Affection pour Christ

Éveil, déclin et retour (2 Cor. 11, 1-3)
C.A. Coates

Le sujet qui est devant moi est celui de l’affection pour Christ, ou de cet état du cœur que l’Esprit produit dans les croyants et par lequel ils répondent aux pensées de Christ pour le moment présent. Je crains que lorsque nous parlons d’être ici-bas pour Christ, nous n’ayons devant nous que notre service ou notre conduite ; mais nous devons nous souvenir qu’il y a une chose de laquelle Christ est plus jaloux qu’Il ne l’est de notre service ou de notre conduite. C’est ce jardin clos — cette source fermée, cette fontaine scellée — duquel tout autre que Lui est exclu ; oui, c’est la source cachée des affections qui seule satisfait Son cœur, et qui Lui rend agréables notre conduite et notre service.

Cette vérité est exprimée d’une manière frappante dans les versets que nous avons pris pour texte ; nous y trouvons aussi le but d’un vrai évangéliste. Ce dernier s’applique à obtenir un résultat présent pour Christ. Il ne tient pas à avoir un certain nombre de personnes qu’il peut compter comme étant le fruit de son travail ; il ne pense pas à lui-même, mais à son Maître ; tout ce qu’il désire, c’est de présenter les croyants « au Christ comme une vierge chaste ». Il ne perd pas de vue le résultat éternel, mais le but immédiat de son cœur, ce après quoi il soupire avec une ardente ferveur, c’est que les affections des saints soient entièrement pour Christ. « Car je vous ai fiancés à un seul mari, pour vous présenter au Christ comme une vierge chaste ».

Le grand objet du cœur de Dieu est d’avoir présentement les siens non seulement délivrés du jugement et de l’étang de feu, mais du monde ; une compagnie sauvée non seulement pour le ciel bientôt, mais pour le cœur de Christ maintenant. L’œuvre de Christ sur la croix a réglé toute question soulevée par le péché entre Dieu et nos âmes, et notre avenir, c’est la gloire de Dieu dans laquelle nous serons introduits selon toute la valeur de cette œuvre. Mais il y a une autre chose ; il y a un intervalle marqué, entre la croix et la gloire, pour ce qui concerne ce monde, par le déshonneur et le rejet de Christ. Satan ne peut toucher à la valeur de l’œuvre de la croix ; il ne peut toucher non plus à la perfection de la gloire éternelle ; mais toute sa puissance est à l’œuvre pour empêcher qu’il y ait un résultat actuel pour Christ. D’un autre côté, toute l’énergie du Saint Esprit est à l’œuvre pour produire un résultat présent pour Christ. Tout croyant sait qu’il sera, dans l’éternel avenir, la satisfaction et la joie de Christ ; aucun de nous assurément n’aimerait dire que peu lui importe que Christ soit oui ou non satisfait maintenant, et cependant, hélas ! combien souvent notre manière de faire semble le dire.

Il y a un verset en Jérémie 2 qui, en type, nous montre le moment où l’âme peut être considérée comme fiancée à Christ : « Ainsi dit l’Éternel : Je me souviens de toi, de la grâce de ta jeunesse, de l’amour de tes fiançailles, quand tu marchais après moi dans le désert, dans un pays non semé. Israël était saint à l’Éternel, les prémices de ses fruits ». Je suis persuadé que ces paroles se rapportent au temps où les Israélites traversaient la mer Rouge. Ils furent amenés dans la joie d’une complète délivrance de la puissance de l’oppresseur et du pays du jugement. Jéhovah Lui-même était alors tout pour eux ; Il était leur force, leur cantique et leur salut ; Sa victoire et Sa gloire, Ses pensées et Son propos remplissaient leurs cœurs. Lisez le cantique du chapitre 15 de l’Exode. Il est rempli de « tu », « toi », « ton » ; s’ils parlent d’eux-mêmes, c’est pour dire : « ton peuple ». Quel moment merveilleux ! Vous direz peut-être qu’il ne fut pas long. En effet, mais pensez combien il fut béni ! Jéhovah s’en souvenait, et Il en parle plus de huit cents ans après, comme « de la grâce de ta jeunesse, de l’amour de tes fiançailles ».

