Le blasphème de l’Esprit

[Série de traités chrétiens n° 13]

Il n’est pas rare de rencontrer des âmes horriblement tourmentées par la pensée qu’elles ont commis le péché, duquel la Parole dit, qu’il ne sera jamais pardonné. Il pourra donc être utile, si Dieu le permet, de placer devant ces âmes craintives l’explication toute simple de ce que l’Écriture nous enseigne sur ce sujet.

D’abord, il n’est pas parlé, comme on le dit généralement, du péché contre le Saint Esprit, mais du blasphème de l’Esprit, et c’est de ce blasphème qu’il est dit, qu’il ne sera jamais pardonné.

Hélas ! il n’arrive que trop souvent que des âmes résistent à l’action de l’Esprit dans leur cœur. L’Écriture parle aussi de « contrister l’Esprit », « d’éteindre l’Esprit », de « mentir au Saint Esprit » — tout autant de choses très fâcheuses qui jettent le trouble dans l’âme, qui déshonorent le Seigneur et qui, si elles ne sont pas jugées, confessées devant Dieu, ne manqueront pas d’attirer sur nous les châtiments du Père ; mais toutes ces choses qui désolent, affaiblissent les chrétiens, et qui retiennent captifs ceux que le Seigneur cherche et appelle pour leur donner la paix et la liberté, ces péchés, dis-je, ne sont pas le blasphème contre le Saint Esprit, pour lequel il n’y aura point de pardon.

Voici ce qui est écrit en Matthieu 12 sur ce sujet : « Alors on présenta à Jésus un homme tourmenté d’un démon aveugle et muet, et il le guérit ; de sorte que celui qui avait été aveugle et muet parlait et voyait. Les troupes en furent dans l’admiration… mais les pharisiens dirent : Celui-ci ne chasse les démons que par Béelzébul, le prince des démons. Mais Jésus connaissant leurs pensées, leur dit : Tout royaume divisé contre lui-même, sera réduit en désert ; et toute ville ou maison divisée contre elle-même, ne peut subsister. Or si Satan chasse Satan, il est divisé contre lui-même ; comment donc son royaume subsisterait-il ?… Mais si moi, je chasse les démons par l’Esprit de Dieu, certes le royaume de Dieu est venu jusqu’à vous… C’est pourquoi je vous dis, que tout péché et tout blasphème sera pardonné aux hommes, mais le blasphème contre l’Esprit ne sera pas pardonné aux hommes. Et à quiconque aura parlé contre le Fils de l’homme, il sera pardonné ; mais à quiconque aura parlé contre l’Esprit Saint, il ne lui sera pardonné ni dans ce siècle-ci, ni dans celui qui est à venir ».

Nous trouvons le même fait rapporté dans Luc 11 et dans Marc 3 ; et c’est dans ce dernier chapitre, au verset 30, que nous avons l’explication si simple de la nature de ce blasphème. Au verset 22, on voit Jésus accusé de chasser les démons par Béelzébul ; au verset 28, il leur dit : « En vérité, je vous dis que tous péchés et tous blasphèmes, quel qu’ils soient, par lesquels ils blasphèment, seront pardonnés aux fils des hommes ; mais quiconque blasphèmera contre l’Esprit Saint, n’aura jamais de pardon, mais il est passible du jugement éternel ». Et au verset 30 (faites-y attention) : Or il dit (qu’il ne serait jamais pardonné) « parce qu’ils disaient : Il a un esprit immonde ».

Quelle horrible accusation ! dire que Jésus opère des guérisons et des miracles, par la puissance du démon. Voilà le péché de ce malheureux peuple juif. Ils ont méconnu à ce point ce Jésus, qui était oint d’Esprit et de puissance, qui allait de lieu en lieu faisant du bien, guérissant les malades, chassant les démons, ressuscitant les morts. Quel autre que Dieu pouvait faire de telles choses ? Et pourtant les pharisiens osèrent dire : Il ne chasse les démons que par Béelzébul, le prince des démons. C’est pourquoi tout péché et tout blasphème seront pardonnés aux fils des hommes ; mais ce blasphème de l’Esprit ne sera jamais pardonné. « Or Jésus dit cela, parce qu’ils disaient : Il a un esprit immonde ».

