Lettre sur la cène du Seigneur

Traduit de l’anglais
W. Kelly

Chers frères en Christ,

Je vous salue dans le Seigneur, ayant appris que vous avez reçu l’évangile par la foi ; et que vous avez quitté l’église-monde pour suivre Christ, non la tradition des hommes, romanistes ou protestants. Vous avez été appelés à la liberté [Gal. 5, 13]. Tenez-la donc fermement, et ne soyez pas retenus de nouveau sous un joug de servitude [Gal. 5, 1]. Bien que vos visages me soient inconnus dans la chair, je n’ai pas cessé de prier pour vous depuis le jour où j’ai entendu parler de votre ardent désir de célébrer la cène du Seigneur d’une manière conforme à l’Écriture.

Permettez-moi de vous écrire quelques mots sur un sujet si cher à nos cœurs et si important pour la gloire de Christ. Dans la chrétienté, certains considèrent la cène du Seigneur comme le principal moyen d’obtenir la vie éternelle ; d’autres la négligent, préférant de loin un beau discours.

Que dit l’apôtre des Gentils ? « J’ai reçu du Seigneur ce qu’aussi je vous ai enseigné : c’est que le seigneur Jésus, la nuit qu’il fut livré, prit du pain, et après avoir rendu grâces, il le rompit et dit : Ceci est mon corps, qui est pour vous ; faites ceci en mémoire de moi. De même [il prit] la coupe aussi, après le souper, en disant : Cette coupe est la nouvelle alliance en mon sang : faites ceci, toutes les fois que vous la boirez, en mémoire de moi. Car toutes les fois que vous mangez ce pain et que vous buvez la coupe, vous annoncez la mort du Seigneur jusqu’à ce qu’il vienne » (1 Cor. 11, 23-26). Le meilleur texte est ici suivi et traduit fidèlement.

L’évangéliste prêche la bonne nouvelle de Dieu ; il proclame le don de la vie éternelle et la rémission des péchés à tous ceux qui croient en Jésus. Le pasteur et le docteur, publiquement et en privé, disent tout le conseil de Dieu aux fidèles, afin qu’ils puissent être édifiés dans la vérité et remplis de la connaissance de Sa volonté, pour marcher d’une manière digne du Seigneur et pour Lui plaire à tous égards [Col. 1, 9, 10].

Mais, chaque fois que les enfants de Dieu prennent la cène en accord avec l’institution du Seigneur, ils annoncent collectivement la vérité capitale du christianisme, « la mort du Seigneur jusqu’à ce qu’Il vienne ». Sans aucun doute, quand ils sont ainsi réunis ensemble, ils lisent la Parole de Dieu avec prière ; avec l’adoration dans l’Esprit, ils louent la grâce du Père et du Fils ; mais au milieu de tout le reste, nous pouvons dire que la cène a une voix tout à fait distincte. La mort du Seigneur est rappelée là ; et les croyants annoncent Sa mort chaque fois qu’ils prennent part à la cène. C’est vrai de ceux dont la voix n’est pas entendue dans l’assemblée, oui, même si certains étaient muets. Quel privilège immense, chers frères ! Jésus seul pouvait nous le conférer, Jésus uniquement, en vertu de Son sacrifice, si précieux pour Dieu, et si efficace pour ôter nos péchés.

Devant ces symboles, la foi reconnaît que tout était mal de notre part, mais que tout était grâce souveraine de la part de Dieu. Nous nous sentons profondément humiliés, et encore davantage par l’amour de notre Sauveur et par Sa mort, que par nos propres péchés, quelque nombreux et honteux qu’ils soient. Là, Christ dans Sa mort est le véritable objet direct de nos âmes. C’est cela qui nous attire et nous suffit, qui absorbe nos pensées et remplit notre cœur. Le Fils nous aime, comme aussi le Père ; et nous honorons le Fils comme nous honorons le Père [Jean 5, 23]. Mais c’est Jésus, le Fils de Dieu et le Fils de l’homme, qui seul a souffert pour nos péchés, le Juste pour les injustes, afin qu’Il nous amenât à Dieu [1 Pier. 3, 18]. Et Dieu, dans Sa sagesse, a voulu là notre joie, établissant une fête sur le grand sacrifice, la fête la plus bénie sur la terre, où, en communion les uns avec les autres, nous rappelons la mort de Jésus. Nous proclamons aussi là l’unité du corps de Christ, en rendant grâces à Celui qui nous aime sans limite ni fin, à la gloire de Dieu le Père.

