Les deux natures

ou Le nouveau converti et ses difficultés
G. Cutting

Les personnes qui ont beaucoup à faire avec les difficultés et les combats des nouveaux convertis, entendent souvent des expressions comme celle-ci : D’abord je croyais être sauvé, mais maintenant je commence à craindre qu’après tout, ce n’ait été qu’une illusion, car, bien loin de me sentir meilleur, je me sens plutôt pire qu’avant ma conversion.

En pareil cas, vous trouverez que ces personnes ne sont pas proprement troublées par leurs péchés, mais qu’elles sont profondément découragées en découvrant peu à peu que leur nouvelle naissance n’a aucunement amélioré leur mauvaise nature qui leur paraît même beaucoup plus mauvaise qu’avant leur conversion. De là, maints efforts inutiles pour l’améliorer, qui hélas ! ne font qu’aggraver cet état misérable. Un tel état d’âme offre à Satan une belle occasion pour nous lancer ses dards enflammés. Il nous suggère que nous sommes de misérables hypocrites, professant être ce que nous savons n’être pas ; et que nous ferions mieux d’abandonner la partie, de nous montrer sous notre vrai jour, et d’avouer que nous n’avons jamais été convertis !

Oh ! quelles angoisses, quelle agonie morale, causent de tels assauts, tant que la vraie liberté n’est pas connue ! Ceux qui ont réellement passé par là peuvent seuls en comprendre l’indicible amertume. Le désir de leur venir en aide a donné naissance à ces pages.

Les faits divins et nos sentiments

Lorsque Dieu établit un fait dans sa Parole, nous devons l’accepter et le croire, lors même que notre raison ne pourrait le comprendre, et qu’il ne serait pas d’accord avec notre expérience. Dieu est son propre interprète, et en son temps, il « rendra la chose intelligible » à l’âme qui s’attend patiemment à Lui. Mais quand même il ne lui plairait pas de le faire, notre devoir est toujours de croire, puisque Dieu ne saurait se tromper.

Avant d’entreprendre le sujet qui doit nous occuper, permettez-moi d’exprimer ma pensée par un exemple que Dieu bénira, je l’espère, pour tout lecteur, encore incertain s’il possède actuellement la vie éternelle.

Ouvrez votre Bible au chapitre 3 de l’évangile de Jean ; vous y verrez, dans les deux derniers versets, quatre faits positifs et actuels établis par Dieu. Plaçons-les à la suite les uns des autres :

1° Le Père aime le Fils.

2° Et a mis toutes choses entre ses mains.

3° Qui croit au Fils a la vie éternelle.

4° Qui désobéit au Fils… la colère de Dieu demeure sur lui.


Eh bien ! je le répète, voici quatre faits qui ne sont pas de simples opinions humaines basées sur notre expérience, mais des faits inaltérables. De quelle manière tel fait agit sur vous, quand vous y croyez, est une toute autre question, et devient alors une affaire de sentiment ou d’expérience.

La nouvelle de la bataille de la Marne, il y a de nombreuses années, produisit, sans doute, une immense diversité d’impressions, en parvenant aux oreilles de diverses personnes, en différents pays, mais le fait n’en restait pas moins invariablement le même. L’expérience était produite par la réception du fait, mais le fait lui-même ne dépendait pas de l’expérience.


Prenons un autre exemple. Un jeune homme doit entrer, à sa majorité, en possession d’une grande fortune. Un matin, son père lui dit : « Je te félicite, mon fils ! te voilà majeur aujourd’hui ». — « Pardon, mon père », répondit-il, « mais je crois que tu te trompes ». — « Comment donc ? » demande le père étonné. — « Oh ! pour trois raisons. D’abord, je ne sens pas que j’ai vingt et un ans. Ensuite, je me suis regardé ce matin au miroir, et je suis persuadé que je n’ai pas l’air d’avoir cet âge. Enfin, beaucoup de mes amis intimes sont convaincus que je ne puis avoir plus de dix-huit ou dix-neuf ans. Comment donc aurais-je atteint ma majorité ? Mes amis ne le pensent pas, moi-même je ne le sens pas, et je n’en ai pas l’apparence ».

Que fera, dans ce cas, un père avisé ? Il ouvrira tout simplement le registre de famille, et si ce qu’il y trouve inscrit ne parvient pas à convaincre son fils, rien ne le pourra.

« Mais », direz-vous, « qui serait assez fou pour parler de la sorte ? ». Je réponds : Prenez garde de ne pas commettre vous-même une pire folie. On ne saurait nier qu’aujourd’hui, des multitudes de chrétiens qui font profession de croire en Christ, suivent exactement le même ordre d’arguments, et cela en présence des faits les plus clairs de la Parole de Dieu. Or si le témoignage écrit du père, dans le registre de famille, suffit pour convaincre le fils de son âge réel, quels que soient ses sentiments à ce sujet, certes la Parole écrite de Dieu « qui sort de la bouche de Dieu », doit suffire pour nous donner la pleine assurance de notre bénédiction éternelle. Remarquez comment, dans ce verset de Matthieu 4, 4, Christ relie ces mots : « il est écrit », avec ceux-ci : « la bouche de Dieu ». La foi fait toujours ainsi.


Passons maintenant à l’examen des quatre faits mentionnés plus haut :

Le Père aime le Fils.

Croyez-vous à ce fait ?

