C’est une chose précieuse, quoique effrayante aussi dans un sens (effrayante toujours pour la chair), que de savoir que nous « avons affaire à Dieu » (v. 13) ; et pourtant il n’y a rien que nous oubliions aussi facilement, ou que nous perdions de vue aussi vite. La tendance naturelle de nos cœurs est de fuir la présence de Dieu, de la haïr et de la craindre, comme l’enfant rebelle, qui fuit la présence du père dont il ne veut pas rencontrer le regard. C’est à Dieu que nous « avons affaire », toujours, à chaque instant, dans chaque détail de notre vie. Ceux qui regardent habituellement à des causes secondes, sont entraînés à une infidélité pratique, et, en quelque mesure, il en est de même chez les enfants de Dieu. Si nous nous arrêtons aux circonstances, nous perdons de vue le sentiment « d’avoir affaire » à Dieu, car, que ce soit pour la bénédiction ou pour le profit de notre conscience, toujours est-il que c’est à Dieu que nous « avons affaire ».
Si nous cherchons le bonheur, où le trouverons-nous ? Où trouverons-nous une félicité que rien n’altère ou n’empêche, que rien ne peut détruire, si ce n’est en Dieu ? Il n’est pas seulement la source du bonheur, Il est le bonheur même. Les enfants de Dieu rencontrent, il est vrai, sur leur route, bien des bénédictions extérieures, et les inconvertis aussi en peuvent trouver, mais pour le chrétien, la force, la sécurité et la joie sont en ce qu’il « a affaire » à Dieu. Dieu est la source et le centre de ce qui le rend heureux.
Une fois que nous en sommes réellement venus à connaître Dieu, nous Le connaissons comme étant amour, et alors, quoique nous soyons dans le désert, n’importe où et quelles que soient les circonstances, sachant que toutes choses nous viennent de Dieu, nous interprétons tout par Son amour. Je puis être appelé à passer par la souffrance, l’affliction, l’épreuve, comme formant une partie de la discipline de Dieu, mais tout ce qui vient de Lui découle d’une source et d’une origine dans lesquelles j’ai confiance : je regarde à Lui à travers tout, et rien ne peut me séparer de Son amour [Rom. 8, 38-39]. Là où Dieu est peu connu, et où il n’y a par conséquent aucune confiance en Lui, on s’en prendra aux circonstances, et il y aura murmure et même révolte, et dans ce cas la conscience « d’avoir affaire » à Dieu, inspirera plus de terreur que de joie. L’apôtre Jean dit : « Nous avons connu et cru l’amour que Dieu a pour nous. Dieu est amour, et celui qui demeure dans l’amour, demeure en Dieu et Dieu en lui » (1 Jean 4, 16).
N’est-il pas vrai que, pratiquement, nous nous arrêtons bien souvent aux circonstances, et que nous les considérons selon notre appréciation particulière et notre propre jugement ? — Eh bien ! ceci est une preuve que nous ne vivons pas dans une pleine communion avec Dieu. Ce qui devrait nous occuper, ce ne sont pas les circonstances, mais ce que Dieu a en vue par leur moyen. La conscience aussi doit être exercée, car il est également vrai que, dans notre conscience, nous « avons affaire » à Dieu. Cela nous est d’un grand profit, quoique cela ne soit pas agréable. « Toutes choses sont nues et entièrement découvertes aux yeux de Celui à qui nous avons affaire » (v. 13) ; et après tout, chers amis, n’est-ce pas une bien grande faveur, que de savoir que rien n’échappe soit à la main, soit au regard de Dieu ? Quelle tranquillité n’y a-t-il pas dans l’assurance que Dieu discerne chaque pensée de notre cœur, qui pourrait L’empêcher de nous bénir, ou qui affaiblirait notre communion avec Lui ? Il pourrait y avoir quelque mal secret, agissant en nous (une de ces dix mille choses qui, tolérées, rendraient toute jouissance de Dieu impossible), et nous pourrions ne pas nous en douter ; eh bien ! Dieu fait naître alors une circonstance qui nous fait voir le mal, afin qu’il puisse être ôté. Cela n’est-il pas une grande grâce ? La circonstance ne crée pas le mal qu’elle manifeste, elle ne fait qu’agir sur ce qu’il y a dans le cœur et le mettre au jour. « Ayant affaire » à Dieu, Il nous donne d’apercevoir en nous un mal dont nous n’avions aucune idée, et dont nous ignorions l’existence. Dieu découvre « les pensées et les intentions du cœur » (v. 12) ; Il n’aurait aucun repos s’Il laissait en nous quoi que ce fût, qui pût mettre obstacle à notre amour, et à notre confiance en Lui, troubler notre paix et notre tranquillité. Mais le mal une fois mis à découvert, les circonstances sont perdues de vue, et le dessein de Dieu demeure seul en évidence.
