Philippiens 3

Il est important de comprendre le caractère particulier de cette épître. Elle nous présente la marche d’un homme céleste ici-bas à travers le monde ; elle nous dit quels devraient être le caractère et la marche d’un homme qui n’est pas de ce monde et qui est en esprit dans le ciel, bien que, quant à son corps, il soit encore sur la terre. Dans l’épître aux Romains, chapitre 8, nous voyons la position de l’homme nouveau, le fondement sur lequel il est établi ; ici nous apprenons quelle est la marche qui convient à un tel homme.

La Parole de Dieu — et cela est d’un grand prix pour nous — nous fait non seulement connaître comment un homme doit marcher, mais elle nous montre cette marche réalisée en Paul pratiquement dans toute son histoire ; elle nous montre un homme qui traverse le monde, en étant supérieur à tout ce qui s’y trouve.

Nous sommes, ici-bas, environnés de toutes sortes d’obstacles, il n’y a rien autour de nous qui puisse profiter à l’homme nouveau ; — tout, au contraire, sert notre vieil homme, et trouve de l’écho dans notre vieille nature. Il importe donc que nous connaissions la puissance par laquelle nous pouvons marcher au milieu d’un tel monde en étant supérieurs à tout ce qui nous entoure. Tout devant nos pas est fait pour nous détourner ou nous arrêter, et il n’y a rien qui réponde aux besoins de nos âmes ; mais si je suis un homme céleste, c’est du ciel que je suis soutenu ; le ciel doit être mon point de départ. Vous tenez-vous pour un homme céleste ? « Tel qu’est le céleste, tels aussi sont les célestes », et « tel qu’est celui qui est poussière, tels aussi sont ceux qui sont poussière » (1 Cor. 15, 48). Si j’appartiens à Christ, je suis céleste. La question de savoir si je manifeste ce caractère est une autre chose. Mais si nous avons pour point de départ le fait que nous sommes célestes, il faut que nous laissions le monde derrière nous. Les chrétiens sont si attachés à ce misérable monde ! Ils aiment à se placer dans la même position que les saints de l’Ancien Testament, afin de jouir du monde à leur gré. Les saints de l’Ancien Testament vivaient sur la terre et comptaient sur les ressources de la terre ; mais Christ a été ici-bas, et Il a été rejeté de la terre et est allé au ciel ; tout, ainsi, est changé désormais. Puisse la conscience de chacun de nous en être profondément pénétrée. Celui auquel nous devons tout a été rejeté de ce monde : comment donc, nous qui Lui devons tout, trouverions-nous notre repos, nos plaisirs, nos intérêts dans un lieu d’où Il a été rejeté, là où Lui, le Fils de Dieu, a été mis à mort ! Tout Lui appartenait, mais on Lui a refusé Sa place ici-bas : les hommes ont préféré un meurtrier au Fils de Dieu. Ils Lui ont donné une crèche à Sa naissance, une croix entre deux brigands à Sa mort.