Recherchez dans les Écritures, et examinez les voies de Dieu depuis le début jusqu’à la fin, telles qu’elles nous y ont été communiquées : vous trouverez que, dans les faits comme dans le propos divin, la personne de Jésus, le second homme, éclipse tous les autres nés de femme ; et que Jésus est aussi le dernier Adam. Il n’y a, et il ne peut y avoir, personne qui Lui soit comparable. Il répond à toutes les pensées, à toutes les affections, et à tous les conseils de Dieu. Tous les actes de Jésus sont parfaits, chacun à sa place ; pourtant, il y en a un qui est distingué du reste et qui s’élève au-dessus de tout. C’est « la mort du Seigneur ». Il n’y avait rien que mal et orgueil dans la créature. Nous étions même conçus dans le péché [Ps. 51, 5], nous étions morts dans nos péchés [Éph. 2, 1], les uns comme les autres. Mais en Christ, Dieu, dans Son amour, s’est abaissé au-dessous de nos péchés pour les ôter ; et Christ est exalté au-dessus de tout pour nous envoyer le pardon et la paix. Là où le péché abondait, la grâce a surabondé ; afin que, comme le péché a régné par la mort, ainsi aussi la grâce règne par la justice pour la vie éternelle par Jésus Christ notre Seigneur [Rom. 5, 20, 21].

Sur cette base de justice, Dieu envoie la bonne nouvelle de Sa grâce à toute la création qui est sous le ciel. Le même Seigneur de tous est riche envers tous ceux qui L’invoquent [Rom. 10, 12]. Quiconque croit en Jésus est justifié par Lui [Act. 13, 39]. C’est ainsi que Dieu sauve. Et la cène est le privilège du sauvé, non le moyen du salut ; c’est l’heureuse part de ceux qui croient et savent qu’ils ont la vie éternelle (1 Jean 2, 12 ; 5, 12). Quant à ceux qui ne croient pas au Sauveur, ils demeurent responsables de Sa mort, aussi bien que de tous leurs autres péchés ; mais pour ceux qui croient en Lui, leurs péchés sont pardonnés à cause de Son nom, eux-mêmes sont justifiés par la foi. Ainsi s’exprime la Parole de Dieu. Nous recevons maintenant la fin de notre foi, le salut de l’âme (1 Pier. 1) ; bientôt, à Sa venue, nos corps seront sauvés (Rom. 8).

Le Seigneur a aussi institué Son souper, auquel Il invite tous ceux qui sont siens. Son nom est leur passeport et leur garantie. Sa cène est la fête continuelle pour la famille de Dieu : ils rompent le pain, ils boivent la coupe, en mémoire de Christ. Avant d’inaugurer cette fête, Jésus avait déjà en vue les dangers que les siens devaient rencontrer, les difficultés qu’ils auraient à surmonter, le déclin et la chute de la profession chrétienne ; et Il avait consolé les disciples avec ces paroles d’amour : « Là où deux ou trois sont assemblés en mon nom, je suis là au milieu d’eux » (Matt. 18, 20). C’est Sa véritable présence ; c’est notre besoin, et c’est Son assurance. Sa Parole demeure à toujours, Son amour ne fait jamais défaut.

La cène est donc le privilège commun conféré par Christ à tous Ses membres, sauf ceux qui encourent justement Sa discipline pour de mauvaises mœurs ou de fausses doctrines. Si l’institution bénie du Seigneur est pervertie ou négligée dans la chrétienté, néanmoins elle subsiste dans toute sa réalité pour ceux qui s’en tiennent à l’Écriture ; et la foi se l’approprie quand elle est observée convenablement, ce qui seul porte le sceau de l’autorité divine. Dans les mains de l’homme, avec cette institution ont été bientôt mêlés des éléments du monde qui ont altéré son caractère, de sorte qu’elle n’est plus la sienne. Quoi qu’il en soit, Sa cène n’est pas perdue pour ceux qui se soumettent dans l’humilité à la volonté révélée de notre Seigneur. Quand les Corinthiens avaient modifié sa nature, l’apôtre (v. 20) nie qu’elle soit la cène du Seigneur ; elle devenait leur propre souper, non pas le sien.

La cène du Seigneur n’est pas une question d’administration ou de présidence ; encore moins est-elle une cérémonie où le sacrificateur se tient entre le fidèle et Dieu. « L’heure vient, et elle est maintenant, que les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité » (Jean 4). Le Seigneur Jésus est le seul souverain sacrificateur ; et nous qui croyons sommes Sa maison. Dieu n’a plus, comme en Israël, un peuple à Lui quoique dehors. « Par lui (Christ) nous avons, les uns et les autres, accès auprès du Père par un seul Esprit » [Éph. 2, 18]. L’épître aux Hébreux enseigne explicitement (chap. 7 et 10) que, la sacrificature étant changée, il y a aussi par nécessité un changement de loi ; et que comme frères saints, participants à l’appel céleste, nous avons pleine liberté pour entrer dans les lieux saints par le sang de Jésus, le voile étant déchiré et les deux étant maintenant faits un.