Par la bonté de Dieu, ce blasphème ne peut guère exister de nos jours. On n’entend pas dire que Jésus ait fait Ses actes de puissance par un esprit satanique ; hélas ! beaucoup d’autres péchés, d’autres blasphèmes sont commis ou sortent de la bouche des hommes ; mais quel amour ! Tous péchés et tous blasphèmes, même contre le Fils, peuvent être pardonnés. Le sang de Christ purifie de tout péché. Jésus est la propitiation pour nos péchés, et non pas seulement pour les nôtres, mais aussi pour le monde entier ; tous peuvent venir au trône de la grâce, tous sont invités. Dieu veut que Sa maison soit remplie, et de qui ? De pauvres pécheurs, comme vous qui avez peut-être résisté jusqu’ici aux appels de Dieu, à l’action de l’Esprit dans vos cœurs ; de vous, à qui Satan cherche peut-être à faire croire que vous avez commis le blasphème contre le Saint Esprit qui ne peut être pardonné. Repoussez, âmes troublées, la voix de celui qui vous parle de perdition ; écoutez avec confiance la voix de Celui qui vous parle de salut. Dieu n’a-t-Il pas fait annoncer la paix à ceux qui étaient loin et à ceux qui étaient près ? N’y a-t-il pas de la joie au ciel pour un seul pécheur qui vient à Dieu ? — Ne fut-il pas dit au brigand, qui était sur la croix pour meurtre, mais qui crut en Jésus : Aujourd’hui tu seras avec moi dans le paradis ? Jésus ne reçut-il pas l’hommage, les larmes de cette femme au sujet de laquelle Simon le pharisien, disait : Si celui-ci était prophète, il saurait qui et quelle est cette femme qui le touche, car c’est une pécheresse ; et à laquelle, Jésus dit : « Ta foi t’a sauvée, va-t’en en paix » ? — Et à cette Samaritaine qui Lui refusait de l’eau, Jésus ne dit-Il pas : Si tu m’eusses demandé, je t’aurais donné de l’eau vive ? La femme adultère n’entendit-elle pas cette douce parole : « Je ne te condamne pas ; va, et ne pèche plus » ? Y a-t-il un pécheur, qui se soit approché de Jésus et qui ait été repoussé ? L’homme peut repousser d’autres pécheurs, mais Jésus est venu pour chercher et sauver ce qui était perdu. Les pharisiens seuls avec leur propre justice ne pouvaient rien avoir affaire avec cette grâce ; c’étaient de vieilles outres qui ne pouvaient pas contenir le vin nouveau.

On confond souvent le blasphème de l’Esprit et le péché qui va à la mort, dont il est parlé dans 1 Jean 5, 16. Ce sont pourtant deux choses bien différentes : dans le premier cas, comme nous venons de le voir, ce blasphème ne sera jamais pardonné ; dans 1 Jean, il s’agit tout simplement de la vie, ou de la mort du corps. Dans Jacques 5, 14, il est écrit : « Y a-t-il quelqu’un parmi vous qui soit malade ? Qu’il appelle les anciens de l’assemblée, et qu’ils prient pour lui en l’oignant d’huile au nom du Seigneur. Et la prière de la foi sauvera le malade, et le Seigneur le relèvera ; et s’il a commis des péchés ils lui seront pardonnés ». De même dans 1 Jean 5, 16, il est écrit : « Si quelqu’un voit son frère pécher d’un péché qui n’est pas à la mort, il priera pour lui, et Dieu lui donnera la vie, savoir à ceux qui ne pèchent pas à la mort. Il y a tel péché qui va à la mort, je ne dis pas de prier pour ce péché-là ». Ici, il est d’abord à remarquer, que c’est d’un frère qu’il s’agit : « Si quelqu’un voit son frère » ; il n’est pas dit : « un faux frère », mais « un frère » ; ce seul mot est un garant qu’il ne peut pas être question de la mort éternelle. S’il est un « frère », c’est qu’il est enfant de Dieu, et s’il est enfant de Dieu, c’est qu’il a cru au nom du Seigneur Jésus : « À tous ceux qui l’ont reçu, il leur a donné le droit d’être enfants de Dieu, savoir à tous ceux qui croient en son nom » (Jean 1) ; et encore : « Je vous écris à vous qui croyez au nom du Fils de Dieu, afin que vous sachiez que vous avez la vie éternelle. Celui qui a le Fils a la vie ». Il est donc parfaitement clair dans les Écritures, que Dieu communique la vie, une vie éternelle à tous ceux qui croient ; or si c’est une vie éternelle, elle ne peut pas nous être enlevée.