Le chapitre 7 du livre des Actes nous présente l’inauguration du christianisme : Étienne, par le Saint Esprit, regarde fixement en haut, non plus en bas sur la terre. Le Saint Esprit dirige toujours le regard en haut vers le ciel. Étienne voit la gloire de Dieu, et Jésus à la droite de Dieu : son chez-lui est là où est son Sauveur. Il voit Jésus dans les cieux ouverts, Jésus à qui il est uni. Ici, dans l’épître aux Philippiens, nous voyons l’effet produit par le fait que le regard est arrêté sur Christ. Ce n’est pas simplement que Paul eût trouvé le pardon, et la paix de la conscience ; mais, du moment qu’il avait vu Jésus dans la gloire, il avait été délivré de toutes choses ici-bas. Il est la contrepartie du brigand sur la croix (Luc 23, 40-43). On peut penser en effet que, pour un homme condamné à mort pour ses crimes, c’était un bienheureux changement de s’en aller dans le paradis ; et nous ne savons pas quel homme il aurait été, s’il eût continué à vivre dans ce monde. En Paul, au contraire, nous voyons un homme qui possédait tout ce qui pouvait faire contraste avec le brigand : il avait tout ce qu’on peut désirer ici-bas pour le retenir dans le monde, mais il estima tout cela « comme une perte ». Nul autre que lui n’aurait pu produire autant de titres à se glorifier dans la chair ; il possédait tous les privilèges de la naissance ; il était personnellement religieux ; il était le plus strict observateur de la tradition de ses pères ; il haïssait Jésus glorifié et était un persécuteur acharné de Ses saints sur la terre. Mais tout ce que l’homme dans la chair tenait pour un bien, il l’estima comme une perte à cause de Christ. Qu’est-ce qui a opéré ce changement radical ? La méchanceté de Saul dépassait celle de tout autre. Il avait voulu contraindre ceux qui aimaient le plus Jésus à blasphémer Son nom ! Et maintenant, ce même homme déclare que ce Jésus est tout pour lui. Il a vu le Seigneur Jésus dans la gloire, il a entendu Sa voix ; et tout est changé pour lui désormais, et lui-même est changé à l’égard de toutes choses. Il ne reçoit pas seulement le salut, quelque grand que soit celui-ci, mais il reçoit la connaissance de la suprême excellence de Christ. Christ qui l’a rencontré sur le chemin et qui l’a appelé par son nom, lui le rebelle Saul, est au-dessus de tout pour lui ; il L’a vu dans la gloire et Christ bannit tout autre objet de son cœur. Tout est éclipsé par Christ, qu’il a eu le privilège de voir ressuscité d’entre les morts et glorifié. Il Le voit vivant, Lui qui a porté et ôté le péché ; il Le voit, reconnaissant, comme étant un avec Lui, les saints que lui Saul persécutait ; il est aveuglé par cette vue. D’autres âmes ont appris aussi comment la vue de Christ glorifié ôte du cœur tout ce à quoi elles tenaient autrefois, et le monde qui nous entoure leur est apparu comme des ténèbres, pauvre et vain, comparé à Christ.

Paul dit : « Je regarde toutes choses comme étant une perte à cause de l’excellence de la connaissance du Christ Jésus mon Seigneur, à cause duquel j’ai fait la perte de toutes choses ; et je les estime comme des ordures, etc. ». Il ne dit pas seulement : « j’ai estimé » ; mais « je regarde,… j’estime ». Cette parole retentit de sa prison à Rome, à l’heure de l’épreuve et de la souffrance ; la mort le regardait en face, mais la gloire et la beauté de Christ étaient aussi présentes que jamais à son âme : « J’estime toutes choses comme des ordures… ! ».

Il est très important pour les chrétiens de retenir jusqu’au bout ce qu’ils ont eu au commencement de leur course (comp. Héb. 3, 6, 14 ; Col. 1, 23 ; 1 Jean 2, 24 ; 2 Pier. 1, 12 ; etc.). Avez-vous commencé avec la conscience que Christ vous vaut mieux que tout ? — Alors, retenez-le ferme !

Paul vise à l’état de résurrection, afin de passer de l’état dans lequel il était en rapport avec le premier Adam à la résurrection d’entre les morts. « Si en quelque manière que ce soit, dit-il, je puis parvenir à la résurrection d’entre les morts », non pas comme s’il y avait quelque doute dans son esprit, mais comme disant : je consens à passer par n’importe quoi : mort, vie, souffrances quelles qu’elles soient, afin que, par la puissance de Dieu, je parvienne à la résurrection d’entre les morts. C’est quelque chose de merveilleux quand l’âme vient à saisir la suprême excellence de Christ, quand Christ devient l’objet absorbant, dominant du cœur, quand Lui est tout. Christ suffit pour remplir le cœur et en chasser tout le reste, pour nous rendre capables de traverser ce monde « comme n’ayant rien et toutefois possédant toutes choses ». Lecteur, Christ vous suffit-Il ? Vous suffit-Il à tous égards pour répondre à tous les désirs de votre cœur ? Pouvez-vous dire : « Je Le possède, et je suis riche au-delà de toute expression » (comp. Act. 26, 29) ? Dans ce cas, vous devez avoir tourné le dos au monde pour toujours.

