Les dernières scènes de Malachie et de Jude

(Traduit de l’anglais)
C.H. Mackintosh

[Courts articles 43]

En comparant ces deux écrits inspirés, nous trouvons de nombreux points de similitude et de nombreux points de contraste. Tant le prophète que l’apôtre dépeignent des scènes de ruine, de corruption et d’apostasie. Le premier s’occupe de la ruine du judaïsme, le dernier de la ruine de la chrétienté. Le prophète Malachie, dans ses premières phrases, donne avec une intensité peu courante la source de la bénédiction d’Israël et le secret de leur chute. « Je vous ai aimés, dit l’Éternel ». C’était là la grande source de toute leur bénédiction, de toute leur gloire, de toute leur dignité. L’amour de l’Éternel explique toutes les gloires les plus brillantes du passé d’Israël et toutes les gloires les plus brillantes de son avenir. D’un autre côté, leur défi téméraire et infidèle : « En quoi nous as-tu aimés ? » explique les plus grandes profondeurs de la dégradation actuelle d’Israël.

Poser une telle question, après tout ce que l’Éternel avait fait pour eux depuis les jours de Moïse jusqu’aux jours de Salomon, était la preuve d’une condition de cœur insensible au plus haut degré. Ceux qui pouvaient dire, en ayant devant les yeux la merveilleuse histoire des actes de l’Éternel : « En quoi nous as-tu aimés ? », étaient hors de portée de tout appel moral. C’est pourquoi nous ne devons pas être surpris des paroles brûlantes du prophète. Nous nous attendons à des déclarations telles que la suivante : « Si donc je suis père, où est mon honneur ? et si je suis maître, où est la crainte qui m’est due ? dit l’Éternel des armées, à vous, sacrificateurs, qui méprisez mon nom. Et vous dites : En quoi avons-nous méprisé ton nom ? ». Il y avait la plus complète insensibilité à la fois vis-à-vis de l’amour du Seigneur et vis-à-vis de leurs propres mauvaises voies. C’était la dureté de cœur qui pouvait dire : « En quoi nous as-tu aimés ? » et « En quoi t’avons-nous fait tort ? ». Et tout cela en ayant sous les yeux une histoire de mille ans — une histoire remplie de la grâce, de la miséricorde et de la patience de Dieu sans précédents, une histoire marquée du début à la fin par la trace de leur infidélité, de leur folie et de leur péché.

Mais écoutons les touchantes remontrances de Dieu peiné et offensé à Israël. « Vous présentez sur mon autel du pain souillé, et vous dites : En quoi t’avons-nous profané ? En ce que vous dites : La table de l’Éternel est méprisable. Et si vous présentez une bête aveugle en sacrifice, n’est-ce pas mal ? et si vous en présentez une boiteuse et malade, n’est-ce pas mal ? Offre-la donc à ton gouverneur : t’agréera-t-il, ou te recevra-t-il avec faveur ? dit l’Éternel des armées… qui même d’entre vous fermerait les portes ? et vous n’allumeriez pas le feu sur mon autel pour rien ! Je ne prends pas plaisir en vous, dit l’Éternel des armées, et l’offrande, je ne l’agréerai pas de vos mains. Car, du soleil levant jusqu’au soleil couchant, mon nom sera grand parmi les nations, et, en tout lieu, l’encens sera brûlé à mon nom, et une offrande pure sera présentée, car mon nom sera grand parmi les nations, dit l’Éternel des armées. Mais vous, vous le profanez, en ce que vous dites : La table du Seigneur est souillée ; et ce qu’elle fournit, sa nourriture, est méprisable. Et vous dites : Voilà, quel ennui ! et vous soufflez dessus, dit l’Éternel des armées, et vous apportez ce qui a été déchiré, et la bête boiteuse, et la malade ; c’est ainsi que vous apportez l’offrande. Agréerais-je cela de votre main ? dit l’Éternel ».

