Le grand voyage

H. A.
« Je cours droit au but »
Phil. 3, 14

En vérité tout le monde est en route ; c’est un grand voyage. Tu es aussi en voyage ; sais-tu où tu vas ? C’est la première chose à considérer et j’espère que tu es bien en règle pour arriver au « port désiré » : désiré parce que là il n’y aura plus de vents et de tempêtes, désiré surtout parce que là ton Sauveur t’attend.

Déjà tu as pu t’apercevoir que la navigation n’est pas toujours bien facile. J’ai devant moi l’image de la tempête que traversa l’apôtre Paul, comme le raconte le chapitre 27 des Actes. Il me semble que je te vois ayant déjà subi les vents contraires qu’il avait lui-même rencontrés dès le début de ce voyage, et désirant prendre une bonne décision avant de te remettre en route. Car les vents soufflent dans tous les sens et tu te demandes où est le bon chemin, celui qu’il faut suivre. Alors tu vas, comme le centurion l’avait fait, demander conseil au pilote et au patron du navire, gens instruits et avisés ; tu as bien raison.

Et je te vois aller chez ce professeur expérimenté des choses de la vie, chez ce négociant habitué à regarder loin en avant, chez celui qui, près de toi, estimé et estimable, saura te montrer le chemin où tu ne pourras que réussir. Oui, tu as bien raison. Mais n’hésite pas à aller voir et à écouter ce frère de bon sens, instruit dans la Parole de Dieu, qui déjà t’a montré le chemin du ciel et qui encore saura, avec tout son cœur et dirigé par l’Esprit de Dieu, te conduire dans ce tournant difficile. De tes conseillers, vu par les hommes, il est le plus petit. Vu par Dieu, il est le plus grand. Écoute-le.

Donc tu vas poursuivre ton grand voyage. Tu diras d’abord que ce n’est que pour contourner un peu l’île de Crète ; un tout petit chemin ; du reste, le « vent du midi souffle doucement ». Tout est, en apparence, court, facile, bien propice. C’est un stage qui n’a rien d’inquiétant, c’est pour contrôler tes aptitudes ; ce n’est que provisoire ; c’est en attendant des jours meilleurs. Oui, mais même pour ce court chemin, aussi facile et prometteur qu’il puisse apparaître, tu as besoin de la même protection, de la même dépendance, des mêmes prières que pour un grand chemin paraissant tout hérissé de difficultés. Tu diras encore : « Mais le vent du midi souffle doucement », il est si agréable, donne tant de confiance ! As-tu bien raison ? Sais-tu ce que peut représenter ce vent si doux ? Pour Jonas, ce fut le navire allant à Tarsis ; pour le jeune homme des Proverbes, la rencontre de cette femme qui pourtant avait une certaine forme de religion ; pour Démas, et combien avec lui, ce fut le présent siècle ; et voici les sourires, et voici que « le vent du midi souffle doucement »… et voici que bien vite — oh ! trop vite ! — le vent orageux appelé Euroclydon descend violemment, apportant la tempête et la catastrophe. Tu vois ce qui s’est passé ? Ton espérance toute fraîche est déjà remplacée par une sombre réalité ; tu croyais boire à une source rafraîchissante et la citerne crevassée est déjà sèche ; l’ami avec qui tu as mangé tout ton bien ne te donne plus que les gousses des pourceaux ! Ah ! s’ils avaient écouté l’apôtre Paul ! Ah ! si tu avais écouté les conseils du vieux frère !

Maintenant, il faut sauver sa vie, délester le navire en jetant à la mer les choses les plus précieuses : agrès, nourriture. Maintenant il faut, à grand-peine, se rendre maître de la chaloupe qui sera peut-être la barque de sauvetage ! Et ainsi dans l’épreuve tant de choses indispensables doivent être abandonnées, et ce n’est qu’à grand mal que nous pourrons garder ce qui en un jour pire pourra nous sauver la vie… Un jour pire… Quatorze jours sans manger, sans soleil, sans lune ! Même le ciel fermé ?… Non, car une voix se fait entendre : « Ne crains point », dit-elle à son bien-aimé. « Ayez bon courage », dit-elle à chacun. Écoutons Celui aux yeux duquel les ténèbres ne sauraient nous cacher, au cœur duquel nous ne saurions être indifférents, même si nous ne récoltons que ce que nous avons semé.

Confions-nous de tout notre cœur dans le Dieu fidèle qui a fait les promesses. Ce sera sans doute assez dur pour notre propre volonté, pour notre « moi ». Pensez : barque de sauvetage, gouvernail, ancre : tout abandonner ! Qu’est-ce à dire ? Ne t’appuie pas sur ton intelligence [Prov. 3, 5]… ne sois pas sage à tes propres yeux… enseignement des hommes… éléments du monde. Et Dieu va se servir de ces moyens qui avaient conduit au désastre, matelots, vent, comme instruments de salut ! Mais le résultat est là ; « alors que toute espérance de pouvoir nous sauver nous avait été ôtée » (v. 20), tous « parviennent à terre sains et saufs » (v. 44). Ce n’est pas une arrivée triomphale, loin de là ! L’ouvrage a été consumé. L’artisan est sauvé, toutefois comme à travers le feu (1 Cor. 3, 15).

Autre chose aurait été la riche entrée « dans le royaume éternel de notre Seigneur et Sauveur Jésus Christ » (2 Pier. 1, 11). Couronnement d’un beau voyage, productif pour le Maître, où la chaîne des vertus chrétiennes allant de la foi à l’amour aurait été manifeste aux yeux de tous.

Et pour conclure, ami qui es en route pour le grand voyage, mieux que tes provisions, ta boussole et ton moteur, recherche la présence et le secours de Celui qui a promis d’être avec les siens tous les jours.

Il marche devant :
Suis ses traces !
Il te parle par Sa Parole :
Écoute-le !

En toutes choses, parle-Lui. Si tu es ici ou là dans le chemin de la dépendance, c’est pour Le glorifier, pour défendre Ses intérêts, pour Le représenter, et tout à l’heure tu entendras : « Entre dans la joie de ton maître » [Matt. 25, 21, 23].

L’éternel salut
Est le prix, le but
Vers lequel je cours.
Seigneur, pour l’atteindre
À toi j’ai recours.