Le sel de la terre

Matthieu 5, 13
Traduit de l’anglais
W. Kelly

Le Seigneur avait posé, dans les versets 5-9, les qualités morales distinctives appropriées au royaume des cieux, avec la bénédiction supplémentaire dans les souffrances (v. 10-12). Il poursuit maintenant pour établir définitivement leur position ici-bas selon Sa pensée. La première partie est donnée dans le verset 13, répondant à la justice, comme nous l’avons vue dans les premières qualités qu’Il approuvait ; la seconde partie, dans les versets 14-16, répondant à l’énergie de la grâce qui se manifeste, est laissée pour un commentaire séparé en temps voulu.

« Vous êtes le sel de la terre ; mais si le sel a perdu sa saveur, avec quoi sera-t-il salé ? Il n’est plus bon à rien qu’à être jeté dehors et à être foulé aux pieds par les hommes » (v. 13).

Les disciples connaissaient le sel, non seulement dans la vie ordinaire, mais dans les offrandes à l’Éternel, « le sel de l’alliance de ton Dieu » : « sur toutes tes offrandes, tu présenteras du sel » (Lév. 2, 13).

Et de même, nous lisons qu’il est parlé d’« une alliance de sel », comme exprimant en figure ce qui doit être gardé inviolé et inchangé (Nomb. 18, 19 ; 2 Chron. 13, 5). En accord avec cela, le Seigneur, en Marc 9, 49-51, déclare que « chacun sera salé de feu ; et tout sacrifice sera salé de sel. Le sel [est] bon ; mais si le sel devient insipide, avec quoi lui donnerez-vous de la saveur ? Ayez du sel en vous-mêmes, et soyez en paix entre vous ».

Si le feu représente le jugement vengeur de Dieu sur le mal, le sel ne fait pas moins ressortir Sa puissance conservatrice, en relation avec Lui-même. Car, comme le Seigneur nous le fait savoir, les images de la loi sont désormais, par et en Lui, traduites des ombres du passé dans les réalités présentes et éternelles. Il y a donc une opération nécessaire avec « chacun », parce que tout est ruiné par le péché. La foi s’incline maintenant devant cela, alors que l’incrédule brave l’avertissement, pour découvrir qu’il est solennellement vrai et justifié, trop tard, pour l’éternité, devant le grand trône blanc, et le feu inextinguible qui le suit. Mais comme la grâce a envoyé le Sauveur pour porter le jugement sans appel de Dieu, quand Il fit Jésus péché pour nous, sur la croix, ainsi le croyant se juge lui-même d’autant plus qu’il reconnaît en Celui qui a souffert hors de la porte, le véritable et divin sacrifice pour le péché, réduit en cendres hors du camp ; dont le sang entre, dans toute sa valeur, dans le lieu très saint, et lui donne le droit de s’approcher hardiment jusque-là, avec un cœur vrai, en pleine assurance de foi, ayant le cœur par aspersion purifié d’une mauvaise conscience, et le corps lavé d’eau pure [Héb. 10, 22].

Lui donc, là, et de cette manière, fut salé de feu d’une manière absolument parfaite, tel que nul autre ne pouvait l’être, comme ceux qui L’ont rejeté devront l’être dans l’étang brûlant de feu et de soufre, qui est la seconde mort [Apoc. 21, 8]. Mais tous ceux qui croient jouissent de la pleine efficace de ce feu de Dieu qu’Il a enduré pour nos péchés, tandis qu’il nous est donné de nous juger nous-mêmes comme sous le regard de Dieu et de nous tenir nous-mêmes pour morts avec Lui au péché, mais vivants à Dieu dans le Christ Jésus [Rom. 6, 11] ; car celui qui est mort est justifié du péché aussi bien que des péchés. Nous avons aussi le privilège de « tout sacrifice salé de sel ». Ce n’est pas seulement que « notre Dieu est un feu consumant » [Héb. 12, 29] contre toute chose mauvaise, tout ce qui est incompatible avec une relation avec Lui et avec Sa nature ; mais comme offerts à Dieu, nos corps même étant un sacrifice vivant [Rom. 12, 1], nous savons et avons l’assaisonnement avec le sel, afin que nous soyons gardés purs et sans corruption, abhorrant toute œuvre de la chair comme étant mauvaise et condamnée dans la mort de Christ.

