Le Seigneur invite les disciples à considérer la créature assujettie à l’homme, à l’encontre de leur crainte personnelle. C’est humiliant, mais sain, pour eux, de tirer de là des leçons de dépendance. Et tout d’abord, Il parle des membres de la classe ailée, partout familiers à l’œil humain, comme étant les objets des soins divins, et dépendant de Ses provisions bienfaisantes. Combien cela est-il encore plus le cas pour les siens, dans leur relation incomparablement plus élevée et plus proche avec Lui ! Et combien est également impuissante leur anxiété pour les soulager !
« Regardez aux oiseaux du ciel : ils ne sèment, ni ne moissonnent, ni n’assemblent dans des greniers, et votre Père céleste les nourrit. Ne valez-vous pas beaucoup mieux qu’eux ? Et qui d’entre vous, par le souci qu’il se donne, peut ajouter une coudée à sa taille ? » (v. 26, 27).
Les oiseaux forment une grande classe et sont d’une immense variété ; à tel point que le fameux Cuvier dut confesser son opinion divergeant de tous les systèmes scientifiques qu’il avait vus. Depuis, un naturaliste compétent peut-il nier qu’une classification vraiment adéquate attend encore d’être découverte ? Dans son « Règne animal », Cuvier propose six ordres, avec des genres bien plus nombreux ; Temminck, seize ordres ; Latreille, sept, avec deux cent cinquante-deux genres. Bien que quelques excellents observateurs, comme Willughby et Ray, aient précédé et suivi ces écrivains français illustres, il n’y a pas encore de fin à cette controverse.
Mais notre Seigneur tira Ses inestimables leçons, non de secrets obscurs, encore moins des incertitudes de la science, mais de faits avérés et indéniables de la création et de la providence de Dieu, que seuls les pervers peuvent mettre en question, même à cette époque où toute la création gémit ensemble, mais non sans espoir que la délivrance vienne d’en haut. Tous les disciples peuvent donc comprendre et sentir ce qu’Il voulait dire, et ils en ont besoin. Les oiseaux ne sèment ni ne moissonnent ni n’assemblent dans des greniers ; mais votre (non pas leur) Père céleste les nourrit. Ils peuvent partager les conséquences d’un monde en chute, comme les autres animaux, et l’homme plus qu’eux tous, comme étant leur chef, une créature morale, et grandement à blâmer, directement ou indirectement. Néanmoins, sans moyens et le moindre soin propres, notre Père céleste nourrit les oiseaux, selon une règle simple, belle et instructive.
Ainsi autrefois, le psalmiste (Ps. 104) célébrait Celui qui envoyait les sources dans les vallées, qui coulaient entre les montagnes, non seulement pour les hommes, ou pour toute bête des champs, et les plus sauvages d’entre elles, mais aussi pour les oiseaux qui font entendre leur voix dans les branches où prévaut un silence de mort, troublé de temps en temps par les cris stridents d’angoisse si différents de leurs gais accents. Les cèdres à la ramure majestueuse n’ont pas été plantés pour le seul usage de l’homme, ni par goût ou par fierté, mais aussi pour les oiseaux, pour y faire leur nid, à moins que les pins plus hauts conviennent encore mieux à certains. Les créatures de la vaste et grande mer ne sont pas non plus oubliées. Elles s’attendent toutes à toi, afin que tu leur donnes leur nourriture en son temps : ce que tu donnes, ils le recueillent. Tu ouvres ta main : ils sont rassasiés de biens. Tu caches ta face : ils sont troublés. Tu retires leur souffle : ils expirent et retournent à leur poussière. Tu envoies ton esprit : ils sont créés, et tu renouvelles la face de la terre.
Mais ici, le Seigneur garde les siens de toute pensée anxieuse dans leur vie quotidienne. Les passereaux, comme Il l’enseigna plus tard, valent peu de chose ; mais de même qu’aucun d’eux ne tombe en terre sans notre Père, de même Il les préserve, tout comme les autres oiseaux, grands ou petits, sans prévoyance de leur part.