Nous avons donc là un triste et déplorable tableau de la condition morale d’Israël. L’adoration publique de Dieu était tombée dans un complet mépris. Son autel était insulté, son service méprisé. Quant aux sacrificateurs, c’était simplement une question d’argent. Quant au peuple, toute la chose était devenue un ennui, une formalité creuse, une routine insipide et sans cœur. Il n’y avait pas de cœur pour Dieu. Il y avait beaucoup de cœur pour le gain. N’importe quel sacrifice, quelque estropié et déchiré qu’il soit, semblait assez bon pour l’autel de Dieu. Ce qui était boiteux, aveugle et malade, le pire de ce qu’ils pouvaient avoir, tel qu’ils n’auraient pas osé l’offrir à un gouverneur humain, était amené sur l’autel de Dieu. Et si une porte devait être ouverte ou un feu allumé, il fallait payer pour cela. Pas de paiement, pas de travail. Tel était le lamentable état des choses dans les jours de Malachie. Cela rend le cœur malade, en le considérant.

Mais, grâces et louange en soient rendues à Dieu, il y a un autre côté du tableau. Il y avait quelques rares et aimables exceptions à la règle lugubre — quelques formes belles et frappantes se détachant en relief sur le fond sombre. Il est vraiment rafraîchissant, au milieu de toute cette vénalité et cette corruption, cette froideur et ce vide, cette stérilité et cette absence de cœur, cet orgueil et cette obstination de cœur, de lire des paroles telles que celles-ci : « Alors ceux qui craignent l’Éternel ont parlé l’un à l’autre, et l’Éternel a été attentif et a entendu, et un livre de souvenir a été écrit devant lui pour ceux qui craignent l’Éternel, et pour ceux qui pensent à son nom ».

Combien ce court récit est précieux ! Quelles délices de contempler ce résidu au milieu de la ruine morale ! Il n’y a ni prétention ni supposition, pas de tentative d’établir quelque chose, aucun effort pour reconstruire l’économie en chute, pas de manifestation feinte de puissance. C’est là la faiblesse sentie, et le regard vers l’Éternel. C’est le vrai secret de toute puissance réelle. Nous n’avons jamais à craindre une faiblesse ressentie. C’est la force qui fait impression que nous avons à craindre et devant laquelle nous devons reculer. « Quand je suis faible, alors je suis fort » est toujours la règle, pour le peuple de Dieu — une règle assurément très bénie. Il faut toujours compter sur Dieu. Nous pouvons poser comme grand principe racine que, quel que puisse être l’état réel du corps professant, la foi individuelle peut toujours jouir de la communion avec Dieu selon la plus haute vérité de la dispensation.

C’est un grand principe à saisir et à retenir. Que le peuple professant de Dieu soit toujours des individus qui se jugent et s’humilient devant Dieu, qui peuvent jouir de Sa présence et de Sa bénédiction, sans entrave ni limite. Témoins en sont les Daniel, les Mardochée, les Esdras, les Néhémie, les Josias, les Ézéchias, et quantité d’autres, qui ont marché avec Dieu, ont réalisé les principes les plus élevés et joui des privilèges les plus rares de la dispensation, quand tout gisait en ruines sans espoir autour d’eux. Il y eut une pâque célébrée dans les jours de Josias telle qu’il n’en avait pas été connue depuis les jours de Samuel le prophète (2 Chron. 35, 18). Le faible résidu, de retour de Babylone, a célébré la fête des tabernacles, un privilège qui n’avait pas été goûté depuis les jours de Josué, fils de Nun (Néh. 8, 17). Mardochée, sans même frapper un seul coup, a obtenu une victoire sur Amalek aussi splendide que celle obtenue par Josué aux jours de Exode 17 (Esth. 6, 11-12). Dans le livre de Daniel, nous voyons le plus fier monarque de la terre prosterné aux pieds d’un captif juif.