Les disciples avaient encore à apprendre ce qu’était ce merveilleux et puissant sacrifice de Lui-même ; mais ici, ils se trouvent eux-mêmes placés dans la seule position qui Lui convenait, et eux aussi associés avec Lui. Sa nature morale, non seulement intérieurement, mais publiquement, est ici exprimée par les paroles : « Vous êtes le sel de la terre ». Pour le Fils comme pour le Père, tout ce qui n’avait pas cette saveur pure et purifiante, ou du moins conservatrice, était intolérable pour le royaume des cieux dans lequel ils allaient entrer sur la terre. La loi, comme il nous est dit, n’a rien amené à la perfection [Héb. 7, 19]. Et Moïse, au vu de la dureté de cœur d’Israël, a autorisé ce qui ne pouvait subsister quand Dieu eut été révélé dans un Fils. Dans cette lumière divine, Il recherche ce qui convient à Sa sainteté. Ils ne savaient pas encore comment cela allait se faire en eux ; car les discours sur la montagne ne révélaient pas la rédemption, ni encore la nouvelle naissance. Mais il ne pouvait y avoir de doute que c’était l’expression simple et certaine de la position dans laquelle le Seigneur met les siens.

Remarquons qu’eux, et eux seulement, et en y insistant, étaient « le sel de la terre ». Le Seigneur ne dit pas le sel « du monde ». Cela sera expliqué ultérieurement lorsque nous considérerons ce que veut dire être « la lumière du monde », non de la terre. Mais étant ainsi distingués comme ici, nous pouvons remarquer maintenant, en soulignant la force de notre passage, que « la terre » veut dire cette scène ordonnée avec laquelle Dieu a affaire plus qu’avec toute autre chose. C’était alors, comme autrefois, là où Israël était placé ; comme cela allait être élargi par la profession extérieure de Son nom bien au-delà de la terre de Palestine. Le Seigneur, en conséquent, part de cette position de conserver la pureté, à la fois privilège et responsabilité. « Vous êtes le sel de la terre ». Moins que cela, ou autre chose que cela, ne pouvait pas être reconnu, depuis que Lui, le Fils, était venu et avait appelé à être associé avec Lui. La vie qu’Il communiquait au croyant, et la rédemption qu’Il allait accomplir pour ses péchés, seraient pleinement expliquées en leur temps. Mais ici, Il montre ce qu’il en était avec le Père, ainsi que le royaume qu’Il allait établir.

Mais Il ajoute des paroles — paroles des plus graves — « Si le sel a perdu sa saveur, avec quoi sera-t-il salé ? ». Il y aurait de la profession, et c’est une chose excellente, si c’est un témoignage du cœur pour Dieu, vrai non seulement en paroles, mais en œuvres. Ici, au commencement, et encore plus clairement à la fin de Ses communications, le Seigneur nous prépare à nous attendre à ce que bientôt, et de façon croissante, il devienne évident combien cela devait devenir creux et faux ; et Il laisse entendre par Sa question et Son commentaire, que la saveur véritable et sainte, si elle était perdue, le serait de façon irréparable. Quoique la grâce puisse opérer individuellement, ou avec quelques-uns ici et là, la position pure ne pourrait pas être restaurée. Le sel a sa saveur en lui. Rien d’extérieur ne peut lui donner cette saveur qui disparaît. Avec quoi serait-il salé ?

Il va plus loin, et déclare qu’il est inapte même pour le but utile de fertiliser, provenant de ce qui est des plus blessant ! Du sel sans saveur n’est même pas utile pour enrichir le sol. Il n’est bon qu’à être jeté dehors, et foulé aux pieds par les hommes. Et il en sera ainsi, comme cela a déjà été le cas. Quand le christianisme disparut et que seule demeura une chrétienté sans saveur, les hommes l’ont foulée aux pieds comme plus inutile que le judaïsme ou même le paganisme, et d’autant plus insupportable qu’elle était plus orgueilleuse et plus persécutrice. Et il en sera ainsi quand viendra le coup final pour Babylone ; et les puissances qui auparavant avaient leur commerce illicite avec elle, haïront la prostituée et la rendront désolée et nue, et mangeront sa chair et la brûleront au feu [Apoc. 17, 16]. Non seulement Dieu est fort en la jugeant, mais elle a été foulée aux pieds par des hommes indignes.