Le cœur de l’homme cherche naturellement le repos, et le cherche ici-bas, tandis que, pour le chrétien, il n’y a pas de repos ici-bas ; mais il est écrit : « Il reste donc un repos pour le peuple de Dieu » (v. 9). Ces paroles sont à la fois une source de tristesse et une source de joie ; — de tristesse pour la chair, parce que la chair, cherchant toujours son repos sur cette terre, est destinée à être toujours déçue ; — de joie pour l’esprit, parce que l’esprit, étant né de Dieu, ne trouve son repos que dans le repos de Dieu Lui-même, ainsi qu’il est dit : « s’ils entrent dans mon repos » (v. 3, 5). Dieu ne peut pas trouver Son repos dans la corruption du péché ; Il ne le trouve que dans ce qui est parfaitement saint, et par la raison que Celui qui trouve ainsi Son repos, est amour et nous aime, Il nous fait comprendre qu’Il veut nous introduire dans Son propre repos, dans Son propre bonheur.
Une fois que l’âme a compris quel est ce repos de Dieu, que le cœur s’y est attaché, il y a une joie inexprimable à penser que l’amour de Dieu ne peut être satisfait, avant de nous avoir amenés dans un même repos avec Lui ; et la conviction est là en même temps, que pour nous, il n’y a pas de repos ailleurs. Sans doute nous rencontrons quelques jouissances le long du chemin, mais du moment que nous nous y arrêtons, elles se changent, comme les cailles pour le peuple d’Israël, en poison (Nomb. 11).
Lorsque nous perdons, pratiquement, la conscience que notre repos se trouve dans le repos de Dieu, et que nos regards se détournent de ce qui « demeure », nous nous mettons à chercher du repos ici-bas, et par suite il y a du malaise, du trouble, du mécontentement. Toutes les fois que nous rencontrons une chose à laquelle nous sommes portés à nous attacher, cette chose même devient une source de difficultés et de lutte, d’exercice et de fatigue pour le cœur. Dieu nous aime trop pour nous laisser nous reposer ici-bas.
Et vous, cher lecteur, ne cherchez-vous votre repos nulle autre part que dans le repos de Dieu Lui-même ?
Quel est le secret du malheur et de l’inquiétude de tant de chrétiens ? C’est qu’ils s’efforcent de trouver le repos ici-bas, et par suite, Dieu est obligé de discipliner et d’exercer leurs âmes, de permettre qu’une circonstance, peut-être, vienne entamer ce en quoi la volonté propre est intéressée, et découvre ainsi l’état réel du cœur. Les circonstances ne nous troubleraient pas, si elles ne rencontraient rien en nous qui s’oppose à Dieu ; elles ne feraient que nous effleurer comme un vent léger. Dieu s’occupe en nous de ce qui entrave la communion et empêche que nous cherchions notre repos en Lui seul. La discipline est l’exercice continuel et infatigable de l’amour, qui ne prend aucun repos, afin de nous introduire dans le repos même de Dieu. Si Dieu détruit notre repos ici-bas, s’Il change notre viande en poison, ce n’est qu’afin de nous faire entrer dans Son repos à Lui, afin de nous donner ce qui répond à Ses désirs, non pas aux nôtres. Dieu se reposera dans Son amour [Soph. 3, 17].
