La justice de Dieu

Romains chapitre 10
J.N. Darby

Il est évident que l’apôtre place devant nous, dans ce chapitre, deux principes opposés : les œuvres de la loi et la justice de la foi.

La loi, en elle-même, est l’expression de ce que Dieu exige de l’homme ; la justice de la foi est la justice de Dieu ; elle est en contraste complet avec la justice qui vient de la loi. L’homme éprouve une très grande difficulté à comprendre cela. Tous les hommes ont le sentiment de la responsabilité, c’est-à-dire du bien et du mal, et ce sentiment ne quitte jamais la conscience de l’homme. L’homme veut bien accepter Christ, sans cependant se soumettre à la justice de Dieu. Il ne sait peut-être pas ce qu’il fait, mais cherche au fond à établir sa propre justice.

Dans ce chapitre 10 des Romains, nous avons deux principes de justice, tous deux justes en eux-mêmes, mais parfaitement distincts. Ils sont opposés l’un à l’autre, bien que vrais tous deux. Si un homme a une dette, et qu’il la paie, ce n’est pas la même chose que si elle lui est remise. Nous avons une dette justement exigible et qu’il faut payer, mais la question ici est la manière d’agir à l’égard de cette dette : ou la payer nous-mêmes ou qu’elle nous soit remise. Le fait d’être converti n’y change rien. Même étant converti, je puis dire : « Je dois être ceci ; je dois être cela, envers mon prochain ».

Ce sentiment du bien et du mal devient plus distinct et plus impératif après la conversion. Alors on s’efforcera d’établir sa justice. On dira : « Ne dois-je pas être ceci ou cela ? ». Sans doute vous devez l’être !

L’homme dont je parle considère la sainteté et dit : « N’est-il pas vrai que sans la sainteté, personne ne verra le Seigneur ? Ne dois-je pas la poursuivre ? ». C’est parfaitement vrai, et vous avez tout à fait raison ; mais, en réalité, c’est établir votre propre justice.

Ce même homme dira encore : « Au jour du jugement, Dieu ne s’enquerra-t-Il pas de tout ce que l’on a fait ? ». Assurément ; mais l’homme qui parle ainsi est encore dans les plus profondes ténèbres quant à la racine de la question. Il dit : « Je dois », mais il oublie de se demander ce qu’il est. La question n’est pas ce que je dois être, mais ce que je suis.

Ne me parlez pas de ce que vous vous proposez d’être. Vos désirs sont bons, sans doute. Souvent on trouve, même chez une personne inconvertie, ce sentiment du bien et du mal ; seulement, après la conversion, la conscience est plus éclairée et devient plus sensible à ses obligations relativement au bien et au mal, mais ce sont des obligations touchant ce qu’il faut faire ou ne pas faire. Il en était ainsi du jeune homme riche, aimable caractère, qui vint au Seigneur et Lui dit : « Que faut-il que j’aie fait pour hériter de la vie éternelle ? ». Il ne dit pas : « Que faut-il que je fasse pour être sauvé ? ». Il croit devoir faire quelque chose.

Si nous avions en tout point gardé la loi, Dieu n’aurait rien à nous reprocher ; nous ne serions pas des pécheurs. Mais ce serait me tromper complètement que de prendre la loi pour règle de ce que je dois être, si je ne m’enquiers pas de ce que je suis. Si je prends la loi pour règle, y a-t-il de l’honnêteté de ma part de promettre que je serai, si je ne considère pas en même temps ce que je suis ? C’est ignorer tout le passé, semblable en cela à un enfant sur le point d’être fouetté et tout disposé à dire qu’il sera sage, mais montrant par là qu’il n’a pas le juste sentiment du mal qu’il a fait. L’âme, en voulant faire quelque chose, n’a pas le sentiment juste de sa condition actuelle.

Si vous êtes réellement en la présence de Dieu, vous ne remettrez jamais le règlement de la question au jour du jugement à venir. Vous êtes devant Dieu dans votre condition présente, brisé et abattu dans la conscience de ce que vous êtes. On laisse souvent de côté cette question, même après la conversion, dans la pensée qu’on a de s’améliorer : on suppose que l’on peut établir sa justice, avec un appoint de miséricorde pour la compléter ; mais mêlez-y autant de miséricorde que vous voudrez, il y a toujours la pensée que vous pouvez vous améliorer ; c’est encore une question de votre justice, c’est encore le même principe de loi. Vous désirez faire quelque chose qui vous sera utile au jour du jugement. S’il y a un jugement, il faut que j’aie une justice devant Dieu. Sur quel autre fondement puis-je me trouver, sinon sur celui qui me rend propre à subsister dans ce jugement ?