Mais si nous avons ce don ineffable de la vie éternelle, si nous savons que nulle brebis ne peut être ravie de la main de Celui qui a lié l’homme fort, qui a vaincu Satan et la mort, nous savons aussi, par la grâce de Dieu, que si nous sommes enfants, nous sommes sous la discipline du Père. Nous savons qu’Il reprend et châtie tous ceux qu’Il aime ; nous savons que si nous sommes rebelles, que nous n’honorions pas le Seigneur, que nous ne nous jugions pas nous-mêmes, nous pouvons être repris, disciplinés, et même châtiés jusqu’à la mort du corps.

Nous avons, dans les Écritures, plusieurs exemples de péchés qui ont été châtiés de mort ; il y en a un cas tout particulier dans 1 Corinthiens 11, et je profite volontiers de cette occasion pour dire un mot sur le verset 29, qui a aussi quelquefois troublé des âmes : « Celui qui en mange et qui en boit indignement, mange et boit un jugement contre lui-même, ne discernant pas le corps du Seigneur ». Jésus, avant de quitter ce monde pour aller au Père, désira fort de manger encore une fois la Pâque avec Ses disciples. Après le souper, Il prit le pain et la coupe et leur annonça qu’Il ne boirait plus de ce vin jusqu’au jour qu’Il le boirait nouveau avec eux dans le royaume de Dieu ; et Il leur dit : Faites ceci en mémoire de moi… jusqu’à ce que je vienne. Jésus voulait que nous eussions un mémorial visible de Son corps rompu pour nous et de Son sang répandu pour nos péchés. Lorsque Jésus institua la cène, Il le fit après un souper ; c’est pourquoi, dans les premiers temps de l’Église, lorsque les disciples se réunissaient pour rompre le pain, ils commençaient par prendre ensemble un repas. Mais, hélas ! bientôt la chair toujours rebelle, cette chair qui ne sert jamais de rien, se mêla à cette sainte fête, de telle sorte qu’au lieu de se souvenir de Jésus, de Sa mort, de Son retour, de cette œuvre par laquelle le ciel nous a été ouvert, on mangeait et on buvait pour satisfaire la chair.

C’est pourquoi il leur est dit que ce n’est pas là manger la cène du Seigneur, et que celui qui en mange et en boit indignement mange et boit un jugement contre lui-même, ne discernant pas le corps du Seigneur ; puis il ajoute : « C’est pour cela qu’il y a plusieurs infirmes, plusieurs malades parmi vous, et que quelques-uns sont morts ». Voilà donc ce qu’était ce jugement, cette condamnation, comme on disait à tort, qui a si souvent effrayé des consciences délicates qui, craignant d’avoir mangé indignement la cène du Seigneur, s’appliquaient la menace de l’apôtre. Et pourtant, ici encore, un examen tout simple de la Parole aurait réjoui l’âme inquiète, en lui montrant tout l’amour, toutes les ressources qui se trouvent dans le cœur de Dieu.

Après avoir dit, verset 30 : « C’est pour cela qu’il y a parmi vous des infirmes, des malades, et que plusieurs sont morts », Paul ajoute : « Si nous nous jugions nous-mêmes, nous ne serions point jugés. Mais quand nous sommes ainsi jugés, nous sommes châtiés par le Seigneur, afin que nous ne soyons pas condamnés avec le monde ». Quelle grâce de notre Père ! S’Il nous châtie, c’est pour que nous ne soyons pas condamnés avec le monde. — Ce n’est donc pas d’une condamnation qu’il s’agit dans le verset qui nous occupe, ce n’est surtout pas d’une condamnation éternelle ; c’est d’un jugement, afin que nous ne soyons pas condamnés.