« Car celui qui est entré dans son repos, celui-là s’est reposé de ses œuvres, comme Dieu s’est reposé des siennes propres » (v. 10). Il ne s’agit pas ici de justification ou de paix de la conscience quant au jugement : ceci est une affaire accomplie. « Comme par la désobéissance d’un seul homme, plusieurs ont été constitués pécheurs, ainsi aussi par l’obéissance d’un seul, plusieurs seront constitués justes » (Rom. 5, 19). C’est en cela qu’est notre repos, et qu’est le repos de Dieu. Et encore : « car par une seule offrande, Il a rendu parfaits à perpétuité ceux qui sont sanctifiés » (Héb. 10, 14). Sous ce rapport, le croyant s’est déjà entièrement reposé de ses œuvres. Il a la paix par le sang de Christ. — La question concerne ceux qui sont justifiés, que Dieu a introduits dans Sa famille, et qu’Il enseigne et prépare pour une plus entière jouissance de Sa propre félicité. Si moi, comme père, je jouis d’une chose, il est impossible, si j’aime réellement mon enfant, que je ne désire pas qu’il jouisse de cette chose avec moi. Si donc nous qui sommes méchants agissons ainsi, combien plus notre Père qui est dans le ciel ! Ce que Dieu désire pour nous, ainsi que nous l’avons vu (et ce sont là Ses délices), c’est de nous faire jouir de tout ce dont Il jouit Lui-même. Il nous a rendus participants de la nouvelle nature, afin que nous jouissions de cette nature. Les Hébreux avaient une tendance constante à retomber dans la recherche d’un repos terrestre, en un mot, à ne pas vivre par la foi, et nous voyons que le sujet sur lequel l’apôtre insiste principalement, c’est que le repos de Dieu n’est pas sur la terre, et que Dieu ne peut trouver Son repos, tant que l’exercice de Son amour est entravé. Ceci nous est démontré par différents passages, voyez les versets 3-8.
Quant à la condition même des Hébreux, quoique l’apôtre dise : « nous qui avons cru, nous entrons dans le repos » (v. 3), il n’était pas nécessaire de leur prouver, non plus qu’à nous quant à nous-mêmes, qu’ils n’étaient pas dans le repos. Il nous est dit qu’ils enduraient un grand combat de souffrances, qu’ils étaient offerts en spectacle par des épreuves et des afflictions, et qu’ils s’associaient à ceux qui étaient ainsi traités [10, 32-33]. Les circonstances étaient donc encore de nature à ce qu’on pût leur dire : « Vous avez besoin de patience, afin qu’ayant fait la volonté de Dieu, vous receviez les choses promises » (Héb. 10, 36). — Les exhortations : « Craignons donc » (v. 1), et « appliquons-nous donc » (v. 11), ne s’accordent nullement avec un état de repos.
Il peut sembler étrange qu’à un moment nous soyons exhortés à une confiance implicite dans l’amour et la fidélité de Dieu, tandis qu’à l’autre il nous soit dit : « craignons donc qu’une promesse nous ayant été laissée d’entrer dans son repos, quelqu’un d’entre vous ne paraisse pas l’atteindre » (v. 1). C’est que Dieu ne cesse jamais de nous avertir, pour que la responsabilité envers Lui-même ne soit pas perdue de vue pendant que nous nous avançons vers le repos. S’il avait été question de justification, il aurait été dit : « ne craignez point », « ne vous appliquez point », car Christ a tout accompli pour vous. « À celui qui fait les œuvres, le salaire n’est pas compté comme une grâce, mais comme une chose due » (Rom. 4, 4). « La crainte » et « l’application » dont nous parlons, ne commencent que lorsque la question de la justification a été résolue, et résolue pour toujours ; et il nous est enseigné qu’elles sont la conséquence de ce que nous « avons affaire » à Dieu. C’est parce que nous avons une entière confiance dans l’amour de Dieu et que nous connaissons la valeur du repos de Dieu, que nous craignons tout ; non pas seulement les tentations et les embûches du chemin, mais toute œuvre quelconque de la chair, qui pourrait se mettre entre nous et Dieu. Le bonheur nous est assuré au terme de notre course : il est « conservé », nous est-il dit, « dans les cieux pour nous » (1 Pier. 1, 4) ; mais la conscience parle ainsi : « Comment ferais-je un si grand mal et pécherais-je contre Dieu ? » (Gen. 39, 9) ! C’est par la foi, que nous sommes « gardés par la puissance de Dieu pour un salut qui est prêt à être révélé aux derniers temps » (1 Pier. 1, 5). La foi réalise la présence de Dieu. Il y a donc cette sainte frayeur ; — nous nous conduisons « avec crainte durant le temps de notre séjour ici-bas » (1 Pier. 1, 17).