Le plus grand bienfait que Dieu ait jamais octroyé à la création déchue, c’est que ceux qui Lui appartiennent doivent mourir pour passer de leur condition mortelle en Adam, dans l’état de résurrection. Quel moment que celui auquel nous nous réveillerons, ayant tout laissé derrière nous pour jamais, même ce corps mortel, toute entrave étant ôtée pour jamais ! L’apôtre avait son regard fixé là. Nous devrions anticiper ce bonheur maintenant. Le fait que nous ne l’avons pas encore atteint, nous tient dans l’humilité ; mais le fait que c’est Christ qu’il s’agit de gagner, nous pousse en avant avec énergie. Pour plusieurs, le christianisme est une chose négative seulement. Si vous avez les yeux arrêtés sur Jésus, vous rejetterez tout ce qui n’est pas de Lui, et vous aurez un seul et unique objet, vous « courrez, regardant au but, etc. ». — Avez-vous cet objet ? « Le prix de la céleste vocation » est-il devant les yeux de votre âme ? Christ est-Il Celui que vous cherchez ? Est-ce que l’ardent désir de votre cœur est de « le connaître, Lui » ? Êtes-vous content de souffrir afin de Le connaître ? — Je tourne ma face vers le Jourdain à cause de la magnificence du pays que j’aperçois au-delà, avec ses coteaux de vignes, de grenadiers et d’oliviers. Ce n’est pas le Jourdain qu’il faut regarder — cela décourage — mais l’arche qui a passé devant le peuple. « Je poursuis le but, cherchant à le saisir, et c’est pour cela aussi que j’ai été saisi par Christ ». Quel bonheur de savoir que Christ m’a saisi pour un but ! Je poursuis ce pourquoi j’ai été saisi. C’est une grande chose quand un homme peut dire : « Voilà le but que je poursuis ». Si ce désir d’atteindre le but existe réellement, il y aura un déploiement énergique des forces de l’âme pour y parvenir. « L’âme du paresseux ne fait que souhaiter, et il n’a rien ; mais l’âme des diligents sera engraissée » (Prov. 13, 4). Notre capacité est d’avoir l’œil simplement arrêté sur Christ. Si j’ai Christ, je peux dire : je n’ai besoin de rien. Vous pouvez rencontrer toute sorte de peines, de difficultés — le Jourdain à traverser ; mais si vos yeux sont tournés vers l’arche, vous trouverez un chemin préparé pour vous, à travers le fleuve.

Le christianisme, c’est la puissance sur toutes choses ; c’est être supérieur à tout. Si je suis chrétien, j’ai un objet dans la gloire qui forme mon âme sur la terre ; en pensant à Christ tel qu’Il est, nous marcherons comme Lui a marché ; en ayant les yeux fixés sur lui, l’Esprit de Dieu nous transforme à Son image (2 Cor. 3, 18).

Il est très important d’avoir un but clair et distinct devant soi ; et on ne l’a jamais aussi longtemps que l’on est encore occupé de soi-même. Vous ne pouvez pas être occupé de Christ, tant que vous l’êtes de vous-même. Celui qui a fait de moi d’une manière si parfaite l’objet de Ses soins, m’a affranchi, en sorte que je puis être occupé de Lui, faisant une chose comme Marie au chapitre 11 de l’évangile de Jean. Marie savait ce que c’était que d’avoir trouvé Jésus venant à elle, alors que tout ce qui l’entourait ici-bas s’était évanoui pour elle, et que nul autre que Lui n’aurait pu répondre à ses besoins et remplir son cœur ; — et au chapitre 12, elle sympathise avec Lui : « Je me souviens que tu as été avec moi dans mon affliction ; — j’ai été amenée à la liberté maintenant pour être avec toi dans ton affliction ». « Il me fait reposer dans des parcs herbeux » [Ps. 23, 2]. Mais il faut que nous soyons satisfaits, premièrement, avant que de pouvoir nous « reposer dans les parcs herbeux ». — Quelle scène que celle-là, où il n’y a pas un besoin, pas une nécessité, où rien n’interrompt ni n’ôte la jouissance, où chaque désir est satisfait par Lui, Lui-même remplissant tout de Sa présence, non de Ses faveurs ou de Ses grâces seulement. Ceux qui ne désirent et n’attendent qu’une pluie de bénédiction descendant à eux sur la terre, seront toujours secs ; ils ne sont pas montés encore jusqu’à la source de tout bien. Quand le Seigneur retient le cours de Ses gratuités, vous vous écriez peut-être avec étonnement, pour douter de Sa bonté et de Ses soins pour vous ? Si vous Le connaissiez Lui-même, vous ne considéreriez jamais Ses faveurs comme la mesure de ce qu’est Son cœur pour vous. Plus vous connaîtrez le cœur de Christ, moins vous aurez besoin qu’Il vous prouve ce qu’Il est ; vous n’aurez pas la pensée de mesurer Son affection par des preuves : connaissant Son cœur et ce qu’Il est en Lui-même, vous Le bénirez pour chacune de Ses faveurs, mais vous n’attendrez pas d’en recevoir pour être assurés de Son amour.