Un autre péché très grave se manifesta encore parmi les Corinthiens : l’incestueux, 1 Corinthiens 5 ; — et ici encore l’apôtre, revêtu de la puissance de l’Esprit, dans une sainte indignation, dit : « Au nom de notre Seigneur Jésus, vous et mon esprit étant assemblés, avec la puissance de notre Seigneur Jésus Christ, j’ai jugé de livrer un tel homme à Satan pour la destruction de la chair, afin que l’âme soit sauvée dans le jour du Seigneur Jésus… ». Pour que l’âme soit sauvée, quelle grâce ! Mais quelle triste chose qu’un chrétien qui marche selon la chair, quelle perte pour lui, quel déshonneur pour notre Seigneur, quel opprobre pour toute la famille, quel travail pour ce Père de grâce, ce Dieu d’amour qui n’aime qu’à bénir, de le forcer à châtier, quelle triste chose d’être retranché, livré à Satan, à cause de ses infidélités, de ne plus être jugé capable de rester ici-bas pour rendre témoignage à la bonté, à la grâce de Dieu et à l’œuvre parfaite de Jésus !

Hélas ! souvent par nos infidélités nous forçons Dieu, ce Père qui ne voudrait que bénir Ses enfants, nous Le forçons, dis-je, à nous corriger. Le jugement de Dieu commence par Sa maison ; c’est ici-bas que tout se traite pour la famille. Celui qui croit ne vient point en jugement, mais il est passé de la mort à la vie ; l’enfant de Dieu sera semblable à Christ lorsqu’il Le verra ; mais il peut être châtié jusqu’à la mort, s’il ne se juge pas, s’il n’écoute pas la voix du Père lorsqu’Il le reprend. Les Corinthiens avaient péché à la mort ; il y a tel péché qui va à la mort, je ne dis pas de prier pour ce péché-là.

Aaron, le chef de la sacrificature, est châtié à la mort ; Moïse lui-même, ce fidèle serviteur qui avait été admis en la présence de Dieu, qui conversait avec Lui face à face, qui si souvent avait fléchi Dieu par ses prières pour le peuple d’Israël, ce Moïse, plus doux qu’aucun des fils des hommes, ne fut-il pas châtié de mort à cause des eaux de Meriba ? Dieu lui avait dit : « Parle au rocher et il donnera de l’eau ». Ce rocher, qui était Christ, avait déjà été frappé une fois ; c’était assez pour qu’il pût constamment en jaillir des eaux rafraîchissantes. Moïse, au lieu de parler au rocher, dit au peuple : « Vous, rebelles, écoutez maintenant, ferons-nous sortir de l’eau de ce rocher ? » et il frappa deux fois le rocher, au lieu de lui parler (Nomb. 20). Il se glorifia lui-même et ne sanctifia pas Dieu en la présence du peuple. Aussi plus tard l’Éternel dit à Moïse : « Monte sur cette montagne… et regarde le pays de Canaan que je donne en possession aux enfants d’Israël ;… tu verras le pays, mais tu n’y entreras point,… parce que vous ne m’avez point sanctifié au milieu des enfants d’Israël » (Deut. 32). Moïse meurt, Dieu Lui-même l’ensevelit ; ce fidèle serviteur qui, pendant quarante ans, avait porté toute la charge du peuple, toute la fatigue du désert, doit mourir au moment où il voit cette terre de Canaan, objet de son espérance et de la promesse. Il était encore plein de vigueur ; il aurait pu, soutenu de Dieu comme il l’avait été jusque-là, être encore longtemps utile à ce peuple qu’il avait porté avec la tendresse d’une mère ; il est retranché, c’est une perte pour lui, le temps de faire quelque chose pour le peuple et par là pour Dieu est passé ; mais où le retrouvons-nous, ce Moïse châtié de Dieu ? Nous le voyons sur la montagne, dans la gloire magnifique, s’entretenant avec Jésus transfiguré et avec Élie transmué, des souffrances qui attendaient le Christ à Jérusalem.