« Oh oui ! dites-vous, j’y crois ».

Mais sentez-vous que le Père aime le Fils ?

« Il ne s’agit pas de ce que je pense ou sens », répondez-vous, « j’en suis certain, parce que la Parole de Dieu le dit. C’est un fait, et comme tel, j’y crois ».


Et a mis toutes choses entre ses mains.

« Oui », dites-vous, « je crois aussi fermement à ce fait ».

Mais y croyez-vous parce que vous le sentez, ou bien parce que vous voyez que Dieu a mis toutes choses entre les mains du Fils ?

« Ni l’un, ni l’autre », répondez-vous ; « j’en suis pleinement convaincu, parce que Dieu l’a déclaré ».

Passons maintenant d’abord au dernier fait.


Qui désobéit au Fils… la colère de Dieu demeure sur lui.

Je vous le demande encore : Croyez-vous à ce fait, savoir que la colère de Dieu demeure sur l’incrédule ? Peut-être répondrez-vous encore affirmativement. Mais supposez que l’incrédule ne le sente pas ? « Oh ! » direz-vous, « la colère de Dieu n’en demeure pas moins sur lui ». Qu’il la sente ou non, la chose n’en reste pas moins vraie. C’est un fait écrit dans la Parole, et « la parole de Dieu demeure éternellement » (És. 40, 8). « Mais », vous hâtez-vous d’ajouter, « je ne suis pas un incrédule, je crois réellement au Fils de Dieu ».

Bien ! veuillez remarquer maintenant le troisième fait que j’avais omis à dessein :


Qui croit au Fils a la vie éternelle.

Dans un verset précédent de ce même chapitre, nous lisons : « Celui qui a reçu son témoignage, a scellé que Dieu est vrai » (v. 33). Or remarquez que Dieu n’a pas seulement donné un témoignage distinctif relativement à son Fils bien-aimé, mais, mainte et mainte fois, il a déclaré les faits les plus positifs au sujet de ceux qui croient réellement en Lui. « Si seulement je pouvais croire que je suis sauvée, je serais sauvée », disait un jour une personne travaillée, « mais je n’ai pas encore assez de foi pour cela ». Quelque plausible que puisse paraître ce langage, ce n’est pas celui de l’évangile. Dieu ne dit pas : « Si vous avez assez de foi pour croire que vous avez la vie éternelle, vous l’aurez ». Ce serait faire un Sauveur de votre foi et exclure Christ. Mais si je crois en Son Fils, Dieu émet à mon égard un simple fait, savoir que j’ai la vie éternelle et, pour ma part, il me laisse simplement sceller que « Dieu est vrai ». Si la colère de Dieu demeure sur l’incrédule, qu’il le sente ou non, de même le croyant a la vie éternelle, qu’il pense ou non le sentir suffisamment.

Deux impossibilités

Mais quelque âme angoissée dira peut-être : « Là n’est pas ma difficulté ; je ne saurais douter un instant que le croyant ne possède actuellement la vie éternelle, mais, en comparant mon expérience journalière avec d’autres vérités très claires de la Parole de Dieu, je doute beaucoup que je sois né de nouveau.

Dans la première épître de Jean, par exemple, je trouve trois faits absolus qui caractérisent celui qui est « né de Dieu, et j’ai beau faire, ils ne correspondent nullement à mon état.

1° Il ne pratique pas le péché… et ne peut pas pécher (1 Jean 3, 9).

Il est victorieux du monde (chap. 5, 4).

Le méchant ne le touche pas (chap. 5, 18).

Eh bien ! en face de ces assertions de l’Écriture, je suis obligé de confesser :

1° Que je puis pécher, et que, hélas ! je pèche.

2° Qu’au lieu d’être victorieux du monde, il a constamment la victoire sur moi.

3° Que l’ennemi me défait sans cesse, et, à bien plus forte raison, me touche.

Est-il étonnant », dites-vous, « que je sois souvent troublé, et même effrayé, par de tels passages, devant mes propres expériences ? ».

En effet, cela ne m’étonne pas, mais, pour vous encourager, permettez-moi de vous dire que ceux qui sont « morts dans leurs péchés » n’éprouvent jamais d’angoisses pareilles. Ceux qui sont convertis peuvent seuls désirer répondre aux pensées et aux désirs de Dieu. Celui qui est inconverti ne désire pas « connaître ses voies ». « Il n’y a point de crainte de Dieu devant leurs yeux » (Rom. 3, 18).


Mais reprenons notre sujet :

Vous venez de mentionner une impossibilité, savoir que « celui qui est né de Dieu ne peut pécher ». Considérons-en une seconde (Rom. 8, 7, 8). « La pensée de la chair est inimitié contre Dieu, car elle ne se soumet pas à la loi de Dieu, car aussi elle ne le peut pas. Et ceux qui sont dans la chair ne peuvent plaire à Dieu ». Notez bien ces contrastes importants :

« Dans la chair » — comme nés de la chair, et « ne pouvant plaire à Dieu ».

« Nés de Dieu » et « ne pouvant pas pécher ».

Il est à propos de remarquer ici que l’Écriture mentionne la « chair » de deux manières :

1° Ce terme est employé pour désigner le corps physique, ainsi : « Dieu a été manifesté en chair » (1 Tim. 3, 16). Et Paul, écrivant aux Colossiens, dit (chap. 2, 1) : « Tous ceux qui n’ont point vu mon visage en la chair ».