Que nous enseignent tous ces cas ? Quelle leçon prononcent-ils à nos oreilles ? Simplement cela, que l’âme humble, croyante et obéissante, a le droit de jouir de la communion avec Dieu la plus profonde et la plus riche, en dépit du manquement et de la ruine du peuple professant de Dieu et de la gloire disparue de la dispensation dans laquelle elle se trouve.

Ainsi en était-il dans les dernières scènes de Malachie. Tout était ruine désespérée, mais cela n’empêchait pas ceux qui aimaient et craignaient le Seigneur de s’assembler pour parler de Lui et de méditer sur Son précieux nom. Il est vrai que ce faible résidu n’était pas comme la grande congrégation qui s’était assemblée dans les jours de Salomon, de Dan jusqu’à Beër-Shéba, mais il avait une gloire unique qui lui était propre. Il avait la présence divine d’une manière non moins merveilleuse, quoique pas aussi frappante. Il ne nous est pas parlé d’un « livre de souvenir », dans les jours de Salomon. Il ne nous est pas parlé de l’Éternel étant attentif et entendant. Peut-être pourrait-on dire que ce n’était pas nécessaire. Soit, mais cela ne diminue en rien l’éclat de la grâce qui brillait sur la petite compagnie aux jours de Malachie. Nous pouvons hardiment affirmer que le cœur de l’Éternel était aussi rafraîchi par les souffles d’amour de cette petite compagnie que par les magnifiques sacrifices aux jours de la dédicace de Salomon. Leur amour brille d’autant plus puissamment, en contraste avec le formalisme sans cœur du corps professant, et la corruption des sacrificateurs.

« Et ils seront à moi, mon trésor particulier, dit l’Éternel des armées, au jour que je ferai ; et je les épargnerai comme un homme épargne son fils qui le sert. Alors vous reviendrez, et vous ferez la différence entre le juste et le méchant, entre celui qui sert Dieu et celui qui ne le sert pas. Car voici, le jour vient, brûlant comme un four ; et tous les orgueilleux, et tous ceux qui pratiquent la méchanceté seront du chaume, et le jour qui vient les brûlera, dit l’Éternel des armées, de manière à ne leur laisser ni racine, ni branche. Et pour vous qui craignez mon nom, se lèvera le soleil de justice ; et la guérison sera dans ses ailes ; et vous sortirez, et vous prospérerez comme des veaux à l’engrais. Et vous foulerez les méchants, car ils seront de la cendre sous la plante de vos pieds, au jour que je ferai, dit l’Éternel des armées ».

Nous allons maintenant jeter un bref coup d’œil à l’épître de Jude. Là, nous avons un tableau encore plus épouvantable de l’apostasie et de la corruption. On dit couramment parmi nous que la corruption de la meilleure chose est la pire des corruptions. De là vient que l’apôtre Jude place devant nous une page tellement plus sombre et plus affreuse que celle présentée par le prophète Malachie. C’est le récit de la faillite et de la ruine complètes de l’homme sous les privilèges les plus riches et les plus élevés qui puissent lui être conférés.

Au début de cette solennelle exhortation, l’apôtre nous fait savoir qu’il avait eu à cœur de « nous écrire de notre commun salut ». Ç’aurait été sa tâche bien plus agréable. Ç’aurait été sa joie et son rafraîchissement de s’étendre sur les privilèges actuels et les gloires futures contenus dans la portée globale de ce mot précieux, « salut ». Mais il sentait qu’il était « nécessaire » de se détourner de ce travail plus agréable, pour fortifier nos âmes contre la marée montante de l’erreur et du mal qui menaçait les fondements mêmes du christianisme. « Bien-aimés, quand j’usais de toute diligence pour vous écrire de notre commun salut, je me suis trouvé dans la nécessité de vous écrire afin de vous exhorter à combattre pour la foi qui a été une fois enseignée aux saints ». Tout ce qui était vital et fondamental était en jeu. Il s’agissait de combattre vigoureusement pour la foi elle-même. « Car certains hommes se sont glissés parmi les fidèles, inscrits jadis à l’avance pour ce jugement, des impies, qui changent la grâce de notre Dieu en dissolution, et qui renient notre seul maître et seigneur, Jésus Christ ».