Dans l’histoire de tout homme qui connaît le salut de Dieu, il y a un moment semblable à celui-là. Il a peut-être eu lieu quelque temps après la conversion ; car on peut se trouver abrité par le sang pendant plusieurs années sans avoir goûté la joie de ce moment-là. Mais quel moment que celui où Christ ressuscité est placé devant l’âme, ainsi que la grandeur de Sa victoire et la part que nous avons dans ses résultats, et les desseins merveilleux de Dieu envers nous assurés par cette victoire ! Nous ne pouvons jamais l’oublier. Nous avons été amenés à Celui qui est ressuscité pour notre justification, et par Lui nous sommes délivrés du pays du jugement et du pays où s’exerce la puissance de l’oppresseur. En présence de Christ ressuscité, il n’y a aucun sentiment de besoin dans l’âme ; mais il y a la jouissance d’une faveur illimitée, car l’âme est consciente qu’elle a une part aux fruits de la victoire, parce qu’elle appartient à Celui qui l’a gagnée. Par Lui nous avons accès à cette faveur. Mais l’âme qui en est là, au lieu de regarder à cette faveur ou à cette bénédiction comme à une chose en elle-même, en jouit en rapport avec Christ, et comme Lui appartenant. Si je Lui appartiens, plus Sa victoire et Sa position sont merveilleuses, plus ma position est merveilleuse ; mais je pense à tout cela comme étant à Lui. Tant que nous ne sommes pas venus à Christ comme à Celui qui est ressuscité, je ne pense pas que nous comprenions bien ce que c’est que de Lui appartenir ; mais le cœur qui Le connaît comme ressuscité d’entre les morts peut dire : « Je suis à Lui ». Il me semble que Thomas en est là quand il dit : « Mon Seigneur et mon Dieu ». Je ne parle pas ici de la connaissance des vérités ou des doctrines, mais d’une âme qui est consciente d’avoir réellement atteint Jésus ressuscité. C’est alors que pour elle ont lieu les « fiançailles ». On peut avoir encore beaucoup à apprendre, mais on a une grande affection pour Christ. Toute la richesse et la sagesse de l’Égypte auraient-elles pu tenter en ce moment ceux qui pouvaient chanter le cantique ? « Israël était saint à l’Éternel ».

Sans doute, il y a plusieurs croyants qui n’ont jamais atteint un Christ ressuscité parce qu’ils n’ont jamais eu un Paul pour les fiancer à « un seul mari ». Ils n’ont pas entendu parler de Sa victoire glorieuse, ou de Sa nouvelle position en résurrection ; ils se débattent dans l’obscurité et l’esclavage de l’Égypte ; leur vie se consume dans les pensées et les choses de ce monde, et ils pensent rendre service à Dieu en s’occupant de politique, de tempérance, etc., essayant d’améliorer l’Égypte, au lieu de voir que ce monde se trouve sous la puissance de l’ennemi et sous le jugement de Dieu. Si les croyants savaient que le système entier de ce monde est sous l’autorité de Satan et sous le jugement de Dieu, ils seraient heureux d’en être délivrés. Mais combien petit est le nombre de ceux qui proclament qu’il en est ainsi devant Dieu, et que Christ et toutes les bénédictions chrétiennes ne peuvent se trouver que sur le terrain de la résurrection. Qu’il y en a peu, dans la chrétienté, qui cherchent réellement à amener les âmes à un Christ ressuscité, à les fiancer à un seul mari, afin qu’elles puissent être présentées au Christ comme une vierge chaste !

