Vocation

G. André
« Par la foi, Abraham, étant appelé, obéit… et il s’en alla, ne sachant où il allait »
Héb. 11, 8

Un jour dont il ne nous est rien dit — Genèse 12, 1 en parle déjà comme d’une chose passée — l’Éternel avait appelé Abraham. Mystère des relations étroites de l’âme avec son Dieu, moments sacrés « trop merveilleux » pour les sonder, où la foi, ayant entendu l’appel, répond par l’obéissance. Obéissance intérieure qui s’attache à une personne dorénavant connue, à un Sauveur vivant qui nous a rachetés de la mort éternelle, à un ami avec lequel on parlera souvent le long de la route. Obéissance extérieure, si l’on peut dire, qui va se montrer dans toute la vie, dans toute la marche.

« Il s’en alla ». Il a quitté le pays de ses pères idolâtres, il est sorti d’un milieu corrompu où désormais sa part n’est plus ; il est en route vers une nouvelle patrie. Celui qui a répondu à l’appel, désormais est « en chemin ».

Il a un but devant lui. Il ne l’a pas encore atteint. Quoiqu’il ait quitté « son pays et sa parenté », le monde et ses vanités, il aura tout le long de la route besoin de vigilance et d’énergie pour « rejeter tout fardeau et le péché qui nous enveloppe si aisément » [Héb. 12, 1]. Il aura souvent à « s’étudier à affermir son appel et son élection » (2 Pier. 1, 10). Mais la voix divine qui un jour a dit : « Viens », résonnera quotidiennement dans son cœur et, s’il sait « faire silence », il pourra apprendre de Celui qui parle et ainsi montrer chaque jour davantage dans toute sa manière d’être qu’il « recherche une patrie » [Héb. 11, 14].

Mais si la voix appelle pour le salut, elle appelle aussi pour le service. « Qui enverrai-je, et qui ira pour nous ? » (És. 6, 8). Pourquoi si peu de réponses ? Pourquoi parmi la jeunesse tant de vies stériles, égoïstes, où le dévouement aux intérêts du Seigneur et des siens est si rare ? Beaucoup de « métiers », peu de « vocations », pour parler notre langage. Qui dit « vocation », dit appel intérieur, appel de Dieu à un service, humble et caché souvent, auquel on a répondu du cœur, mettant à la disposition du Seigneur ce que nous sommes et ce que nous avons : « Livrez-vous vous-mêmes à Dieu, comme d’entre les morts étant faits vivants, et vos membres à Dieu, comme instruments de justice » (Rom. 6, 13). Si nous sommes d’abord ainsi prêts intérieurement, dans l’oubli de nous-mêmes, à répondre : « Me voici, envoie-moi », à l’appel du Seigneur pour le service de Son choix, alors Il pourra dire : « Va » (És. 6, 9).

Une sœur en Christ — à laquelle nous devons laisser la responsabilité des pensées qu’elle exprime — nous écrivait récemment à peu près ceci :

« Il est une vocation, dite « de la charité », qui embrasse toutes les vertus chrétiennes et qui malheureusement est peu connue dans sa beauté et sa grandeur par la jeunesse actuelle. C’est celle de l’infirmier, de l’infirmière. Il est triste de constater parmi nous le peu de vocations nées. Pourquoi les écoles d’infirmières ou institutions hospitalières doivent-elles adresser tant d’appels pour le recrutement de leur personnel ? N’est-ce pas parce que trop de jeunes, cherchant leur propre intérêt, ne sont pas disposés à répondre à l’appel de Dieu ? On dira : Je n’ai pas la santé. « Va avec cette force que tu as » [Jug. 6, 14]. Ce qu’on met à Sa disposition, Jésus le redonne au double. Ne doutez pas de Sa puissance. Une force physique moyenne, de même qu’une intelligence moyenne, amènera à rester dans une dépendance plus complète de Dieu, et gardera dans l’humilité[1].

Au reste, on parle souvent des fatigues de l’infirmière, mais les fatigues d’une mère de famille n’ayant pas toujours ses bonnes nuits, ne sont-elles pas les mêmes ou plus grandes ?

Qu’il est beau de s’approcher des âmes dans la souffrance, morale autant que physique, et d’essayer d’être pour elles dans une faible mesure le porte-parole de Jésus Christ. Et si l’on doit beaucoup donner, on reçoit aussi beaucoup. Que de leçons de patience nous pouvons quelquefois puiser chez nos malades. »

Tous ne sont sans doute pas appelés à être infirmiers ou infirmières. Celui qui, ému de compassion, se penchait sur les malades et les souffrants, doit pourtant apprécier particulièrement leur dévouement et leur service. Mais dans toute « carrière » — et pourquoi pas en tout premier lieu dans celle de mère de famille ? — n’y a-t-il pas l’occasion de répondre à la voix qui dit : « Va », et sers-moi dans ceux que je t’ai confiés ou auprès desquels je t’envoie : enfants et vieillards de nos foyers, malades, écoliers, ouvriers, collègues, âmes qui vont se perdant dans le vide ou l’ignorance. Il y a certes des « vocations » où les occasions de dévouement humble sont plus fréquentes que dans d’autres, mais là où Il nous a placés, chacun « dans la vocation dans laquelle il a été appelé » (1 Cor. 7, 20), qu’Il nous accorde d’écouter Sa voix, et unis de cœur chaque jour à Celui qui est vivant, de « porter du fruit » qui demeure. « Ainsi l’entrée dans le royaume éternel de notre Seigneur et Sauveur Jésus Christ vous sera richement donnée » (2 Pier. 1, 11).