C’est bien pire que tout ce que nous avons en Malachie. Là, il s’agissait de la loi, comme nous le lisons : « Souvenez-vous de la loi de Moïse, mon serviteur, que je lui commandai en Horeb pour tout Israël, des statuts et des ordonnances ». Mais en Jude, il ne s’agit pas d’oublier la loi, mais en réalité de tourner la pure et précieuse grâce de Dieu en dissolution, et de renier la seigneurie de Christ. C’est pourquoi, au lieu de s’attarder sur le salut de Dieu, l’apôtre cherche à nous fortifier contre la méchanceté et l’impiété des hommes. « Or je désire vous rappeler », dit-il, « à vous qui une fois saviez tout, que le Seigneur, ayant délivré le peuple du pays d’Égypte, a détruit ensuite ceux qui n’ont pas cru ; et qu’il a réservé dans des liens éternels, sous l’obscurité, pour le jugement du grand jour, les anges qui n’ont pas gardé leur origine, mais qui ont abandonné leur propre demeure ».

Tout ceci est très solennel, mais nous ne pouvons pas nous attarder sur les sombres caractères de cette scène : l’espace ne nous le permet pas. En outre, nous désirons plutôt présenter au lecteur chrétien le charmant tableau du résidu chrétien donné dans les dernières lignes de ce passage qui nous sonde profondément. Comme, dans Malachie, nous trouvons, au milieu de la ruine désespérée du judaïsme, une compagnie dévouée d’adorateurs juifs qui aimaient et craignaient le Seigneur et tenaient ensemble de doux conseils, de même en Jude, au milieu des ruines les plus épouvantables de la profession chrétienne, le Saint Esprit introduit une compagnie à laquelle Il s’adresse comme « bien-aimés ». Ils sont « appelés, bien-aimés en Dieu le Père, et conservés en Jésus Christ ». Ceux-ci, Il les met solennellement en garde contre les diverses formes de l’erreur et du mal qui commençaient déjà à apparaître, mais qui ont depuis pris de si formidables proportions. Il se tourne vers ceux-ci avec une grâce très exquise, et leur adresse l’exhortation suivante : « Mais vous, bien-aimés, vous édifiant vous-mêmes sur votre très sainte foi, priant par le Saint Esprit, conservez-vous dans l’amour de Dieu, attendant la miséricorde de notre seigneur Jésus Christ pour la vie éternelle ».

Nous avons là la sécurité divine contre les sombres et terribles formes de l’apostasie — « le chemin de Caïn, l’erreur de Balaam, la contradiction de Coré, les murmurateurs et ceux qui se plaignent de leur sort, les discours orgueilleux, les vagues impétueuses, les étoiles errantes, ceux qui admirent les hommes en vue de leur propre profit ». Les « bien-aimés » doivent être « édifiés sur leur très sainte foi ».

Que le lecteur remarque bien cela : il n’y a pas un mot ici quant à un ordre humain pour succéder aux apôtres, ni concernant des hommes doués en quelque manière que ce soit. Il est bon de le voir et de le garder toujours à l’esprit. Nous entendons beaucoup parler de notre manque de don et de puissance, de ce que nous n’avons pas de pasteurs et de docteurs. Comment pourrions-nous nous attendre à avoir plus de don ou de puissance ? Les méritons-nous ? Malheureusement, nous avons manqué et péché et échoué. Reconnaissons-le, et rejetons-nous sur le Dieu vivant, qui ne fait jamais défaut à un cœur qui se confie en Lui.