J’espère que vous comprenez quelle est la bénédiction de ce moment où Christ est réellement connu du cœur, en dehors des choses de ce monde, dans la grandeur infinie de Son triomphe, et où l’on a conscience de participer aux résultats de cette victoire parce qu’on Lui appartient. En un tel moment, l’offre de n’importe quelle somme d’argent ou d’or ne pourrait séduire le cœur. On a trouvé une personne qui a infiniment plus de prix pour le cœur que toutes les choses de la terre. On a mis le pied sur le rivage d’un nouveau monde où l’on se trouve suprêmement heureux, et l’ancien monde est totalement éclipsé et remplacé.

C’est là la grâce de la jeunesse et l’amour des fiançailles. Il y a une personne qu’on aime sans L’avoir vue, et en laquelle on croit, quoique maintenant on ne la voie pas, et l’on se réjouit d’une joie ineffable et glorieuse. Les choses vaines qui charmaient autrefois sont oubliées ; on ne se les rappelle que pour en avoir honte ; on est heureux d’être rejeté comme Christ, à cause de la satisfaction qu’on trouve en Lui. J’espère que vous avez connu la réalité d’un tel moment.

Or tel est le vrai commencement d’un chrétien ; et l’Esprit de Dieu opère jalousement afin que ces affections soient maintenues en nous dans toute leur fraîcheur et leur ardeur. Ce n’est que de cette manière que Christ trouve en nous une vraie satisfaction ; car si le jour des fiançailles produit en nous une sainte et profonde joie, il produit une joie plus grande et plus profonde pour Celui dont l’amour incomparable a attiré l’affection de nos cœurs. C’est le jour de Ses fiançailles, et le jour de la joie de Son cœur (Can. 3, 11).

Il est facile de comprendre que si le diable a réussi à chasser Christ de ce monde, il ne verra pas avec plaisir ceux pour lesquels Christ est tout. C’est pourquoi son but est de corrompre nos pensées en les détournant de la simplicité quant au Christ ; et il cherche à accomplir cette œuvre non par une attaque ouverte contre Christ, mais comme le serpent qui séduisit Ève « par ruse ». Il avait introduit au milieu des saints de Corinthe des hommes qui se disaient être apôtres de Christ, et qui avaient toute l’apparence des ministres de la justice (2 Cor. 11, 12-15). Ces hommes discréditaient Paul et, sous une apparence de grand dévouement pour l’œuvre du Seigneur, ils introduisaient artificieusement des principes charnels et mondains, qui corrompaient ceux qui les recevaient et les détournaient de la simplicité quant au Christ. Je pense qu’ils avaient soin de ne pas attaquer ce que nous appelons les vérités fondamentales. Le diable sait bien qu’il ne faut pas premièrement introduire le gros bout du coin dans une fente. Il n’aurait pas convenu à ces hommes de montrer premièrement leur couleur d’une manière ouverte ; mais ils cherchaient à modifier et à humaniser les choses pour leur enlever leur force et leur portée.