Deux choses sont à remarquer. Premièrement, avoir la pensée de devenir quelque chose, n’est pas reconnaître sincèrement ce que nous sommes. Secondement, en supposant qu’en quelque mesure je reconnaisse ce que je suis (aussi bien que ce que je ne suis pas), il y a toujours la pensée que je puis devenir ce que je dois être. Cela montre une complète ignorance de ce que nous sommes quant à notre état, un manque de sentiment du mal qui est dans notre nature, et de l’impuissance de celle-ci pour le bien.

Tout cela vient, je le répète, de ce que l’on ne reconnaît pas ce que l’homme est devant Dieu. On n’a pas la paix, et on ne peut jamais l’avoir, tant qu’on ne possède pas ce qui peut satisfaire la sainteté de Dieu. Ce qu’il nous faut, c’est de reconnaître distinctement et positivement que nous sommes coupables et déjà perdus. Ce n’est pas mettre de côté les droits de Dieu sur nous, mais au contraire les reconnaître et admettre que c’en est déjà fait de nous. Aussi longtemps que je mêle à la justice qu’il me faut devant Dieu, quelque chose que je puis faire, il ne saurait y avoir de paix pour moi.

Lorsque quelque chose de ce que Dieu est dans l’immuable sainteté de Sa nature, a relui dans l’âme, elle s’aperçoit qu’en elle tout est contraire à Dieu ; il est donc impossible qu’elle soit en paix ; elle voit que moralement, tout ce qu’elle est doit être rejeté, et c’est un sentiment terrible que d’avoir ainsi à condamner tout son « moi ». Je ne parle pas ici de péchés grossiers, mais des motifs qui gouvernent notre vie, tous ayant leur source dans une nature mauvaise, tous venant du « moi ». Considérez la vie divinement sainte de Christ. Là, vous voyez la perfection de Dieu ; en nous, c’est tout l’opposé. Quels sont, hélas ! les motifs qui gouvernent les hommes ? Le désir d’approbation, l’amour de l’argent, la science, les arts, la renommée, tous les ressorts qui font agir le monde viennent du « moi ». Qu’est-ce que la recherche de la renommée, sinon l’égoïsme ? Avez-vous jamais vu, chez le Seigneur Jésus (je parle de Lui comme homme) une seule chose qu’Il ait faite pour Lui-même ? Jamais ! L’homme n’a dans sa nature aucun goût pour les choses de Dieu. Semblable au fils prodigue, il ramasse tout, afin de le dissiper pour lui-même, et, bien que ce soit une insigne folie, l’homme dépense sa vie pour des choses qu’il sait devoir quitter. Même en mettant à part les péchés grossiers, tous ses motifs sont égoïstes, et les hommes n’aiment pas les scruter de trop près, parce qu’ils sentent que cela détruirait toutes les activités de leur vie.

« La pensée de la chair est inimitié contre Dieu, car elle ne se soumet pas à la loi de Dieu, car aussi elle ne le peut pas ». La fin est la mort ; tout le monde le sait, et tous travaillent pour ce à quoi ils doivent mourir. Il n’y a pas une chose qu’ils puissent prendre avec eux. Leur nom peut vivre dans la mémoire des autres quand ils ne sont plus, mais à quoi cela sert-il ? Ils marchent dans une vaine apparence, et, comme le dit le psaume 49 : « Ce chemin qu’ils tiennent est leur folie ; mais ceux qui viennent après eux prennent plaisir aux propos de leur bouche ». L’Ecclésiaste montre cela, et c’est l’explication du livre. Tout ce qui est sous le soleil est vanité et tourment d’esprit. « Que fera l’homme qui viendra après le roi ? ». Dans ce livre, nous voyons quelqu’un qui avait toute les facilités possibles de trouver, dans les choses de la terre, depuis les plus élevées jusqu’aux plus basses, la satisfaction de ses désirs ici-bas ; mais la mort était écrite sur toutes, et il ignorait ce qu’il y avait au-delà, de sorte qu’il dit : « Tout est vanité », et conclut qu’il doit jouir autant qu’il le peut de tout ce qui se présente, car il n’y a rien de meilleur. Chacun des motifs se rapporte au « moi ».

