Contrôle de soi

(Traduit de l’anglais)
C.H. Mackintosh

[Courts articles 41]

Le mot « tempérance » en 2 Pierre 1, 6 signifie bien plus que ce qui est généralement compris par ce terme. Il est d’usage d’appliquer le mot « tempérance » à une habitude de modération en rapport avec le manger ou le boire. Sans aucun doute, il englobe pleinement ces choses, mais il implique beaucoup plus. En effet, le mot grec utilisé par l’apôtre inspiré peut être rendu par « contrôle de soi ». Il donne l’idée de quelqu’un qui a bien maîtrisé le moi de façon habituelle.

C’est une grâce rare et admirable, qui diffuse son influence sanctifiante sur toute la course, le caractère et la conduite de quelqu’un. Elle ne porte pas seulement de façon directe sur une ou deux, ou une douzaine, d’habitudes égoïstes, mais sur le moi dans toute l’étendue et la portée de ce terme général et très odieux. Beaucoup de ceux qui considéreraient avec un fier dédain un glouton ou un ivrogne, pourraient eux-mêmes manquer à tout moment à manifester la grâce du contrôle de soi. Il est vrai que la gourmandise et l’ivrognerie doivent être rangés parmi les formes de l’égoïsme les plus viles et les plus contraires à la morale. Elles doivent être regardées comme faisant partie des grappes les plus amères qui croissent sur cet arbre si étendu. Mais le moi est un arbre et non une simple branche d’un arbre, ou une grappe sur une branche, et nous devons non seulement juger le moi quand il est à l’œuvre, mais le contrôler de façon qu’il n’agisse pas.

Certains pourraient demander : « Comment pouvons-nous contrôler le moi ? ». La réponse est heureusement simple : « Je puis toutes choses en Christ qui me fortifie » (Phil. 4). N’avons-nous pas obtenu le salut en Christ ? Oui, c’est le cas, béni soit Dieu. Et qu’est-ce que ce merveilleux mot comprend ? Est-ce simplement la délivrance de la colère qui vient ? Est-ce simplement le pardon de nos péchés et l’assurance d’être exempté de l’étang de feu et de soufre ? C’est bien plus que cela, toutes précieuses et inestimables que soient ces choses. En un mot, le « salut » implique une acceptation pleine et de cœur de Christ comme ma « sagesse » pour me guider hors des chemins obscurs et tortueux de la folie, vers les chemins de la lumière et de la paix célestes ; comme ma « justice » pour me justifier au regard d’un Dieu saint ; comme ma « sanctification » pour me rendre pratiquement saint dans toutes mes voies ; et comme ma « rédemption » pour me donner une délivrance finale de toute la puissance de la mort, et une entrée dans les domaines éternels de la gloire.

C’est pourquoi il est évident que le « contrôle de soi » est inclus dans le salut que nous avons en Christ. C’est un résultat de la sanctification pratique que nous a accordée la grâce divine. Nous devons rester soigneusement en garde contre l’habitude de ne prendre qu’une vue étroite du salut. Nous devons chercher à entrer dans toute sa plénitude. C’est un mot qui s’étend de l’éternité à l’éternité et englobe, dans sa grande portée, tous les détails pratiques de la vie quotidienne. Je n’ai pas le droit de prendre le salut de mon âme dans l’avenir tout en refusant de reconnaître et de manifester sa portée pratique sur ma conduite dans le présent. Nous sommes sauvés, non seulement de la culpabilité et de la condamnation du péché, mais tout aussi pleinement de sa puissance, de le pratiquer et de l’aimer. Ces choses ne devraient jamais être séparées, et elles ne le seront pas par quiconque a été divinement enseigné quant à la signification, l’étendue et la puissance de ce précieux terme, « salut ».

Or, en présentant à mon lecteur quelques phrases pratiques sur le sujet du contrôle de soi, je le considérerai sous les trois divisions suivantes, à savoir les pensées, la langue et le tempérament. Je tiens pour acquis que je m’adresse à une personne sauvée. Si mon lecteur ne l’est pas, je ne peux que le diriger vers le seul vrai chemin vivant : « Crois au seigneur Jésus, et tu seras sauvé, toi et ta maison » (Act. 16). Mettez en Lui toute votre confiance et vous serez aussi en sécurité que Lui. Maintenant, je vais continuer en traitant le sujet pratique et si nécessaire du contrôle de soi.

Tout d’abord, quant à nos pensées et au gouvernement habituel de celles-ci. Je suppose que peu de chrétiens n’ont pas souffert de pensées mauvaises — ces intrus pénibles dans le plus profond de notre intimité, ces perturbateurs constants de notre paix mentale, qui assombrissent si souvent l’atmosphère autour de nous et nous empêchent d’avoir un regard clair et complet élevé sur le brillant ciel en haut. Le psalmiste pouvait dire : « Je hais les vaines pensées ». Ce n’est pas étonnant. Elles sont véritablement haïssables et devraient être jugées, condamnées et rejetées. Quelqu’un[1], en parlant au sujet des pensées mauvaises, a dit : « Je ne peux pas empêcher les oiseaux de voler au-dessus de moi, mais je peux les empêcher de se poser sur moi. De la même manière, je ne peux empêcher que de mauvaises pensées soient suggérées à mon esprit, mais je peux refuser qu’elles y logent ».