Si de telles créatures, les impures aussi bien que les pures, sont les bénéficiaires habituels de Sa bienfaisance, que doit-il en être de Ses enfants ? C’est un argument tiré de la comparaison de l’insignifiance et de la distance, pour ceux que la grâce daigne amener dans la relation la plus proche avec Lui-même. Et le but du Seigneur est d’imprimer dans Ses disciples si favorisés, l’obligation de se confier dans l’amour de leur Père sans doute ni crainte. Pourquoi ne le feraient-ils pas, au lieu de se laisser aller à l’anxiété naturelle à ceux qui ne connaissent pas Dieu du tout, comme les Gentils, ou Le possèdent d’une manière somme toute inférieure, comme les Juifs ?
Il semble presque inutile de dire que les termes employés ne fournissent pas le moindre support à ceux qui allèguent une contradiction avec Proverbes 6, 6-8. Car ce dernier touche au devoir général du travail, et reprend donc le paresseux du texte au moyen de la laborieuse fourmi. Le premier invite le croyant à apprécier la confiance de la foi dans les soins du Père, sans pensée anxieuse. L’un et l’autre sont également vrais ; mais le dernier va plus profond et monte plus haut, à cause de la révélation du nom du Père à ceux qui croient au Fils.
Là encore, un étrange groupe de fanatiques, à la fois dans les tout premiers et dans les derniers jours de la chrétienté, ont fait de l’abstention du travail un conseil de perfection. Ils prétendaient être à un degré particulier des hommes de prière, et furent appelés Euchites par ceux qui les condamnaient. Leur vantardise était de ne pas semer ni moissonner ; mais ils ne pouvaient pas échapper au reproche d’aimer le grenier et de l’avoir bien rempli. Le germe de cet égoïsme se montrait parmi les saints de Thessalonique. Mais il ne manqua pas d’être immédiatement découragé et de recevoir un rude coup de la part de l’apôtre, qui pouvait faire appel au travail de ses propres mains, fait pour la gloire du Seigneur. Mais il déclarait aussi une telle prétention comme indigne de Lui, et étant un déshonneur pour ceux ainsi piégés dans l’erreur. « Mais nous vous enjoignons, frères, au nom de notre Seigneur Jésus Christ, de vous retirer de tout frère [non pas s’élevant à une spiritualité supérieure, mais] marchant dans le désordre, et non pas selon l’enseignement qu’il a reçu de nous ; car vous savez vous-mêmes comment il faut que vous nous imitiez, car nous n’avons pas marché dans le désordre au milieu de vous, ni n’avons mangé du pain chez personne gratuitement, mais dans la peine et le labeur, travaillant nuit et jour pour n’être à charge à aucun de vous ; non que nous n’en ayons pas le droit, mais afin de nous donner nous-mêmes à vous pour modèle, pour que vous nous imitiez. Car aussi, quand nous étions auprès de vous, nous vous avons enjoint ceci : que si quelqu’un ne veut pas travailler, qu’il ne mange pas non plus. Car nous apprenons qu’il y en a quelques-uns parmi vous qui marchent dans le désordre, ne travaillant pas du tout, mais se mêlant de tout. Mais nous enjoignons à ceux qui sont tels, et nous les exhortons dans le Seigneur Jésus Christ, de manger leur propre pain en travaillant paisiblement » (2 Thess. 3, 6-12).
La question dans le verset 27 met à nu de façon frappante l’impuissance de l’anxiété à ajouter à notre taille une unité habituelle de mesure. Toutefois, beaucoup de traducteurs modernes penchent pour « longueur de vie », au lieu de « taille ». Mais ce n’est guère le lieu de discuter une telle question. Le sens général de tous les événements est clair pour le plus simple.