Ils tombèrent dans le désert

B. Rossel
« Je ne veux pas que vous ignoriez, frères, que nos pères ont tous été sous la nuée, et que tous ils ont passé à travers la mer, et que tous ils ont été baptisés pour Moïse dans la nuée et dans la mer, et que tous ils ont mangé la même viande spirituelle, et que tous ils ont bu le même breuvage spirituel… Mais Dieu n’a point pris plaisir en la plupart d’entre eux, car ils tombèrent dans le désert. Or ces choses arrivèrent comme types de ce qui nous concerne »
1 Cor. 10, 1-6

En feuilletant un album de photographies, nous avons revu des visages connus : amis d’école du dimanche, amis de réunions de jeunes gens. En une douzaine d’années, plusieurs, pour ne pas dire beaucoup, ont renoncé à toute fréquentation des réunions. Leur souvenir nous trouble et nous désirons, après avoir cité quelques-unes de leurs raisons, leur adresser un message fondé en grande partie sur le texte ci-dessus. Qu’ils veuillent bien nous accorder quelques minutes d’attention et, s’ils en ont le loisir, répondre à nos lignes.


Quelques raisons invoquées. Deux réponses

Les raisons invoquées paraissent nombreuses ; citons-en quelques-unes : l’un a renié la foi, un autre a prétendu qu’il perdait son temps aux réunions de l’assemblée (nous l’entendons encore insister sur la pauvreté de telle ou telle réunion), un troisième a craint que sa carrière ne soit compromise (je consacre trop de temps aux réunions, certaines personnes influentes ont une opinion défavorable des frères, disait-il). Dernièrement, nous avons rencontré un jeune homme qui parla en termes énergiques : « Je ne retourne plus au local, j’ai vu comment certaines personnes se sont comportées dans telle circonstance ». Enfin plusieurs ont redouté une mutilation de leur personnalité. Ils estiment que leurs dons et leurs goûts ne peuvent en aucun cas s’épanouir dans un milieu qui condamne la fréquentation des salles de spectacles ou la lecture de certains livres.

Nous sommes en partie responsables de ces défections. Peut-être n’avons-nous pas assez prié, ne nous sommes-nous pas préoccupés de chacun d’eux avec une suffisante sollicitude, n’avons-nous pas été des témoins joyeux et conséquents.

Nous ne voulons pas examiner en détail les raisons indiquées plus haut. Certaines pourraient faire l’objet d’un article. Aussi en retiendrons-nous deux, qui nous paraissent particulièrement importantes : le reniement de la foi et la critique des réunions.

Ceux qui ont renié la foi de leur enfance sont souvent des intellectuels. Par les cours qu’ils ont suivi, les lectures nombreuses qu’ils ont faites, ils se sont peu à peu laissé gagner par le rationalisme. Colossiens 2, 8 indique clairement l’évolution qui s’est produite en eux : l’enseignement des hommes, les éléments du monde ont agi sur leur esprit. Ils ont été incapables de « fuir les discours vains et profanes et l’opposition de la connaissance faussement ainsi nommée » (1 Tim. 6, 20). Souvent j’ai relu cette pensée écrite par un chrétien doué d’une intelligence rare :

« Tout tourne en bien pour les élus, jusqu’aux obscurités de l’Écriture ; car ils les honorent, à cause des clartés divines. Et tout tourne en mal pour les autres, jusqu’aux clartés ; car ils les blasphèment, à cause des obscurités qu’ils n’entendent pas (c’est-à-dire : qu’ils ne comprennent pas) » [Pensées de Blaise Pascal].

Il est frappant de constater qu’un jeune homme critique avec virulence les réunions au moment où il devrait assumer certaines responsabilités dans l’assemblée. Prendrait-il la parole pour prier ou pour expliquer un passage propre à édifier chacun ? Ah ! non, jamais. Il est plus aisé de se retrancher derrière une apparente humilité que de faire valoir ce que l’on aurait reçu de Dieu. Nous disposons d’ouvrages nombreux, de périodiques qui nous aident à sonder les Écritures. Mais ils sont rébarbatifs pour ceux qui n’ont ni faim ni soif spirituelles.

En pensant à ces amis d’autrefois, nous discernons, sous toutes les raisons invoquées par eux, une cause plus profonde à l’attitude qu’ils ont adoptée : l’absence d’un amour personnel pour le Seigneur, et par voie de conséquence, la recherche des joies de la terre. Sachant que le Seigneur est proche, nous songeons au temps perdu par ces jeunes gens, aux regrets tardifs qui, souhaitons-le, les assailliront.


Le texte de 1 Corinthiens 10, 1-6

Ces réponses trop brèves ne les satisferont guère. Nous le savons. Qu’il nous soit permis toutefois d’examiner le même problème à la lumière d’un texte apostolique.

Quel est l’un des sujets doctrinaux particulièrement cher à l’apôtre Paul ? Les relations entre le judaïsme, dont il fut un temps l’ardent défenseur, et le christianisme, qu’il prêcha aux Gentils, après sa conversion.

Aussi, voyons-nous l’apôtre montrer que tout ce qui était arrivé aux Juifs n’était que des types ou des exemples destinés à mettre en garde les chrétiens eux-mêmes ou tous ceux qui, pendant un certain temps, ont affirmé l’être.