Paul, en écrivant aux Philippiens, dit : « Frères, pour moi je ne pense pas moi-même l’avoir saisi ; mais je fais une chose : oubliant les choses qui sont derrière, et tendant avec effort à celles qui sont devant, je cours droit au but, pour le prix de l’appel céleste de Dieu dans le christ Jésus » ; et encore : « si en quelque manière que ce soit, je puis parvenir à la résurrection d’entre les morts » (Phil. 3, 13, 11). Était-ce parce que Paul ne voyait pas la certitude du but ? Nullement ; mais il voyait le chemin aussi bien que le but, en même temps que toutes les difficultés de la route. Paul craignait beaucoup tout ce qui pouvait le distraire dans sa course, ou l’entraîner pour un moment en arrière (la chair, quand elle est écoutée, produit toujours cet effet), et il ajoute : « Soyez tous ensemble mes imitateurs, frères, et portez vos regards sur ceux qui marchent ainsi suivant le modèle que vous avez en nous. Car plusieurs marchent, dont je vous ai dit souvent et dont maintenant je le dis même en pleurant, qu’ils sont ennemis de la croix du Christ, dont la fin est la perdition, dont le dieu est le ventre et dont la gloire est dans leur honte, qui ont leurs pensées aux choses terrestres » (Phil. 3, 17-19).
Cette sainte frayeur étant en nous, et la promesse qui nous est donnée étant celle d’entrer dans le repos de Dieu, nous savons où aboutit la route ; mais nous nous « appliquons » par conséquent « à entrer dans ce repos-là, afin que personne ne tombe en imitant une semblable incrédulité » (v. 11). La grâce préviendra ce résultat ; mais pour celui qui n’est chrétien que de nom, c’est à cela que la chair — l’œuvre de la volonté propre — doit infailliblement le conduire.
La « crainte » est le témoignage le plus vrai de la réalité de la vie chrétienne. Un incrédule n’a, à proprement parler, aucune frayeur de Satan ; mais, s’il n’est pas complètement endurci, il aura une grande frayeur de Dieu. L’enfant de Dieu n’a aucune frayeur de Dieu, tandis qu’au contraire il craint beaucoup Satan. Jésus, en parlant de Ses brebis, dit : « Elles ne suivront pas un étranger, mais elles s’enfuiront loin de lui ; parce qu’elles ne connaissent pas la voix des étrangers » (Jean 10, 5). Elles se méfient de tout, sauf de la voix bien connue de leur propre berger (Jean 10, 27) ; et par-dessus tout, elles ont peur du loup, sachant qu’elles sont faibles. Nous avons à veiller contre tout ce qui obscurcirait notre vue de la gloire, ou rendrait notre œil moins simple quant à Dieu, quelque précieux ou quelque digne d’estime que cela pût nous paraître, car nous serions rapidement entraînés loin de Dieu. Là où l’œil est simple, tout le corps est plein de lumière, et par suite, le moindre mal est découvert, ainsi que le moindre obstacle à ce que nos affections soient fixées, simplement et sans partage, sur Dieu seul.
Ce n’est donc pas que nous ayons quelque incertitude quant à l’amour de Dieu, mais c’est parce que nous sommes certains d’être dans le désert, que nous devons « craindre » et nous « appliquer ». Le chrétien sait que cette terre est « déserte, altérée et sans eau » [Ps. 63, 1] — mais dès qu’il se trouve en la présence de Dieu, son âme est nourrie comme de moelle et de graisse, et il lui est donné de se désaltérer au fleuve des délices de Dieu. La délivrance hors du pays d’Égypte nous conduit dans le désert, et si nous n’y avons pas Dieu, nous n’y avons rien. Il n’y a rien dans ce monde si vaste, ni dans ce qui est de ce monde, qui puisse satisfaire le nouvel homme, comme il n’y a rien dans le ciel qui puisse satisfaire l’homme inconverti. Si nous perdons de vue l’œil et la main de Dieu, il ne nous reste que notre propre esprit insensé et autour de nous les sables du désert. — On peut dire à un chrétien : Le repos sera doux à la fin ! — Ah ! répondra-t-il, il ne me suffit pas de savoir que bientôt je serai avec Dieu, j’ai mon repos en Lui déjà maintenant, je connais Dieu maintenant, je jouis de Sa présence maintenant ; je ne puis être satisfait si je n’ai pas Dieu comme ma portion présente, et je crains extrêmement tout ce qui pourrait s’interposer entre Lui et moi ! Le regard étant fixé sur Dieu et l’âme se reposant en Lui, ce n’est pas seulement le but, ce sont aussi les voies qui occupent le cœur, et qui deviennent les moyens de communication avec Dieu.