Ce que nous venons de dire est de toute importance pour nous tous, car nous devons être préparés pour admettre que nous manquons beaucoup de cette simplicité d’affection pour laquelle Christ ressuscité est tout. Pourquoi en est-il ainsi ? Pourquoi les saints qui savent ce que c’est que d’être fiancés à Christ deviennent-ils froids dans leurs affections ? Comment se fait-il qu’ils soient de nouveau satisfaits et à l’aise dans les choses mondaines et charnelles ? Je ne pense pas qu’une personne qui a su ce que c’est que d’être fiancé à Christ puisse tomber dans la mondanité tant que son esprit n’a pas été corrompu par quelque chose qui a obscurci son jugement touchant ce monde. Avant l’éloignement extérieur, une influence corruptrice a agi intérieurement ; l’esprit a été occupé et pénétré par des pensées et des principes en rapport avec l’homme et les choses d’ici-bas ; et cela se fait d’une manière si subtile que la conscience n’en éprouve aucune alarme. Je crois que le déclin des affections pour Christ et les procédés corrupteurs qui précèdent ce déclin peuvent souvent remonter à l’influence d’un ministère qui n’est pas dans la ligne ou le courant de l’Esprit de Dieu. Il me semble que le chapitre qui est devant nous montre clairement qu’il y a deux ministères, le vrai et le faux, ce qui est de Christ et de l’Esprit, et ce qui est de Satan ; l’un est nettement opposé à l’autre dans ses tendances et ses effets. Tout vrai ministère exercé dans la puissance de l’Esprit tend à détourner nos cœurs de l’homme et des choses de ce monde, pour les attacher à un Christ ressuscité. Le faux ministère nous occupe de l’homme et des choses de ce monde ; par conséquent, il éloigne nos cœurs de Christ, car Il ne peut être connu qu’en résurrection, en dehors des choses présentes. Je parle sobrement et avec douleur en disant que la majeure partie du ministère du jour actuel revêt ce dernier caractère. Il ne peut en être autrement quant le ministre lui-même est inconverti ou qu’il n’a jamais su pour lui-même ce que c’est que d’être fiancé à Christ ; mais nous ne devons pas passer sur le fait qu’un homme peut être converti, et posséder une certaine somme de vérité, et avoir cependant la tendance dans son ministère d’occuper les âmes de l’ancienne création. Des hommes peuvent avoir la réputation d’une grande piété, parler de ce qui est bon et vrai, et cependant nous amener à nous occuper de l’homme et des choses présentes. Vous savez que pour plusieurs chrétiens évangéliques, être un bon citoyen, s’occuper de tout ce qui peut tendre à l’amélioration du monde, fait partie du christianisme d’aujourd’hui ; et tous les grands corps religieux sont plus ou moins occupés de l’amélioration de leur position et cherchent à augmenter leur influence dans ce monde. Malheur à nous si nous nous laissons entraîner dans ce courant. La vraie affection pour Christ sera complètement détruite par de tels principes, car nous ne pouvons Le connaître qu’en résurrection, et comme Celui qui a été définitivement rejeté par l’homme.

Nous devons nous tenir en garde contre les influences que nous tolérons. Nous sommes affectés par tout ce que nous entendons et par tout ce que nous lisons, sans souvent nous en rendre compte. Le mal est fait sans que nous le sachions ; nous avons, comme Éphraïm, des cheveux gris sans le savoir. Je ne crois pas que nous puissions nous placer sous l’influence du ministère qui s’exerce actuellement dans les systèmes sans en éprouver une perte pour notre âme. Notre cœur sera ramené aux choses présentes, religieuses peut-être, et par conséquent éloigné de Christ en résurrection.

Il n’est pas nécessaire de dire que la littérature mondaine produit le même effet. Je suis persuadé qu’un homme qui trempe son esprit chaque matin dans la lecture d’un journal ne peut conserver sa fraîcheur d’affection pour Christ. Un commerçant peut avoir à consulter un journal pour savoir quel est le cours du bois ou des pierres, ou du froment, de la même manière qu’un esclave chrétien, au jour des apôtres, pouvait aller au marché pour faire les affaires de son maître ; mais vous pouvez être assuré que l’esclave chrétien qui savait ce que c’est que d’être fiancé à Christ se retirait aussi promptement que possible du tumulte du marché et de la causerie oiseuse de la rue ; le discours d’un orateur politique aurait eu peu de charme pour lui. Il y a quelques personnes qui disent : « Nous pouvons écouter et lire les choses sans être touchés par elles, si nous ne leur permettons pas d’avoir une place dans notre cœur ». Mais que répondraient-elles, si on leur demandait : « Quel profit y a-t-il pour vous à occuper votre esprit de ce qui, selon votre aveu, est indigne du cœur ? ». Mais c’est précisément de cette manière que le cœur est détourné de ce qui est réellement bon. L’esprit et les pensées étant tournés vers le monde, les affections suivent bientôt la même direction. Il ne s’agit pas de la rétention présente dans la mémoire des choses qu’on a entendues ou lues, mais de l’impression qu’elles laissent sur l’esprit et de la teinte qu’elles donnent aux pensées. Quand l’esprit se tourne vers le monde, il en résulte immédiatement que cette entière affection du cœur, pour laquelle Christ est tout, est perdue et sera considérée bientôt peut-être comme une excitation passagère d’aucune valeur pratique. Ah ! le Seigneur regarde à ces heures de sainte joie, de vraie affection, d’amour brûlant, et Il dit : « Je me souviens de toi, de la grâce de ta jeunesse, de l’amour de tes fiançailles ». Huit cents ans s’étaient écoulés, huit longs siècles d’infidélité et de rébellion, mais le Seigneur n’avait jamais oublié ce court moment où Il était tout pour le cœur de Son peuple. A-t-Il à regarder bien loin en arrière pour trouver un tel moment dans votre histoire ou la mienne ?