Regardez le touchant discours de Paul aux anciens d’Éphèse en Actes 20. À qui nous recommande-t-il là en vue de la disparition du ministère apostolique ? Y a-t-il un mot concernant les successeurs des apôtres ? Pas un, à moins qu’en effet ce ne soient les « loups redoutables » dont il parle, ou de ces hommes qui devaient se lever du sein même de l’Église, disant des choses perverses pour attirer les disciples après eux. Quelle est alors la ressource du fidèle ? « Je vous recommande à Dieu, et à la parole de sa grâce, qui a la puissance d’édifier et de vous donner un héritage avec tous les sanctifiés ».

Quelle précieuse ressource ! Il n’est rien dit d’hommes doués, quelque précieux qu’ils puissent être à leur juste place. Dieu nous garde de déprécier en aucune manière les dons que, en dépit de tous les manquements et le péché, notre Seigneur plein de grâce peut trouver bon d’accorder à Son Assemblée. Mais toutefois, il demeure vrai que le bien-aimé apôtre, en prenant congé de l’Assemblée, nous recommande non pas à des hommes doués, mais à Dieu Lui-même et à la Parole de Sa grâce. De là vient que, quelque grande que soit notre faiblesse, nous pouvons regarder à Dieu et nous appuyer sur Lui. Il ne fait jamais défaut à ceux qui se confient en Lui. Il n’y a aucune limite à la bénédiction que peut goûter notre âme, si seulement nous regardons à Dieu dans un esprit d’humilité et une confiance enfantine.

Là gît le secret de toute vraie bénédiction et de la puissance spirituelle — l’humilité d’esprit et la confiance simple. D’un côté, il ne doit pas y avoir de présomption de puissance, et de l’autre, nous ne devons pas, dans l’incrédulité de nos cœurs, limiter la bonté et la fidélité de notre Dieu. Il peut accorder, et Il le fait, des dons pour édifier Son peuple. Il accorderait bien davantage si nous n’étions pas si enclins à nous gérer nous-mêmes. Si l’Assemblée ne regardait que toujours plus à Christ, sa Tête vivante et son Seigneur qui l’aime, au lieu de regarder aux arrangements des hommes et aux méthodes de ce monde, elle aurait une histoire bien différente à raconter. Mais si nous, par nos plans incrédules et nos efforts désordonnés pour nous procurer un mécanisme, étouffons, entravons et attristons le Saint Esprit, devons-nous nous étonner si nous sommes laissés pour éprouver la stérilité et le néant, la désolation et la confusion de toutes ces choses ? Christ est suffisant, mais Il doit être goûté, il faut Lui faire confiance, il faut Le laisser agir. Le terrain doit être laissé complètement vide pour que le Saint Esprit y manifeste la valeur précieuse, la plénitude et la toute-suffisance de Christ.

Mais c’est précisément en cela même que nous manquons de façon si remarquable. Nous essayons de masquer notre faiblesse au lieu de la reconnaître. Nous cherchons à couvrir notre nudité d’un drap que nous nous procurons, au lieu de nous confier simplement et entièrement en Christ pour tout ce dont nous avons besoin. Nous sommes lassés de l’attitude d’attente humble et patiente. Nous sommes pressés de revêtir une apparence de force. C’est là notre folie et notre grave perte. Si seulement nous pouvions être amenés à le croire, notre vraie force serait de connaître notre faiblesse et de nous accrocher à Christ dans une foi absolue, jour après jour.

C’est ce chemin bien plus excellent auquel l’apôtre Jude exhorte le résidu chrétien dans ses dernières lignes. « Mais vous, bien-aimés, vous édifiant vous-mêmes sur votre très sainte foi ». Ces paroles présentent la responsabilité de tous les vrais chrétiens à se trouver ensemble au lieu d’être divisés et dispersés. Nous devons nous aider les uns les autres en amour, selon la mesure de grâce accordée et la nature du don communiqué à chacun. C’est une chose mutuelle — « vous édifiant vous-mêmes ». Ce n’est pas rechercher un ordre selon l’homme, ni nous plaindre de notre manque de dons, mais simplement faire chacun ce qu’il peut pour promouvoir la bénédiction commune et le profit de tous.