Tout nous dit, chers amis, que notre repos n’est pas ici-bas. Ce n’est pas le repos que de craindre, parce qu’on est dans le désert avec un cœur prompt à abandonner Dieu. Ce n’est pas le repos que d’avoir à combattre Satan. Le travail n’est pas le repos. « Il reste donc un repos pour le peuple de Dieu » (v. 9).
Il y a, de plus, l’activité et la diligence du nouvel homme dans sa sphère propre, et il est d’une grande importance que nous nous employions avec ardeur à ce qui forme notre part à nous. L’Église a besoin de savoir qu’elle a sa part à elle, son propre champ de travail. « Il y a beaucoup à manger dans le défrichement des pauvres, mais il y a ce qui se perd faute de règle » (Prov. 13, 23). Lorsque nous sommes pauvres en esprit et que nous nous « appliquons » à entrer dans le repos de Dieu, nous découvrons, dans les richesses de Christ, une réalité dont bien des chrétiens n’ont aucune idée. N’avons-nous pas une sphère de travail dans laquelle notre vie soit intéressée ? Les hommes de ce monde ont leurs intérêts propres qu’ils poursuivent et qui les occupent, et la vie de Dieu en nous n’a-t-elle pas des ressources qui la consolident, pas de richesses en Christ dont elle puisse se nourrir ? Sans doute. « Nous avons un autel dont ceux qui servent le tabernacle n’ont pas le droit de manger » (Héb. 13, 10). Nous avons devant nous une carrière, dans laquelle la vie divine qui nous est communiquée trouve à exercer les facultés qui lui appartiennent, et rencontre les ressources qui lui sont nécessaires. — L’Église a ses jouissances propres, ses intérêts, ses richesses, sa sphère d’existence et d’affections ; elle a ses propres motifs ; en un mot, elle a son monde à elle, dans lequel il y a du fruit pour Dieu. — Et vous, cher lecteur, avez-vous la conscience de posséder cette part particulière, et trouvez-vous votre bonheur à sonder les richesses de Christ et les témoignages de la bonté de Dieu qu’elle renferme ? Tout ce que nous avons reçu jusqu’à présent, ne nous est donné que pour que nous obtenions davantage encore, et n’est qu’un moyen de parvenir à ces trésors dont on ne peut sonder l’immensité.
Le saint travail de rechercher les richesses qui sont en Christ, nous garde dans le sentiment vivant de tout ce que nous avons en Lui, et par conséquent rend nulles toutes les autres choses. En ayant le cœur attaché à Christ, nous serons capables de résister à la tentation et au péché, car ce n’est pas en pensant à ce qui nous est un sujet de tentation que nous aurons de la force contre elle ; ce n’est pas en permettant à notre esprit de s’y arrêter, quand même ce serait en nous efforçant de combattre. Notre privilège, c’est d’être occupés de Christ et c’est ainsi que nous serons victorieux. Notre liberté consiste à n’être jamais, et plus jamais, esclaves du péché ; c’est une délivrance par laquelle nous sommes capables de servir Dieu, sans obstacle de la part de la chair. Nous n’avons pas besoin de liberté pour la chair, mais de liberté pour le nouvel homme, afin de faire la volonté de notre Père. Si quelque chose avait pu ôter la liberté au Seigneur Jésus, lorsqu’Il était sur la terre (ce qui naturellement était impossible), cela n’aurait pu consister qu’à L’empêcher de faire la volonté de Son Père.