Paul, qui est ravi pendant son ministère au troisième ciel, dans le paradis, peut dire avec connaissance que « déloger pour être avec Christ est beaucoup meilleur », et pourtant il a confiance qu’il demeurera avec eux tous pour l’avancement et la joie de leur foi. Malgré les peines de tous genres que ce fidèle serviteur rencontrait sur son chemin, lui qui était chaque jour comme livré à la mort, il est évident qu’il regardait comme une plus grande grâce de travailler encore pour son Seigneur dans l’Église que de déloger. Souvent pour nous aussi la fatigue, les peines, les tribulations du temps présent nous font désirer de quitter le désert. Je ne pense pas que ces sentiments soient agréables à Dieu. Si ce n’est pas Jésus Lui-même qui est le mobile de nos pensées, et l’objet de nos désirs, ce ne sont souvent que des murmures. Si c’est Jésus qui nous occupe, ne serons-nous pas heureux de rendre, avec nos frères, témoignage à Son grand amour ; — et d’annoncer Sa grâce, jusqu’à ce qu’Il vienne, pendant que c’est encore le temps favorable, le jour du salut ; pendant qu’il y a encore tant d’âmes qui sont au bord du précipice et que nous avons la liberté d’inviter de la part du Seigneur à venir à Lui, parce que tout est prêt pour les recevoir, le vrai Agneau de Dieu ayant été immolé, la paix entre Dieu et les hommes étant faite, la rémission des péchés accordée ? Si nous pouvons contribuer à l’avancement et à la joie de la foi des saints, et prêcher la bonne nouvelle aux pécheurs, ne regarderions-nous pas comme une grâce, malgré la lassitude du voyage, de demeurer pour publier les vertus de Celui qui nous a appelés des ténèbres à Sa merveilleuse lumière ? Que Dieu nous préserve, dans tous les cas, d’être retranchés à cause de nos infidélités ; jugeons-nous nous-mêmes afin que nous ne soyons pas jugés par le Seigneur.


Il y a encore deux passages, sur lesquels je désire attirer votre attention : Hébreux 6, 4 et 6, et 10, 26 à 29. Que Dieu me donne de demeurer dans Sa pensée et que par là rien ne soit retranché, ni ajouté, ni mal interprété dans Sa bonne Parole, qui est toute divinement inspirée et propre à enseigner, à convaincre, à corriger et à instruire selon la justice.

Il est bon, pour comprendre les choses souvent difficiles de l’épître aux Hébreux, de ne pas oublier que c’est à des Juifs qu’elle a été écrite. Dès le premier verset, on voit que ce n’était pas aux croyants d’entre les Gentils qu’elle s’adresse : « Dieu ayant autrefois parlé à nos pères par les prophètes, nous a parlé en ces derniers temps par le Fils, qu’il a établi héritier de toutes choses ».

Les Gentils étaient sans Dieu dans le monde. Les pères étaient Abraham, Isaac et Jacob. Parmi les Juifs croyants, il y en avait plusieurs qui avaient une tendance à se remettre sous l’ancien ordre de choses ; cela n’était pas étonnant, puisque c’était Dieu Lui-même qui avait institué leur loi, leurs ordonnances, leur culte. L’apôtre s’applique, dans cette épître, à leur montrer la supériorité de Christ sur tous les personnages les plus éminents de l’Ancien Testament et sur toutes les choses qui n’étaient que l’ombre de Celui qui est venu, non pour abolir mais pour accomplir toutes ces ordonnances qui, quoique parfaites comme Celui qui les avait données, étaient contraires à l’homme parce qu’elles exigeaient de lui quelque chose qu’il ne pouvait accomplir : « Fais ces choses, et tu vivras ». Ces ordonnances, Christ les a annulées, les ayant clouées à la croix.

Dans les deux premiers chapitres, nous voyons la supériorité de Christ sur les anges. Auquel des anges a-t-Il jamais dit : « Tu es mon fils » ? Dans le chapitre 3, Sa supériorité sur Moïse qui, comme serviteur, a été fidèle dans la maison, tandis que Jésus l’a été, comme Fils, sur Sa propre maison ; et par là Il a été jugé digne d’une gloire d’autant plus excellente que celui qui a bâti la maison est plus grand que la maison elle-même. Au chapitre 4, nous voyons que si Josué eût introduit le peuple dans le repos, il ne parlerait plus d’un autre jour de repos ; c’est Jésus qui est entré dans le vrai repos, et c’est vers celui-là que l’apôtre veut diriger les regards des Hébreux. Aaron, au chapitre 5, est montré comme sacrificateur, pris d’entre les hommes, et par là environné d’infirmités ; mais Jésus comme Fils est établi sacrificateur éternellement selon l’ordre de Melchisédec. Après avoir ainsi fait voir la supériorité de Jésus sur tout l’ancien ordre de choses, l’apôtre, au chapitre 6, exhorte les Hébreux à laisser la parole du commencement du Christ, à s’avancer vers la perfection, en ne s’arrêtant pas à jeter de nouveau le fondement de la repentance des œuvres mortes, de la foi en Dieu, etc.