Il est bon que la lumière se fasse, nous montre l’état vrai des choses, et nous en dégoûte tout à fait. Le point où les hommes ont besoin d’être amenés, c’est d’avoir, dans leur conscience, la connaissance du péché. Chercherez-vous alors à vous faire une justice devant Dieu ? Comment le feriez-vous ? Le jugement est fondé sur le fait que je dois avoir une justice devant Dieu, et c’est sur ce terrain qu’il me faut être.

Quand le fils prodigue fut revenu à lui-même, il dit : « Je péris de faim ». Il ne pouvait rester dans cet état. C’est quand il n’avait pas même les gousses que les pourceaux mangeaient, qu’il se souvint qu’il y avait du pain dans la maison de son père.

Tous ces exercices d’une âme qui cherche à avoir une justice devant Dieu, continuent jusqu’à ce qu’elle ait découvert qu’elle est perdue. La révélation de ce qu’est Dieu nous fait voir ce que nous sommes. Si Dieu est ce qu’Il est, et si nous sommes ce que nous sommes, Il doit nécessairement nous condamner. Être né de nouveau ne donne pas la justice, mais donne une conscience réveillée, et alors la conscience prédomine. Je vois réellement la sainteté de Dieu, et je cherche toujours plus ardemment la sainteté, mais je ne réussis pas à me faire une justice, ou plutôt je cherche encore à établir ma propre justice, et je n’y arriverai jamais. Cela ne peut satisfaire Dieu.

Même si je suis né de nouveau (en tenant compte de toute la grâce qu’il vous plaira), je ne puis m’acquérir une justice. Ma conscience est devenue plus claire et plus sensible, je vois mieux la spiritualité de la loi, je trouve dans la vie de Christ une règle divine pour ma conduite, mais tout cela ne fait que me rendre plus misérable ; de fait, j’ai beaucoup plus le sentiment de mes manquements, je m’efforce d’être plus saint, mais ce n’est que la vaine tentative d’établir ma propre justice.

Vous dites : « Mais ne dois-je pas être saint ? ». Sans doute, mais vous voulez vous servir de la sainteté (c’est-à-dire du désir légitime que vous en avez) pour obtenir la justice. Si vous réussissiez, ce serait votre justice.

Je suis extrêmement frappé de voir combien la justice de Dieu est chose vide de sens pour l’esprit naturel de l’homme. Tous les hommes savent qu’ils doivent avoir une justice pour subsister devant Dieu ; chacun le comprend ; mais combien peu comprennent la justice qui est par la foi. Vous cherchez encore ce que vous devez être pour Dieu ? L’Esprit de Dieu, au contraire, veut nous faire sentir, non ce que nous devons être, mais ce que nous sommes.

Quand la grâce intervient et m’amène à avoir conscience que je ne suis pas ce que je dois être ; de fait, quand elle me donne la conviction de ce que je suis, je sens mon impuissance, et c’est alors que je me soumets. Lorsque, en quelque mesure, nous avons vu ce qu’est le cœur humain, et que nous nous trouvons devant Dieu sans être propres pour sa présence, le sentiment que tout nous manque nous abat et nous humilie profondément. Ce sentiment devient toujours plus angoissant ; et soudain, l’impossibilité d’établir notre propre justice apparaît. Nous n’apprenons cela que lorsque peu à peu, nous avons découvert ce qu’est la sainteté de Dieu.

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J’aborde maintenant une autre question : non pas ma justice pour Dieu, mais Sa justice pour moi, découvrant à mon âme tout ce qu’elle est, mais ne m’appelant point du tout à acquérir une justice pour Dieu. La justice de Dieu me convainc que je n’en ai point ; elle me considère comme un pécheur, et agit envers moi en grâce.