Mais il y a une autre chose : « Mon peuple a fait deux maux : ils m’ont abandonné, moi, la source des eaux vives, pour se creuser des citernes, des citernes crevassées qui ne retiennent pas l’eau » (Jér. 2, 13). En Orient, il arrive quelquefois qu’un homme passe des années à creuser une citerne dans le roc, avec l’espoir de la remplir d’eau quand la saison des pluies arrivera. Finalement, les pluies arrivent et les ruisseaux amènent l’eau dans la citerne ; mais, chose étonnante, le niveau de l’eau ne s’élève pas, parce que la citerne est crevassée. Quel désappointement ! Cet homme a deux raisons pour être triste : tout son labeur est vain, et il est altéré. Tel est le tableau que Dieu fait de l’homme dont le cœur se détourne de Christ. Vous attendez de trouver quelque satisfaction dans les choses terrestres, mais sachez que tôt ou tard vous verrez que vos citernes sont « crevassées ». Qu’il est solennel d’avoir à considérer à la fin de sa course une vie perdue ! Combien il est triste d’être altéré tout en ayant une fontaine si près !

Nous nous occuperons maintenant de quelques passages qui nous montreront les voies du Seigneur dans la restauration de ceux des siens qui se sont détournés de Lui. Et je puis dire que nous dépendons autant du Seigneur pour la restauration de nos âmes, quand nous nous sommes égarés, que pour le salut au commencement. Qu’il est doux de savoir qu’Il ne nous abandonnera jamais. Le secret de Ses voies miséricordieuses envers nous repose dans le fait qu’Il nous aime, et l’amour seul peut satisfaire l’amour. Il est jaloux de nous ; Il veut avoir les affections de nos cœurs ; Il les apprécie ; elles sont la satisfaction du choix de Son amour.

Pour la restauration de l’âme, le Seigneur se sert de deux grands moyens : le ministère et le gouvernement ; en d’autres termes, Il s’occupe de nous par Sa Parole, ou avec Sa main. Je n’oublie pas qu’Il est notre avocat auprès du Père. Il s’occupe de notre cas devant le Père, avant qu’il n’y ait un seul mouvement en nous de cette grâce qui restaure, ou une réponse à ce mouvement dans nos âmes. Cette intercession, faite dans toute la valeur de l’intimité de notre Avocat avec le Père, et fondée sur Son œuvre expiatoire, est le résultat infaillible de Son amour. S’il nous arrive de pécher, Son amour en prend immédiatement occasion pour s’occuper de nous devant le Père. Ensuite, comme conséquence de cette intercession parfaite et puissante, il y a l’activité envers nous de cette grâce qui restaure.