Nous devrions nous appliquer à vivre en haut et à mourir en bas. Toute la scène de ce monde est une scène de désappointement et de mort. Ne cherchons pas sur la terre des biens, ou un nid pour nous y établir, parce que nous possédons toutes choses en Christ, en dehors de ce monde. Acceptons tout ce qui nous est dispensé ici-bas ; les ténèbres et l’obscurité de la terre font ressortir d’autant mieux la gloire du ciel où Christ est vivant à la gloire de Dieu. — Ce que Paul désire ici, c’est la participation aux souffrances de Christ. « Oubliant les choses qui sont derrière », il oublie le chemin qu’il a fait, il oublie les choses qu’il a laissées, les peines qu’il a traversées. Plusieurs sont entravés dans leur course parce qu’ils étudient le chemin qu’ils font, tandis que l’apôtre oublie les choses qui sont derrière ; — même les joies en Christ ne le retiennent pas ; il poursuit sa course, « tendant avec effort aux choses qui sont devant… » ; — il court, n’ayant qu’un objet devant les yeux.

Telle était la marche de l’apôtre ; mais « plusieurs marchent, desquels je vous ai souvent dit et maintenant je le dis en pleurant, qu’ils sont ennemis de la croix du Christ…, lesquels ont leurs pensées aux choses de la terre » (v. 18-19). Vos pensées sont-elles aux choses de la terre ? Une âme engagée dans les choses de ce monde, est ennemie de la croix de Christ. La croix est la fin du monde, moralement pour le chrétien, aussi bien que la fin de ses péchés. « Qu’il ne m’arrive pas, à moi, de me glorifier, sinon en la croix de notre Seigneur Jésus Christ, par laquelle le monde m’est crucifié et moi au monde » (Gal. 6, 14). Si les choses présentes vous possèdent, vous êtes ennemis de la croix de Christ (comp. Jacq. 4, 4 ; 1 Jean 2, 15-17). « Notre conversation est dans les cieux » (v. 20). Nous devrions être des étrangers sur la terre, attendant du ciel le Sauveur pour nous délivrer de ce présent siècle : Il déploiera Sa puissance dans ces corps, dans lesquels le péché, la mort et le jugement ont opéré. L’homme dans la gloire est, par le Saint Esprit, notre objet présentement, et ce que nous attendons, c’est qu’Il vienne changer le corps de notre abaissement : ce tabernacle d’argile, ce vase de terre qu’un coup de vent traverse en un moment, qui tombe en une nuit, Lui le changera. La révélation de Jésus a tout changé en Esprit maintenant ; et quand Il viendra, Il posera Sa main sur nos corps vils, et les rendra semblables à Son corps glorieux.

En traversant ce monde, nous rencontrons partout la mort ; mais la puissance magnifique de Christ répandra partout la vie. Il déploie Sa puissance maintenant sur notre esprit ; — Il la déploiera plus tard sur notre corps.

Quelles sont aujourd’hui, dans ce moment, vos pensées ? De quoi sont-elles le plus occupées ? Ce à quoi le cœur tient le plus, est aussi ce qui occupe le plus habituellement les pensées.

Que le Seigneur, par Sa grâce et Son Esprit, tourne nos yeux là où Il est Lui-même ; — et que là où Il est, notre âme ait sa demeure actuellement ! Quelle chose que d’avoir actuellement une habitation, là où tout est parfait et permanent ! Il n’est pas une des choses que vous possédez dans le monde dont vous n’avez à faire la perte tôt ou tard ; — celle qui vous est la plus chère, que vous estimez le plus, est celle qui vous procurera le plus de chagrin, parce qu’elle doit mourir. Quelle est la chose la plus précieuse dans le monde ? L’amour ; — mais à la racine de l’amour se trouve l’épine la plus aiguë : tout est mortel, mortel, mortel, ici-bas ; la mort est partout. Il n’y a qu’un lieu où la mort ne puisse pas entrer, un seul lieu où le cœur soit satisfait. Tournez vos yeux en haut, là où est Jésus ; — là vous trouverez paix et repos, et vous pourrez regarder de face tout ce qui est ici-bas, et dire : Je possède toutes choses en Christ ; Il m’a rempli ; je n’ai besoin de rien d’autre. Le dessein de l’Esprit est de nous occuper ainsi de Christ — « selon l’opération de cette puissance par laquelle il peut même s’assujettir toutes choses ».