Les Juifs qui avaient cru et qui ainsi étaient participants du Saint Esprit et des dons célestes, avaient néanmoins une telle tendance à retourner à la loi, que nous voyons ceux de Galatie sévèrement repris : « Qui vous a ensorcelés pour que vous n’obéissiez plus à la vérité ? ». Les Hébreux avaient ce même esprit. Ils retournaient à Moïse ; c’est pour cela que Dieu place une barrière au bord de ce précipice, en mettant dans la bouche de l’apôtre ces paroles effrayantes : « Or il est impossible que ceux qui ont été une fois éclairés, qui ont goûté du don céleste, et qui sont devenus participants de l’Esprit Saint, et qui ont goûté la bonne parole de Dieu et les miracles du siècle à venir, et qui sont tombés, soient renouvelés encore à la repentance, ayant crucifié pour eux-mêmes le Fils de Dieu, et l’exposant à l’opprobre ». S’ils retombent ou qui sont tombés ; ce sont là les expressions que nous devons examiner, puisqu’elles sont l’occasion de la sentence. « S’ils retombent », cela veut-il dire : s’ils pèchent de nouveau, s’ils commettent de nouvelles fautes ? Hélas ! s’il en était ainsi, qui pourrait ne pas s’appliquer cette portion de l’Écriture, et par conséquent ne pas être au désespoir ? Grâces à Dieu, il n’en est pas ainsi ; nous savons que « si quelqu’un a péché nous avons un avocat auprès du Père, Jésus Christ le juste », et que : « si nous confessons nos péchés, il est fidèle et juste pour nous les pardonner et nous purifier de toute iniquité ».

S’ils retombent ! Où ?… D’où ils étaient sortis, savoir dans le judaïsme ; car en y retournant, les chrétiens d’origine juive, s’identifiaient de nouveau avec la nation meurtrière, avec ceux qui avaient crié : Crucifie, crucifie-Le — avec ceux qui avaient appelé sur eux le sang de Jésus, en condamnation ! C’est ainsi qu’autant qu’il était en eux, ils crucifiaient de nouveau le Fils de Dieu etc. — ils devenaient complices de la crucifixion. Ce péché donc ne pourrait se commettre que par des chrétiens qui se feraient juifs. Il est évident que c’est essentiellement d’une question de doctrine qu’il s’agit dans ces versets ; aussi l’apôtre ne veut-il pas que les frères soient effrayés par ces menaces. Au verset 9, il s’empresse de les rassurer : « Or nous sommes persuadés, par rapport à vous, bien-aimés, de meilleures choses, et convenables au salut, quoique nous parlions ainsi ».

Et au verset 11 : « Or nous souhaitons que chacun de vous montre la même diligence pour la pleine certitude de l’espérance ». « La pleine certitude de l’espérance », c’est là ce que nous sommes appelés à garder en nous y appliquant avec soin. Cette espérance est une ancre ferme qui, au lieu de nous faire retourner en arrière à la loi et aux ordonnances, nous fait pénétrer jusqu’au-dedans du voile, où Jésus est entré comme notre précurseur, ayant été fait sacrificateur éternellement selon l’ordre de Melchisédec. Cette plénitude d’espérance, à laquelle nous sommes appelés, est basée sur la valeur infinie de Christ devant Dieu. Douter n’est pas de l’humilité, c’est mépriser, déshonorer l’œuvre parfaite de Celui qui pour nous a été obéissant jusqu’à la mort de la croix.

Dans les chapitres 7 à 9, l’apôtre continue à mettre en évidence l’infinie supériorité de l’œuvre de Jésus sur tout ce qui s’était fait sous la loi qui n’a rien amené à la perfection. Jésus, étant sacrificateur selon l’ordre de Melchisédec, devient le garant d’une beaucoup plus excellente alliance et, parce qu’Il demeure éternellement, Il peut sauver pour toujours ceux qui s’approchent de Dieu par Lui, étant toujours vivant pour intercéder pour eux.

