Fortifie-toi

L. Gibert
« Toi donc… fortifie-toi dans la grâce… »
2 Tim. 2, 1

Un jeune chrétien, devant qui on dépeignait l’état de ruine de la chrétienté et l’extrême faiblesse du témoignage du Seigneur, laissa échapper cette exclamation : « Quelles sombres perspectives ! Si vous nous découragez ainsi !… », et la phrase interrompue signifiait sans aucun doute : « Que va donc connaître notre génération ? Oserons-nous reprendre le flambeau qui semble si près de s’éteindre ? ».

J’ai souvent pensé, depuis, avec une entière sympathie, à l’exclamation attristée de l’un des vôtres, mes jeunes amis. Et je voudrais avec vous rechercher ce que contient la Parole de Dieu, comme encouragements pour ceux qu’afflige la situation actuelle de l’Église du Seigneur, au milieu d’un monde sur qui s’amassent tant de nuages sombres.

Beaucoup d’excellents traités, dont la lecture persévérante et attentive ne saurait vous être trop conseillée, vous permettront de faire le point exact de cette situation à la lumière de l’Écriture. Quelques-uns datent de plus d’un siècle ; ils se sont trouvés vérifiés dans leurs avertissements et leurs exhortations, par les développements successifs, récents surtout, de cette situation que Dieu a prévue et dès longtemps annoncée. Ce « ministère écrit », des plus utiles pour qui désire comprendre ce qui se passe au milieu et autour de nous, est d’un tel prix que nous déplorons le peu d’empressement à en profiter dont font preuve trop de jeunes chrétiens. Sans nous lasser nous vous redisons : Prenez un intérêt vivant à ce que Dieu nous a fait connaître par Sa Parole ; elle est le guide sûr pour conduire nos pas dans Son sentier, en des temps toujours plus difficiles.

Je voudrais simplement aujourd’hui attirer votre attention sur quelques-unes de ses déclarations. Et d’abord celle-ci, qui nous conduit à prendre devant Lui la place où Il peut nous enseigner et nous bénir : « Car ainsi dit Celui qui est haut élevé et exalté, qui habite l’éternité et duquel le nom est le Saint : J’habite… avec celui qui est abattu et d’un esprit contrit, pour revivifier l’esprit de ceux qui sont contrits, et pour revivifier le cœur de ceux qui sont abattus » (És. 57, 15).

Voilà donc la promesse de Dieu pour ceux qui recherchent Sa face et souhaitent avec ferveur Sa bénédiction. Cette promesse fut accomplie, cent cinquante ans après, en faveur de Daniel qui partageait à Babylone le sort de ceux que le prophète avait avertis du jugement de Dieu sur la nation coupable.

Ce fut un jeune homme pieux, sage, intelligent, aux traits moraux déjà remarquables : consécration à Dieu, confiance en Lui, décision de cœur pour Lui, séparation du mal. Dieu l’enseigna de bonne heure et lui révéla Ses secrets. Puis Il lui fit comprendre « par les livres » que le moment était proche de la miséricorde de l’Éternel pour son peuple et sa ville (chap. 9, 2). Alors il se tourna vers Lui et Lui exprima, dans la supplication, le jeûne, le sac et la cendre, l’une des plus touchantes confessions que la Bible contienne.

Si vous désirez, mes jeunes amis, entrer dans les circonstances présentes du témoignage de Jésus Christ, sans en éprouver d’autre honte (2 Tim. 1, 8) que celle d’une humiliation consciente et vraie sous Sa main, il vous faut prendre l’attitude de Daniel, cet homme pieux dont la vie dans le récit divin n’est jamais entachée, mais qui pouvait faire sa confession (9, 4) et dire avec les accents d’une profonde contrition : « Nous avons péché contre toi » (v. 8) !

Alors son intelligence fut éclairée (v. 22). Dieu lui fit la faveur de l’appeler « un bien-aimé » (v. 23). Et cette exhortation lui fut adressée : « Ne crains pas, homme bien-aimé ; paix te soit ; sois fort ; oui, sois fort » (10, 19). Puis Dieu lui révéla Son propos pour le temps à venir, dont le dénouement conduit jusqu’à la vie éternelle (12, 2).

Que ces dispositions morales soient vôtres, quand vous réfléchissez sur l’affligeante histoire de l’Église du Seigneur, et particulièrement sur la condition actuelle du témoignage qu’Il se suscita voici plus d’un siècle ! Ceux qui avaient la tâche de vous instruire et de vous guider doivent reconnaître qu’ils n’ont pas su tracer devant vous le sillon droit, ajoutant eux aussi à la confusion générale. Mais le Saint et le Véritable vous répète : « Ne crains point » (Apoc. 1, 17), et encore : « … J’ai mis devant toi une porte ouverte, que personne ne peut fermer… Je t’ai aimé… Je viens bientôt, tiens ferme ce que tu as… » (3, 8, 9, 11).

Vous désirez, n’est-ce pas, entrer à votre tour dans le chemin du Seigneur ? Non pas simplement vous réunir avec les deux ou trois assemblés à Son nom, parce que vous avez eu ce privilège dès votre enfance. Non pas seulement avec eux annoncer Sa mort, privilège plus grand encore. Mais vous désirez prendre une conscience toujours plus claire de votre propre responsabilité relativement à « la Parole de Dieu et au témoignage de Jésus Christ » (Apoc. 1, 9).

Si vous désirez cela vraiment, cette Parole vous formera en vue de ce témoignage. Dans quelles conditions sera-t-il à rendre pour l’étape finale de l’histoire de l’Église, dont les premières heures ont déjà sonné ? Nous l’ignorons. Pour un grand nombre d’enfants de Dieu, ces circonstances se font toujours plus difficiles. Croyez que ceux qui vous laisseront bientôt, s’Il tarde, ceux à qui vous succéderez dans le combat de la foi, souhaitent de tout cœur vous voir préparés, par une connaissance personnelle du Seigneur, à Le servir humblement et avec fidélité, quoi qu’il advienne.

