Le travail de Dieu dans l’âme

(Traduit de l’anglais)
C.H. Mackintosh

[Courts articles 62]

Nous avons de temps en temps écrit sur le travail de Dieu pour nous. Ce travail est à la base même de tout vrai christianisme pratique et de toute religion personnelle. La connaissance de ce qui a été accompli par la mort expiatoire de Christ est essentielle pour la paix et la liberté de l’âme. Nous ne pouvons trop souvent répéter ou trop fortement insister sur la vérité fondamentale que c’est l’œuvre opérée pour nous, et non l’œuvre opérée en nous, qui nous sauve. Nous ne devrions non plus jamais oublier que la foi est le regard extérieur de l’âme, non son regard intérieur.

Tout cela est de la plus grande importance, et le lecteur peut bien être assuré que rien n’est plus éloigné de nos pensées que d’écrire une seule ligne qui tendrait à minimiser son importance. Mais cette grande et intéressante ligne de vérité a été largement exposée. C’est pourquoi nous nous sentons tout à fait libres d’aborder, dans cet article, un sujet qui devrait toujours tenir une place en évidence dans nos esprits — l’œuvre de Dieu en nous. Que l’Esprit de Dieu guide nos pensées tandis que nous méditons sur ce thème !

En suivant le travail du Saint Esprit dans l’âme d’un pécheur, il y a trois choses distinctes à remarquer. Tout d’abord, Il crée un besoin. Ensuite, Il révèle un objet qui répond à ce besoin. Et enfin, Il permet à l’âme de s’emparer de cet objet. Ce sont les trois étapes du travail de l’Esprit dans l’âme, et rien ne peut être plus intéressant que de les suivre. Il y a diverses autres branches du travail de l’Esprit Saint, mais nous nous limitons maintenant à cette branche particulière qui concerne l’âme individuelle dans son passage des ténèbres à la lumière et du pouvoir de Satan à Dieu. Et là, la première chose que nous avons à remarquer est

Le besoin créé

Ce besoin peut se développer de différentes manières. Dans certains cas, il prend la forme d’un profond sentiment de culpabilité ; dans d’autres, d’un sentiment de vanité complète et de vide de tout sous le soleil. Sans aucun doute, dans de nombreux cas, nous pouvons trouver toutes ces voies opérant ensemble.

Prenons un exemple ou deux des pages de l’inspiration. Regardons Pierre au lac de Génésareth (Luc 5). À peine un rayon de lumière divine eut-il pénétré dans son âme avec une puissance qui le convainquait de péché, qu’il s’exclame : « Seigneur, retire-toi de moi, car je suis un homme pécheur ». Nous avons là un sentiment de culpabilité — un sentiment profond et aigu de péché et d’indignité personnels, le résultat d’une opération divine dans l’âme de Pierre. C’est très important. Il est bon de se souvenir que la question du péché doit être soulevée et réglée dans la conscience de l’homme. Le péché est une chose sérieuse, au jugement de Dieu, et il doit être ressenti comme tel dans l’âme du pécheur. Pierre sentit qu’il n’avait ni droit ni titre à se trouver dans la présence de cette personne bénie, dont la gloire venait de resplendir sur lui. Il se sentait totalement impropre à être là. Il sentait que le péché et la sainteté ne pouvaient se trouver ensemble, pas plus que la lumière et les ténèbres.

C’était un sentiment juste, en Pierre ; c’est un sentiment juste dans tous les cas. C’est toujours une bonne chose de commencer avec un profond sentiment de culpabilité personnelle. Il est bon que la flèche de la conviction de péché perce jusqu’au centre même de l’âme. Il est bon que le soc de la charrue brise le sol en jachère et creuse un profond sillon dans le cœur. Nous trouvons invariablement que les chrétiens les plus fermes et les plus solides sont ceux qui ont, au début, passé par les eaux les plus profondes et enduré les exercices les plus intenses.

Nous ne voulons pas dire que les exercices de l’âme ont quoi que ce soit affaire avec la base du salut de l’âme, pas plus que les sentiments d’un homme dans une maison en feu n’ont affaire avec la sortie de secours par laquelle il descend de l’immeuble en feu. Mais cependant, nous croyons que c’est une bonne chose pour l’âme de commencer avec un sentiment complet et très clair de sa culpabilité et de sa ruine — une compréhension juste du jugement de Dieu sur le péché. Plus on aura senti intensément son affreuse position dans la maison en feu, plus on appréciera pleinement l’issue de secours, l’esprit qui l’a prévue et la main qui l’a fournie. Et il en est ainsi dans le cas du pécheur ; plus il sentira sa culpabilité et son indignité, plus il appréciera le précieux sang qui annule sa culpabilité et l’amène sans tache dans la présence d’un Dieu saint qui hait le péché.

Il est à craindre que, dans de nombreux cas, le travail de conviction ou de repentance soit très superficiel. Nous sommes frappés aussi de ce que parfois, dans notre grande anxiété pour amener l’âme à la paix, nous interférons avec le travail de conviction. Nous précédons, au lieu de suivre le Saint Esprit. C’est très sérieux. C’est une chose périlleuse de toucher au travail de Dieu dans l’âme. C’est une très merveilleuse grâce qui daigne nous utiliser, mais prenons garde de ne pas courir en avant du Saint Esprit. Notre place est de prendre note de Ses opérations, non pas de les gâcher.

Si, par exemple, nous rencontrons une âme convaincue de péché, il se peut que cette œuvre ne soit pas encore complète ; elle peut n’être qu’en cours. Que devons-nous faire ? Chercher à presser l’individu à faire confession de sa foi en Christ, lui extirper une reconnaissance de paix avec Dieu ? En aucun cas ; faire ainsi serait endommager la précieuse œuvre de Dieu dans l’âme. Alors, que devons-nous faire ? Chercher à poursuivre à la suite du Saint Esprit, pour être Son instrument en continuant l’œuvre qu’Il a en main. Il rendra certainement parfaite Son œuvre. Si nous nous attendons à Lui, Il nous enseignera quoi faire et comment le faire, que dire et quand le dire. Si Ananias était allé vers Saul une heure avant la fin des « trois jours », il serait venu trop tôt. Ces jours étaient des jours sérieux — des jours qui laissèrent leur empreinte dans toute l’histoire de l’apôtre — des jours qui ne devaient jamais être oubliés. C’étaient les jours durant lesquels ses yeux, fermés au monde extérieur, étaient tournés vers l’intérieur de lui-même et en arrière sur ses voies. Et n’avons-nous pas raison d’affirmer que ç’aurait été une intrusion peu judicieuse, voire profanatrice, si Ananias était venu interférer avec le profond et saint travail qui était en cours dans l’âme de cet homme remarquable ? Sans le moindre doute ; et il en est ainsi dans tous les cas. Nous pouvons être certains de cela, que nous ne faisons que blesser les âmes, si nous essayons de les presser par notre travail, ne serait-ce que de la largeur d’un cheveu au-delà du point actuel où les a conduites le travail de Dieu.

