Porter du fruit

G. André
« Que nos fils soient comme des plantes croissant dans leur jeunesse »
(Ps. 144, 12)

« Il y a plus de fleurs au printemps que de fruits en automne », a dit un chrétien, témoin d’un des réveils du siècle dernier. Et pourquoi donc ? Chaque fleur ne peut-elle pas donner son fruit ? Ils sont si beaux, les vergers tout blancs dans la fraîche lumière du printemps ; ils font si bien augurer la récolte future ! L’automne arrive, et souvent les fruits manquent. Que s’est-il passé ? — Les fleurs n’ont jamais noué.

Il y a beaucoup de jeunes parmi nous. Enfants de parents chrétiens, élevés dès le berceau « dans la discipline et sous les avertissements du Seigneur » [Éph. 6, 4], ils ont fréquenté l’école du dimanche ; ils sont venus aux réunions des croyants ; ils connaissent la Parole de Dieu. Fleurs de nos vergers, ils seront les fruits de demain. Les années passent ; l’intérêt pour les choses d’en haut s’affaiblit ; le monde les attire ; combien d’entre eux, à l’âge de l’indépendance, prennent le chemin large qui mène à la perdition [Matt. 7, 13] ! Ils sont plus nombreux, hélas ! qu’on ne le croit souvent. Fleurs fanées qui gardent quelques pétales desséchés de leur beauté première, mais perdus pour l’éternité si, dans Sa miséricorde insondable, le Sauveur ne les arrête sur la route, en frappant bien fort souvent, pour les amener repentants, humiliés à Ses pieds.

Et pourquoi donc ? — Les fleurs n’ont jamais noué. Réveillés, peut-être, mais pas convertis. Connaissant le chemin du salut, ayant « goûté du don céleste » [Héb. 6, 4], mais chez lesquels le cœur et la conscience n’ont jamais été touchés. Ils n’ont pas vu leurs péchés à la lumière de Dieu. Ils ne sont pas venus au Sauveur pour eux-mêmes. L’apparence a subsisté pour un temps ; puis la « brûlante chaleur » [Jacq. 1, 11] du soleil est arrivée : la vie avec ses obligations, son labeur et ses peines ; le monde avec ses attraits et ses joies passagères. La nouvelle naissance n’ayant pas eu lieu, la fleur s’est fanée… et ils s’en vont, honorables et considérés peut-être, mais portant la terrible responsabilité « d’avoir foulé aux pieds le Fils de Dieu » [Héb. 10, 29], d’avoir méprisé le don de la grâce.

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Par la miséricorde infinie de Dieu, tous n’ont pas pris ce chemin-là. Ils ont reconnu leurs péchés ; ils sont venus au Sauveur tels qu’ils étaient, pas meilleurs que les autres ; ils ont mis en Lui toute leur confiance, par la foi dans Son œuvre accomplie. La fleur a noué, mais… le fruit est encore bien loin d’atteindre sa maturité.

Combien de jeunes croyants ne restent que trop longtemps dans cet état ! Leur salut ne fait aucun doute ; si le Seigneur Jésus venait, ils s’en iraient auprès de Lui. Mais ils ne « croissent » pas ; ils ne font pas de progrès dans les choses d’en haut ; ils ne s’occupent pas des âmes qui les entourent. Et pourquoi donc ? — Ils ont fait d’eux-mêmes le centre de leur vie. La fleur qui portera du fruit doit se dépouiller entièrement de sa parure. Pour venir « après Lui », il faut se renoncer soi-même (Luc 9, 23). Il s’agit de réaliser pratiquement que nous sommes morts avec Lui, « afin que la vie aussi de Jésus soit manifestée dans notre chair mortelle » (2 Cor. 4, 11).

Et pour cela, il est nécessaire de Le considérer. « Apprenez de moi, car je suis débonnaire et humble de cœur » [Matt. 11, 29]. Il faut souvent s’asseoir à Ses pieds ; dans le silence, Le laisser nous parler par Sa Parole ; ouvrir le Livre, et écouter. Cultiver la prière et la communion avec Lui. Et puis, apprendre à servir. Regarder autour de nous ; répondre aux besoins, parfois si simples, que nous rencontrons sur notre chemin : un malade à visiter, un traité à donner, un livre utile à prêter, une parole d’encouragement à prononcer, un mot de l’œuvre que le Seigneur opère dans notre âme. Et cette « vie de Jésus » qui se manifestera dans tous les détails de nos journées, sera la prédication la plus puissante au milieu des ténèbres de ce monde.

Il n’y a qu’un printemps de la vie, comme il n’y aura qu’un été et qu’un automne. Notre printemps déterminera en grande partie la prospérité de l’été et le fruit de l’automne. « Que nos fils soient comme des plantes croissant dans leur jeunesse » [Ps. 144, 12]. Ce n’est pas à trente ou quarante ans qu’il faut commencer à croître ; que de fruit perdu s’il en était ainsi ! Le temps passe ; le Seigneur est proche. « Occupe-toi de ces choses ; sois-y tout entier, afin que tes progrès soient évidents à tous » (1 Tim. 4, 15).

« Un arbre planté près des eaux ; il étendra ses racines vers le courant… et sa feuille sera toujours verte… et il ne cessera de porter du fruit » (Jér. 17, 8).