Nous sommes portés, même après être nés de Dieu, à nous arrêter à l’une de ces vérités, au lieu de jouir de l’une et de l’autre. Quoiqu’elles soient en précieuse harmonie, comme c’est le cas, du reste, de toute vérité, il y a cependant une différence manifeste entre les deux déclarations : « Christ est tout », et « Christ est en tous ». Lorsque l’Esprit de Dieu dit que « Christ est tout », je comprends par là que dans les choses de Dieu, Il rejette complètement tout ce que nous sommes par nature et tout ce qui tient au monde : et qu’ainsi Il exclut toute dispute sur la différence entre Juifs et Gentils — entre ceux qui avaient les pensées de Dieu, et se prévalaient des alliances, des rites, ou de la loi, pour s’estimer préférables aux autres, comme l’avait fait Israël. Il rejette aussi toute dispute sur les sages ou les ignorants quant à la science de ce monde ; — barbares ou Scythes, esclaves ou libres — peu importe quelle est la condition sociale des hommes dans cette vie. De sorte qu’Il embrasse d’un seul regard toutes les diverses manières dont les hommes se différencient entre eux. Ces choses ont leur existence dans ce monde, car il y a évidemment des liens naturels, et il est bon qu’il en soit ainsi ; mais il n’en existe point dans le ciel. Et nous devons nous rappeler que le culte chrétien a pour base ce qui est vrai dans le ciel. C’est pour cela que Paul, dans ses exhortations aux chrétiens hébreux, les invite à « entrer dans les lieux saints » [Héb. 10, 19], parce que c’est là que la foi nous transporte. Nos corps peuvent être réunis en quelque endroit que ce soit sur la terre, mais c’est dans le ciel que se rend le véritable culte en esprit, dans le « vrai tabernacle que le Seigneur a dressé, et non pas les hommes » [Héb. 8, 2]. C’est pourquoi nous pouvons dire que le ciel est maintenant le seul vrai lieu de culte, car c’est là que notre sacrificateur se trouve et que notre sacrifice est présenté. Nous nous y tenons par la foi en la présence de Dieu Lui-même. Par conséquent, en ce qui se rapporte à Dieu, Christ est tout : ce qui nous appartenait dans la chair disparaît entièrement.
Mais nous avons encore à examiner un côté de la vérité. Tandis que, d’une part, toutes les distinctions appartenant à la chair sont mises de côté dans les choses de Dieu par cette déclaration : « Christ est tout », il est de la plus haute importance de voir que Christ est « en tous ». Il n’y a pas un de ceux qui portent le nom de Christ dans lequel Il n’habite pas. La foi agit d’après cela ; et c’est ce qui produit le seul amour qu’il vaille la peine de posséder, le seul que Dieu reconnaisse en ce qui Le concerne. Cet amour qui vient de Dieu et qui est ce que Dieu Lui-même est, en quoi consiste-t-il ? Ce n’est pas simplement de la sympathie, parce que nous partageons les mêmes sentiments, car c’est là ce qui a engendré l’esprit sectaire. Qu’est-ce donc qui unit des hommes qui naturellement n’ont peut-être rien de commun ? Christ est en tous. Une responsabilité des plus solennelles accompagne cette vérité. Lorsqu’on voit ce qui n’est pas de Christ se manifester chez un chrétien, on ne doit pas passer légèrement dessus en disant que, malgré tout, Christ habite en lui. Le fait est que Christ habite en lui, afin que tout ce qui est de la chair et en désaccord avec Celui qui est notre vie puisse être jugé et rejeté. Tout autre principe que celui-ci conduirait nos âmes à pécher, afin que la grâce abonde [Rom. 6, 1]. Cependant, il n’en demeure pas moins vrai, et c’est une vérité des plus précieuses, que Christ est tout, et qu’Il est en tous. Si l’une de ces vérités nous efface entièrement, l’autre, je puis le dire, fait de nous ce qu’il y a de plus glorieux. L’une efface tout ce qui est du premier Adam, et l’autre donne toute la plénitude de la valeur de Christ à ceux qui appartiennent à Dieu, en dépit des épreuves et des difficultés individuelles. C’est du caractère du second Adam que les saints sont revêtus, et c’est dans leurs relations mutuelles qu’ils sont surtout éprouvés. Nous pouvons voir dans le cercle de famille des effets analogues. Souvent, nous rencontrons au-dehors plus d’amabilité et de prévenance que nous n’en trouvons dans notre intérieur. Évidemment, cela est fort triste ; mais c’est dans le cercle domestique que nous sommes surtout mis à l’épreuve, car c’est là que nous sommes surtout témoins des fautes et des faiblesses les uns des autres. Il en est de même dans les choses de Dieu.