Le premier tabernacle avait des ordonnances et un sanctuaire terrestre ; mais Christ étant venu pour être le souverain sacrificateur des biens à venir, par un plus excellent et plus parfait tabernacle qui n’est pas fait de main, est entré une fois dans les lieux saints avec Son propre sang, et non avec le sang des taureaux et des boucs, après avoir obtenu une rédemption éternelle. La loi était donc l’ombre des biens à venir et non la vraie image des choses ; le sang des taureaux et des boucs ne pouvait pas ôter les péchés. Alors Jésus a dit : « Je viens, ô Dieu ! pour faire ta volonté », et c’est par cette volonté que nous sommes sanctifiés. « Puis donc, mes frères, que nous avons une pleine liberté d’entrer dans les lieux saints par le sang de Jésus, approchons-nous avec un cœur vrai, en pleine assurance de foi, ayant les cœurs par aspersion purifiés d’une mauvaise conscience. Retenons la profession de notre espérance sans varier, car celui qui a fait les promesses est fidèle, et prenons garde l’un à l’autre pour nous exciter à l’amour et aux bonnes œuvres ; n’abandonnant pas le rassemblement de nous-mêmes, comme quelques-uns ont accoutumé de faire. Car si nous péchons volontairement, après avoir reçu la connaissance de la vérité, il ne reste plus de sacrifice pour les péchés, mais une certaine attente terrible de jugement et l’ardeur d’un feu qui va dévorer les adversaires ». L’expression, « si nous péchons volontairement, après avoir reçu la connaissance de la vérité », me paraît avoir le même sens que celle de : « s’ils retombent » du chapitre 6. C’était pécher volontairement que d’abandonner le rassemblement des fidèles pour retourner aux ordonnances, et l’apôtre veut qu’ils sachent que, s’ils se remettent sous la loi, il n’y a plus comme précédemment les sacrifices qui se faisaient chaque année pour les péchés. Jésus s’est offert une fois pour toutes, Lui juste, pour les injustes. Dieu n’enverra pas une seconde fois Son Fils pour ceux qui ne se contentent pas de Christ ou qui L’abandonnent, et qui par là foulent aux pieds le Fils de Dieu et tiennent pour une chose profane le sang de l’alliance par lequel ils avaient été sanctifiés, et qui ainsi outragent l’Esprit de grâce. Or le juste vivra de la foi et non de la loi. Si quelqu’un se retire, Dieu ne prend point de plaisir en lui ; mais pour nous nous ne sommes pas de ceux qui se retirent pour la perdition, mais de ceux qui croient pour la conservation de leur âme.

Que Dieu nous accorde la grâce de demeurer fermes, inébranlables dans la foi, abondant toujours dans l’œuvre du Seigneur, marchant selon une même règle dans les choses auxquelles nous sommes parvenus, ne nous laissant pas entraîner à tous vents de doctrines, retenant l’espérance sans varier.


En résumé, nous avons vu que : 1º le blasphème de l’Esprit, c’est le péché qu’ont commis les pharisiens en disant que Jésus chassait les démons par la puissance du diable et non par l’Esprit de Dieu.

2º Le péché qui va à la mort est à la mort du corps et non de l’âme.

3º Manger et boire sa condamnation, c’est un jugement et non une condamnation, et ce jugement était porté sur le corps et non sur l’âme, puisqu’il est dit : « Quand vous êtes ainsi jugés, c’est afin de n’être pas condamnés avec le monde ».

4º Ceux qui après avoir été éclairés retombent, sont ceux qui abandonnent Christ pour retourner au judaïsme, et qui par là pèchent volontairement après avoir reçu la connaissance de la vérité ; ils rentrent dans un ordre de choses où ils ne retrouveront plus de sacrifices pour leurs péchés, mais une attente terrible de jugement.

Je prie instamment ceux de mes lecteurs auxquels ces sujets ne seraient pas clairs et qui pourraient en être troublés, de lire avec attention ces portions de l’Écriture, et, je n’en doute pas, leur tristesse sera changée en joie et leur bouche s’ouvrira pour bénir, louer Celui qui, dans Sa grâce, a apporté par Jésus le remède pour toutes nos infirmités.

Puissions-nous, par une sainte conduite, par des œuvres de piété, par une séparation complète de tout ce qui est mal, montrer notre reconnaissance et notre amour à Celui qui nous a tant aimés !