Les issues de la vie

G. André
« Garde ton cœur plus que tout ce que l’on garde, car de lui sont les issues de la vie »
Prov. 4, 23

Jeune homme, héritier du trône d’Israël, Salomon se trouvait dans une situation bien particulière. Son père, malgré ses défaillances, avait suivi l’Éternel de tout son cœur, « en vérité, en justice et en droiture » [1 Rois 3, 6]. David restait comme un modèle pour tous ceux qui viendraient après lui : leurs voies sont mises en regard des siennes tout au long des livre des Rois et des Chroniques.

Et maintenant, il n’était plus ; qu’allait faire le jeune Salomon ? Il « aimait l’Éternel », nous est-il dit, « seulement il offrait des sacrifices et faisait fumer l’encens sur les hauts lieux » (1 Rois 3, 3). Son cœur était, dirions-nous, dans la bonne direction, mais combien il avait à apprendre !

La royauté mise à part, n’y a-t-il pas une analogie frappante entre Salomon et les jeunes croyants de nos jours ? La plupart d’entre nous ont eu — dans la famille ou spirituellement — des pères qui ont marché dans le chemin du Seigneur, des conducteurs qui nous ont « annoncé la Parole de Dieu » [Héb. 13, 7]. La plupart ont été maintenant recueillis dans le repos. Que va faire la génération qui les suit ? Marchera-t-elle dans les traces laissées, consciente de sa responsabilité accrue de tout ce qu’elle a reçu par le ministère et l’exemple de ceux qui ne sont plus ?

Qu’il y ait de l’amour pour le Seigneur, c’est certain. Mais Dieu ajouterait-Il un « seulement » ?

L’Éternel savait ce qu’il en était de Son jeune serviteur et, dans le silence de la nuit, à Gabaon, Il se présente à lui et lui présente Sa grâce : « Demande ce que tu veux que je te donne » [1 Rois 3, 5]. Conscient de la tâche immense qui est devant lui, des conséquences que son exemple et sa marche auront pour le peuple de Dieu, Salomon, simplement, humblement, demande à son Dieu « un cœur qui écoute » [1 Rois 3, 9].

Parlant d’un plus grand que lui-même, le prophète dira plus tard : « Le Seigneur… me réveille chaque matin, il réveille mon oreille pour que j’écoute » (És. 50, 4). Et à l’aube des journées de Sa vie terrestre, nous voyons le Seigneur Jésus aller, en effet, seul à l’écart pour prier, pour écouter. Moments de communion personnelle et intime, que rien ne remplace, moments où le cœur écoute ce que Dieu veut dire. « Donne à ton serviteur un cœur qui écoute » [1 Rois 3, 9], demande Salomon. Et la voix divine répond : « Voici, je t’ai donné un cœur sage » [1 Rois 3, 12]. Salomon a « cherché premièrement le royaume de Dieu » [Matt. 6, 33] : toutes choses lui sont données par-dessus. « L’Éternel donne la sagesse », écrira-t-il plus tard (Prov. 2, 6), mais Il la donne à celui qui écoute.

Ainsi le cœur du jeune roi sera formé pour Dieu ; « large comme le sable qui est sur le bord de la mer » [1 Rois 4, 29], il pourra embrasser tout son peuple, être un instrument de paix et de justice ; il bâtira la maison « appelée de son nom » [1 Rois 8, 43] ; sa sagesse attirera des âmes « des bouts de la terre » [Matt. 12, 42].

Mais tout d’abord, quel fut l’effet sur Salomon de la nuit de Gabaon ? « Il vint à Jérusalem et se tint devant l’arche » (1 Rois 3, 15). Avant que son « cœur écoute », il allait sur les hauts lieux offrir l’encens ; maintenant, il a compris qu’il y a un seul centre de rassemblement pour le peuple de Dieu : Celui que l’arche représente, Christ Lui-même ; il y a un lieu, tel Jérusalem, celui où il a mis « la mémoire de son nom » (Matt. 18, 20). C’est là que dorénavant Salomon offrira des holocaustes et des sacrifices de prospérité ; c’est là qu’il donnera la nourriture, « un festin à tous ses serviteurs ».


« Ses femmes détournèrent son cœur »
1 Rois 11, 3, 4

Vingt-cinq ou trente ans ont passé depuis la nuit de Gabaon. Salomon a achevé la maison de l’Éternel. Inspiré par l’Esprit de Dieu, il a consigné dans trois livres de Sa Parole cette sagesse qui lui avait été donnée. Toute la terre a recherché sa face et ses conseils. Et maintenant, quel tableau ! Le cœur qui écoutait, le cœur qui s’attachait à l’Éternel, s’est détourné. Un autre amour s’y est glissé, subtil, sournois, l’amour pour « l’étrangère », l’amour du monde. Il avait écrit, parlant pour Dieu : « Mon fils, donne-moi ton cœur » (Prov. 23, 26). À qui l’avait-il donné « au temps de sa vieillesse » [1 Rois 11, 4] ? David avait pu pécher, gravement, douloureusement ; mais, malgré tout, son cœur restait attaché à Dieu, et dès qu’il se rend compte de sa faute, il peut dire : « Contre toi seul, j’ai péché… Purifie-moi… Rends-moi la joie… » (Ps. 51). Rien de tel chez Salomon. Dieu lui parle (v. 11) ; Il exerce la discipline et suscite l’adversaire ; mais Salomon ne revient pas ; il ne reconnaît pas son péché, il ne se courbe pas sous la main qui le frappe. Pourquoi ? Parce que son cœur (expression six fois répétée en 1 Rois 11) avait été pris. Il s’est détourné, non pas une fois, ni deux fois, non dans une chute accidentelle, mais foncièrement ; pas en un jour, mais petit à petit : des Moabites, des Ammonites, des Édomites, des Sidoniennes, des Héthiennes. Puis viennent les idoles : Ashtoreth ; Milcom, l’abomination des Ammonites ; Kemosh, l’abomination de Moab ; Moloc, l’abomination des fils d’Ammon.

Le règne de paix est troublé. Il y a « de la colère », des « adversaires ». Roboam et « les jeunes gens qui avaient grandi avec lui », ne respirent plus l’atmosphère de la grâce et de l’humilité qu’avait apportées David à Jérusalem. Ils deviendront intransigeants, autoritaires, et seront les instruments de la division du peuple de Dieu (1 Rois 12), telle que l’annonce déjà Akhija le Silonite.

« Les issues de la vie » ! Vie courte, vie brève, mais dont Dieu enregistre les actes, « les premiers et les derniers » (2 Chron. 9, 29). Le cœur s’est-il détourné ? L’issue est sombre. Mais si, par la grâce de Dieu, on a « retenu ferme jusqu’au bout le commencement de son assurance » (Héb. 3, 14), si la foi est restée attachée à son objet, « l’issue de la conduite » reste un exemple (13, 7), une joie, une bénédiction.

« Garde ton cœur plus que tout ce que l’on garde ».