« Une génération s’en va, et une génération vient… » (Eccl. 1, 4)

B. K.

Telle est la constatation que nous faisons tous, une fois ou l’autre. Un jour vient où ceux qui nous ont précédés, nos parents, nos grands-parents, ceux qui étaient là avant nous et nous ont accueillis dans ce monde, sont appelés à le quitter et à nous y laisser. Depuis que les hommes sont sur la terre, il en est ainsi : « une génération s’en va, et une génération vient… » [Eccl. 1, 4]. Et pour les aînés, qui ont connu la génération ancienne aujourd’hui disparue, et qui voient se lever une nouvelle génération, cette question se pose souvent : « Que sera la jeune génération ? ».

« Et le peuple servit l’Éternel tous les jours de Josué, et tous les jours des anciens dont les jours se prolongèrent après Josué, et qui avaient vu toute la grande œuvre de l’Éternel, qu’il avait faite pour Israël… Et toute cette génération fut aussi recueillie vers ses pères ; et après eux se leva une autre génération qui ne connaissait pas l’Éternel, ni l’œuvre qu’il avait faite pour Israël… Et ils abandonnèrent l’Éternel, le Dieu de leurs pères » (Jug. 2, 7-12).

N’y a-t-il pas, dans ce récit, un sérieux avertissement pour nous ? Nous pouvons en effet voir une certaine analogie entre le temps dont il est question dans ce passage, et celui dans lequel nous vivons. Au commencement du dix-neuvième siècle, Dieu a fait une grande œuvre parmi les siens, en remettant en lumière plusieurs vérités qui avaient été perdues de vue depuis le début de l’histoire de l’Église. Nous avons entendu parler de ces choses ; pour la plupart d’entre nous, nous appartenons à des familles chrétiennes, et ces vérités nous ont été enseignées dès notre jeune âge ; mais quelle réalité ont-elles pour notre cœur ?

Chaque génération a la même responsabilité quant au témoignage. Les pères ont enseigné à leurs enfants ce qu’ils avaient reçu ; à ceux-ci appartient maintenant la responsabilité de servir le Seigneur, de Lui rendre témoignage devant le monde, et, si le Seigneur tarde encore un peu, de transmettre fidèlement ce qu’ils ont reçu à ceux qui les suivront. « Une génération célébrera tes œuvres auprès de l’autre génération, et elles raconteront tes actes puissants » (Ps. 145, 4).

Mais, dira-t-on, pour les jeunes d’aujourd’hui, les temps sont difficiles, beaucoup plus difficiles à certains points de vue que pour leurs aînés. Oui, c’est vrai — d’abord à cause de l’indifférence et de l’incrédulité environnantes ; mais aussi parce que les barrières qui séparent les enfants de Dieu du monde sont moins fermement maintenues qu’autrefois, et tendent même à disparaître complètement. « La borne ancienne » [Prov. 22, 28] que les pères avaient faite, a été reculée, et il est beaucoup plus difficile maintenant de la rétablir en sa place primitive. Peu à peu aussi, nous voyons partir tous ces anciens, ces conducteurs si richement doués pour l’enseignement et l’édification, et ils ne sont pas remplacés. Faut-il donc nous laisser aller au découragement ? Non ; et le récit de ce qui se passa après la mort de Josué nous a été donné, non pas pour nous décourager, mais « pour nous servir d’avertissement, à nous que les fins des siècles ont atteints » [1 Cor. 10, 11].

Si les Israélites abandonnèrent l’Éternel, le Dieu de leurs pères, c’est parce qu’ils « ne connaissaient pas l’Éternel, ni l’œuvre qu’il avait faite pour Israël ». Nos pères avaient vu cette grande œuvre de Dieu, et avaient eu à combattre pour défendre ces vérités que nous connaissons souvent, hélas ! plus par l’intelligence que par le cœur. Ils s’étaient résolument séparés du monde qui les entourait pour marcher à part, comme un peuple céleste ; et cette position de séparation ne leur avait pas coûté, parce qu’ils connaissaient le Seigneur, et que leur cœur était attaché à Lui.

Ah ! voilà le point important. Connaître le Seigneur et Son œuvre, ce n’est pas seulement avoir entendu parler dès l’enfance des vérités enseignées dans la Parole de Dieu ; ce n’est pas avoir suivi les réunions, assisté à la lecture en famille ; c’est avoir eu à faire personnellement avec Christ, et avoir le cœur attaché à Lui. Et lorsque nous sommes tentés de nous décourager, en voyant tout changer autour de nous, la ressource n’est-elle pas précisément de nous attacher à Celui qui est immuable ? « Ils seront changés ; mais toi, tu es le même, et tes ans ne cesseront point » [Héb. 1, 12]. « Jésus Christ est le même, hier, et aujourd’hui, et éternellement » [Héb. 13, 8]. Voilà le fondement inébranlable sur lequel nous pouvons nous appuyer, Lui, « le Rocher des siècles » [És. 26, 4]. Les anciens du temps de Josué avaient connu l’Éternel ; nos pères ont su ce que c’était que « Le connaître, Lui » [Phil. 3, 10] ; et pour nous encore, il n’y a pas d’autre secret pour marcher dans ce monde d’une manière qui L’honore, que d’apprendre à connaître personnellement le Seigneur.

Cette génération qui se lève est bien probablement la dernière qui soit appelée à rendre témoignage au Seigneur avant Son retour. Tout nous montre que la fin est proche, et Celui qui a dit : « Oui, je viens bientôt » [Apoc. 22, 20], ne tardera pas à remplir Sa promesse. Lorsque ce jour arrivera, le Seigneur trouvera-t-Il une génération qui L’attend, une génération occupée à Le servir et à Lui rendre un témoignage fidèle ? Ah ! Dieu veuille qu’elle ne soit pas comme celle qui a suivi Josué, mais que chacun de ceux qui la composent recherche la présence du Seigneur pour lui-même, et « demeure attaché à Lui de tout son cœur » [Act. 11, 23].