Tout ministère véritablement spirituel tendra à approfondir dans l’âme ce caractère particulier de l’œuvre que le Saint Esprit opère à ce moment-là. C’est pourquoi, si nous entrons en contact avec quelqu’un en qui le travail de conviction ou de repentance est en cours, nous ne devons pas chercher trop vite à presser l’âme à la confession d’avoir trouvé la paix. Si nous cherchons à être des collaborateurs de Dieu, ce sera notre place de veiller, avec d’ardentes prières et une sainte diligence, sur les progrès du travail divin — de compter beaucoup sur Dieu afin qu’Il se plaise à nous utiliser comme Ses instruments pour poursuivre les propos de Sa grâce. C’est une œuvre très bénie, mais elle est très solennelle et demande beaucoup de spiritualité, beaucoup de proximité de Christ, beaucoup de renoncement à soi. Les erreurs les plus graves sont commises par des mains malhabiles entreprenant de s’occuper de cas dans lesquels le travail de l’Esprit de Dieu est en cours. Nous devons nous souvenir que l’œuvre de Dieu est parfois très lente, mais elle est toujours très sûre. Nous, au contraire, sommes souvent impétueux. Dans notre désir d’atteindre rapidement des résultats, nous pouvons souvent presser l’âme à tort dans une position professée bien au-delà de son état pratique réel. Nous pouvons souvent provoquer des lèvres plus que ce que l’Esprit Saint a opéré dans le cœur. C’est une chose très sérieuse pour tous ceux qui ont affaire avec les âmes.

Mais la grâce de Dieu est entièrement suffisante pour tous les cas. Rien ne peut être plus intéressant que de considérer les manifestations du travail de l’Esprit dans l’âme — de relever les étapes de la nouvelle création de Dieu, l’établissement et le progrès de Son royaume dans le cœur. Loin de nous de presser ou d’encourager une froide indifférence sans cœur envers les précieuses âmes dans leurs exercices spirituels profonds et variés — une espèce de fatalisme des plus misérables qui, sous prétexte de laisser les âmes entièrement dans les mains du Saint Esprit, se débarrasse en réalité de tout sentiment de responsabilité. Dieu nous garde de prêter une quelconque approbation à quoi que ce soit de la sorte. Nous nous sentons profondément responsables de prendre soin des âmes. Nous croyons que tous les chrétiens en sont responsables. De là vient le besoin de faire preuve d’habileté et de tact spirituel en ayant affaire avec les âmes, de manière à ne retarder en aucun cas, mais à faire avancer par tous les moyens l’œuvre bénie de l’Esprit de Dieu en elles.

Mais nous nous sommes plutôt écartés de notre sujet immédiat, vers lequel nous revenons maintenant.

Nous avons déclaré que l’Esprit de Dieu produit quelquefois dans l’âme un sentiment de danger. Il fait peser sur le cœur et la conscience l’affreuse réalité de l’étang de feu et du ver qui ne meurt jamais. Parfois, Il trouve bon de tirer le voile et de révéler ce qui attend tous ceux qui meurent dans leurs péchés. Le sentiment de culpabilité et le sentiment du danger vont souvent ensemble, mais ce sont des exercices distincts, et dans bien des cas, le dernier est le plus proéminent des deux. L’âme est remplie d’horreur à la pensée de brûler éternellement dans les flammes de l’enfer. Le Saint Esprit utilise cette horreur pour faire sentir au cœur son besoin de Christ.

Beaucoup font objection à la prédication du châtiment éternel comme moyen d’amener les âmes à Christ. Non pas qu’ils nient la vérité de ce sujet, mais ils s’interrogent sur le fait qu’il est approprié ou utile. Ils estiment qu’il est plus sage d’insister sur l’amour de Dieu en donnant Son Fils, et sur l’amour de Christ en se donnant Lui-même. Ils jugent qu’il est meilleur et plus efficace d’insister sur les joies et les gloires du ciel, que sur les malheurs et les horreurs de l’enfer. Eh bien, nous n’avons pas un seul instant l’intention de comparer les deux ; aucune personne intelligente ne songerait à agir ainsi. Mais nous devons garder à l’esprit que notre bien-aimé Seigneur, encore et encore, parlait à Ses auditeurs de l’affreux sujet du feu de l’enfer. Lisez Matthieu 5, 22 à 30. Trois fois, dans ce court passage, Il met en garde Ses auditeurs contre le danger de l’enfer.

Il en est aussi ainsi dans ce passage très solennel à la fin de Luc 16. Qui peut le lire sans se sentir pressé par le poids et le sérieux de la parabole ? Quelle présentation du passé, du présent et du futur ! « Mon enfant, souviens-toi ». Ici, la mémoire est ramenée sur le passé. Et quel passé ! La mémoire sera terriblement active, en enfer. « Mais maintenant, tu es tourmenté ». Ici, l’âme perdue est appelée à contempler le présent. Et quel présent ! Tourmentée dans les flammes de l’enfer ! Mais n’y a-t-il pas de fin, pas d’espoir ténu que cela cesse ? Non, aucunement. « Un grand gouffre est établi ». Voilà le futur. Et quel futur ! L’enfer est une réalité éternelle. Si le feu de l’enfer n’est pas éternel, quelle serait la force du mot « établi » ?