Parler de « crainte » et « d’application », ne semble pas peut-être mentionner un privilège, pourtant c’en est un bien réellement ; et parce que nous manquons si fréquemment dans ces choses, c’est encore un privilège précieux de savoir que Dieu sonde le cœur et agit envers la conscience, et que « toutes choses sont nues et entièrement découvertes aux yeux de celui à qui nous avons affaire » (v. 13). — Si nous ne nous jugeons pas nous-mêmes, Dieu nous jugera, mais « quand nous sommes jugés, nous sommes châtiés par le Seigneur, afin que nous ne soyons pas condamnés avec le monde » (1 Cor. 11, 32).
N’est-ce donc pas une source de tranquillité pour un cœur réellement affectionné à la sainteté, de savoir que Dieu viendra et balayera la maison, pour que rien ne reste qui puisse offenser Ses regards, ou nous empêcher de marcher dans la lumière dans laquelle Il demeure ? La grâce enhardit le saint de l’ancienne alliance jusqu’à dire : « Sonde-moi, ô Dieu ! et connais mon cœur ; éprouve-moi, et connais mes pensées, et regarde s’il y a en moi quelque voie de chagrin, et conduis-moi dans la voie éternelle » (Ps. 139, 23-24) ! Quelle confiance merveilleuse ! et Dieu nous sonde en effet par le moyen de Sa Parole. Il nous montre le mal par Sa Parole. Tel est l’usage que l’Esprit en fait. « Car la Parole de Dieu est vivante et opérante, et plus pénétrante qu’aucune épée à deux tranchants, atteignant jusqu’à la division de l’âme et de l’esprit, des jointures et des moelles, et jugeant des pensées et des intentions du cœur » (v. 12).
Nous sommes amenés dans la présence de Dieu ; Dieu en un mot nous parle. Il sonde nos cœurs, même dans les témoignages les plus doux de Sa grâce, et puis, quand Il a mis à nu le mal, nous en parle-t-Il en jugement, comme devant nous être imputé comme péché ? Non ; Il dit : Il y a ici quelque chose qui ne s’accorde pas avec mon amour, qui ne le satisfait pas.
Si nous avons négligé de nous juger par la Parole, la discipline peut être devenue nécessaire pour nous rappeler à nous-mêmes ; toutefois il est doux et rassurant d’avoir affaire à Dieu. Peut-être avons-nous cherché notre repos ici-bas ; peut-être avons-nous fini par nous y établir, trouvant une patrie dans le désert ; — alors Dieu agit pour nous détacher, nous déraciner ; — à moins qu’Il ne juge bon de nous abandonner à nous-mêmes pour un temps, afin que nos chutes réitérées réveillent notre conscience assoupie. Et quand une chose nous met dans la perplexité et nous éprouve, disons-nous : c’est à Dieu que j’ai affaire, que veut-Il de moi ? Dès que le cœur est amené dans la présence de Dieu, tout est dit : il y a soumission. L’âme se trouve en communion avec Dieu au sujet de la difficulté même, et tout est paix.
Ce n’est pas le repos que d’être sondé et éprouvé ; c’est que le repos, Dieu en soit béni, n’est pas ce qui nous attend sur la terre. La sainteté de Dieu ne permet pas que nous trouvions notre repos là où il y a du péché, comme Son amour ne veut pas que nous le trouvions là où il y a de l’affliction. Il nous « reste un repos », le repos de Dieu Lui-même. Dans le repos de Dieu il n’y aura ni péché, ni angoisse, ni souffrance d’aucune nature ; Dieu Lui-même sera là, et nous nous reposerons en Lui. Si seulement nous connaissions un peu plus le bonheur qu’il y a à s’abreuver à la plénitude de l’amour de Dieu, les circonstances présentes nous seraient comme rien ! Oui, si nous entrions davantage dans les desseins de Dieu à notre égard, nous dirions : qu’Il agisse envers nous, qu’Il nous châtie, qu’Il déracine nos cœurs autant qu’Il le veut, mais que seulement nous soyons dans une entière communion avec Lui !
Ah ! ne nous contentons pas d’une mesure chétive, de jouissances chétives, de n’être qu’un peu béni ; mais hâtons-nous en avant, que nos yeux soient fixés droit devant nous, et cherchons, par la puissance de l’Esprit, à réaliser tout ce qui est à nous en Jésus.