Sacrifices

G. André
« Un sacrifice de louanges »
(Héb. 13, 15)

« Que rendrai-je à l’Éternel pour tous les biens qu’Il m’a faits ? » [Ps. 116, 12] demandait autrefois le psalmiste. N’est-ce pas le sentiment de notre cœur en considérant tout ce que le Seigneur Jésus a souffert pour nous à la croix ? Que pourrions-nous Lui « rendre » en regard de tout Son amour ? Rien, sans doute ; et la pensée même de vouloir « rendre » quelque chose est-elle de mise, en face de Son œuvre infinie et de notre néant ? Pourtant la Parole de Dieu nous parle de divers « sacrifices » que le croyant peut apporter à Dieu, non afin d’être sauvé, mais parce qu’il l’est.

Le premier, le plus important, le plus élevé, c’est la louange, « le fruit des lèvres qui bénissent Son nom ». « Celui qui sacrifie la louange me glorifie » (Ps. 50, 23), nous dit déjà Asaph ; et le Seigneur Jésus lui-même révèle à la femme samaritaine que « le Père cherche » des adorateurs qui L’adorent en esprit et en vérité (Jean 4). Il n’y a aucun service plus élevé sur la terre que celui du culte, aucun « sacrifice » plus agréable à Dieu (Ps. 50, 14). Il ne s’agit pas de l’offrir seulement le dimanche matin, mais tous les jours de notre vie : « Offrons… sans cesse à Dieu… ».

Souvent la pauvreté de notre louange, la faiblesse de notre culte nous a attristés. Mais la louange est offerte à Dieu par le Seigneur Jésus, « par Lui » qui purifie nos saintes offrandes ; et Dieu agrée la louange à cause des perfections de Celui par qui elle est présentée.

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« Vos corps en sacrifice vivant »
(Rom. 12, 1)

Le sentiment de l’amour infini de Dieu, Ses « compassions », doivent nous amener à nous « livrer » entièrement à Lui. On fait souvent une confusion à cet égard. Il ne s’agit pas de « se donner » au Seigneur Jésus pour être sauvé, de « s’offrir » à Lui pour être converti ; non, le bon Berger Lui-même « cherche » Sa brebis, « jusqu’à ce qu’Il l’ait trouvée » [Luc 15, 4]. C’est une fois sauvés, « comme d’entre les morts étant faits vivants » (Rom. 6, 13), que nous sommes appelés à nous « livrer nous-mêmes à Dieu ». Il nous est dit des Macédoniens « qu’ils se sont donnés premièrement eux-mêmes au Seigneur » (2 Cor. 8, 5) ; attendrait-Il moins de nous qui avons été achetés au même prix ? Mais, pratiquement, réellement, l’avons-nous présenté à Dieu, ce « sacrifice » ; ou vivons-nous plus ou moins pour nous-mêmes, au lieu de vivre « pour Celui qui pour nous est mort et a été ressuscité » (2 Cor. 5, 15) ? C’est un « sacrifice » qui s’accomplit sans doute fondamentalement une fois, mais qui est aussi, par l’opération de l’Esprit de Dieu en nous, pratiquement répété chaque jour de notre vie : « Que dois-je faire, Seigneur ? » (Act. 22, 10). C’est la disposition du cœur, réaffirmée chaque matin dans la prière, à faire Sa volonté, à être dans Sa main un instrument qu’Il emploie selon Son désir.

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« La bienfaisance… faire part de vos biens… Dieu prend plaisir à de tels sacrifices »
(Héb. 13, 16)

Il est bien frappant qu’à la louange, sacrifice le plus élevé du croyant, l’Esprit de Dieu associe dans les mêmes versets le « sacrifice » des biens matériels (voir aussi Deut. 26, 1-16) : « la bienfaisance » qui s’occupe de ceux qui sont dans le besoin ; « faire part de ses biens », qui implique, selon Galates 6, 6, l’intérêt porté aux serviteurs que le Seigneur emploie dans Son œuvre, leur demandant pour cela, selon la parole de Paul, de « vivre de l’évangile ».

À première vue, ce « sacrifice » paraît le plus aisé de tous. « Plusieurs riches y jetaient beaucoup », trouvons-nous dans l’évangile (Marc 12, 41) ; mais il s’agissait « de leur superflu » aux yeux de Celui qui sonde les cœurs et connaît tous les détails de nos vies ; nous savons quel cas Il en fit. Qu’en est-il de nous à cet égard ? David disait : « Je n’offrirai pas à l’Éternel mon Dieu des holocaustes qui ne me coûtent rien » (2 Sam. 24, 24). En y regardant de près, ce « sacrifice » n’est pas si aisé peut-être, et le danger de l’« oublier » n’est-il pas grand aujourd’hui comme au temps des Hébreux ?