Le passage ci-dessus n’est-il pas tout à fait suffisant pour démontrer que l’Esprit Saint utilise la vérité du châtiment éternel pour créer un besoin dans l’âme immortelle ? Très certainement. Et s’Il agit ainsi, ne le devrions-nous pas ? L’apôtre Paul ne discourait-il pas devant Félix sur le sujet du jugement à venir, et d’une manière telle qu’elle fit trembler l’homme sensuel sur son trône ? Ah, oui ! c’est une bonne chose, pour l’âme d’un pécheur, d’être impressionnée par un profond sentiment du danger de l’enfer pour elle. Et quand nous trouvons une âme impressionnée ainsi, que devons-nous faire ? Ne devons-nous pas chercher à renforcer cette impression ? Ne serait-ce pas notre sagesse de poursuivre ce que le Saint Esprit est manifestement en train d’opérer ? Oui, en vérité. Agir autrement serait entraver au lieu d’approfondir l’œuvre de Dieu dans l’âme. L’Esprit béni nous enseignera le bon moment pour présenter l’Objet divin pour répondre au besoin de l’âme exercée. Le Maître prononcera au bon moment le commandement : « Déliez-le, et laissez-le aller ». Dieu fera Son œuvre et nous y utilisera, si nous nous attendons à Lui. Tout ce que nous désirons est d’insister auprès du lecteur sur la réalité du travail de Dieu dans l’âme et sur la nécessité de se tenir en garde contre tout ce qui ressemblerait à de la hâte injustifiée en pressant les âmes au-delà de la mesure de l’opération de l’Esprit. Nous devons prendre garde à ne pas panser légèrement la plaie et crier : Paix, quand il n’y a point de paix, oui, là où il n’y a pas même de vraie préparation pour cette bienheureuse paix que Jésus a faite par le sang de Sa croix, que Dieu proclame dans Sa Parole et dont le cœur jouit par la foi, par la puissance du Saint Esprit.

Ayant jeté un coup d’œil à deux de ces manières selon lesquelles l’Esprit de Dieu travaille dans l’âme pour produire un sentiment de besoin — en convainquant la conscience de culpabilité, et en faisant peser sur l’esprit la juste crainte du danger — il nous reste à considérer une troisième méthode, qui est de faire sentir au cœur la vanité complète et l’insatisfaction quant à tout ce que ce pauvre monde peut offrir, en matière de plaisir et de jouissance.

Ce n’est pas du tout inhabituel. Nous rencontrons fréquemment des chrétiens très mûrs qui disent avoir été amenés à Christ, non pas tant par un sentiment de culpabilité ou par un sentiment de danger, mais par une aspiration intense à quelque chose d’indéfinissable — un vide douloureux dans le cœur, un sentiment de lassitude, de solitude et de désolation. Ils ont senti un vide que rien dans le monde ne pouvait combler. Ils avaient le cœur malade et étaient déçus. Sans doute, ils sentaient et reconnaissaient la grande vérité qu’ils étaient des pécheurs. De plus, quand ils regardaient vers l’avenir, il sentaient qu’il n’y avait rien d’autre pour eux que la misère et le tourment éternels. Mais alors, le grand trait saillant de l’œuvre divine en eux n’était pas tant la conviction de péché ou la peur du châtiment, que le sentiment d’une désolation et d’une insatisfaction complètes. Ils se trouvaient dans cette condition d’âme que nous montre l’étude du livre de l’Ecclésiaste. Ils avaient essayé du monde sous toutes ses formes, et comme le prédicateur royal, ils l’avaient trouvé être « vanité et poursuite du vent ».

Or nous devons être préparés à cette variété de voies de l’Esprit de Dieu. Nous ne devons pas supposer qu’Il se limitera à un type particulier, dans Ses opérations bénies. Quelquefois, Il produit dans l’âme le plus accablant sentiment de culpabilité, de sorte que le cœur est écrasé par terre, et que rien d’autre n’est ressenti, vu ou pensé, que l’infamie, le caractère odieux et la noirceur du péché. Le sombre catalogue des péchés se dresse comme une grande montagne devant la vision de l’âme, et la fait presque sombrer dans le désespoir. L’âme refuse d’être consolée. La honte et la confusion, le sac et la cendre, sont estimés être la seul part convenable du coupable.

D’autres fois, Dieu trouve bon de placer devant l’âme les terreurs de l’enfer et l’affreuse réalité de passer une éternité dans cette région d’obscurité et de misère indescriptible. Les sombres ombres du futur sont amenées à tomber sur les plus brillantes scènes du présent. La pensée de la colère à venir pèse tellement sur le cœur, que rien ne semble apporter le moindre soulagement ou la moindre consolation. Tout est profonde obscurité et profonde horreur.

Enfin, dans d’autres cas, le divin ouvrier se plaît à éveiller l’âme à la douloureuse découverte et à la conscience qu’il n’y a rien, dans les limites de la terre, qui fournisse une part qui satisfasse un esprit immortel, que tout ce qui est sous le soleil porte sur lui la marque de la mort, que la vie humaine n’est qu’une vapeur qui disparaît rapidement, que si un homme devait vivre un millier d’années et posséder toute la richesse de l’univers et concentrer dans sa seule personne tous les honneurs et toutes les dignités que ce monde peut accorder — serait-il au pinacle le plus élevé de la puissance et serait-il renommé dans le monde entier pour son génie, son intelligence et sa dignité morale — aurait-il tout ce que la terre peut accorder et l’homme mortel posséder — il manquerait encore quelque chose au cœur. Il y aurait encore un vide douloureux. Il y aurait encore le cri : « Oh ! vivement un objet ».

Les opérations de l’Esprit de Dieu dans les âmes des hommes sont ainsi variées. Sans doute, il peut y avoir un sentiment de culpabilité, une crainte du danger, et une conscience douloureuse du vide et de la vanité de toutes les possessions et de toutes les jouissances terrestres, tout à fait indépendamment d’une œuvre divine dans l’âme ; mais nous sommes actuellement uniquement occupés de cette dernière, et nous sentons l’immense importance d’être capables de discerner et d’apprécier le travail de l’Esprit de Dieu dans le cœur de l’homme, comme aussi de chercher à l’aider là-dessus. Nous redoutons fortement tout ce qui ressemble à de l’interférence humaine avec les progrès du royaume de Dieu dans l’âme. Il y a des dangers de tous les côtés. Il y a le danger de jeter un froid sur les convertis, et il y a le danger de confondre les simples œuvres de la nature avec l’action de l’Esprit de Dieu. Et ce n’est pas tout. Nous sommes fréquemment en danger de courir directement à l’encontre du but que le Seigneur a en vue dans Ses opérations avec l’âme. Nous pouvons, par exemple, chercher à extraire la flèche qu’Il a envoyée droit au centre de l’âme. Nous pouvons chercher à couvrir une blessure que Lui voudrait sonder jusqu’au fond.

Toutes ces choses demandent la plus grande vigilance et le plus grand soin, de la part de ceux qui ont à cœur les âmes. Nous sommes, chacun de nous, susceptibles de faire les plus graves erreurs, soit en décourageant et en repoussant les âmes qui devraient plutôt être encouragées et réconfortées, soit en reconnaissant et en accréditant comme étant de Dieu ce qui est simplement le fruit de la nature religieuse à l’œuvre. En bref, c’est une chose sérieuse de chercher à faire l’œuvre de Dieu, de quelque manière que ce soit. Lui seul peut donner la sagesse et la grâce nécessaires dans chaque cas, selon qu’il surgit. Et Il veut, béni soit Son nom, donner abondamment à tous ceux qui s’attendent simplement à Lui. « Il donne une plus grande grâce ». Parole précieuse ! Il n’y a là absolument aucune limite. Elle brille comme une devise inépuisable sur la porte du trésor de notre Père, nous assurant de la plus ample provision « pour le besoin urgent de chaque heure ».