2° C’est la nature mauvaise et déchue de tout enfant d’Adam, empoisonnée par le péché qui y habite et qui est la source de toutes les mauvaises actions que l’homme commet. « La chair convoite contre l’Esprit, etc. » (Gal. 5, 17).

Deux natures distinctes dans la même personne

Nous avons vu qu’à notre naissance, nous recevons une nature mauvaise, si mauvaise qu’il lui est impossible de se soumettre à la sainte loi de Dieu. Elle « ne peut plaire à Dieu ». « Voici », dit le psalmiste, « j’ai été enfanté dans l’iniquité, et dans le péché ma mère m’a conçu » (Ps. 51, 5).

Mais lors de notre naissance spirituelle (ou nouvelle naissance), nous recevons par l’opération souveraine de l’Esprit, par le moyen de la Parole de Dieu (Jacq. 1, 18 ; 1 Pier. 1, 23), une nature entièrement différente, une « nature divine » (2 Pier. 1, 4), une nouvelle vie. Le Seigneur le déclare en quelques mots à Nicodème : « Ce qui est né de la chair est chair ; et ce qui est né de l’Esprit est esprit » [Jean 3, 6].

Le croyant possède donc deux natures, « celle qui est née de la chair » et qui, par suite de son essence même, « ne peut plaire à Dieu », et celle qui est née de l’Esprit et qui, par son essence même, ne peut pécher, parce qu’elle est née de Dieu. Au chapitre 7 des Romains, vous verrez ces deux natures mentionnées ensemble ; comme, par exemple, au dernier verset :

« Ainsi donc moi-même, de l’entendement (c’est-à-dire de l’esprit renouvelé, ou, comme nous l’avons exprimé, de la nouvelle nature), je sers la loi de Dieu ; mais de la chair (c’est-à-dire de la vieille nature), la loi du péché ». Et aux versets 22, 23 : « Car je prends plaisir à la loi de Dieu selon l’homme intérieur ; mais je vois dans mes membres une autre loi qui combat contre la loi de mon entendement, etc. ».


Un simple exemple pourra servir d’illustration.

Une fermière ayant fait couver des œufs de canard à une poule, découvrit au bout d’une semaine qu’un ennemi de la couvée avait détruit une bonne partie des œufs. Elle les remplaça par des œufs de poule. Quand vint le jour de l’éclosion, la poule se trouva mère de deux espèces bien distinctes de petits êtres. Elle ne s’en inquiéta guère, mais un beau jour elle s’aperçoit, à son grand effroi, que les canetons se sont enfuis vers une mare du voisinage, et sont tellement ravis de leur première excursion sur l’eau, que tous les gloussements et les pressants appels de leur mère sont impuissants à les ramener sur le sec. Les poussins, au contraire, ne montrent pas la moindre velléité de s’aventurer sur l’élément perfide, et seraient profondément malheureux d’y être contraints. Il y a donc ici deux natures bien distinctes avec des goûts et des habitudes entièrement différents. Celle qui provient de l’œuf de canard a la nature de ce dernier ; celle qui provient de l’œuf de poule a la nature de la poule, et cependant l’une et l’autre ont été couvées dans le même nid. Mais toutes les fermières de l’univers, assistées de tous les hommes de science, ne réussiront jamais à changer la nature d’un caneton en celle d’un poussin. Chacun d’eux gardera toujours sa nature.


Eh bien ! les deux natures dans le chrétien sont mille fois plus distinctes, en vertu de la différence de leurs origines. L’une vient de l’homme — de l’homme perdu, coupable, tombé — l’autre est de Dieu, dans toute la sainteté de sa nature sans tache. L’une est humaine et souillée, l’autre divine et, par conséquent, parfaitement pure. Toute pensée ou action mauvaise dans le croyant, doit donc nécessairement provenir de la vieille nature ; tout bon désir, tout acte approuvé de Dieu, prend sa source dans la nouvelle.

Mais une autre question importante surgit ici :

La vieille nature est-elle améliorée par la nouvelle ?

Il n’y a qu’une seule réponse : Rien ne peut améliorer la chair. L’essai en a été tenté de toute manière depuis la chute d’Adam en Éden, jusqu’à la croix de Christ. Et quel en a été le résultat ? L’homme a volontairement transgressé la sainte loi de Dieu, lorsque Dieu lui demanda d’y obéir. Son Fils fut cruellement mis à mort quand il vint visiter ce monde en grâce. Au lieu donc que la présence de la vie divine améliore la vieille nature, elle ne fait qu’en manifester la complète perversité. Si vous donnez à un pauvre mendiant un habit neuf, croyez-vous qu’il embellira l’apparence de son vieux gilet déchiré ?

« Eh bien ! dites-vous, si ma vieille nature ne peut être ni pardonnée, ni améliorée, deux difficultés nouvelles se présentent :

1° Comment puis-je en être délivré ?

