Les lis des champs

Matthieu 6, 28-30
Traduit de l’anglais
W. Kelly

Après les oiseaux des cieux aux versets 26, 27, le Seigneur se tourne vers les lis des champs aux versets 28-30 : une leçon contre l’inquiétude, la première dans le manger et le boire, la seconde dans le vêtement. De façon notoire, cela comprend les deux branches de la vie ordinaire, qui éprouvent tant les masses, non de l’humanité seulement, mais des disciples, à qui Il s’adresse par Son enseignement sur la montagne. Ses disciples ne devaient pas oublier ou se défier de leur Père céleste par de tels doutes envers Ses soins d’amour quant à leurs besoins journaliers.

« Et pourquoi êtes-vous en souci du vêtement ? Étudiez les lis des champs, comment ils croissent : ils ne travaillent ni ne filent ; cependant je vous dis que, même Salomon dans toute sa gloire, n’était pas vêtu comme l’un d’eux. Et si Dieu revêt ainsi l’herbe des champs qui est aujourd’hui, et qui demain est jetée dans le four, ne vous [vêtira-t-il] pas beaucoup plutôt, gens de petite foi ? »

Ici, comme Il fait référence, non aux oiseaux, mais aux fleurs, Il ne parle pas de semer ou de récolter ou de stocker, mais de travailler et filer : Dieu prend soin des oiseaux sans les uns, et des lis sans les autres. Ses enfants n’étaient-ils pas beaucoup plus précieux pour leur Père céleste que les uns ou les autres ? Non seulement ils étaient la race de Dieu [Act. 17, 29], comme l’est toute l’humanité en général, mais Ses enfants par grâce par la foi. Ce n’est pas que semer ou récolter, travailler ou filer, ne soient pas pour eux un devoir, s’ils doivent subvenir à leurs besoins et à ceux de leur maison, et peuvent gagner leur vie par ces travaux plus facilement qu’autrement. Même dans un monde sans chute, l’Éternel plaça Adam qu’Il avait formé dans le jardin d’Éden, pour le cultiver et le garder [Gen. 2, 15], quand il n’y avait personne à embaucher pour le travail nécessaire, et que lui-même pouvait y employer avec bonheur ses propres mains.

Le péché a amené un triste changement, non seulement pour l’âme et le corps de l’homme, mais pour le sol même qu’il foulait, comme l’Écriture nous le dit clairement. Ce n’était plus désormais un travail facile et agréable, mais il devait en manger dans le labeur ou la peine tous les jours de sa vie. Et ce n’est pas étonnant ; car il devait lui faire pousser des ronces et des épines, qui ne seraient surmontées que par la sueur de son visage, afin de manger du pain. Si la propre volonté se rebelle contre l’aiguillon, cela ne fait qu’aggraver le cas ; si le joug (et il n’est pas ici pénible) est accepté, c’est d’autant mieux pour les hommes qui murmurent. Il n’y a pas de délivrance de la culpabilité et du péché, sinon par la foi en Christ, duquel le Saint Esprit rend témoignage, et par lequel Il donne la puissance au croyant. Mais pour les enfants non encore convertis, comme pour les adultes dans le même état, l’occupation est une aide miséricordieuse contre les dangers de l’oisiveté et de l’assouvissement des désirs et des passions. Même pour le fidèle, c’est une bonne chose, car refuser de travailler quand on est sans ressource, est mauvais ; à tel point, que l’apôtre pose sèchement, que si un homme n’aime pas travailler, qu’il ne mange pas non plus [2 Thess. 3, 10]. Cette prescription, dûment administrée, se révèlera être en général un remède salutaire et sans faille.