Ne soyons donc pas découragés par l’ampleur et le sérieux du travail, ou par le danger qui l’accompagne. Dieu est suffisant. Le travail est le sien. S’Il daigne nous utiliser comme Ses collaborateurs, dans Sa merveilleuse grâce, comme c’est assurément le cas, Il nous fournira libéralement tout ce qui est nécessaire pour chaque cas qui se produit. Mais nous devons nous attendre à Lui patiemment, humblement et avec confiance. Nous devons chercher à laisser le moi de côté, avec sa propre importance et son excitation agitées. Nous devons chercher, par la grâce, à être débarrassés de cet esprit qui voudrait continuellement pousser en avant ce misérable « moi, moi, moi ». En un mot, la nature doit être gardée dans l’ombre, et Christ seul doit être exalté. Alors, assurément, l’Esprit de Dieu nous emploiera dans la glorieuse œuvre qu’Il poursuit dans les âmes. Il nous donnera l’habileté et la capacité nécessaires pour chaque cas spécifique. Il nous conduira le long de ce chemin dans lequel Lui va et dans lequel aussi Il manifeste les précieux mystères de Sa nouvelle création.

Rien ne peut être plus merveilleux, rien ne peut être plus intensément intéressant, que de suivre les progrès du travail de Dieu dans l’âme. Un poète a exprimé cela en disant :

« C’est ma joie inaltérable,
De voir le bras de mon Sauveur triompher,
De suivre les pas de Sa grâce :
Maintenant, les âmes nées de nouveau, convaincues de péché,
Son sang leur étant révélé intérieurement,
Glorifient l’Agneau en tout lieu »

Mais afin de discerner et d’apprécier — pour ne pas dire coopérer à — ce travail très précieux et sacré, il doit y avoir un œil oint, un cœur circoncis, un pied déchaussé, des mains nettes. L’Esprit de Dieu est très délicat, très facilement attristé, éteint et entravé. Il n’aime pas à avoir du bruit fait au sujet de Son œuvre. Nous avons vu le travail du Saint Esprit tout à fait interrompu en raison de l’excitation profane de ceux qui y étaient engagés.

Il est bon de se souvenir de cela. L’incrédulité entrave le début de l’œuvre de l’Esprit. Une interférence indue gêne aussi son progrès. La plus légère marque du doigt humain est susceptible de souiller le mystérieux et magnifique travail de Dieu. Il est vrai que le Seigneur nous utilisera si nous regardons vraiment à Lui, avec humilité d’esprit et dans le dépouillement de soi. En effet, nous voyons constamment que, en poursuivant Son œuvre, Il nous permet de faire juste autant que nous le pouvons, tandis que Lui, béni soit Son saint nom, fait seulement ce que nous ne pouvons pas. Ceci est illustré de façon frappante dans la scène au tombeau de Lazare, en Jean 11. Là, le Seigneur commande à ceux qui L’entouraient d’« ôter la pierre », parce que c’était quelque chose qu’ils pouvaient faire. Mais c’est Lui qui crie : « Lazare, sors dehors », parce que c’était quelque chose que Lui seul pouvait faire. Alors de nouveau, Il dit : « Déliez-le, et laissez-le aller », leur permettant ainsi de coopérer autant qu’ils le pouvaient.

Il est frappant d’avoir en tout cela un exemple de la manière de faire pleine de grâce du Seigneur avec Ses serviteurs. Dans toutes les petites choses dans lesquelles Il peut les utiliser, Il le fait. Mais oh ! soyons attentifs à ne pas nous mêler de Son travail. Que nous nous contentions de contempler et d’adorer, de suivre les merveilleuses manifestations de cette nouvelle création en laquelle « toutes choses sont de Dieu ». Son œuvre persistera à travers toutes les générations. Tout ce qui porte la marque de Sa main durera éternellement. C’est pourquoi c’est notre sagesse aussi bien que notre bénédiction, de regarder simplement Sa main et la suivre là où Il nous conduit.

« Poursuis ta nouvelle création —
Que nous soyons fidèles et saints,
Joyeux en ton plein salut,
Toujours plus conformes à toi.
Transformés de gloire en gloire,
Jusqu’à ce que nous prenions notre place dans le ciel,
Pour alors te louer et t’adorer,
Perdus dans l’émerveillement, l’amour et la louange ! »

Avant d’entrer dans la deuxième partie de notre sujet, nous nous sentons contraints de poser une ou deux questions précises au lecteur. Nous espérons qu’il supportera que nous le fassions. Nous sommes conscients que certaines personnes n’aiment pas les choses proches et personnelles. Elles préfèrent le simple exposé de la vérité et la laissent faire sa propre œuvre. Eh bien, nous apprécions aussi d’exposer la vérité en puissance de salut ou d’édification au cœur et à la conscience du lecteur ou de l’auditeur.

Mais nous croyons que c’est le devoir absolu de l’écrivain ou de l’orateur de faire de son mieux pour que l’appel, l’exhortation et la sonde ciblée affectent le cœur, atteignent la conscience et éclairent l’intelligence de son lecteur ou de son auditeur. Nous devons nous souvenir que nous avons un double devoir à accomplir. Nous avons à exposer la vérité et nous avons à nous occuper de l’âme. Tous les prédicateurs, ceux qui enseignent et les écrivains, devraient s’en souvenir. Si quelqu’un ne s’occupe que de vérité abstraite, son ministère est susceptible d’être trouvé sans effet pratique et sans fruit. S’il ne s’occupe que des âmes, son ministère se révèlera vide et sans intérêt. S’il s’occupe dûment des deux, il sera trouvé « un bon serviteur du Christ Jésus ».

C’est pourquoi, bien-aimé lecteur, nous sentons que nous laisserions une moitié de notre travail inaccomplie, si nous ne nous détournions pas de temps en temps de notre sujet pour vous adresser un sérieux appel ; et nous voudrions maintenant instamment vous supplier, comme dans la présence immédiate de Celui avec qui nous avons affaire, de prêter toute votre attention à la question qui suit. Soyez honnête avec vous-même, soyez sérieux, soyez vrai, et demeurez assuré que Dieu vous bénira.