« Je connais tes œuvres, et ton travail, et ta patience, et que tu ne peux supporter les méchants ; et tu as éprouvé ceux qui se disent apôtres et ne le sont pas, et tu les as trouvés menteurs ; et tu as patience, et tu as supporté des afflictions pour mon nom, et tu ne t’es pas lassé ; mais j’ai contre toi que tu as abandonné ton premier amour. Souviens-toi donc d’où tu es déchu, et repens-toi, et fais les premières œuvres ; autrement je viens à toi et j’ôterai ta lampe de son lieu, à moins que tu ne te repentes » (Apoc. 2, 2-5). Nous avons ici le ministère, ou la voix du Seigneur, s’adressant à ceux dont les cœurs ont abandonné leur premier amour, et cherchant à les amener à la repentance. Le tableau qui est placé devant nous dans ce passage est bien solennel. L’assemblée d’Éphèse était en apparence dans l’ordre le plus parfait ; il se trouvait en elle une mesure extraordinaire de fidélité et d’énergie spirituelle, mais elle manquait d’une chose qui seule pouvait satisfaire le cœur de Christ. Aucun œil humain n’aurait pu discerner ce qui lui manquait ; car, en mesure peu ordinaire, s’y trouvaient le service, la fidélité, la souffrance pour le nom de Christ et la patience. Si nous connaissions une telle assemblée, nous dirions probablement qu’elle possède tout ce qu’on peut désirer. Mais l’amour de ses fiançailles s’était évanoui ; elle avait abandonné ce « premier amour » pour lequel Christ est tout. Hélas ! il est fort possible que notre service, notre fidélité et notre témoignage pour Christ deviennent la chose principale dans nos esprits, et que ces choses, bonnes en elles-mêmes, usurpent la place que Christ désire occuper dans nos affections. Cela a pu arriver à Éphèse, car Satan se sert même de tels moyens pour corrompre nos pensées et les détourner de la simplicité quant au Christ ; c’est souvent ainsi que commence le déclin de nos affections.

Combien sont touchantes ces paroles : « Souviens-toi donc d’où tu es déchu » ! Nous avons déjà vu comment le Seigneur se souvient du « premier amour » des siens ; Il prend plaisir à se le rappeler, et Il compte que la mémoire d’un tel amour sera douce aux cœurs de Ses rachetés. C’est là le premier effort de cette grâce qui restaure ; elle rappelle à la mémoire ces heures précieuses où le premier amour disparu remplissait le cœur, et où Christ était réellement tout. Est-ce que les plus beaux moments de l’histoire de votre âme sont maintenant derrière vous ? Avez-vous à regarder à travers les brouillards des années écoulées pour trouver un moment de profonde joie dans lequel Christ remplissait toute la vision de votre âme, et dans lequel Son amour satisfaisait tous les soupirs de votre cœur ? Avec douleur, mais dans la tendresse de Son amour, le Seigneur vous invite maintenant à vous souvenir. Ne vous laissez pas tromper par le fait que vous avez plus de connaissance maintenant, et que plusieurs vérités sont plus claires à votre esprit. Il peut en être ainsi et, en même temps, les affections être flétries et l’âme aussi altérée que le sable du désert. Que la voix du Seigneur atteigne réellement en puissance tout cœur qui aurait abandonné son premier amour !

« Et repens-toi ». Il me semble qu’il y a une grâce immense dans ces mots. Ils ouvrent la porte au cœur réveillé pour remonter jusqu’au point où le déclin a commencé. Le Seigneur nous invite, pour ainsi dire, à revenir au bonheur et à l’intimité du « premier amour ». Il est triste et humiliant que le Seigneur ait à employer de telles paroles pour les siens, mais il y a en cela une grâce précieuse et une consolation pour le cœur exercé. Au lieu de placer sur le chemin quelque difficulté ou quelque sujet de découragement, Il nous invite à revenir sur nos pas. Cependant, il est indispensable que nous revenions d’une manière qui nous mette réellement en liberté en Sa présence quant aux objets qui nous ont détournés de Lui. C’est pourquoi il est dit : « Repens-toi ». C’est par le jugement en Sa présence de tout l’égarement de nos cœurs que nous sommes ramenés au point où le déclin a commencé. Il faut que l’âme revienne sur son chemin, et juge devant le Seigneur le vrai caractère des choses qui l’ont fait errer, et qu’elle se juge aussi pour cette condition du cœur qui a donné à ces choses une telle puissance sur elle. C’est là un procédé solennel et pénétrant, mais l’amour infini nous y appelle, et il nous soutiendra à travers tout cet exercice, si nous répondons à cet appel. Il peut bien se faire qu’un homme en chute dise : « Mais ma course a été si tortueuse et embrouillée qu’il m’est impossible d’en retrouver la trace, et le commencement de mon déclin a été si subtil et les phases en ont été si imperceptibles que je suis tout à fait dans l’embarras ». C’est là une preuve que vous ne pouvez vous restaurer vous-mêmes. Le Seigneur seul peut nous conduire en arrière dans notre histoire personnelle, et Il le fera si réellement nos cœurs se tournent vers Lui. Il peut nous montrer exactement ce qui nous a détournés de la bonne voie et ce qui nous a préparés à cela ; Il peut nous donner de voir les choses comme Il les voit Lui-même. Il n’y a là aucun effort légal ; l’âme se place devant le Seigneur pour juger avec Lui toute cette vie d’égarement. Il résulte d’un tel exercice que nous sommes ramenés, avec une connaissance plus profonde du « moi » et un jugement plus vrai du monde, à trouver notre entière satisfaction dans l’amour invariable de Son cœur. Nous sommes ramenés à la fraîcheur et à la simplicité de ce premier amour pour lequel Christ est tout.