Nous ne pouvions aller à Dieu. Lui est venu à nous, mais en voilant Sa gloire quant à sa manifestation extérieure, car ç’aurait été notre condamnation. Il est venu, non pour condamner, mais pour sauver, et j’ai affaire avec Dieu sur ce pied-là, savoir que Dieu m’a visité en grâce pour sauver un être perdu. Lorsque j’ai découvert que je suis moralement et nécessairement perdu, je vois le sens moral de Sa venue. Il est là présent avec moi qui suis dans cet état, me faisant voir qu’Il est plus grand que tout mon mal. Est-Il venu pour exiger quelque chose ? Je suis aussi dépourvu de fruits que le figuier stérile ; je suis desséché ; mais le Seigneur, béni soit-Il, est venu dans ce monde, parce que je suis tout cela. Au lieu que le mal qui est en moi ait repoussé Dieu, c’est au contraire ce qui L’a attiré. Dieu, qui est au-dessus de tout mal, m’a visité dans l’état où j’étais. Voulez-vous dire par là que tout le mal qui est en moi, pauvre misérable, soit ce qui a amené Christ dans le monde ? Parfaitement.

Ce que je trouve dans l’évangile est ceci : La condamnation, la colère et la mort, sont écrites sur l’homme qui essaie d’établir sa justice ; mais du moment que je viens simplement devant Dieu comme un pécheur (et là, je ne suis que pécheur), j’ai Dieu avec moi pour me sauver : « Là où le péché abondait, la grâce a surabondé » (Rom. 5, 20).

Ce n’est pas la justice ; c’est la grâce régnant par la justice. Dieu est venu où je suis. Tel que je suis, je me trouve en la présence de Celui qui est venu ici-bas, à cause de ce que je suis. Je n’ai plus à désirer que ma culpabilité soit enlevée, la découverte de Sa grâce l’a ôtée. Il est venu pour guérir, et j’ai trouvé Dieu. L’ai-je trouvé au jour du jugement ? Nullement, mais au temps agréable. Ai-je besoin de m’améliorer en quoi que ce soit ? Non, car Il est venu pour sauver des pécheurs. Il m’a pris où j’étais, absolument tel que j’étais et à cause de ce que j’étais.

Mais, cher lecteur, voudrait-Il m’avoir comme un pécheur avec tous mes péchés ? Non, cela ne peut se faire. Ce ne serait pas la justice. Ne dois-je pas avoir une justice ? Oui, mais jusqu’ici, c’est seulement la grâce, Sa grâce cherchant le pécheur, pour lui donner une justice ; c’est pourquoi Il dit : « Qui montera ? », ou « qui descendra ? » (Rom. 10, 6, 7). Ce n’est pas si loin, « la parole est près de toi ». Christ non seulement est venu vers moi, quand j’étais dans mes péchés, mais Il est venu afin de mourir pour mes péchés, et Il m’apporte la grâce parfaite là où je suis. Il est mort, et a glorifié Dieu, l’œuvre étant achevée, complètement achevée, sur la croix, entre Lui et Dieu seul, selon la sainteté et la justice de Dieu. Tout ce que j’étais comme pécheur a été réglé parfaitement, Dieu ayant affaire avec mes péchés et avec moi-même : « Christ a été fait péché pour nous » ; « il a porté nos péchés en son propre corps sur le bois », Lui qui, « ayant fait par lui-même la purification des péchés, s’est assis à la droite de la majesté dans les hauts lieux ». Il est maintenant assis à la droite de Dieu. Je vois par là que tout est finalement et entièrement réglé pour toujours.

Le père va au-devant du fils prodigue, alors que celui-ci est dans ses haillons ; mais il ne peut pas entrer ainsi dans la maison ; il est d’abord revêtu de la plus belle robe, puis introduit dans la maison parfaitement propre pour y entrer. Dieu donne une perfection qui rend propre pour le ciel (Col. 1, 12). La possédez-vous ? Sinon, comment pouvez-vous aller au ciel ? Mais Christ, n’a-t-Il pas pu y aller ? Oui. Eh bien ! avez-vous Christ ? Il est là, et ainsi, pour y aller, il faut que ce soit par la foi, simplement, absolument, uniquement, sinon, il y aurait quelque chose de moi. Je dois avoir, non pas un bon sentiment, non pas une bonne œuvre, mais simplement Christ.

Mais ne dois-je pas le sentir ? Si un homme a payé mes dettes, et que de plus il ait placé à mon usage une fortune immense à la banque, je dois naturellement le sentir, mais qu’ont à faire mes sentiments avec la fortune qui m’est laissée ? Qu’ont à faire mes sentiments avec la justice ? Christ est là, au ciel, agréé de Dieu, à cause de l’œuvre qu’Il a accomplie, et c’est là ce qu’il me faut. La justice a été montrée en ceci, savoir que Christ est assis à la droite de Dieu. La justice est là, et il n’y a pas de justice ici-bas. Le seul homme juste dans ce monde en a été rejeté et chassé. Dieu L’a pris hors du monde ; Il m’en sort aussi, et me dit : La justice est là à ma droite. Là est ma justice.