Avez-vous, cher ami, été conduit à sentir votre besoin ? L’Esprit de Dieu a-t-Il opéré dans votre cœur pour produire un sentiment de culpabilité, une crainte du jugement ou la conscience de la complète vanité de tout ce qui est sous le soleil ? Pouvez-vous dire de tout votre cœur : « Malheur à moi, car je suis perdu », « Voici, je suis une créature de rien », « Je suis un homme pécheur » ? Toutes ces diverses exclamations proviennent d’hommes semblables à vous — d’hommes ayant les mêmes passions que vous — mais d’hommes sous la visitation vivifiante du Saint Esprit et l’action de la vérité de Dieu qui les convainquait. Soyez certain que ce sont de bonnes paroles, le fruit d’exercices très précieux dans l’âme, des exercices tels que nous nous plaisons à en voir.

C’est une grande chose de voir l’âme complètement brisée devant Dieu, tout à fait sensible à sa condition perdue et ruinée, à sa profonde culpabilité, et au fait qu’elle est exposée au juste jugement et à la colère d’un Dieu saint qui hait le péché. Ce n’était pas un simple travail en surface chez Job, Ésaïe ou Pierre, quand ils prononcèrent les paroles ci-dessus. Le soc de la charrue avait pénétré jusque dans les profondeurs de l’âme. L’être moral tout entier était imprégné de la lumière de la sainteté divine. La flèche de la conviction avait percé jusqu’au centre même du cœur. C’était une œuvre réelle. Aucun de ces bien-aimés saints de Dieu n’aurait pu se reposer sur la légère confession des lèvres du fait que « nous sommes tous pécheurs ». De simples généralités creuses ne leur suffisaient pas. Tout était profond, vrai et personnel. Ils étaient dans la présence de Dieu, et c’est toujours une chose réelle et solennelle.

Or nous voudrions clairement déclarer ici, une fois pour toutes, que les exercices de l’âme n’ont rien affaire avec la base du salut ou de la paix. Nous ne pouvons pas être trop simples et trop clairs quant à cela. Job ne se reposait pas sur ses propres paroles : « Voici, je suis une créature de rien », mais sur la déclaration de Dieu : « J’ai trouvé une propitiation ». Ésaïe ne s’appuyait pas sur un « Malheur à moi ! », mais sur : « Ceci a touché tes lèvres ». Pierre ne trouva pas de réconfort dans sa propre exclamation : « Je suis un homme pécheur », mais en ces mots doux et apaisants de Jésus : « Ne crains pas ».

Tout cela est très vrai. Loin de nous la pensée d’amener une âme à s’appuyer sur ses exercices, quelque profonds, vrais et spirituels qu’ils puissent être. Non, nous ne devons nous appuyer que sur Christ, et entièrement. « Ainsi dit le Seigneur, l’Éternel : Voici, je pose comme fondement, en Sion, une pierre, une pierre éprouvée, une précieuse pierre de coin, un sûr fondement : celui qui se fie à elle ne se hâtera pas » (És. 28, 16). Cette « pierre » n’est pas un exercice, de quelque nature que ce soit. Ce n’est pas même l’œuvre du Saint Esprit, toute essentielle qu’elle soit. Ce n’est pas même le Saint Esprit Lui-même. C’est Celui à qui le Saint Esprit se plait toujours à rendre témoignage, à savoir Christ qui est la pierre « éprouvée », « précieuse », et le « sûr fondement », qui mourut pour nos péchés selon les Écritures, et ressuscita pour notre justification selon les Écritures.

Toutefois, tandis que non seulement nous admettons, mais que nous insistons vivement et constamment sur tout ceci, nous devons pouvoir exprimer notre sentiment profond et toujours plus grand de la valeur d’une œuvre profonde de l’Esprit de Dieu dans l’âme. Nous craignons qu’il y ait une épouvantable quantité de matériau non brisé dans les rangs de la profession chrétienne, une quantité de vérités flottant dans les régions de l’intelligence comme une théorie sans effet pratique et sans influence, une grande quantité d’activité mentale au sujet d’une vérité non ressentie, beaucoup de choses qui ne sont pas réelles. Nous nous demandons si, dans de nombreux cas, la tête n’est pas très en avance sur le cœur — l’esprit bien plus à l’œuvre que la conscience. C’est le secret de bien des fausses réalités, du vide et du manque de cohérence si douloureux à contempler. Nous en sommes convaincus. C’est pourquoi nous désirons si vivement avoir affaire fidèlement avec le cœur et la conscience du lecteur. Il n’a pas le moins du monde besoin de craindre de regarder en face ce sujet important. Qu’il ne craigne pas le couteau. Qu’il prenne garde à un simple intellectualisme, qui amène le règne temporaire de la superstition et de l’infidélité.

Nous poursuivrons en considérant

L’objet révélé

Dans la mesure où une référence explicite a déjà été faite à Ésaïe et à Pierre — un prophète du temps de l’Ancien Testament et un apôtre de celui du Nouveau — nous pouvons difficilement faire mieux que considérer la manière dont notre thèse est illustrée dans l’histoire de ces deux hommes remarquables. Tout d’abord, considérons le cas du prophète Ésaïe. Nous avons vu, dans son cas, comment fut créé le besoin ; considérons maintenant comment l’objet fut révélé.

À peine l’âme convaincue a-t-elle donné passage au cri : « Malheur à moi ! car je suis perdu », que le messager angélique était envoyé avec tout le gage et l’énergie de l’amour divin, depuis le trône même de Jéhovah éternel et trois fois saint. « Et l’un des séraphins vola vers moi ; et il avait en sa main un charbon ardent qu’il avait pris de dessus l’autel avec des pincettes ; et il en toucha ma bouche, et dit : Voici, ceci a touché tes lèvres ; et ton iniquité est ôtée, et propitiation est faite pour ton péché » (És. 6, 6-7).

Il y a deux choses, dans la citation précédente, qui demandent notre attention. Tout d’abord, la substance ; en second lieu, le style de l’action rapportée. La substance est la chose qui fut faite ; le style est la manière de la faire. Le prophète avait été conduit à se voir dans la lumière qui venait du trône de Dieu. C’était un moment sérieux. Il ne pouvait pas en être autrement. Il est profondément solennel d’être amené à découvrir ce que nous sommes dans la présence de Dieu. Quand on est ainsi amené là, rien sinon la provision divine ne peut répondre à notre besoin, rien sinon un objet divin ne peut satisfaire le cœur. Si Ésaïe n’avait vu que le trône, sa condition aurait été sans espoir. Mais il y avait aussi l’autel, et là git le secret de la vie et du salut, pour lui comme pour tout autre pécheur convaincu et se condamnant lui-même. Si le trône avait ses droits, l’autel avait sa provision. L’un suivait l’autre — deux figures saillantes dans cette sublime vision, deux grandes réalités dans la glorieuse économie de la grâce divine. La lumière du trône révélait la culpabilité du pécheur ; la grâce de l’autel l’ôtait.

