Donner

Matthieu 5, 42
Traduit de l’anglais
W. Kelly

Dans ce verset, nous avons un grand principe pour le chrétien. Il se trouve à la fin de l’exhortation à ne pas résister au mal, mais plutôt de le souffrir, en privé, par des détournements de la loi, ou par une demande publique. Christ est le modèle pour le disciple ; et aucun exposé sain ne peut expliquer Sa parole, aussi désagréable soit-elle pour la chair et le sang. La nouvelle nature avance avec elle fidèlement, comme la loi parfaite de la liberté [Jacq. 1, 25]. Seul l’esprit charnel cherche à y échapper par tous les moyens hypocrites.

« Donne à qui te demande, et ne te détourne pas de qui veut emprunter de toi ». Le disciple apprend de Dieu qu’il est un débiteur de la grâce, non seulement dans les miséricordes extérieures de chaque jour, qu’il partage avec toute l’humanité, mais dans cet amour encore plus profond qui l’a vivifié de la mort morale, mort dans ses fautes et dans ses péchés, quand il était par nature un enfant de colère. Là, être un Juif ou un Gentil ne fait aucune différence : en ce qui nous concerne tous, c’était un cas désespéré de mal irrémédiable. Mais Dieu, qui est riche en miséricorde, à cause de Son grand amour dont Il nous a aimés, nous a vivifiés ensemble avec le Christ, et nous a ressuscités ensemble, et nous a fait asseoir ensemble dans les lieux célestes dans le Christ Jésus ; afin qu’Il montrât dans les siècles à venir les immenses richesses de Sa grâce, dans Sa bonté envers nous dans le Christ Jésus [Éph. 2, 4-7].

Ceux à qui Christ s’adresse alors ont déjà goûté que le Seigneur est bon [1 Pier. 2, 3] ; mais ils allaient bientôt en réaliser toute la mesure quand Il mourrait, ressusciterait et monterait en haut, et enverrait le Saint Esprit pour Le glorifier et les conduire dans toute la vérité [Jean 16, 13]. Le Seigneur, ayant devant Lui une telle plénitude de grâce que nous devions recevoir, s’attend à ce que nous l’appréciions par la foi et l’action du Saint Esprit qui y correspond dans nos âmes. Comme Il l’a dit ailleurs : Vous avez reçu gratuitement, donnez gratuitement [Matt. 10, 8]. C’est l’esprit du ciel reproduit sur cette terre qui était pleine d’égoïsme sordide. Nul n’était davantage caractérisé par la cupidité que les Juifs qui, ayant pour le moment perdu leur position comme témoins de l’Éternel, cherchaient un exutoire et une excuse à leur énergie pour amasser des richesses ; à cette fin, tromper leurs maîtres païens ne leur donnait que plus d’ardeur. Il n’est pas étonnant que des âmes ainsi bénies par la grâce soient appelées à une marche entièrement nouvelle et à une adoration également nouvelle, inintelligible par ceux qui n’entrent pas dans l’appel et l’espérance chrétiens. Néanmoins, l’apôtre dit clairement que nous sommes Son ouvrage, créés dans le Christ Jésus pour les bonnes œuvres que Dieu a préparées à l’avance, afin que nous marchions en elles [Éph. 2, 10].

Mais Christ est venu non seulement pour sauver de la colère, mais aussi de la ruine, non seulement de la sanction, mais du péché, et pour former un nouveau caractère en ceux qui entendent Sa voix et qui Le suivent. C’était, et ce ne pouvait être, que Son propre caractère. Car quel était celui de Socrate, ou d’Antonin le Pieux, ou de Gautama Bouddha, ou de Confucius ? Des nuances de vanité ou d’orgueil, en comparaison avec Celui qui ne fit jamais rien de Sa propre volonté, mais seulement de celle de Dieu le Père qui L’avait envoyé, Lui Son Fils unique. C’est Lui qui est venu dans ce monde de péché et d’égoïsme pour se livrer en sacrifice, y introduisant ainsi Dieu pour en ôter le péché, comme Il le fera assurément en puissance comme résultat glorieux de ce qu’Il a déjà fait et souffert.

C’est pourquoi, comme faisant partie du progrès spirituel, Il a voulu imprimer sur les siens le caractère de la grâce, et non de la simple loi comme pour un Juif, dont Il était le témoin constant et la perfection bénie. Y a-t-il jamais eu un besoin, un désir, une souffrance qui Lui furent présentés, sans une réponse de grâce et de puissance divines, et dans toute la tendresse humaine ? Celui qui allait se livrer Lui-même à Dieu pour nous, quel bien a-t-Il jamais refusé ? Donner de l’argent était trop peu et trop insignifiant, sauf pour répondre à l’impôt du temple. « Prends-le [d’une bien étrange banque !], et donne-le-leur pour moi et pour toi » [Matt. 17, 27]. De là les paroles dans Luc 6, 38 : « Donnez, et il vous sera donné : on vous donnera dans le sein bonne mesure, pressée et secouée, et qui débordera ; car de la même mesure dont vous mesurerez, il vous sera mesuré en retour ». C’est littéralement : « ils vous donneront », mais si souvent dans Luc, il s’agit d’une déclaration impersonnelle, et qui en réalité se rapporte à Dieu. Ainsi, comme Sa grâce le produit de même, Il ne l’oubliera jamais, quoique cela arrive à l’homme.

Maintenant, mon cher lecteur, vous savez que cela dépasse de loin votre cœur et votre vie ; et que, si vous vous efforcez d’imiter un tel don, vous vous lasserez rapidement et trouverez que c’est une loi bien plus brûlante que les dix commandements du Sinaï. Seul Christ donne l’exemple ; seul Christ donne la puissance. Mais vous devez d’abord être à Ses pieds comme un pécheur perdu, jetant votre âme avec tous vos péchés sur Lui pour avoir la vie, le pardon par Son sang, et la paix. C’est en vain que vous pensez donner de vos biens, jusqu’à ce que vous soyez venu à Lui comme le plus nécessiteux de tous, pour recevoir de Sa plénitude. C’est seulement alors, quand vous L’aurez pour votre trésor indéfectible, que vous aurez la foi et l’amour pour vous faire des amis avec le mammon de l’injustice [Luc 16, 9]. C’est seulement alors que vous, avec un œil simple et un cœur libéral, « donnerez à celui qui vous demande, et ne vous détournerez pas de qui veut emprunter de vous », qu’il soit du monde ou de la maison de la foi ; non à regret, ou par contrainte, car Dieu aime celui qui donne joyeusement. Et Il est capable de faire abonder toute grâce envers vous, afin que, ayant toujours en toutes choses tout ce qui suffit, vous abondiez pour toute bonne œuvre [2 Cor. 9, 7-8]. Quand la grâce vous a sauvés par Christ à la gloire de Dieu, alors ce sera votre joie de suivre Christ ; et vous éviterez et détesterez ce qui ne Lui est pas conforme, à la fois par votre nouvelle nature, et en obéissance à la Parole de Dieu.