Mais comment pouvons-nous contrôler nos pensées ? Pas davantage que nous ne pouvons ôter nos péchés ou créer un monde. Que devons-nous faire ? Regarder à Christ. C’est le vrai secret du contrôle de soi. Il peut nous garder, non seulement de la demeure de mauvaises pensées, mais même de leur suggestion. Nous ne pouvons pas plus éviter l’une que l’autre. Lui peut empêcher les deux. Il peut empêcher les vils intrus, non seulement d’entrer, mais même de frapper à la porte. Quand la vie divine est en activité — quand le courant de la pensée et du sentiment spirituels est profond et rapide, quand les affections du cœur sont intensément occupées de la personne de Christ — les pensées vaines ne nous troublent pas. C’est seulement quand l’indolence spirituelle nous envahit que les mauvaises pensées — problème vil et horrible — viennent sur nous. Alors notre seule ressource est de regarder droit à Jésus. Nous pourrions aussi bien essayer de faire face aux armées réunies de l’enfer, qu’à une horde de mauvaises pensées. Notre refuge est en Christ. Il nous a été fait sainteté. Nous pouvons faire toutes choses par Lui. Nous avons simplement à amener le nom de Jésus pour s’occuper du flot des mauvaises pensées, et Il donnera de façon assurée une délivrance complète et immédiate.

Cependant, le plus excellent moyen est d’être préservé des suggestions du mal par la puissance de l’occupation préalable du bien. Quand le canal des pensées est délibérément vers le haut, quand il est profond et bien formé, sans courbes ni renfoncements, alors le courant de l’imagination et des sentiments, quand il jaillit des sources profondes de l’âme, coulera naturellement en avant dans le lit de ce canal. C’est incontestablement la manière la plus excellente. Que nous l’éprouvions dans notre propre expérience. « Au reste, frères, toutes les choses qui sont vraies, toutes les choses qui sont vénérables, toutes les choses qui sont justes, toutes les choses qui sont pures, toutes les choses qui sont aimables, toutes les choses qui sont de bonne renommée, — s’il y a quelque vertu et quelque louange, — que ces choses occupent vos pensées : ce que vous avez et appris, et reçu, et entendu, et vu en moi, — faites ces choses, et le Dieu de paix sera avec vous » (Phil. 4, 8-9). Quand le cœur est complètement absorbé par Christ, l’incarnation vivante de toutes ces choses énumérées au verset 8, nous jouissons d’une paix profonde, qui n’est pas perturbée par de mauvaises pensées. C’est le vrai contrôle de soi.

En deuxième lieu, quant à la langue, ce membre influent si fécond en bien, et si fécond en mal — l’instrument au moyen duquel nous pouvons donner naissance soit à des accents de douce et apaisante sympathie, soit à des paroles d’amer sarcasme et d’indignation brûlante. Combien est très importante la grâce du contrôle de soi dans son application à un tel membre ! Un trouble, que les années ne peuvent réparer, peut être provoqué par la langue en un instant. Des paroles dont nous donnerions le monde entier pour les retirer, peuvent être prononcées par la langue lors d’un moment d’inattention. Écoutez ce que dit l’apôtre inspiré sur ce sujet : « Si quelqu’un ne faillit pas en paroles, celui-là est un homme parfait, capable de tenir aussi tout le corps en bride. Voici, nous mettons les mors des chevaux dans leurs bouches, pour qu’ils nous obéissent, et nous dirigeons çà et là leur corps tout entier. Voici, les navires aussi, qui sont si grands et qui sont poussés par des vents violents, sont dirigés çà et là par un très petit gouvernail, où que ce soit que le veuille l’impulsion de celui qui les gouverne. Ainsi aussi la langue est un petit membre et elle se vante de grandes choses. Voici, un petit feu, quelle grande forêt allume-t-il ! Et la langue est un feu. La langue, un monde d’iniquité, est établie parmi nos membres ; c’est elle qui souille tout le corps, et enflamme tout le cours de la nature, et est enflammée par la géhenne. Car toute espèce de bêtes sauvages et d’oiseaux, de reptiles et d’animaux marins, se dompte et a été domptée par l’espèce humaine ; mais pour la langue, aucun des hommes ne peut la dompter : c’est un mal désordonné, plein d’un venin mortel » (Jacq. 3, 2-8).