Le lecteur remarquera les quatre choses que nous sommes exhortés à faire, à savoir « édifier », « prier », « conserver », « attendre ». Quel travail béni il y a là ! Oui, et c’est un travail pour tous. Il n’y a pas un seul vrai chrétien sur la surface de la terre qui ne puisse accomplir une ou toutes ces branches du ministère. En réalité, chacun est responsable de le faire. Nous pouvons nous édifier nous-mêmes sur notre très sainte foi, nous pouvons prier par le Saint Esprit, nous pouvons nous conserver dans l’amour de Dieu, et en faisant ces choses, nous pouvons attendre la miséricorde de notre Seigneur Jésus Christ.

On pourrait demander : « Qui sont les bien-aimés ? À qui le terme s’applique-t-il ? ». Notre réponse est : « À qui de droit ». Assurons-nous d’être sur le terrain de ceux à qui ce précieux titre s’applique. Ce n’est pas supposer un droit, mais occuper le vrai terrain moral. Ce n’est pas une profession vide, mais une possession réelle. Ce n’est pas revendiquer le nom, mais être la chose.

La responsabilité du résidu chrétien ne se termine pas ici. Ce n’est pas seulement à eux-mêmes qu’ils ont à penser. Ils doivent jeter un regard d’amour et étendre une main secourable au-delà de la limite de leur propre cercle. « Et les uns qui contestent, reprenez-les ; les autres sauvez-les avec crainte, les arrachant hors du feu, haïssant même le vêtement souillé par la chair ». Qui sont « les uns » ? et qui sont « les autres » ? N’est-ce pas la même belle indétermination quant à ceux-ci que quant aux « bien-aimés » ? Ces derniers ne seront pas en peine de découvrir les premiers. Il y a des âmes précieuses dispersées ici et là au milieu des ruines effroyables de la chrétienté, « quelques-unes » d’elles devant être considérées avec une tendre compassion, « d’autres » devant être sauvées avec une pieuse crainte, de peur que le « bien-aimé » ne soit impliqué dans la souillure.

C’est une erreur fatale de supposer que, afin d’arracher les gens hors du feu, nous devons nous-mêmes entrer dans le feu. Cela n’ira jamais ainsi. Le meilleur moyen de délivrer quelqu’un d’une mauvaise position, est d’être moi-même complètement en dehors de cette position. Comment puis-je le mieux tirer quelqu’un d’un bourbier ? Certainement pas en entrant dans le bourbier, mais en me tenant sur le sol ferme et de là, en lui tendant une main secourable. Je ne peux pas tirer quelqu’un hors de quoi que ce soit, sans en être moi-même dehors. Si nous voulons aider le peuple de Dieu qui est mêlé à la ruine environnante, la première chose pour nous est de nous trouver dans une séparation complète et décidée. La chose suivante est d’avoir nos cœurs remplis et débordants d’un amour tendre et fervent pour tous ceux qui portent le précieux nom de Jésus.

Nous devons terminer ici, et en le faisant, nous citerons au lecteur cette doxologie bénie par laquelle l’apôtre résume son discours solennel et lourd de sens. « Or, à celui qui a le pouvoir de vous garder sans que vous bronchiez et de vous placer irréprochables devant sa gloire avec abondance de joie, au seul Dieu, notre Sauveur, par notre seigneur Jésus Christ, gloire, majesté, force et pouvoir, dès avant tout siècle, et maintenant, et pour tous les siècles ! Amen ». Nous avons bien des choses concernant la « chute » dans cette épître — Israël en chute, les anges en chute, les cités en chute, mais béni soit Dieu, il y en a un qui est capable de nous garder de chute, et c’est à Sa sainte garde que nous sommes remis.