Nous sommes mis à l’épreuve par nos relations avec les saints de Dieu. Savez-vous, savons-nous tous concilier d’une manière pratique ces deux vérités : Christ « tout » et Christ « en tous » ? Aimer Christ en tous, et en même temps n’exalter que Christ ? Je parle ici des relations mutuelles des saints dans les choses de Dieu.
Mais il est un autre passage sur lequel il faut que je dise un mot, parce qu’on le confond souvent avec celui que nous venons d’étudier. Je veux parler d’une expression employée en 1 Corinthiens 15, et qui nous est familière à tous. Dieu sera tout en tous — vérité tout à fait différente, et qui ne se rapporte pas à la même époque. Elle n’est pas en rapport avec ce qui a cours maintenant, et nous pouvons dire qu’elle se rattache à un état de choses encore éloigné. Elle ne sera pas réalisée jusqu’à cette époque, excepté pour la foi qui donne à toute vérité une existence actuelle. Mais si vous en venez à l’accomplissement et que vous demandiez : Quand Dieu sera-t-Il « tout en tous » ? ce ne sera pas même lorsque nous aurons été enlevés pour être avec le Seigneur, ni lorsque le Seigneur aura ramené Son ancien peuple, lui aura pardonné ses iniquités, et qu’Il en aura fait l’instrument de Ses bénédictions ici-bas. Alors même Dieu ne sera pas « tout en tous ». Quand sera-ce donc ? Lorsque le Seigneur aura remis le royaume. Il le recevra expressément dans le but d’accomplir toutes les promesses de Dieu, et de mettre de côté tout mal qui s’élève contre Dieu. Tel sera le but du règne terrestre de Christ. Et lorsque tout aura été mis de côté et que le dernier ennemi sera détruit — que la mort ne pourra plus frapper le corps, et que le diable ne saurait plus tenter l’âme (je ne parle pas de l’enchaînement temporaire de Satan, mais de l’époque où il sera entièrement mis de côté et jeté dans l’étang de feu), alors, mais non pas avant, Dieu sera tout en tous. Durant le millénium, quand il y aura plénitude de bénédiction dans le ciel et qu’il y en aura une grande mesure sur la terre, il sera pourtant nécessaire de réprimer le mal sous le règne de Christ. Mais qu’est-ce donc qui sera proéminent alors ? L’homme, dans la personne de Christ, sera « tout en tous ». Comme homme, Christ prendra le royaume, qui sera ainsi le triomphe de Celui qui fut crucifié. C’est comme homme qu’Il souffrit, et c’est en tant qu’homme qu’Il sera exalté dans ce royaume qui donnera lieu à ce qu’Il soit manifesté, pour ainsi dire comme homme tout en tous. Et lorsqu’Il se sera servi de la puissance et de la gloire, dont Il doit être revêtu, pour soumettre à Dieu toute chose, alors viendra l’état éternel où Dieu sera tout en tous. Ce sera la réponse bénie à la conduite que l’homme a tenue depuis le commencement, en s’arrogeant ce qui appartient à Dieu. Même lorsqu’il s’agit du pardon de ses péchés, comme un pauvre pécheur, l’homme essaie d’en obtenir le pardon par lui-même, quoiqu’il soit écrit : « Qui est-ce qui peut pardonner les péchés que Dieu seul ? » [Luc 5, 21]. Toujours nous voyons l’homme prendre la place de Dieu, et la prendre, hélas ! en méchanceté. Lorsque Jésus sera entré en possession de Son royaume béni, Il aura pour but unique dans Sa gloire la gloire de Dieu le Père. Et lorsque tout aura été parfaitement aboli et qu’il ne restera pas une tache sur l’univers que Dieu a créé — que le mal aura été jugé et que le bien ressortira à la parfaite gloire de Dieu, même infiniment mieux que lorsque la création fut produite au commencement (car la nouvelle création est supérieure à la vieille), alors resplendira dans tout son jour cette grande vérité qui doit durer éternellement : Dieu tout en tous ; Dieu — Père, Fils et Saint Esprit. Il nous faut retenir cela avec force ; car ce qui est enseigné, ce n’est point que Dieu Père doive être tout en tous — jamais l’Écriture ne le dit ; et ce serait ôter au Fils et au Saint Esprit la place qui leur est due. Mais Celui qui aura possédé le royaume en tant qu’homme, s’en dessaisira, afin que Dieu (Père, Fils et Saint Esprit) soit tout en tous — le sujet des louanges de toutes les créatures, d’éternité en éternité, sans que rien jamais vienne obscurcir ou ternir la scène de la gloire.