Mais il y a un autre moyen que le Seigneur emploie pour atteindre les consciences et les cœurs des siens en chute. C’est le gouvernement ou l’action de Sa main. Je citerai un passage de l’Ancien Testament pour rendre ma pensée claire : « C’est pourquoi, voici, je vais fermer ton chemin avec des épines, et j’élèverai une clôture, et elle ne trouvera pas ses sentiers. Et elle courra après ses amants, et ne les atteindra pas ; et elle les cherchera, et ne les trouvera pas. Et elle dira : J’irai, et je m’en retournerai à mon premier mari ; car alors j’étais mieux que maintenant » (Os. 2, 6-7). Nous trouvons ici l’activité de la main du Seigneur en grâce pour restaurer celui qui est en chute. Il ne permet pas que cette âme continue sa course dans le chemin de son propre choix sans être reprise ; Il ferme son chemin avec des épines et élève une clôture. Nos cœurs n’en connaissent-ils pas quelque chose ? Nous pensions prendre un chemin agréable, mais Christ n’était pas devant nos cœurs, quand nous y sommes entrés ; chaque pas en avant nous éloignait de Lui. Dans Sa grâce, Il a fermé le chemin avec des épines. Il a permis que notre chemin nous conduise au milieu de circonstances pénibles et que les épines déchirent notre chair. Avons-nous compris que c’était la grâce qui avait placé ces épines devant nous ? Il nous semblait apercevoir un chemin aisé ; nous l’avons désiré, notre jugement l’a approuvé, et nous y sommes entrés avec une grande assurance. Mais voilà que nous rencontrons un terrible obstacle ; il y a sur le chemin une haute clôture, et nous ne pouvons ni la franchir, ni en faire le tour. Ah ! c’est la grâce qui a élevé cette clôture et qui cherche à nous rappeler par cela que Christ n’était pas devant nos yeux quand nous avons pris ce chemin.

N’avez-vous jamais poursuivi un objet sans succès, et n’avez-vous jamais été mortifié par le désappointement ? Ou, ayant atteint la fin désirée, ne l’avez-vous pas trouvée très différente de ce que vous supposiez ? N’avez-vous jamais cherché quelque satisfaction dans les choses présentes, et n’avez-vous pas été surpris de ce qu’elles en procuraient si peu ? Vous avez poursuivi sans atteindre, et vous avez cherché sans trouver. Vous avez éprouvé que les citernes de ce monde sont crevassées et ne contiennent point d’eau. La manière de faire de la main du Seigneur ne vous a-t-elle pas contraint à dire : « Je m’en retournerai à mon premier mari ; car alors j’étais mieux que maintenant » ?