Très certainement, rien d’autre n’aurait été convenable, pour Ésaïe, rien d’autre pour le lecteur. Il doit en être ainsi dans tous les cas. La mesure peut varier, mais le grand fait est toujours le même. « Malheur à moi ! » et « Ceci a touché tes lèvres » doivent aller ensemble. Le premier est l’effet du trône ; le dernier, le fruit de l’autel. Le premier est le besoin créé ; le dernier est l’objet révélé. Rien ne peut être plus simple, rien ne peut être plus béni. C’est seulement Celui qui crée le besoin, qui peut révéler l’objet qui y répond ; Il opère le premier par l’action de la vérité ; le dernier par la provision de la grâce.

« Ceci a touché tes lèvres ». Remarquez les mots, lecteur ! Notez-les soigneusement. Veillez à comprendre leur force, leur signification et leur application à vous-même. « Ceci » — qu’est-ce que c’est ? C’est la provision — la riche, ample et parfaite provision de la grâce divine. Elle renferme dans l’ensemble de ses replis tout ce dont un pauvre pécheur coupable, méritant l’enfer et au cœur brisé, peut avoir besoin pour répondre à sa culpabilité et à sa ruine. Ce n’est rien d’intérieur, mais quelque chose d’extérieur. Ce n’est pas un procédé, ce n’est pas un exercice, ce n’est pas un sentiment ; c’est une provision divine pour répondre au plus profond besoin du pécheur, pour ôter sa culpabilité, pour faire taire ses craintes, pour sauver son âme. Tout était contenu dans ce mystérieux « charbon ardent pris de dessus l’autel ».

Nous aurons l’occasion de revenir sur cette scène en lien avec le dernier point de notre sujet — l’âme saisissant l’objet. Nous nous référerons ici simplement au style de cette merveilleuse action qui parlait de paix à l’âme troublée d’Ésaïe. Il n’y a personne qui ne soit pas conscient de l’influence immense du style sur le cœur. En effet, nous pourrions presque dire que le style d’une action a plus d’influence que le contenu. Et n’est-ce pas une chose très bénie de savoir que notre Dieu a Son propre style unique ? Oui, en vérité. Que Son saint nom soit adoré à jamais, non seulement Il répond à notre besoin, mais Il le fait d’une manière telle que nous sommes laissés sans l’ombre d’un doute, que « tout Son cœur et toute Son âme » sont dans l’acte. Non seulement Il pardonne nos péchés, mais Il le fait d’une manière telle qu’elle convainc notre âme que c’est Sa plus riche joie de le faire.

Le style de l’action divine en Ésaïe 6 resplendit dans ce petit mot : « vola ». C’est comme si Dieu avait hâte d’appliquer le baume divin à un esprit blessé. Il ne fallait pas perdre un moment. Ce cri amer : « Malheur à moi ! » provenant des profondeurs mêmes du cœur brisé d’un pécheur, était allé droit à l’oreille et au cœur de Dieu, et avec la grande rapidité de l’aile du séraphin, une divine réponse doit être envoyée du sanctuaire de Dieu pour purifier la conscience coupable et tranquilliser le cœur troublé.

Telle est la voie de notre Dieu. Telle est la manière de faire de Son amour. Tel est le style de Sa grâce. Non seulement Il nous sauve, mais Il le fait d’une manière telle qu’elle nous assure que cela Le rend bien plus heureux de nous sauver que cela nous rend heureux de l’être. Le pauvre cœur légal, qui doute, qui raisonne, peut souvent être plein de crainte quant à la manière dont Dieu a affaire avec nous. En dépit de toute les précieuses assurances de Son amour, de toutes les preuves de Sa miséricorde et de Sa bonté, de tous les gages de Sa volonté de sauver et de bénir, cependant le cœur doute et reste en retrait. Il refuse encore d’écouter cette voix d’amour parlant en dix mille vers éloquents et touchants. Il montre encore sa disposition à prêter une oreille bien disposée aux sombres suggestions de l’ennemi malin — à ses propres misérables raisonnements, à quoi que ce soit et à tout sauf aux murmures de l’amour divin. C’est en vain qu’un Dieu Sauveur se tient devant le pécheur, le suppliant de venir ; c’est en vain qu’Il ouvre Son cœur même au regard du pécheur — l’Agneau de Son libre don, le Fils de Son sein. Le cœur demeurera encore dans ses sombres suspicions déprimantes. Il ne veut pas accorder crédit à Dieu pour un amour si complet, si gratuit. Il n’admettra pas que Dieu se plaise à sauver, se plaise à bénir, se plaise à nous rendre heureux.

Oh ! bien-aimé lecteur, êtes-vous un sceptique ? Restez-vous en retrait ? Continuez-vous à faire du mal et à blesser cet amour de Dieu profond, tendre, merveilleux, qui ne s’est pas arrêté avant de donner Son Fils unique de Son sein, et de Le meurtrir sur le bois maudit du Calvaire ? Pourquoi, oh pourquoi, hésitez-vous ? Qu’attendez-vous ? Que voulez-vous de plus ? Ne dites pas, nous vous en supplions : « Je ne peux pas croire ; je le voudrais si je le pouvais, mais je ne peux pas. J’attends de la puissance ». Écoutez ces paroles : « Si nous recevons le témoignage des hommes, le témoignage de Dieu est plus grand ». N’avez-vous pas, bien des fois, reçu le témoignage, le récit, le compte-rendu de l’homme ? Si vous deviez dire à un homme comme vous que vous ne pouvez pas le croire, que vous dirait-il ? Ne vous dirait-il pas que vous le traitez de menteur ? Voulez-vous faire de Dieu un menteur ? Vous l’avez fait suffisamment longtemps. Ne le faites pas davantage, nous vous en supplions, mais venez maintenant, tel que vous êtes, et observez la manière de faire de l’amour de Dieu — sa substance et son style. Venez maintenant avec toute votre culpabilité, tout votre état lamentable, toute votre misère, tout votre besoin, et vous trouverez dans cet objet que Dieu révèle dans Sa Parole, tout ce dont vous pouvez avoir besoin pour le temps et l’éternité. Et non seulement cela, mais vous recevrez un accueil aussi chaleureux que ce que peut donner le Dieu de toute grâce. Venez !