Le servir, dans le cercle béni de la famille où la piété doit être tenue en honneur — cette piété qui a les promesses de la vie présente et de celle qui est à venir [1 Tim. 4, 8] — en sorte que votre foyer soit un jour connu comme l’un de ceux où Jésus entre pour y demeurer avec ceux qui L’aiment.

Le servir au milieu des siens, au sein de la famille de Dieu, qui est déjà sur la terre Son habitation par l’Esprit. On Le sert en servant les autres. « Par amour, servez-vous l’un l’autre » [Gal. 5, 13], dit l’apôtre Paul. On les aime en Lui, pour pouvoir les servir en Lui. Cela nécessite abnégation et dévouement. Mais cela seul comptera dans le jour des rétributions, quand le Fils de l’homme dira : « En tant que vous l’avez fait à l’un des plus petits de ceux-ci qui sont mes frères, vous me l’avez fait à moi » [Matt. 25, 40]. Alors, le verre d’eau froide donné en son nom ne perdra pas sa récompense [Matt. 10, 42].

Le servir devant ce monde, toujours plus opposé à Dieu et à Son Christ, mais à l’égard duquel ce devoir demeure : lui faire connaître les vertus de Celui qui nous a appelés des ténèbres à Sa merveilleuse lumière [1 Pier. 2, 9]. Que vous étreigne l’amour du Christ pour ceux qui périssent ! Soyez intéressés à l’œuvre de l’évangile. Priez pour qu’il porte du fruit et croisse [Col. 1, 6], en dépit des efforts de l’adversaire. J.N. Darby écrivait en 1862 : Dieu aime les âmes ; si nous ne les cherchions pas, Il mettrait Son témoignage ailleurs ! ». Soyez, dans votre cercle particulier de travail et de relations, un témoin pour le Seigneur, gardé fidèle dans les détails de votre vie pratique pour que l’évangile dont vous vous réclamez puisse s’imposer au cœur de ceux qui vous voient vivre. Le Seigneur placera devant vous les occasions de parler de Lui, si vous êtes dépendants et conséquents à l’appel dont Il vous a appelés.

Mais il vous faut désirer Le servir ainsi, le désirer tout à la fois avec ferveur et humilité, gardés dans le sentiment de la faiblesse qui est la nôtre et la certitude que Sa puissance s’accomplit dans l’infirmité [2 Cor. 12, 9]. Il vous faut être « fortifiés en toute force, selon la puissance de sa gloire, pour toute patience et constance, avec joie » (Col. 1, 11). La foi montre sa réalité dans la persévérance selon Dieu. Hélas ! les élans du jeune converti, la fraîcheur de son premier amour pour son Sauveur, ses résolutions les plus ferventes, tout cela peut passer comme la rosée du matin ; piété éphémère qui s’évanouit quand l’objet divin en est perdu de vue, après avoir été pour un moment saisi par le cœur.

Chers jeunes amis, soyez fermes en Lui ; ne perdez pas courage. Demeurez attachés au Seigneur de tout votre cœur. Aucun de ceux qui se confient en Lui ne sera confus. Vous avez déjà certainement expérimenté la fidélité de Sa grâce ; retenez-la pour Le servir avec révérence et avec crainte [Héb. 12, 28].

Ne vous arrêtez pas à la petitesse, à la faiblesse de ceux qui désirent pourtant garder Sa Parole et ne pas renier Son nom. Le Seigneur ne dit-Il pas à Philadelphie : « Tu as peu de force » [Apoc. 3, 8] ? — aux deux ou trois qui se groupent autour de Lui : « Ne crains pas, petit troupeau » [Luc 12, 32] ?

Seriez-vous surpris et découragés si s’affirment de tant de manières les derniers jours et leurs temps fâcheux ? L’apôtre voulait que son enfant Timothée sache à quel point se constaterait la ruine morale qui les caractérise sous nos yeux. Si lui-même dut voir la maison de Dieu sur la terre bien lézardée, malgré ses travaux persévérants et tout son dévouement, serions-nous surpris que ce qui a été confié à nos devanciers, un témoignage pour le Seigneur aux derniers jours de l’Église, se soit à ce point affaibli ? — tellement, que nous devons dire comme le petit résidu remonté de captivité : nous sommes dans une grande misère et dans l’opprobre [Néh. 1, 3]

Ni surpris, ni découragés. Mais bien plutôt rejetés sur Lui, en qui est la force.


J’aime à rappeler ici la recommandation que le vénéré J.N. Darby sur son lit de mort, fit à son compagnon de travail W.J. Lowe : « Travaillez parmi les jeunes frères, occupant leurs cœurs de Christ ». Ce fut le souci constant de W.J. Lowe. Dans toutes ses prières, il présentait au Seigneur « la jeune génération ». Quarante ans après, parvenu à son tour aux frontières du ciel, il ne cessait de penser aux besoins spirituels de cette jeune génération qui, depuis lors, a vieilli…

Nous voudrions vous porter le même intérêt affectueux dont nous avons été les objets.

Hélas ! nous n’avons pas su, comme ces zélés « devanciers », veiller et prier — prier pour vous qui êtes maintenant la « jeune génération » dont les besoins nous tiennent cependant bien au cœur.

Mais il vous reste la ressource suprême, celle de l’amour du Seigneur. De Lui, que rien ne vous sépare.

« Que la grâce de notre Seigneur Jésus Christ, et l’amour de Dieu, et la communion du Saint Esprit, soient avec vous tous » (2 Cor. 13, 13).