Il est une devise entre toutes austères
Que parfois je médite et qui me fait trembler,
Car trop souvent, hélas ! nous faisons le contraire ;
Et Dieu nous a prescrit de la réaliser.
Il faut, pour énoncer cette règle suprême,
Un phénomène auquel je n’ai jamais songé
Sans un frisson d’effroi : se renoncer soi-même,
Mot divin qu’en partant Jésus nous a laissé.
Ce n’est pas renoncer à telle ou telle chose
Pour trouver dans telle autre un dédommagement,
Conserver des abris où l’âme se repose…
Il n’est point de repos pour le renoncement.
Ce n’est pas obéir à l’attrait qu’on éprouve
Pour tel ou tel devoir, objet d’un libre choix.
Mais se renoncer soi, chaque fois qu’on se trouve,
C’est-à-dire toujours et partout ici-bas.
Laisser à chaque pas, sur cette sombre route,
Un lambeau de son cœur, regret, espoir, désir,
Immoler ce qu’on aime à ce que l’on redoute
Et vivre au jour le jour sans projet d’avenir.
Voilà ce que j’attends, mon âme, sur la terre,
Le sentier que Jésus t’a Lui-même tracé
Quand Il t’a dit : Suis-moi !… Suis-le donc, mais espère,
Espère en Son amour, et crois en Sa bonté.
Il marcha le premier dans cet étroit passage.
Il peut te l’adoucir, s’Il le juge à propos,
Mais s’il te faut, sans joie, achever ton ouvrage
Soumets-toi sans murmure. Oh ! ne crains rien, courage !
Tu te reposeras là-haut !