2° Comment pourrai-je la tenir en ma puissance ? »

Avant de résoudre ces difficultés, notons la différence importante établie par l’Écriture entre :

Le « péché » dans la chair et « les péchés »

Le mauvais principe, né en nous par nature, est fréquemment appelé le péché, tandis que les actions, paroles et pensées mauvaises, résultats de la possession de cette nature corrompue, sont appelées les péchés. Vous remarquerez cette distinction en 1 Jean 1, 8, 9 : « Si nous disons que nous n’avons pas de péché, nous nous séduisons nous-mêmes », et plus loin : « Si nous confessons nos péchés, il est fidèle et juste pour nous pardonner nos péchés ». Cette distinction est de toute importance, car si l’Écriture nous enseigne que Dieu pardonne nos actes coupables, c’est-à-dire nos péchés, en vertu de l’aspersion du sang de Christ, elle nous montre aussi que Dieu ne pardonne jamais le péché dans la chair, mais le « condamne » ou le juge. Je m’explique :

Supposons que vous ayez un enfant d’un caractère violent et emporté. Un jour, dans un accès de colère, il jette un livre à la tête de son frère et brise du même coup une vitre. Il se repent, confesse sa méchante action, et vous lui pardonnez de bon cœur. Mais que ferez-vous du caractère emporté qui l’a poussé à cet acte ? Le pardonnerez-vous ? Impossible ! Vous le détestez, vous le condamnez absolument, vous le feriez disparaître si vous le pouviez.

Eh bien ! le mauvais caractère (bien qu’il ne soit en lui-même qu’un des traits d’une mauvaise nature) correspondrait au péché habitant en nous, tandis que le déploiement de son activité mauvaise qui fait blesser le frère et briser la vitre, correspondrait plutôt aux péchés. Ainsi, je le répète, bien que Dieu pardonne gratuitement les péchés du croyant, il ne pardonne jamais le péché. Dans sa justice, il ne peut que le frapper de condamnationla mort seule peut en affranchir.

Voyez Romains 8, 3 : « Dieu, ayant envoyé son propre Fils en ressemblance de chair de péché, et pour le péché (c’est-à-dire comme sacrifice pour le péché), a condamné le péché dans la chair ».

Les premiers chapitres de l’épître aux Romains s’occupent de la délivrance des péchés, mais au chapitre 6, l’apôtre nous montre comment nous sommes délivrés du péché. Le dernier verset du chapitre 4, par exemple, parle de Christ comme ayant été « livré pour nos fautes et… ressuscité pour notre justification » ; et la conséquence bénie du fait qu’il a été ainsi délivré, est que ceux qui croient en Lui sont pardonnés justement, c’est-à-dire « justifiés », et ont « la paix avec Dieu ». Mais, comme nous venons de le dire, le chapitre 6 traite d’un tout autre sujet, de la délivrance du péché : « Celui qui est mort », dit-il, « est justifié du péché » (v. 7).

Vous pourrez vous faire une idée de la différence entre ces deux choses, en comparant la purification du lépreux (Lév. 14, 1-7) avec celle de Naaman (2 Rois 5, 10-14).

Remarquez, dans le premier de ces passages, que le pauvre lépreux, entièrement incapable de faire quoi que ce soit pour sa propre purification, n’a qu’à se tenir tranquille, assistant, pour ainsi dire, à tout ce qui se fait pour lui. Le passereau « vivant et net » est trempé dans le sang de l’autre passereau égorgé, puis le sacrificateur le laisse aller par les champs ; c’est-à-dire que le pauvre lépreux, souillé, voit en figure quelqu’un de « vivant » et de « net » descendre dans la mort pour lui. Le substitut, trempé dans le sang, s’envole ensuite dans les airs, et le lépreux est déclaré net par la bouche du sacrificateur.

De même, « Christ a souffert une fois pour les péchés, le juste pour les injustes, afin qu’il nous amenât à Dieu » (1 Pier. 3, 18), et, par conséquent, aucune tache ne peut être trouvée sur nous, aucune accusation formulée contre nous qui croyons en Lui. « Le sang de Jésus Christ son Fils nous purifie de tout péché » (1 Jean 1, 7), et « de tout ce dont vous n’avez pu être justifiés par la loi de Moïse, quiconque croit est justifié par Lui » (Act. 13, 38, 39).

Passons maintenant au cas de Naaman. Ici, nous ne voyons pas une autre personne descendre dans la mort pour lui ; il faut qu’il entre lui-même dans le Jourdain, figure de la mort. Je ne m’étends pas sur ce qui en résulte ; il suffit de faire remarquer qu’en type, tout ce qu’il avait été comme lépreux avait disparu dans la mort.

L’Écriture nous enseigne donc que non seulement Christ est descendu dans la mort pour le croyant, mais que ce dernier, comme Naaman, est entré lui-même dans la mort. Il est mort avec Christ (Rom. 6, 8).

Il y a toutefois une grande différence entre notre délivrance et celle de Naaman. Il fut délivré de la présence du fléau, tandis que nous ne serons délivrés de la présence actuelle du péché qui habite en nous, que lorsque nous quitterons ce monde, soit à la mort, soit à la venue du Seigneur.

Ainsi, tout ce que nous sommes par nature, comme aussi tout ce que nous avons fait, a déjà été jugé à la croix, et Celui qui y a porté notre condamnation a dit : « C’est accompli ». Qui donc nous condamnera ? Il ne reste rien à condamner. Que Satan vienne placer nos péchés devant nous, nous ne chercherons ni à les nier, ni à les excuser, mais nous répondrons simplement : « Christ est mort pour mes péchés ». Qu’il cherche à nous troubler par la pensée de notre nature pécheresse, nous ajouterons : « Et moi aussi je suis mort ».