On me dit : Votre foi est chose bien aisée ! En est-il vraiment ainsi ? Quand nous voulons faire de bonnes œuvres, c’est très aisé, mais non pas lorsque nous trouvons que nous ne pouvons en faire aucune. Il n’est pas très aisé de se dire : Si je ne suis pas sauvé comme un misérable mendiant, je ne suis pas sauvé du tout ; ou bien : Je n’ai rien, et tout est pure grâce. Rien n’est plus difficile à l’orgueil du cœur humain que de dire : Il n’y a que Christ, et c’est tout. L’orgueil vient, et dit : non seulement il faut que je fasse, mais je dois et je puis faire.

Montrez-moi, seulement dans une de vos journées, une seule chose qui vous rende propre pour le ciel. Je ne le puis, mais Christ est ma justice. Quoi de plus entièrement humiliant que de se soumettre à la justice de Dieu ? Quand nous avons été complètement brisés et abattus, alors nous nous soumettons à cette justice. La foi abandonne toute pensée d’avoir aucune justice propre, et se soumet à la justice de Dieu. Si nous pensons à un jour de jugement, nous savons que le chrétien y paraît devant Christ, et la justice qui juge est la justice que je possède là.

Au commencement de l’épître, l’apôtre dit qu’il n’y a pas de différence — tous sont mauvais (3, 9). Ici, dans notre chapitre, il dit : Je prends le pécheur le plus vil, le plus corrompu ; il n’y a pas de différence quant à la miséricorde, « car le même Seigneur de tous est riche envers tous ceux qui l’invoquent » (10, 12).

Le plus beau caractère d’homme, celui de Paul, par exemple, qui était sans reproche quant à la justice qui est par la loi, doit s’abaisser et reconnaître qu’il est le plus grand ennemi que Christ ait eu. Est-ce chose aisée que de se reconnaître tel ? Nullement. Vous direz alors : ma justice n’est donc rien ? Elle n’est rien pour moi, vous dit Christ, car je suis venu appeler des pécheurs, et non des justes. Jusqu’à ce que j’aie appris que je ne serai jamais jugé pour mes péchés, je ne puis me juger moi-même sans éprouver cette crainte qui porte avec elle du tourment (1 Jean 4, 18). Si je suis fortement endetté, je n’aime pas à parcourir mes livres de compte ; cela n’est pas agréable ; mais quand mes dettes sont toutes payées, j’en puis tourner les feuillets sans crainte.

Nous avons à apprendre les diverses manières dont Dieu agit envers les pécheurs. Ce à quoi l’homme doit arriver est, non pas simplement d’apprendre ce qu’il doit être, mais ce qu’il est. Plus nous serons près de Dieu, plus nous connaîtrons la quantité de choses qui passent continuellement dans notre cœur et qui ne conviennent pas à Dieu. Le chrétien a découvert que la grâce de Dieu est venue dans le monde, non pour juger le monde, mais pour le sauver, et que cette grâce a ôté tout péché, ainsi qu’il est écrit : « Si vos péchés sont comme le cramoisi, ils deviendront blancs comme la neige ».

Eh bien ! cher lecteur, vous êtes-vous soumis à la justice de Dieu ? S’il en est ainsi, vous pourrez vous juger vous-même et vous ferez des progrès spirituels : « À celui qui a, il sera donné davantage ».

Il y a donc deux voies : l’une où, voyant que nous ne sommes pas justes, nous espérons le devenir pour le jour du jugement ; l’autre où, reconnaissant que l’œuvre est faite, nous nous reposons sur Christ.

Maintenant, lecteur, avez-vous cette parfaite et divine justice ? C’est Christ. Il nous a été fait de la part de Dieu justice (1 Cor. 1, 30). Elle est toute en Lui. C’est ce qui donne une parfaite paix avec Dieu. « Il est notre paix ». Faiblesse, lutte, tentations en nous dans ce monde, nous trouverons tout cela, mais en haut tout est paix. Puissiez-vous connaître l’ineffable bienfait du repos en Christ, qui est en la présence de Dieu pour nous.