Lisons un peu plus loin. « C’est pourquoi, voici, moi, je l’attirerai, et je la mènerai au désert, et je lui parlerai au cœur » (Os. 2, 14). Si nos affections sont vraies pour Christ, elles feront de ce monde un désert pour nous ; mais si elles n’en font pas un désert, la main du Seigneur interviendra. Il nous aime trop pour permettre à nos cœurs de trouver un nid ici-bas ; et Il nous amènera au sentiment que ce monde est un désert, afin d’avoir l’occasion de parler à nos cœurs dans la solitude et l’épreuve. La voix que nous ne pouvions entendre au milieu du bruit et du tumulte et au milieu des rires de la ville, est entendue dans le silence et la solitude du désert. N’avez-vous jamais eu un entretien dans le désert avec le Seigneur de votre âme ?

Ensuite, il est dit : « Et de là, je lui donnerai ses vignes, et la vallée d’Acor pour une porte d’espérance » (Os. 2, 15). Tout cela est significatif. La vallée d’Acor (trouble) était l’endroit où fut lapidé Acan, et où lui et toute sa famille et tout ce qu’il avait, furent brûlés au feu.

Le péché d’Acan était le premier mouvement de l’éloignement du bon chemin, lorsque le peuple fut entré dans le pays ; et l’endroit où ce premier mouvement fut si pleinement jugé, est donné comme « une porte d’espérance » à un peuple en chute. Que nos cœurs sentent toujours plus la nécessité solennelle de juger la racine et la cause secrète de tout symptôme de déclin ! La racine du mal, c’est de permettre à la chair d’agir, en tolérant ses goûts et ses tendances. Nous nous laissons détourner par la pensée qu’un beau manteau de Shinhar, et un peu d’or et d’argent, sont préférables à Christ. Nous pouvons être assurés que si Christ perd Sa place dans nos cœurs, nous sommes alors sous l’influence ou de la convoitise de la chair, ou de la convoitise des yeux, ou de l’orgueil de la vie. Que le Seigneur, dans Sa grâce, conduise tout cœur en chute par la vallée d’Acor, et qu’Il nous donne à chacun de juger toute racine de la chair et du monde !

« Et là elle chantera comme dans les jours de sa jeunesse, et comme au jour où elle monta du pays d’Égypte… Et je te fiancerai à moi pour toujours… Je te fiancerai à moi en vérité ; et tu connaîtras l’Éternel » (Os. 2, 15-20). Quel triomphe de la grâce ! Pauvre Israël ! Après tant d’années d’égarement et de rébellion, il sera ramené à la beauté de sa jeunesse et à l’amour de ses fiançailles. Il connaîtra la grâce infinie de Jéhovah, comme il ne l’a jamais connue ; il ne connaîtra plus Dieu comme son Maître, mais comme son mari (v. 16) ; et il entrera de nouveau et pour toujours dans la joie de ses fiançailles avec Lui.

Frères bien-aimés, si telle est la grâce du Seigneur envers Israël, nos cœurs ont sûrement le droit de s’en approprier la douceur, nous qui sommes appelés, par l’amour infini, à connaître le Seigneur dans une relation plus étroite. Quand le cœur a été depuis longtemps étranger à la joie du premier amour, je sais qu’il est alors facile de s’asseoir et de laisser aller les choses telles qu’elles sont, comme s’il était inutile d’attendre une restauration. Je suis sûr que si le Seigneur vous donne d’avoir de nouveau le sentiment qu’Il vous aime réellement, cette pensée désespérée et accablante s’évanouira de votre âme. Vous ouvrirez vos yeux à la réalité bénie du fait qu’Il soupire après vous dans Son amour illimité, et qu’Il est prêt pour vous conduire, en communion avec Lui, au jugement des choses qui vous ont détourné et au jugement de vous-même pour leur avoir donné une place dans vos pensées. Votre cœur tressaillira de joie en pensant que Son amour n’a pas changé. Ainsi restauré, « le premier amour », avec ce qu’il signifie pour vous et pour Lui, remplira de nouveau votre cœur. Vous chanterez comme aux jours de votre jeunesse. Vous serez ramené dans un esprit soumis et purifié, avec un cœur humble et une volonté brisée, à la joie du moment de vos fiançailles, de ce moment où Christ était tout pour votre cœur.