Ici se présente une difficulté pratique pour beaucoup d’âmes. J’entendis une fois un croyant prier très instamment « qu’il lui fût donné de sentir qu’il était mort avec Christ ». Mais Dieu nous parle-t-il jamais de sentir que nous sommes morts ? Non ; il nous dit de nous « tenir pour morts », « pour morts au péché, mais pour vivants à Dieu dans le Christ Jésus » (Rom. 6, 11). Il nous faut croire que nous sommes morts avec Christ, simplement parce que Dieu le dit, et non parce que nous le sentons, car nous ne le sentirons jamais. Dieu nous dit qu’à ses yeux il en est ainsi, et veut que nous le croyions aussi simplement que nous croyons au fait de la mort de Christ pour nos péchés. Dieu nous compte la mort de notre substitut comme étant la nôtre, et les calculs de la foi sont toujours d’accord avec ceux de Dieu.

Ainsi notre ancienne condition, en tant que fils d’Adam tombé, a pris fin devant Dieu à la croix, où, comme dit l’Écriture : « Notre vieil homme a été crucifié avec Christ » (Rom. 6, 6), et maintenant nous sommes en relation vivante avec le second Adam, le Christ ressuscité, ou, comme il est dit en Romains 7, 4, nous sommes mariés « à un autre, à celui qui est ressuscité d’entre les morts ».

Comme croyants, nous avons été introduits dans une position entièrement nouvelle. Celui qui a porté notre condamnation, ayant été fait péché pour nous sur la croix, est maintenant ressuscité d’entre les morts, et Dieu nous voit « en Lui ». Nous sommes faits « la justice de Dieu en Christ » [2 Cor. 5, 21], et nous sommes, par conséquent, pour toujours à l’abri de la condamnation.

« Mais comment peut-il se faire, dira quelqu’un, que la présence, dans le croyant, d’une chose aussi mauvaise que la chair, ne soit pas un empêchement à sa communion avec Dieu ? ». Je vais chercher à l’expliquer par un nouvel exemple :

Un père et un fils sont un jour à la maison, jouissant ensemble d’une heureuse communion ; c’est-à-dire qu’ils ont en commun, sur toutes choses, les mêmes pensées et les mêmes sentiments. En ce moment, un autre enfant qui vient de courir les bois, entre dans la chambre et pose sur la table des baies de belladone. Aussitôt le père les condamne comme un poison terrible dont il faut se garder de goûter, et ordonne de les emporter. Or, si le fils partage la pensée de son père à l’égard de ce poison, et le condamne comme lui, vous comprendrez immédiatement que la seule présence du mauvais fruit n’a pas occasionné la moindre rupture de communion entre le père et le fils. Mais si le fils, trompé par la belle apparence de ces fruits et refusant d’accepter le jugement de son père, cherche à conserver les baies de belladone, il est hors de communion, et s’il les goûte, il peut être certain d’en porter la conséquence. Si toutefois, confessant humblement sa propre volonté, il est amené à voir sa folie et à prendre le parti de son père en condamnant ce mauvais fruit, il retrouvera la communion perdue.

Lorsque le croyant, auquel Dieu a enseigné ces vérités bénies, découvre, ce qui ne saurait manquer, que le péché habite encore en lui, et que la vieille nature est aussi mauvaise et même pire que jamais, il peut, au lieu de tenter inutilement de l’améliorer, prendre le parti de Dieu contre elle. Il ne la considère que comme un ennemi mortel dont il faut toujours se garder et qu’il ne faut jamais tolérer. Il sait que Dieu l’a entièrement condamnée à la croix, et par conséquent lui-même aussi la condamne entièrement. Il se tient pour mort au péché, mais « vivant à Dieu par Jésus Christ notre Seigneur ».


Oh ! quelle grâce que Dieu n’attende plus rien de bon de la chair, mais qu’il l’ait mise de côté à toujours comme une chose foncièrement mauvaise. Mais, en outre, elle n’a plus aucun droit légitime sur nous. Nous ne sommes plus débiteurs à la chair « pour vivre selon la chair » (Rom. 8, 12), et, bien que nous soyons responsables d’exercer la plus grande vigilance pour l’empêcher d’agir, Dieu, par la mort et la résurrection de Christ, nous donne de la considérer comme n’ayant plus aucune place dans notre nouvelle condition devant lui. La croix de Christ a rompu à jamais le lien qui nous unissait au premier Adam déchu, et le Saint Esprit a apporté dans nos âmes la vie du dernier Adam ressuscité.

Dieu ne nous estime plus du tout comme étant « dans la chair », mais « dans l’Esprit », et la seule vie que nous possédions maintenant devant Lui est la vie de Christ. C’est pourquoi l’apôtre pouvait dire : « Je suis crucifié avec Christ ; et je ne vis plus, moi, mais Christ vit en moi ; et ce que je vis maintenant dans la chair, je le vis dans la foi, la foi au Fils de Dieu, qui m’a aimé et qui s’est livré lui-même pour moi » (Gal. 2, 20).

Considérons maintenant la question suivante, savoir :

Quel est le secret de notre puissance ?