Qui peut donc contrôler la langue ? « Nul homme » ne peut le faire, mais Christ le peut, et nous n’avons qu’à regarder à Lui dans une foi simple. Cela demande à la fois le sentiment de notre totale incapacité et de Sa toute-suffisance. Il est complètement impossible que nous puissions contrôler la langue. Nous pourrions aussi bien essayer de juguler la marée de l’océan, le torrent de la montagne ou l’avalanche alpine. Combien de fois, alors que nous souffrions des effets de quelque erreur de la langue, avons-nous pris la résolution de commander à ce membre indiscipliné quelque chose de meilleur la prochaine fois, mais notre résolution s’est trouvée être comme la nuée du matin qui s’évanouit, et nous n’avons eu qu’à nous retirer et à pleurer sur notre lamentable échec quant au contrôle de nous-mêmes. Pourquoi cela ? Simplement parce que nous avons entrepris la chose avec notre propre force, ou du moins sans une conscience suffisamment grande de notre propre faiblesse. C’est là la cause d’un manquement constant. Nous devons nous accrocher à Christ comme un bébé à sa mère. Non pas que notre accroche ait quelque valeur ; mais nous devons nous accrocher. C’est seulement ainsi que nous pourrons tenir la langue en bride avec succès. Souvenons-nous à tout moment des solennelles paroles de ce même apôtre Jacques, qui nous sondent : « Si quelqu’un pense être religieux et qu’il ne tienne pas sa langue en bride, mais séduise son cœur, le service religieux de cet homme est vain » (Jacq. 1, 26). Voilà de bonnes paroles pour le temps actuel, où il y a tant de langues indisciplinées partout. Que nous ayons la grâce d’avoir part à ces paroles ! Que leur sainte influence se montre dans nos voies !

Le troisième point à considérer est le tempérament, qui est étroitement lié à la fois avec la langue et les pensées. En effet, tous trois sont très étroitement liés. Quand la source des pensées est spirituelle et que leur courant est céleste, la langue est seulement l’agent actif pour le bien, et le tempérament est calme et imperturbable. Christ habitant dans le cœur par la foi régule toutes choses. Sans Lui, tout est pire qu’inutile. Je peux posséder et manifester la maîtrise de soi d’un Socrate, et en même temps, ignorer complètement le « contrôle de soi » de 2 Pierre 1, 6. Ce dernier est basé sur la « foi » ; le premier, sur la philosophie — deux choses complètement différentes. Nous devons nous souvenir que le passage dit : « joignez à votre foi ». Il place la foi à la première place, comme le seul lien qui relie le cœur à Christ, la source vivante de toute puissance. Ayant Christ et demeurant en Lui, nous pouvons ajouter « la vertu, la connaissance, le contrôle de soi, la patience, la piété, l’affection fraternelle, l’amour ». Tels sont les précieux fruits qui découlent du fait de demeurer en Christ. Mais je ne peux pas davantage contrôler mon tempérament que ma langue ou mes pensées, et si je cherche à le faire, je suis certain de tomber chaque heure. Un simple philosophe sans Christ peut manifester davantage de contrôle de soi, pour la langue ou le tempérament, qu’un chrétien, si celui-ci ne demeure pas en Christ. Cela ne devrait pas se produire, et ne se produirait pas si le chrétien regardait simplement à Jésus. C’est quand il manque à cela que l’ennemi prend l’avantage sur lui. Le philosophe sans Christ semble réussir dans cette grande affaire du contrôle de soi, seulement afin d’être encore plus effectivement aveuglé quant à la réalité de sa condition, et d’être emporté tête baissée vers la ruine éternelle. Mais Satan se plaît à faire broncher et tomber un chrétien, afin qu’il puisse par là blasphémer le précieux nom de Christ.

Lecteur chrétien, souvenons-nous de ces choses. Regardons à Christ pour contrôler nos pensées, notre langue et notre tempérament. Mettons-y « toute diligence ». Pensons à tout ce que cela implique. « Si ces choses sont en vous et y abondent, elles font que vous ne serez pas oisifs ni stériles pour ce qui regarde la connaissance de notre Seigneur Jésus Christ ; car celui en qui ces choses ne se trouvent pas est aveugle, et ne voit pas loin, ayant oublié la purification de ses péchés d’autrefois ». C’est profondément solennel. Combien il est facile de tomber dans un état d’aveuglement et d’oubli spirituels ! Aucune quantité de connaissance, soit de la doctrine soit de la lettre des Écritures, ne préservera l’âme de cette affreuse condition. Rien ne le pourra, sinon « la connaissance de notre Seigneur Jésus Christ ». Cette connaissance s’accroît dans l’âme en « apportant tout empressement à joindre à notre foi » les diverses grâces auxquelles fait référence l’apôtre dans le passage ci-dessus, éminemment pratique et émouvant pour l’âme. « C’est pourquoi, frères, étudiez-vous d’autant plus à affermir votre appel et votre élection, car en faisant ces choses vous ne faillirez jamais ; car ainsi l’entrée dans le royaume éternel de notre Seigneur et Sauveur Jésus Christ vous sera richement donnée ».