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« Tout vient de toi, et ce qui vient de ta main, nous te le donnons »
(1 Chron. 29, 14)

Si le Seigneur nous fait la grâce de présenter en quelque mesure ces « sacrifices » à Dieu, Lui aurons-nous « donné » quelque chose ? Non, sans doute. « Si j’avais faim, je ne te le dirais pas, car le monde est à moi et tout ce qu’il contient » (Ps. 50, 12). Jamais nous ne pourrons rendre au Seigneur ce qu’Il a fait pour nous. « Tout vient de toi », disait David au soir de sa carrière ; n’en est-il pas ainsi des « sacrifices » dont nous avons parlé ?

— La louange, qu’est-elle, sinon la présentation à Dieu des perfections de Christ ? Louer, ce n’est pas seulement remercier Dieu de ce qu’Il a fait pour nous, Lui dire notre reconnaissance pour « Son don inexprimable » [2 Cor. 9, 15]. C’est aussi et surtout, Lui parler de ce « don » lui-même, faire monter devant Lui le parfum de ce que le Seigneur Jésus a été dans Sa vie et dans Sa mort :

Quel encens rare et sans mélange,
T’offriraient les tiens en retour ?
Le parfum de notre louange
N’est-il pas Jésus ton amour ?
(H.R.)
Rien de nous-mêmes, tout de Lui.

— Nos corps ? « Vous n’êtes pas à vous-mêmes, car vous avez été achetés à prix » (1 Cor. 6, 19). « Présenter nos corps en sacrifice vivant » [Rom. 12, 1], ce n’est pas « donner » à Dieu ce qui ne lui appartenait pas auparavant ; c’est simplement permettre à Dieu, si nous pouvons le dire, de prendre possession de ce qui Lui appartient de droit par l’œuvre du Seigneur Jésus. Déjà comme créatures, nous sommes siens ; combien plus comme rachetés « par le sang précieux de Christ » [1 Pier. 1, 19] !

On a parfois pris l’exemple suivant pour faire comprendre la chose. Un homme achète une maison pour y habiter ; il la paye. Le transfert est inscrit au registre foncier ; il en est le légitime propriétaire. Mais les anciens habitants restent dans l’immeuble. Tant que ceux-ci refusent de partir, le nouveau propriétaire ne peut prendre possession de son bien. Ne pas « se livrer soi-même à Dieu », selon Romains 6, n’est pas exercer sa liberté propre de faire un sacrifice ou de ne pas le faire ; c’est frustrer Dieu de ce qui Lui appartient ; c’est agir comme les anciens habitants envers le nouveau propriétaire. Et pourtant, combien d’entre nous ne réalisent pas du tout ce « sacrifice », trouvant même à cela diverses excuses qui ont une apparence de vérité ! Faut-il s’étonner alors de notre « conformité à ce siècle » et de notre manque de discernement de « la volonté de Dieu » (Rom. 12, 2) ?

— Et quant à nos « biens », le Seigneur Jésus Lui-même nous a montré par la parabole de l’économe infidèle (Luc 16) qu’ils ne nous appartiennent pas. Il ne s’agit même pas, comme en Israël, de donner la dîme de ce que nous avons, mais d’administrer pour le Seigneur ce qui Lui appartient à Lui, et nous est confié pour un temps comme des « richesses injustes ». Sans doute « Dieu nous donne toutes choses richement pour en jouir » (1 Tim. 6, 17), et nous pouvons recevoir avec reconnaissance de Sa main tant de privilèges et de joies qu’Il sème sur notre route. Mais il n’en reste pas moins que « ce qui est requis dans des administrateurs, c’est qu’un homme soit trouvé fidèle » (1 Cor. 4, 2). Chacun aura pour lui-même à « rendre compte de son administration » (Luc 16, 2) ; c’est une affaire entre le serviteur et son Maître, mais elle vaut que nous y pensions sérieusement pour ce qui nous concerne chacun personnellement, sans pour cela nous « ingérer dans les affaires d’autrui » [1 Pier. 4, 15].

Encore une fois : « Tout vient de toi ». Si nous sommes pénétrés de cette vérité, alors l’amour du Seigneur pour nous sera le mobile des « sacrifices » que nous pourrons Lui présenter. Nous ne paraîtrons pas « à vide devant Sa face » [Ex. 23, 15], parce que nos mains et nos cœurs auront été remplis par l’excellence de cet « amour qui surpasse toute connaissance » [Éph. 3, 19].

N’avons-nous pas lieu de baisser la tête ?