Pour illustrer davantage notre thème, regardons le cas de Pierre au lac de Génésareth, tel que nous le relate le premier paragraphe de Luc 5. Lui aussi, comme le prophète Ésaïe, fut amené à sentir son besoin — son profond, profond besoin. La même lumière convainquant de péché qui était entrée dans l’âme du prophète, pénètre ici dans le cœur du futur apôtre et provoque ces mots sincères : « Seigneur, retire-toi de moi, car je suis un homme pécheur ».

Ici, nous avons le besoin créé, le sentiment de culpabilité produit. Mais remarquez en passant l’étrange quoique très belle incohérence ! Pierre n’avait pas le moins du monde l’idée de fuir la lumière qui avait brillé sur lui ; non, il s’approche en fait toujours plus près d’elle. Il sentait qu’il n’avait aucun droit à être là, et pourtant il ne voulait être nulle part ailleurs. Et pourquoi ? Parce que mêlé avec cette puissante lumière qui le montrait coupable, il y avait la grâce également puissante pour convertir, qui attirait irrésistiblement le cœur de « l’homme pécheur » vers elle. « La grâce et la vérité vinrent par Jésus Christ ». « Et nous vîmes sa gloire, une gloire comme d’un fils unique de la part du Père, pleine de grâce et de vérité » (Jean 1). Que pouvait-il y avoir de plus approprié pour un homme plein de péché, qu’un Sauveur plein de grâce ? Assurément, rien ni personne. Quoique ce Sauveur béni soit plein de vérité également, et que la vérité mette tout et chacun à sa vraie place, cependant la grâce était amplement suffisante pour répondre à tous les besoins que la vérité révélait. C’est pourquoi, bien que le pauvre pécheur coupable crie : « Seigneur, retire-toi de moi, car je suis un homme pécheur », il sent néanmoins que la seule place pour lui est « aux genoux de Jésus ».

Il en est toujours ainsi, dans les cas de vraie conviction. Dans tous les cas où l’œuvre authentique de l’Esprit de Dieu est opérée dans l’âme, nous remarquons plus ou moins de ce que nous avons appelé cette étrange quoique très belle incohérence, cette contradiction apparente, ce phénomène frappant, d’un pécheur confessant son inaptitude totale à être dans la présence d’un Dieu saint, et pourtant ayant une certaine conscience intérieure que c’est la seule place où il puisse être.

C’est très beau, et intéressant de façon touchante. C’est la sûre preuve du travail de Dieu dans l’âme. Il y a un sentiment profond de péché et de culpabilité, et cependant, ce cœur qui s’accroche de façon merveilleuse et mystérieuse à Celui dont la gloire morale nous a humiliés jusque dans la poussière. « Seigneur, retire-toi de moi, car je suis un homme pécheur ». Mais où furent prononcées ces paroles éclatantes ? Aux genoux d’un Dieu Sauveur. Place bénie ! Pierre imaginait-il que Jésus allait se retirer de lui ? Pensait-il vraiment que cette personne pleine de grâce, qui avait daigné utiliser sa nacelle puis lui donner une telle quantité miraculeuse de poissons, le laisserait dans la profondeur de sa misère ? Nous ne le croyons pas, ni ne pouvons le croire. Ah, non ! l’Esprit de Dieu, dans Ses opérations très précieuses dans l’âme, associe toujours ces deux éléments — la conscience d’une complète indignité et un attachement et une aspiration ardentes à Christ. Le premier est la conviction de péché ; le dernier, la conversion. Par le premier, le sillon est fait ; par le dernier, la semence est déposée. En bref, c’est le besoin créé et l’objet révélé. Les deux choses vont ensemble. Comme dans le cas d’Ésaïe, « Malheur à moi ! » est instantanément suivi par : « Ceci a touché tes lèvres » ; ainsi, dans le cas de Pierre, « Retire-toi de moi » est suivi par les paroles de grâce : « Ne crains pas ».

C’est divin. L’objet révélé est parfaitement adapté pour répondre au besoin créé. Il doit en être ainsi, car la création du besoin et la révélation de l’objet sont toutes deux des opérations d’un seul et même Esprit. Et non seulement cela, mais l’objet ainsi révélé se trouve être propre à répondre à toutes les exigences de Dieu Lui-même. C’est pourquoi il doit être propre à répondre à toutes les demandes de l’âme convaincue de péché et exercée. Si Dieu est satisfait par la personne et l’œuvre de Christ, nous pouvons bien l’être aussi de même. Comment Ésaïe apprit-il qu’il était perdu ? Par la lumière d’en haut. Comment apprit-il que son péché était ôté ? Par la grâce d’en haut. Il se reposait sur le témoignage de Dieu et non sur ses propres sentiments ou notions. Si, à la fin de la magnifique scène rapportée au chapitre 6, quelqu’un avait demandé à Ésaïe : « Comment sais-tu que ton péché est effacé ? », quelle aurait été sa réponse ? Aurait-il dit : « Je sens qu’il en est ainsi » ? Nous ne le croyons pas. Nous sommes persuadés que cet homme de Dieu se reposait sur quelque chose de bien meilleur, de bien plus profond, de bien plus solide qu’un simple sentiment de son propre esprit. Sans doute qu’il ressentait. Mais pourquoi ? Justement parce qu’il ne faisait pas du ressenti la base de sa foi, mais de la foi la base de son ressenti, et de la révélation divine la base de sa foi.

Tel est l’ordre divin, un ordre si constamment renversé au plus grand dommage des âmes, au renversement de leur paix et au déshonneur de leur Seigneur. Quand nous nous tournons vers l’Écriture, quand nous examinons les différents cas qu’elle rapporte pour notre instruction, nous trouvons de façon invariable que l’ordre est d’abord, la Parole ; ensuite, la foi ; enfin, le sentiment. D’un autre côté, quand nous nous tournons vers l’histoire des âmes aujourd’hui et examinons leurs exercices et leurs expériences, nous trouvons constamment qu’elles commencent par leur ressenti. En conséquence, elles jouissent rarement d’un sentiment juste de la nature et du fondement de la vraie foi chrétienne.