De tels paresseux, souvent enclins aussi à être fouineurs, sont relativement rares ; mais il n’en est pas de même de ceux qui se préoccupent de leurs vêtements. Quoi ! après être né de Dieu, et ayant maintenant la rédemption aussi bien que la vie éternelle, et le Saint Esprit pour se charger de chacun de nos besoins et de chacune de nos difficultés, non seulement le Seigneur intercédant pour nous, mais le Père bénissant, Lui qui a envoyé Son Fils unique à et pour nous, quand nous n’avions rien que des péchés ? Et des âmes si favorisées se préoccupent peut-être des vêtements, et même de beaux vêtements, au-delà de ce qui convient à un homme, une femme ou un enfant chrétien ?

Quelle réprimande nous donne l’herbe des champs, selon l’interprétation du Seigneur ! Salomon dans toute sa gloire n’était pas vêtu comme l’un de ces lis qui, plus on les inspecte, et avec les moyens les plus puissants, ne font qu’éclipser davantage la splendeur du plus riche roi d’Israël. Pourtant, cette somptueuse beauté de formes et de couleurs n’était qu’un tapis étendu pour le pied du plus pauvre Israélite un jour, et le lendemain était du combustible pour un four. Et cette fin de sa gloire était loin d’être une offense au Seigneur. Lui, qui était par-dessus tout jaloux de l’honneur de Son Père dans Son travail, utilise ce double fait pour juger l’inquiétude de la nature quant aux choses terrestres (qui étaient comme les lis, si beaux à l’œil mais aussi si totalement fugaces), pour bannir les doutes et le désarroi et les désirs indignes, et pour établir le cœur dans la confiance envers les soins actuels, parfaits et plein d’amour de Son Père.

Il n’était pas du tout question pour Lui d’occuper les disciples des oiseaux du ciel ou des lis des champs, comme objets de leur attention, bien que certains puissent faire abus de ces allusions. Il ne voulait pas non plus, en appelant sur eux leur attention, qu’ils traitent de façon cynique ce qui montre Son intérêt dans tout le travail de la main de Dieu et dans les créatures de Sa volonté. Son but est que les disciples, sous Sa sainte observation de l’incomparable bonté de Dieu envers ce qui est si petit à Ses yeux, s’élèvent vers le Père par-dessus tout, et soient assurés de l’amour attentif et constant qu’Il porte aux siens. Ne sont-ils pas les objets particuliers de Ses conseils avant la fondation du monde, et maintenant de la grâce infinie en Celui qui pour eux est mort et est ressuscité, et lors de Son couronnement en gloire, au-dessus non seulement des potentats les plus élevés de la terre, mais aussi des plus hautes principautés dans les cieux ? Devons-nous partager les inquiétudes de ceux qui ne connaissent pas Dieu ? Lui qui n’a pas épargné Son propre Fils, mais L’a livré pour nous tous, comment ne nous fera-t-Il pas don aussi, librement, de toutes choses avec Lui ? [Rom. 8, 32] Nul n’a souffert autant que Christ ici-bas ; et pourtant, qui a jamais entendu une plainte de Sa part ? Et qui peut oublier que, quand Il était de plus en plus rejeté là où Ses puissants actes de bonté et Ses paroles de grâce et de vérité toujours plus merveilleuse étaient tout autant méprisés, et que même Il dut dire : Maudit, maudit, à ce moment même, notre Seigneur Jésus répondait, disant : « Je te loue, ô Père… », et « oui, Père, car c’est ce que tu as trouvé bon devant toi » [Matt. 11, 25, 26] ? Ainsi, le prophétique psaume 16 Lui attribue la confession : « Les cordeaux sont tombés pour moi en des lieux agréables ; oui, un bel héritage m’est échu ». Et ainsi l’apôtre, qui avait la communion de Ses souffrances, et connaissait les afflictions, les persécutions, et le manque de tout, plus que tout autre, est celui-là même qui s’élève au-dessus de toutes les circonstances, et déclare que Dieu nous donne toutes choses richement pour en jouir [1 Tim. 6, 17]. Que nous suivions, quoique, hélas, à bonne distance, une semblable foi !