Rappelez-vous notre histoire de la poule et de sa couvée. Son désespoir est l’image que présentent un grand nombre d’âmes de nos jours. Quelle est la cause des anxiétés de la pauvre poule ? Simplement qu’il lui est impossible de changer les canetons, et de les rendre ce que son instinct naturel lui dit que des poussins doivent être. Plus les canetons grandissent, plus ils sont déterminés à se jeter à l’eau dès qu’ils en trouvent la moindre occasion. Quelquefois, il est vrai, ils viennent tous se reposer sous son aile, et alors elle s’imagine qu’elle a enfin remporté la victoire et les a rendus meilleurs. Mais hélas ! les désappointements se succèdent, car ils vont de mal en pis. Un jour, la fermière, entendant son cri de détresse, envoie sa petite fille pour empêcher les canetons d’entrer dans la mare, car elle voit bien que l’inquiétude de la poule au sujet de cette portion de la couvée, nuit sérieusement aux soins qu’elle devrait donner aux poussins.

Aussitôt cette aide apporte un vrai repos à la pauvre poule, car bien qu’elle n’ait pas trouvé moyen d’améliorer les manières des petits vagabonds, elle a du moins maintenant une puissance pour les contrôler.

Or, quiconque est né de l’Esprit de Dieu possède des instincts particuliers à la nouvelle nature qui lui a été communiquée, instincts qui trouvent leur plaisir dans la loi de Dieu, et se soumettent à la direction de sa Parole. Mais il découvre qu’il a aussi affaire avec des instincts et des désirs d’un caractère tout opposé et particuliers à la vieille nature. Il y a ainsi « les choses de la chair » et « les choses de l’Esprit ». Les goûts et les aspirations de ces deux natures sont en opposition directe les uns avec les autres.

Mais ce qui trouble le nouveau converti, c’est qu’il ne peut faire de la chair ce que la Parole de Dieu exige pour une âme née de nouveau, et la loi ne peut lui venir en aide, dans cette lutte, car elle ne lui donne aucune puissance. En d’autres termes, il essaie d’accomplir ce que Dieu a déclaré être complètement impossible, c’est-à-dire de soumettre la chair à sa sainte loi (voyez Rom. 8, 7, 8). Il trouve que la chair veut penser aux choses de la chair, qu’elle est ennemie de la loi de Dieu et de Dieu lui-même. Or s’il en est ainsi, plus l’âme s’efforcera d’atteindre cette impossibilité, plus grande sera sa misère. En effet, appliquer la loi à la chair pour chercher à soumettre celle-ci, ne fait que manifester toujours plus son iniquité désespérée. Si vous jetez de l’eau sur la chaux vive, au lieu de la refroidir, vous ne faites que mettre au jour le feu qui y couve. Il en est ainsi de la chair ; appliquez-lui la loi, elle ne fera que découvrir « l’inimitié » que la chair recelait déjà auparavant. « Par la loi est la connaissance du péché » (Rom. 3, 20). Le croyant possède, il est vrai, une nature qui « veut pratiquer le bien », mais il trouve, hélas ! que « le mal est avec lui » [Rom. 7, 21], et il est enfin délivré quand, renonçant à une lutte entièrement désespérée, il regarde hors de lui-même et s’écrie : « Misérable homme que je suis, qui me délivrera ? » [Rom. 7, 24]. Alors il rend grâces à Dieu par Jésus Christ.


Ainsi il a appris (ce que tout homme doit apprendre pour réaliser la délivrance d’une manière expérimentale) premièrement, que « la chair » est une chose sans aucune valeur, et qu’il n’y a ni bien en elle, ni remède pour elle (Rom. 7, 18 ; 8, 7) ; et secondement que, même dans la nature nouvelle avec ses excellents désirs, il n’y a de puissance réelle ni pour le bien, ni contre le mal.

Mais l’Esprit de Dieu fait plus que de donner la vie à un pécheur mort. Il devient ensuite la puissance de cette vie. Lorsque le nouveau converti croit à « l’évangile de son salut », le Saint Esprit, comme une personne distincte, entre en lui et fait de lui sa demeure (Éph. 1, 13). Il est « scellé » pour « le jour de la rédemption », c’est-à-dire de la rédemption du corps (Éph. 4, 30 ; voyez aussi Rom. 8, 9, 14, 16, et les propres paroles du Seigneur, en Jean 14, 17). Selon 1 Corinthiens 6, 19, son corps devient « le temple du Saint Esprit » qui est en lui. Il ne s’appartient plus à lui-même, mais il a été « acheté à prix ».

J’ai vu, il y a quelques mois, l’annonce suivante, sur les murs d’une grande maison qui paraissait être un hôtel.

« Cette maison sera ouverte de nouveau » à telle date, « sous une direction entièrement nouvelle ». Je conclus qu’elle avait changé de maître et avait maintenant un nouveau propriétaire. Cette annonce me fit penser sur-le-champ au passage que nous venons de citer (1 Cor. 6, 19, 20). La maison était la même ; les fenêtres, les portes, les cheminées, les dépendances, n’avaient pas changé, mais elle avait un nouveau propriétaire et par conséquent « une direction entièrement nouvelle ».

Il en est ainsi du croyant. Il est le même individu, avec les mêmes facultés qu’il avait avant sa conversion ; il a peut-être les mêmes occupations ; les mêmes circonstances sociales l’entourent, mais il est devenu la propriété personnelle d’un autre. Il appartient « à Christ », et comme tel il est placé maintenant sous une « direction entièrement nouvelle », car le Saint Esprit demeure dans le corps du chrétien, en fait sa résidence, et dorénavant gouvernera la maison d’après les principes célestes. Que c’est solennel et en même temps infiniment précieux !

