Les petits renards

A. Henry
« Prenez-nous les renards, les petits renards qui ravagent nos vignes, car nos vignes sont en fleur »
(Can. 2, 15)

La vigne tient une grande place dans les enseignements de la Parole de Dieu. Elle symbolise en principe, par le vin qu’elle produit, la joie pour Dieu et pour les hommes (Jug. 9, 13). Et pourtant, dans la première allusion qui y est faite en Genèse 9, 20-27, nous la voyons cause du péché chez un homme de foi ; péché dont la conséquence demeure, la malédiction de Cham étant toujours sous nos yeux ; dès que le péché est introduit, les choses les meilleures en elles-mêmes sont employées par Satan au malheur de l’homme.

La vigne nous donne une leçon dès l’apparition de la vie qui reprend en elle au printemps. Sitôt que le petit bourgeon s’entrouvre, avant même que la feuille soit formée, on peut discerner des grappes minuscules, prometteuses de fruit. Dès que la vie de Dieu apparaît aussi dans une âme, se manifeste le désir de Lui plaire, de Le servir, d’aimer Jésus, d’apprendre à Le connaître pour Lui-même, non seulement dans les résultats de Son œuvre pour nous. C’est peut-être faible et imprécis, mais il y a la promesse du fruit. Jusqu’à ce qu’il apparaisse en récolte mûrie qui donne du vin, type de la joie, que d’orages à subir, que de tentations de l’Ennemi à surmonter, que d’intempéries spirituelles !

La feuille étant formée, la petite grappe aussi, les boutons ont acquis une certaine grosseur ; voici maintenant la fleur de la vigne épanouie, aux étamines couvertes d’un léger duvet, le pollen qui va féconder le pistil. Quel parfum suave, comparable à celui du réséda ! Combien aussi les manifestations du travail de Dieu sont précieuses à considérer dans une âme : tout est de Lui, tout est de Christ, c’est un peu du « parfum répandu par son nom » (Can. 1, 3).

Cette fleur est très fragile ; si, après sa floraison, la fécondation s’opère bien, le développement du fruit se produit ; si, au contraire, la fleur tombe avant sa maturité propre, le grain tombera aussi, ou restera très petit, le fruit en somme disparaît.

Il est nécessaire de suivre ces différents stades de la nature pour comprendre le verset en tête de ces lignes. « Prenez-nous les renards, les petits renards qui ravagent nos vignes, car nos vignes sont en fleur ». Lorsque cette fleur utile, nécessaire, précieuse, est là (rappelons-nous qu’une seule mauvaise pensée trouble la communion avec le Seigneur et produit la sécheresse du cœur), les « petits renards » folâtrant dans les vignes, risquent avec leurs longues queues de détruire ce qui est si délicat ; alors plus de fruit. Qu’importe pour le maître de la vigne qu’à l’heure de la vendange, il ait une magnifique végétation si, en soulevant les feuilles, il n’y a que peu ou pas de fruit. Il y a une grande vie bien apparente, une grande activité peut-être chez le chrétien, mais en somme rien pour le Maître. La chair s’est mise au service de la foi. Pensons aux résultats du tribunal de Christ en Apocalypse 19, 7-9.

Mais que sont donc ces « petits renards » ? La ruse, l’astuce de cet animal sont connues. Le Seigneur donne ce nom à Hérode en Luc 13, 32 ; ce dernier n’était-il pas un suppôt de Satan ? — Ne peut-on pas voir en eux ces habitudes mondaines, ces (petits) péchés cachés, ces paroles légères, dont on usait, que l’on pratiquait, auxquels on avait renoncé, avec lesquels on avait rompu — et cela avec joie — à la conversion ? Petit à petit, insensiblement, on y revient, et le fruit pour le Seigneur est compromis. C’est pourtant le moment où la vigne est en fleur, où le fruit va — oui ou non — prendre ou perdre un aspect précieux !… Ah ! prenez, prenez-nous les « petits renards » ; aidons-nous en cela les uns les autres, jeunes croyants. C’est une question capitale d’où dépend la joie du Seigneur en vous et votre propre joie en Lui.

Et si on les laisse vivre, les « petits renards » deviendront grands, et le renard est un grand consommateur de raisin lorsque celui-ci atteint sa maturité. Après avoir accompli un travail néfaste chez le jeune croyant, ces choses symboliques peuvent encore ruiner le témoignage d’un chrétien âgé. Rappelons-nous, croyants de tout âge, que c’est toujours du même côté que l’on tombe. Satan sait employer les « petits renards », mais le Seigneur est puissant pour donner la force à celui qui est parfois las de combattre et Il augmente l’énergie à celui qui n’a pas de vigueur (És. 40, 29).