Ce qui est arrivé aux Juifs

Nos pères, c’est-à-dire nos ancêtres en Israël, ont connu des événements extraordinaires. Ils ont tous été sous la nuée, car « l’Éternel allait devant eux dans une colonne de nuée pour les conduire par le chemin » (Ex. 13, 21). Ils ont donc suivi Dieu Lui-même, ils ont constaté et goûté Sa présence. Puis ils franchirent tous la mer Rouge, témoins d’un miracle. « Et les eaux se fendirent ; et les fils d’Israël entrèrent au milieu de la mer à sec » (Ex. 14, 21). Le fait d’avoir marché derrière la nuée et d’avoir traversé la mer mettait en évidence leur soumission à Moïse, chef établi par Dieu.

Dans le désert, l’Éternel a pourvu à leurs besoins : « Voici, je vais vous faire pleuvoir des cieux du pain » (Ex. 16, 4). Chaque jour, ils recueillaient leur portion disposée sur la terre. Quand la soif commença à les torturer, le rocher frappé laissa échapper des eaux abondantes (Ex. 17, 6).

La nuée, la mer fendue, la viande, le breuvage. Que de bienfaits variés répondant à toutes leurs nécessités !


Pourtant, leurs cadavres jonchèrent le sol. Ce qui peut arriver à ceux qui professent le christianisme

Un enfant naît de parents chrétiens, dévoués à l’assemblée. Il grandit, suit les traces de ses parents un certain temps et… rompt plus ou moins brutalement avec le milieu auquel il appartenait.

Pourtant, il a été sous la nuée ; dans l’assemblée, maison de Dieu, a-t-il jamais éprouvé une présence divine, solennelle ? Placé devant des problèmes difficiles, a-t-il ressenti le besoin d’une direction ? Que la réponse soit affirmative ou négative, il a appris à maintes reprises que, dans un groupe de croyants ou isolé, ses yeux pouvaient, semblables à ceux de l’Israélite, considérer la nuée qui le guidait.

Dimanche après dimanche, dans les réunions de culte ou d’évangélisation, il a acquis la connaissance du salut. Il s’est associé bon gré mal gré à ceux qui chantaient l’hymne de la délivrance, figurée, bien des siècles plus tôt, par le cantique entonné sur les rives orientales de la mer Rouge. « Jah est ma force et mon cantique, et il a été mon salut. Il est mon Dieu… le Dieu de mon père, et je l’exalterai » (Ex. 15, 2).

Plus encore, il a reçu les eaux du baptême pour l’obéissance à Jésus Christ. Le signe de son appartenance au christianisme a été placé sur lui en présence de plusieurs personnes, soucieuses de le voir s’engager dans le chemin qui mène à la vie.

Souvent, le Fils de Dieu, vrai pain du ciel, lui a été présenté comme la seule nourriture valable pour son âme, et le Saint Esprit, l’eau du rocher, comme breuvage. Il a goûté du don céleste, il est devenu participant de l’Esprit Saint (Héb. 6, 4).

Il est tombé dans le désert. Cela signifie-t-il pour lui la perdition éternelle ? Dieu le sait. Quoi qu’il en soit, l’état intérieur de ce jeune homme ne correspondait nullement aux privilèges qui étaient les siens.


Un appel, un pressant appel

Une question se pose à nous : Aurait-il mieux valu que ces jeunes gens n’aient jamais connu les enseignements bibliques, puisque ces enseignements mêmes rendent leur responsabilité plus grande, le jugement plus terrible ?

Le Seigneur a prêché, a fait un grand nombre de miracles à Chorazin, à Bethsaïda, à Capernaüm, bien qu’Il sût que ces villes ne recevraient pas Son message. Elles ont été privilégiées entre toutes.

Amis d’autrefois, méprisez-vous les richesses de la bonté, et de la patience, et de la longue attente de Dieu, ne connaissant pas que Sa bonté vous pousse à la repentance (Rom. 2, 4) ? Quels termes devons-nous employer pour rendre notre appel plus insistant ? « Reviens, Israël l’infidèle, dit l’Éternel ; je ne ferai pas peser sur vous un visage irrité, car je suis bon, dit l’Éternel… Revenez, fils infidèles, dit l’Éternel » (Jér. 3, 12-14).

Le nom qui rassemble

Cette brochure, de la série « Pour les jeunes croyants », ne cherche ni à résumer, ni surtout à remplacer les nombreux écrits que nous possédons sur le sujet de l’Assemblée de Dieu. Elle désire plutôt donner aux jeunes, aussi simplement et clairement que possible, un cadre à cette question si vaste qui les amène à sonder pour eux-mêmes la Parole de Dieu et à recourir aux écrits des serviteurs que le Seigneur a employés pour nous en exposer les vérités. Il est très nécessaire, surtout pour les plus jeunes parmi nous qui n’ont pu, comme leurs aînés, jouir du ministère de ces serviteurs que le Seigneur a rappelés auprès de Lui, de prendre la peine de considérer l’ensemble de l’enseignement de la Parole au sujet du rassemblement au nom du Seigneur Jésus, sans se confiner à l’un ou l’autre de ses aspects particuliers.

G. André