À l’inverse des rites juifs en général, la cène est une « communion », et même spécifiquement la communion. Elle n’a rien d’une charge ministérielle. « La coupe de bénédiction que nous bénissons, n’est-elle pas la communion du sang du Christ ? Le pain que nous rompons, n’est-il pas la communion du corps du Christ ? Car nous qui sommes plusieurs, sommes un seul pain, un seul corps, car nous participons tous à un seul et même pain » (1 Cor. 10, 16-17).

Par conséquent, l’Écriture, comme tous peuvent facilement le voir, laisse la cène ouverte. En présence de la Tête, les distinctions entre les chrétiens disparaissent de la vue. Il est bon, pour les serviteurs les plus honorés, d’avoir un moment et un lieu où ils s’effacent eux-mêmes en présence de Jésus ; ce temps et ce lieu se trouvent lors de la célébration de la cène. Après avoir rendu grâces, on rompt le pain et on le mange en mémoire de Lui ; et de même avec la coupe. Lui la leur donne, lisons-nous (Marc 14, 23), et ils en burent tous. Pour le croyant, c’est la plus simple, la plus touchante et la plus solennelle des observations. Quelle occasion incomparable de contempler l’humiliation infinie et la grâce parfaite de notre Sauveur ! Quel bonheur pour le saint de se réjouir, avec tous les saints autour de lui en esprit, non seulement dans leurs bénédictions, mais dans Sa présence, ceux qui sont bénis et Celui qui bénit, conscients qu’ils sont les objets de l’amour parfait du Père et du Fils, et sachant toutes choses dans la puissance du Saint Esprit qui habite en nous (1 Jean 4) !

Il y a aussi, dans la cène du Seigneur, une portée morale sur laquelle l’apôtre insiste, à cause de la légèreté profane de certains à Corinthe. Ne l’oublions jamais. « Ainsi quiconque mange le pain ou boit la coupe du Seigneur indignement sera coupable à l’égard du corps et du sang du Seigneur. Mais que chacun s’éprouve soi-même, et qu’ainsi il mange du pain et boive de la coupe ; car celui qui mange et qui boit, mange et boit un jugement contre lui-même, ne distinguant pas le corps. C’est pour cela que plusieurs sont faibles et malades parmi vous, et qu’un assez grand nombre dorment. Mais si nous nous jugions nous-mêmes, nous ne serions pas jugés. Mais quand nous sommes jugés, nous sommes châtiés par le Seigneur, afin que nous ne soyons pas condamnés avec le monde » (1 Cor. 11, 27-32). Ce n’est pas la damnation des incrédules, mais un jugement que le Seigneur exerce à présent sur les siens. Ils avaient traité indignement la sainte fête ; ils n’avaient pas distingué Son corps, car c’est ce que signifie le pain rompu. En conséquent, le Seigneur juge maintenant ceux qui manquent à se discerner eux-mêmes. En vue de Son souper, en souvenir de la mort du Seigneur, chacun des siens est appelé à s’éprouver lui-même, et ainsi à manger et boire : s’il ne le fait pas, il agit indignement, et c’est de l’irrévérence envers le Seigneur, qui juge ceux qui ne se jugent pas eux-mêmes. Mais même dans ce cas, ce n’est pas Son jugement éternel. Au contraire, c’est Son châtiment, « afin que nous ne soyons pas condamnés avec le monde ».

Quant au moment où la cène doit être célébrée, il est clairement indiqué en Actes 20, 7 : « Et le premier jour de la semaine, lorsque nous étions assemblés pour rompre le pain, Paul leur fit un discours », etc. Son discours était une grande bénédiction, mais purement occasionnelle. La cène, dans laquelle avait lieu la fraction du pain, était une chose fixée, non seulement pour les disciples en Troade, mais pour tous les saints où qu’ils soient. La lecture convenable reconnue est : « lorsque nous étions assemblés », impliquant par là que « le premier jour de la semaine » était le jour désormais établi pour la cène partout. À la Pentecôte et pendant quelque temps après, les saints rompaient le pain tous les jours « dans leurs maisons » [Act. 2, 46] (non pas, bien entendu, dans le temple), parce que tous les saints du Seigneur se trouvaient alors dans la même ville — Jérusalem. Mais cela disparut quand l’appel de la grâce de Dieu sortit et que des âmes crurent partout. En Actes 20, 7, nous avons l’ordre régulier dorénavant applicable à l’Église partout, tel que reconnu par le Saint Esprit. Il nous revient, dans le mauvais jour, d’agir dans la foi et dans l’obéissance, en rendant grâces. Ayez foi en Dieu, bien-aimés.

Toujours vôtre en Christ le Seigneur.