Le sourd-muet

G. André
« On amène à Jésus un sourd qui parlait avec peine, et on le prie pour qu’il lui impose la main. Et l’ayant tiré à l’écart, hors de la foule, il lui mit les doigts dans les oreilles ; et ayant craché, il lui toucha la langue ; et regardant vers le ciel, il soupira et lui dit : Ephphatha, c’est-à-dire, ouvre-toi. Et aussitôt ses oreilles s’ouvrirent, et le lien de sa langue se délia, et il parlait distinctement »
Marc 7, 32-35

Quel chagrin pour des parents lorsqu’un de leurs enfants reste sourd-muet. Jamais ils n’entendront la voix qui aurait su leur dire son affection, sa reconnaissance, ses petits soucis ! Jamais ils ne pourront s’entretenir avec cet enfant, ni lui faire part de tout ce que leur cœur de parents aime à traduire en paroles de leur amour, comme aussi, avant tout, de l’enseignement divin.

N’agissons-nous pas souvent de même à l’égard du Seigneur et ne sommes-nous pas, à bien des égards, des sourds-muets ? Il aurait tant voulu nous parler, nous enseigner ! Et nous n’avons pas eu de temps à consacrer à Sa Parole, ou nous l’avons lue d’un esprit distrait, ou l’avons écouté lire sans y prêter l’attention nécessaire. Il aurait tant désiré entendre notre voix dans la prière ! Et nous n’avons pas pris le temps de prier, ou nous avons prononcé des phrases des lèvres, et nous avons dit « amen » à une prière de l’assemblée sans même en avoir bien suivi le contenu. Il attendait notre louange, « le fruit des lèvres qui confessent son nom » [Héb. 13, 15] ! Et, dans le particulier, nous n’avons eu aucune expression de reconnaissance envers Lui, ou dans le culte, même si nous étions présents, nous étions si distraits que notre cœur n’était pas avec les paroles prononcées.


Est-ce un tableau trop noir ou trop vrai ? Que faire ?

« On lui amène… ». Comment nos oreilles s’ouvriront-elles si ce n’est en venant vraiment aux pieds de Jésus et en imitant, avec soin et avec cœur, l’exemple qu’Il nous a donné, tel que le prophète le rappelle : « Il me réveille chaque matin ; il réveille mon oreille pour que j’écoute comme ceux qu’on enseigne » (És. 50, 4). Moment précieux où « chaque matin » l’âme peut se retrouver dans le calme et le silence quelques minutes — quinze ou trente ! — pour écouter ce qu’à travers la Parole, son Seigneur veut lui dire.

« Écouter », et ensuite « suivre », c’est-à-dire obéir : « Le Seigneur l’Éternel m’a ouvert l’oreille, et moi je n’ai pas été rebelle, je ne me suis pas retiré en arrière » (v. 5). Le Seigneur Lui-même a obéi jusqu’au bout, malgré la souffrance et malgré la croix. Si la Parole entendue dans ces moments de recueillement nous montre des choses qu’il serait peut-être dur de confesser ou de corriger, des écarts difficiles à réparer, un témoignage que nous redouterions de rendre, allons-nous reculer et, après avoir « écouté », refuser de « suivre » ? Jésus a pu dire : « Moi, je n’ai pas été rebelle… ».

« Ses oreilles s’ouvrirent », mais aussi : « le lien de sa langue se délia ». Pour bien des raisons, le Seigneur permet des difficultés pour les siens ; l’un des motifs n’est-il pas qu’Il désire entendre leur voix ? Nous avons négligé la prière… et voici l’épreuve, voici le problème, la chute peut-être, qui nous contraignent à prier, à ouvrir notre bouche, à Lui faire entendre notre voix.

Celui dont l’oreille aura été ouverte chaque matin dans le silence aux pieds du Seigneur, aura aussi la bouche ouverte pour élever la voix vers Lui dans la prière ou la louange, et pour s’adresser aux hommes dans leurs besoins divers. « Le Seigneur m’a donné la langue des savants pour que je sache soutenir par une parole celui qui est las » [És. 50, 4], disait le Seigneur Jésus par la voix du prophète. Cette parole à propos, ce mot d’encouragement, cette remarque, toute incidente peut-être mais amenée par l’Esprit de Dieu dans une conversation, combien ils peuvent encourager ceux qui sont las, aiguiller du bon côté un jeune incertain, stimuler des mains lassées.

Dans le Cantique des cantiques, à deux reprises vient une prière : « Fais-moi entendre ta voix » (2, 14) : voix de la prière, voix de la louange, voix de la reconnaissance. Plus loin, il est ajouté : « Habitante des jardins, les compagnons sont attentifs à ta voix ! Fais que je l’entende ! » (8, 13). Pourquoi, frères jeunes ou plus âgés, restons-nous si souvent muets dans le rassemblement ? L’assemblée, à genoux pour la prière, attend que des bouches s’ouvrent pour la prononcer ; et voilà de longs silences, où les mêmes voix doivent de nouveau se faire entendre, parce qu’il y a trop de muets ! Et que dire du culte ? ou même des « cinq paroles » qui selon 1 Corinthiens 14, pourraient être une réelle bénédiction ? Ne l’oublions pas : « Les compagnons sont attentifs à ta voix » !

Mais tel n’est pas seulement le cas dans l’assemblée ; on peut rester muet aussi dans la famille, dans les rencontres d’amis, dans le témoignage envers le monde ; et là, jeunes gens et jeunes filles, ne sommes-nous pas tous appelés à faire entendre notre voix ?

Quand le muet de l’évangile eut le lien de sa langue délié, « il parla distinctement ». D’abord ses oreilles furent ouvertes : il s’agit premièrement d’écouter et de recevoir ; ensuite, il s’est mis à parler. Où ce miracle s’est-il produit ? Seul à l’écart, hors de la foule, avec le Seigneur !

Ne voulons-nous pas en prendre le temps, et Le laisser dire à chacun de nous aussi : Ephphatha, c’est-à-dire ouvre-toi !