Là donc est la force du croyant pour toute activité selon Dieu. Là est sa puissance pour résister à la chair, pour faire « mourir les actes du corps » (Rom. 8, 13). Il nous est dit en Galates 5, 17, que « la chair convoite contre l’Esprit, et l’Esprit contre la chair ; et ces choses sont opposées l’une à l’autre », afin que nous ne pratiquions pas les choses que nous voudrions. Ce à quoi nous devons prendre garde, c’est de ne pas « contrister » Celui qui est venu pour nous « diriger », savoir « le Saint Esprit de Dieu », par lequel nous avons été scellés pour le jour de la rédemption (Éph. 4, 30).

Mais, demandera-t-on, si la mauvaise nature est encore dans toute personne convertie, toujours prête à faire valoir ses droits, comment la Parole peut-elle dire que

Quiconque est né de Dieu ne peut pas pécher

Observez d’abord qu’il ne s’agit pas d’une chose extraordinaire, laquelle n’atteint que quelques personnes qui, selon une expression usitée, ont « la foi pour cela ». Ce passage embrasse l’ensemble de ceux qui sont nés de nouveau : « Quiconque est né de Dieu » [1 Jean 5, 18].

« Mais », direz-vous encore, « cela contredit absolument tout ce dont je fais l’expérience en moi-même, ou ce que je vois chez d’autres ». — Il peut paraître qu’il en est ainsi, mais considérons la chose de plus près et avec prière, nous souvenant que le premier pas pour comprendre la Parole de Dieu est de la croire. « Par la foi, nous comprenons » (Héb. 11, 3). Je vous citerai un exemple, souvent employé par un serviteur de Dieu qui est maintenant auprès du Seigneur, celui de la greffe du pommier qui se pratique fréquemment sur le tronc du pommier sauvage. Vous savez, sans doute, qu’on commence par décapiter le pommier sauvage, puis on y insère soigneusement la « greffe », consistant en un petit rameau du bon pommier, protégé par une couche de terre glaise autour de la fissure, et qu’on laisse croître et se développer pendant le printemps et l’été.

Transportons-nous par la pensée dans le verger où l’arbre en question a été planté, et causons avec le jardinier.

— Comment appelez-vous cet arbre ? demandons-nous.

— Un pommier, répond-il.

— Mais pourquoi ne dites-vous pas que c’est en partie un pommier sauvage et en partie un pommier cultivé ?

— Parce qu’il ne vient pas à l’idée d’un jardinier de s’exprimer ainsi. C’était une fois, il est vrai, un pommier sauvage dans la forêt, maintenant c’est un bon pommier dans le verger. C’est en réalité le même individu, mais quand nous l’avons décapité, son histoire comme pommier sauvage a pris fin. Et du jour que la nouvelle greffe a commencé à donner signe de vie, sa nouvelle histoire comme bon pommier a commencé.

— Mais est-ce que ce pommier ne porte pas encore des pommes sauvages ?

— Non, et qui plus est, il ne le peut. Il est tout aussi impossible au bon pommier de porter des pommes sauvages, qu’il était impossible au pommier sauvage de produire de bonnes pommes.

— Voulez-vous donc dire qu’il ne reste à cet arbre absolument rien de la nature du pommier sauvage ?

— Certes pas, mais je maintiens, qu’il n’y a rien en lui du pommier sauvage qui n’ait été condamné comme tel, et s’il donnait des signes de vie en poussant des rejetons du vieux tronc, je prendrais immédiatement mon sécateur et n’en épargnerais pas le plus faible rejeton.

Faisons maintenant l’application de cette image. Le pommier sauvage représente un homme dans son état naturel, avant d’être né de Dieu. À sa seconde naissance, une vie nouvelle, semblable à la greffe du pommier, est produite en lui par l’Esprit et la Parole.

Dans ses épîtres, l’apôtre Jean parle en général des choses d’une manière très abstraite. De même que le jardinier soutenait que l’arbre était un bon pommier, de même Jean, dans le passage auquel nous avons fait allusion, ne considère le croyant que par rapport à la nouvelle nature, à la vie divine qu’il possède en tant que né de Dieu. Or, tout comme il est impossible qu’un pommier (considéré simplement comme tel) porte des fruits sauvages, et cela parce qu’il est un pommier, il est également impossible pour celui qui est né de Dieu (considéré comme tel) de pratiquer le péché. Sa semence demeure en lui, et « il ne peut pas pécher, parce qu’il est né de Dieu ». Comment une nature divine pourrait-elle pécher ?

Cette nature divine fut en réalité celle que Christ manifesta dans toute sa carrière terrestre. Il n’a pas péché. Comment l’aurait-il pu ? Il a vaincu le monde [Jean 16, 33], le méchant ne pouvait le toucher [1 Jean 5, 18]. « Le chef du monde vient, et il n’a rien en moi » (Jean 14, 30). Et, ainsi que nous l’avons déjà vu, ces mêmes choses sont vraies de ceux qui sont nés de Dieu, en sorte que l’apôtre peut dire : « Ce qui est vrai en Lui » (Christ) « et en vous » [1 Jean 2, 8]. Combien c’est merveilleux ! Et nous pouvons nous écrier dans une sainte adoration : « Voyez de quel amour le Père nous a fait don, que nous soyons appelés enfants de Dieu ; c’est pourquoi le monde ne nous connaît pas, parce qu’il ne l’a pas connu » [1 Jean 3, 1].

