Le « choix » de la foi

W.J. Lowe
1903

Lève-toi, monte à Béthel, et habite là.

Nos jours sont caractérisés par l’absence de toute règle en pensées et en actes. Les hommes laissent libre cours à leur imagination et à la folie de leurs raisonnements (Eccl. 7, 29). Il importe que nous y prenions garde, non pas pour substituer d’autres raisonnements aux leurs, mais pour chercher à atteindre les cœurs et les consciences au sujet de ce qui est dû à Dieu et à Christ. Plus nos âmes sont pénétrées de la grâce, du fait que notre salut est entièrement l’œuvre de Dieu en notre faveur, plus aussi nous nous approcherons de Lui avec le sentiment profond que nous avons besoin d’être gardés dans ce mauvais jour.

Il nous reste peu de temps pour apprendre par la pratique ce qu’était le sentier de Christ, mais en un jour de tolérance apparente et d’indifférence, il s’agit plus que jamais de choisir, et Dieu y donnera Sa bénédiction. « Marie a choisi la bonne part qui ne lui sera point ôtée ». Ruth choisit aussi. Un baiser d’adieu ne pouvait la satisfaire ; elle s’attacha résolument à Naomi dans son affliction, et reçut une pleine récompense. Caleb, après avoir suivi par la foi un chemin de souffrance et de fidélité envers Dieu, usa de son privilège quand le moment fut venu, et choisit Hébron, le lieu où se trouvait la caverne de Macpéla. La foi opère par l’amour et évite les raisonnements. L’apôtre, s’adressant aux Philippiens, demande que « leur amour abonde encore de plus en plus, en connaissance et toute intelligence, pour qu’ils discernent les choses excellentes » (Phil. 1, 9-10).

S’agit-il des affaires ordinaires de la vie, de nos circonstances, le chemin de la foi consiste à ne pas choisir, mais à s’en remettre paisiblement à ce que Dieu nous a préparé d’avance. Lot, se confiant en lui-même, choisit de son propre mouvement la plaine du Jourdain, dressa ses tentes jusqu’à Sodome, puis entra dans cette ville pour y habiter. Un premier avertissement de Dieu resta sans effet sur son âme ; il fut délivré cette fois-là par l’intervention de son oncle, mais il ne désirait point quitter Sodome ; et lorsqu’enfin cette ville inique fut détruite, il perdit tout, et la plaine magnifique, objet de sa convoitise, fut changée en une fournaise embrasée. Abraham, au contraire, instruit par l’expérience humiliante qu’il avait faite en Égypte, apprit la première leçon du désert, c’est qu’il ne pouvait avoir confiance en lui-même, et, ayant acquis ainsi la conviction de son incompétence à faire un choix, il s’estima heureux de laisser Dieu choisir pour lui et en reçut toute la bénédiction.

Le contraire a lieu dans les choses spirituelles. Dieu veut que nous choisissions les choses excellentes dans le chemin que Sa grâce nous ouvre. Nous n’avons pas à chercher des choses éclatantes ou extraordinaires, à accomplir quelque effort remarquable pour attirer l’attention ou faire parler de nous ; nous n’avons qu’à marcher de cœur et joyeusement dans le chemin du Seigneur, cherchant les choses qui sont en haut, où le Christ est assis à la droite de Dieu, et recevant de Sa main ce qu’Il place devant nous.

Ruth n’avait pas à quitter son chemin pour sortir de son pays et unir son sort à celui de Naomi. Un lien tranquille et naturel s’était formé entre elle et sa belle-mère ; elle le conservait, attentive à ne pas négliger ni abandonner ce que Dieu avait placé devant elle ; et pleine d’une confiance paisible, elle pouvait dire à Naomi : « Ton peuple sera mon peuple, et ton Dieu sera mon Dieu ». Rien n’était plus simple. On ne trouve chez elle ni confiance en elle-même, ni résolution éclatante, ni affirmation solennelle au sujet de l’avenir ; calme et ferme, elle n’avait d’autre but que de rester attachée à ce qui lui appartenait déjà par grâce, en un temps où la mort semblait avoir détruit tous ses projets d’avenir.

Caleb nous offre un exemple semblable. Au nombre des espions envoyés pour reconnaître le pays, il était parti par obéissance ; traversant Canaan du sud au nord, il avait atteint le Liban, et en était revenu s’attachant à la promesse divine : « Si le pays que ton pied a foulé n’est à toi pour héritage ! » (Jos. 14, 9). Il avait donc le droit de choisir son héritage dans la meilleure partie du pays promis à ses pères. Après avoir attendu patiemment pendant quarante-cinq années, il choisit, avec ses faubourgs, la cité où vivaient les fils d’Anak, et où les espions avaient senti avec terreur leur insignifiance vis-à-vis des géants (Nomb. 13, 34). Hébron, seule ville de Canaan mentionnée dans ce chapitre des Nombres, était la demeure des géants. Durant sept années de combats, Josué et tout Israël n’avaient pas inquiété ces formidables Anakim ; et pourtant, Caleb ose dire : « Peut-être que l’Éternel sera avec moi, et je les déposséderai, comme l’Éternel a dit » (Jos. 14, 12). Il fait preuve d’une foi simple qui persévère humblement jusqu’à la fin ; il a en même temps l’assurance que donne la foi — pas de prétentions, pas de vanterie, mais la calme confiance d’un homme qui marche avec Dieu. Aussi « la campagne de la ville et ses hameaux » lui furent-ils octroyés à titre perpétuel (Jos. 21, 12). Le « premier lot » des fils d’Aaron (v. 10-11) leur fut donné dans cette même cité. Tel est le choix de la foi opérante par l’amour, car l’amour doit avoir un objet, connu de l’âme et apprécié par elle. Sans cet objet, la sainteté ne nous est pas possible.

Élisée nous offre un autre exemple frappant de la simplicité du choix de la foi ; nous voyons chez lui une âme retenue, comme par une chaîne d’or, dans le chemin ordonné de Dieu pour la bénédiction. « L’Éternel est vivant, et ton âme est vivante, que je ne te laisserai point » (2 Rois 2) ; telle est la simple réponse du prophète, mis trois fois à l’épreuve, à une épreuve extraordinaire ; le résultat fut l’expression d’une communion reconnue, puis la vue émouvante d’Élie, montant au ciel sans passer par la mort, enfin le don d’une double mesure de l’Esprit, quand Élisée releva le manteau précieux qui lui était échu.

« Approchez-vous de Dieu », dit Jacques, « et il s’approchera de vous » (Jacq. 4, 8). Que ce soit toujours plus notre part, à mesure que le monde est entraîné dans le courant de ses pensées et de sa vaine gloire, afin que nous puissions servir Christ sans ostentation et trouver notre joie dans cette humble condition, n’ayant d’autre pensée que d’être approuvés de Lui jusqu’à Sa venue. Il faut que nos yeux et notre cœur soient fixés sur ce qui est invisible et éternel.

La patience et la persévérance pour l’amour de Christ recevront leur récompense à Sa venue. Si le monde est contre nous, nous savons qu’il était contre Lui et le haïssait. Dans le sentier de la foi, l’occasion de faire notre choix pour Lui nous sera fournie, quand la discipline nécessaire à l’âme aura produit ses fruits. Pour Caleb, une attente de quarante-cinq ans ne fut point une perte, bien au contraire. Que chacun de nous sache mieux ce que signifie : « Garder la parole de la patience de Christ » !