Tout cela est très déplorable, et réclame la plus vive attention de la part de ceux qui ont à cœur les âmes et sont appelés à suivre les progrès du travail de Dieu en elles. Il est de la plus grande importance de conduire toutes les âmes exercées au sûr fondement des saintes Écritures et de leur enseigner que la foi, c’est simplement prendre Dieu au mot. C’est croire ce qu’Il dit, non pas parce que nous le ressentons, mais parce qu’Il le dit. Croire parce que nous ressentons ne serait pas du tout de la foi en la Parole de Dieu, mais de la foi en nos propres sentiments, ce qui est une foi sans valeur qui ne peut tenir un instant en présence de l’ennemi. La Parole de Dieu est établie à toujours dans les cieux. « Il a exalté sa parole au-dessus de tout son nom ». C’est le solide fondement de la foi chrétienne.

Il est vrai que c’est par le Saint Esprit que l’âme est amenée à se reposer sur ce fondement, mais le fondement est l’Écriture, et l’Écriture seule. Ce ne sont pas les ressentis ou les expériences, mais le simple témoignage de l’Écriture sainte. « Christ est mort pour nos péchés, selon les écritures, et il a été enseveli, et il a été ressuscité le troisième jour, selon les écritures ». Là se trouve le vrai fondement de la foi chrétienne, et même, de la foi dans tous les âges. Abraham crut Dieu et trouva ainsi le repos pour son âme. De même pour Ésaïe, de même pour Pierre, de même pour tous. Les patriarches, les prophètes, les apôtres et les saints de toute période, de toute condition et de tous cieux, se reposaient sur le rocher stable de la révélation divine, et si le lecteur veut seulement faire de même, il possédera une paix qu’aucune puissance de la terre ni de l’enfer ne peut jamais troubler.

Mais nous devons achever cet article, et nous le ferons avec une brève référence, dans la troisième et dernière partie, à

L’objet saisi

Nous serons brefs sur ce point, car beaucoup a déjà été dit sur ce sujet. Mais nous voudrions appeler spécialement l’attention sur les résultats pratiques qui suivront sûrement, dans tous les cas où l’âme tient ferme le Christ. Nos deux exemples, Ésaïe et Pierre, nous servirons ici aussi bien que dans les autres parties de notre sujet.

Aussitôt que le besoin d’Ésaïe eut été comblé, sa culpabilité ôtée, nous le voyons dans une consécration de lui-même sans réserve à Dieu et à Son service, qui peut bien remuer notre âme au plus profond et nous humilier aussi, à la pensée de combien peu nous l’imitons en cela. À peine eut-il entendu que l’Éternel avait besoin d’un messager, que la réponse toute prête sort de son cœur et s’exprime dans ces paroles ardentes : « Me voici ; envoie-moi ». Il était désormais prêt à s’avancer au service de Celui qui lui avait fait voir sa propre ruine et lui avait aussi révélé le remède divin. L’ordre est magnifique. Nous avons d’abord : « Malheur à moi » ; ensuite : « Ceci a touché tes lèvres » ; et enfin, « Me voici ».

Ainsi aussi dans le cas de Pierre, nous avons précisément le même magnifique ordre moral. Son « Retire-toi de moi » est suivi par le : « Ne crains pas » de Christ. Et puis suit le résultat pratique : « Il quitta tout et le suivit ». C’était réellement saisir l’objet. Pierre sentait évidemment, à ce moment-là, que Christ était digne de tout ce qu’il était et de tout ce qu’il avait. Dans la première floraison de la vie divine dans son âme, tout était aisément mis de côté. Les occupations séculières, quelque justes qu’elles soient en elles-mêmes ; les liens naturels, quelque importants qu’ils soient, sont tous abandonnés pour le seul objet qui l’absorbait et qui avait été révélé et saisi par son âme née de nouveau et affranchie. Christ était plus pour Pierre que les nacelles et les filets, que père et mère, sœurs et frères.

Il abandonna tout. Ce n’était pas difficile, dans la fraîcheur du premier amour, de laisser ces liens et ces occupations naturels. La difficulté, dans un tel moment, serait de les retenir ou de s’y accrocher. Il est regrettable que nous ayons encore été appelés à entendre, des lèvres de Pierre, des paroles telles que celles-ci : « Je m’en vais pêcher », et cela aussi, après trois ans en la compagnie merveilleuse de cette personne bénie qui avait autrefois commandé tout son être moral et l’avait retiré de toutes les préoccupations terrestres et de toutes les relations naturelles.

Mais nous n’insisterons pas sur ce sujet triste et humiliant. Nous penserons à Pierre au lac de Génésareth ; nous nous attarderons sur le moment de son premier amour — ces moments charmants où Pierre pouvait, sans réserve, dire : « Jésus, mon tout dans tout ce que tu es ». C’est ce à quoi nous désirons tous regarder. Nous voulons comprendre le vrai secret, la grande puissance morale, la vraie source de motivation de tout dévouement authentique et de toute consécration personnelle. Nous désirons amener toute notre attention sur la question : « Comment puis-je être tiré de façon plus effective hors de toutes ces choses qui attirent si facilement et si puissamment mon cœur vagabond ? ». Quelle est la réponse ? Simplement ceci : « Gardez le cœur fixé sur Christ, rempli de Christ, consacré à Christ. Rien d’autre ne fera l’affaire. Des lois et des règles n’iront pas, des vœux et des résolutions ne le permettront pas. Ce doit être : la puissance expulsée d’une affection nouvelle.

C’est la grande condition nécessaire, le manque spécial de nos âmes, mais le seul préservatif efficace contre les dix mille choses fascinantes et séductions de la scène au travers de laquelle nous passons. Du moment que nous demandons : « Quel mal y a-t-il en ceci ou cela ? », c’en est complètement fini du dévouement personnel. Le déclin s’est installé, nos cœurs se sont éloignés de Christ. Pierre, au lac de Génésareth, ne songeait aucunement à demander : « Quel mal y a-t-il à pêcher ? Quel péché y a-t-il dans des nacelles et des filets ? Pourquoi ne resterai-je pas avec mon père et mes amis ? ». Il n’y avait aucun mal à pêcher, rien de mauvais dans les nacelles et les filets, considérés en eux-mêmes. Mais pourquoi Pierre les abandonna-t-il ? Parce qu’il était appelé à quelque chose de meilleur. Il abandonna ce qui était inférieur parce qu’il avait saisi quelque chose de supérieur. Et nous pouvons être certains que si Pierre est retourné à ce qui était inférieur, c’est seulement parce que ce qui était supérieur avait, pour un moment, perdu sa puissance sur son cœur.

Nous devons nous arrêter là. Nous n’avions pas l’intention de nous attarder aussi longuement sur le sujet du « travail de Dieu dans l’âme », mais nous l’avons trouvé extrêmement intéressant, et nous espérons affectueusement que cela a été profitable au lecteur.