Mais tout en présentant la nature divine de cette manière abstraite et absolue, l’apôtre ne passe pas sous silence l’existence de la nature pécheresse dans le croyant. Ainsi, au chapitre 1, verset 8, de la première épître, il dit : « Si nous disons que nous n’avons pas de péché, nous nous séduisons nous-mêmes, et la vérité n’est pas en nous ». Puis, au chapitre 2, 1, nous sommes exhortés à ne pas pécher, et si nous tombons dans le péché, le remède nous est indiqué, savoir l’Avocat auprès du Père, Jésus Christ, le juste, qui nous fait retrouver la communion avec le Père, en nous amenant, comme ses enfants égarés, à reconnaître notre folie et à confesser nos péchés. Nous avons en outre, au chapitre 1, 9, la consolante assurance que, « si nous confessons nos péchés, il est fidèle et juste pour nous pardonner nos péchés et nous purifier de toute iniquité ». Pourquoi fidèle et juste ? Parce que Jésus Christ, le juste, en a fait pleine justice une fois pour toutes, en versant son sang précieux sur la croix.

Dans les épîtres de Paul, le Saint Esprit nous présente l’entière délivrance du croyant de son ancienne position en Adam, et nous montre sa place en tant que complètement justifié et parfaitement accepté en Christ. Il nous montre que, quoiqu’il y ait bien deux natures distinctes dans le croyant, Dieu juge que notre vieille condition de pommier sauvage a pris fin, devant Lui, judiciairement à la croix ; que notre vieil homme a été crucifié avec Christ ; que nous avons été « retranchés » comme hommes en la chair (Col. 2, 11), et que nous ne sommes plus considérés comme tels. Aussi peut-il parler du temps où nous étions dans la chair (Rom. 7, 5) et, en Romains 8, 9, peut-il simplement affirmer que nous ne sommes pas dans la chair, mais dans l’Esprit. C’est comme l’arbre qui, s’il pouvait parler, dirait : « Je n’ai pas perdu mon individualité, comme arbre, mais tandis qu’autrefois, j’étais un pommier sauvage en pleine forêt, je suis maintenant un pommier à fruit, dans le verger ».

Il est précieux de savoir que Dieu ne nous considère plus comme liés à la vie condamnée du premier Adam, mais à la vie de résurrection de Christ, le dernier Adam. « Car », dit-il, « vous êtes morts, et votre vie est cachée avec le Christ en Dieu » (Col. 3, 3). « Il n’y a donc maintenant aucune condamnation pour ceux qui sont dans le christ Jésus » (Rom. 8, 1).


J’ajouterai un mot pratique en terminant :

Quelle nature nourrirai-je ?

Nous avons vu qu’il y a deux natures, et qu’avec leurs origines différentes, elles ont des goûts entièrement différents ; il y a donc « les choses de la chair », et « les choses de l’Esprit ». N’oublions pas que ces deux natures réclameront journellement notre attention à leurs besoins respectifs. Voyez ces deux petits oiseaux dans ce nid de moineau ; tous deux demandent à grands cris leur nourriture. Un coucou qui est éclos dans le nid crie : « Donnez-moi à manger », et dans le même nid un petit moineau crie de même. Il en est ainsi des deux natures, seulement, tandis que les deux oiseaux prospèrent avec la même nourriture, chez le chrétien, ce qui nourrit la vieille nature n’a aucun élément nutritif pour la nouvelle, et ce qui est nourriture pour la nouvelle répugne absolument à la vieille.

Nous sommes donc exhortés, en Romains 13, 14, à ne pas prendre « soin de la chair pour satisfaire à ses convoitises », et en 1 Pierre 2, 11, à nous abstenir des « convoitises charnelles, lesquelles font la guerre à l’âme ». D’un autre côté, nous sommes exhortés à « désirer ardemment, comme des enfants nouveau-nés, le pur lait intellectuel », afin que nous croissions par lui à salut (1 Pier. 2, 2). Veillons donc, comme des sentinelles vigilantes, sur tout ce que nous faisons, disons, lisons, pensons, éprouvant toutes choses par cette question : Cela nourrira-t-il la nouvelle nature, ou la chair en fera-t-elle son profit ? Ne laissons rien passer de ce qui nourrit la chair et fait « la guerre à l’âme ». Que de difficultés seraient résolues par cette simple question ! N’oublions pas qu’à part la question du salut de l’âme, ceux qui sèment « pour la chair » et ceux qui sèment « pour l’Esprit », en retireront les fruits dans ce monde. « Car ce qu’un homme sème, cela aussi il le moissonnera » (Gal. 6, 7, 8). Si nous « semons pour notre propre chair », nous pouvons être certains de « moissonner la corruption » ; car il ne faut jamais confondre la main du Père en gouvernement avec l’amour du cœur du Père.

Puissions-nous être caractérisés par une conscience toujours plus délicate et une défiance toujours plus grande de nous-mêmes. Que le Seigneur soit de plus en plus notre nourriture journalière, et sa précieuse Parole nos délices !