Les sept paroles

Notes d’une méditation sur Luc 23, 32 à 34, 39 à 43 et 46 ; Jean 19, 25 à 27 ; Matthieu 27, 46 ; Jean 19, 28 à 30 ; Luc 23, 46
(Traduit de l’anglais)
J.T. Mawson
1937 — Leeds

Vous vous souvenez des paroles du vieux Siméon alors qu’il prenait l’enfant Jésus dans ses bras ; il disait : « Voici, cet enfant est mis pour la chute et le relèvement de plusieurs en Israël… en sorte que les pensées de plusieurs cœurs soient révélées ». La croix de Christ est l’épreuve, par laquelle sont mises à nu les pensées de tous les cœurs ; mais par-dessus tout, Ses sentiments profonds furent révélées là. Nous apprenons ce qu’ils étaient par les sept paroles qui sortirent de Ses lèvres.

Je voudrais que nous considérions le Seigneur Jésus alors qu’Il était pendu sur une croix de criminel. Quelle place pour le Seigneur de gloire ! Quelle place pour le Prince de la vie ! Pourtant, Il était là, et c’est pour cela qu’Il était venu du Père, pour cela qu’Il avait quitté Son trône dans la gloire et était venu dans le monde. Et pourtant, quand nous voyons Sa vie parmi les hommes, nous aurions bien pu nous attendre à quelque chose de différent. Il vint pour faire du bien, Il fut le serviteur de leurs besoins, Son cœur était toujours ému de compassion pour leurs peines ; Il les guérissait, Il bénissait leurs enfants ; Il pleurait sur eux. Assurément, l’acclamation universelle, un trône incontesté et la couronne de l’affection de Son peuple étaient ce qui Lui était justement dû ; mais au lieu de cela, Il fut couronné d’épines, on Lui cracha dessus, Il fut frappé, moqué, exécré et cloué à la croix. Voyez cette multitude criant et se bousculant là, la crucifixion du Nazaréen est pour eux une grande fête. Ils L’ont mis dans la plus grande souffrance et la plus grande honte que leur haine inspirée de l’enfer pouvait concevoir ; mais ils ne sont pas satisfaits, ils se rassemblent autour de Lui pour se moquer de Ses souffrances ; ils font de Sa faiblesse le sujet de leurs plaisanteries. « Il ne peut se sauver lui-même », criaient-ils. « Qu’il descende maintenant de la croix, et nous croirons en lui ». Vague après vague de cette haine qui faisait rage, se brisaient sur Lui, les cœurs des hommes étaient manifestés jusqu’au plus profond d’eux-mêmes, dans cette heure affreuse ; mais ce fut alors qu’Il parla. Par-dessus le bruit de la tempête, Sa voix s’élève à Son Père en prière. « Père », crie-t-Il, « pardonne-leur, car ils ne savent ce qu’ils font ». C’était Sa réponse, le triomphe de l’amour divin sur la haine de l’homme.

Il aurait pu faire une autre prière. Il aurait pu demander douze légions d’ange à Son Père, et ils se seraient tenus entre Lui et les armées des hommes et des démons ; mais Il ne le fit pas ; s’Il l’avait fait, cela aurait signifié la damnation pour cette multitude, et pour vous et moi ; et Il était venu pour sauver, non pour condamner. Il regardait à toute cette masse d’hommes et, au-delà d’eux, à toutes les générations qui suivraient, et Il pria pour leur pardon, et à cause de cette prière, la repentance et la rémission des péchés sont prêchés en Son nom parmi toutes les nations.

Sa première parole exprimait Sa volonté pour l’ensemble des pécheurs ; dans Sa seconde, Il fit connaître Sa volonté pour chaque pécheur individuel qui se confie en Lui. Nous ne savons pas ce qui, en premier lieu, arrêta le brigand à Son côté, mais l’Esprit de Dieu ouvrit ses yeux pour voir et son cœur pour croire et sa bouche pour confesser qu’il reconnaissait son péché et ce qu’il méritait justement, et confesser la vérité quant à la personne du Seigneur. Ses yeux percèrent l’obscurité qui l’environnait et virent la gloire du royaume à venir. « Seigneur », dit-il, « souviens-toi de moi quand tu viendras dans ton royaume ». Il réclamait l’attention exclusive du Seigneur, comme si lui et le Seigneur seul existaient à ce moment-là. Était-ce présomptueux ? Non, c’était la foi ; la foi à laquelle il fut répondu immédiatement par la grâce du Seigneur : « En vérité, je te dis : Aujourd’hui tu seras avec moi dans le paradis ». Et quel « te » était-il : un misérable souillé, indigne de vivre sur la terre. Comment pourrait-il être dans le paradis ? Une chose est certaine, si le Seigneur disait : « Tu seras avec moi dans le paradis », Il le rendrait propre pour cela. « Le sang de Jésus Christ son Fils nous purifie de tout péché ».

En ce jour-là, il n’y avait pas deux personnes sur la terre qui L’aimaient davantage que Sa mère et Jean, et ils se tenaient là ensemble près de la croix. Ses souffrances et leur amour pour Lui les avaient attirés là. Et Jésus dit à Marie : « Femme, voilà ton fils », et à Jean : « Voilà ta mère ». Cela voulait très certainement dire : « Vous m’aimez, aimez-vous l’un l’autre ». Et ce disciple la prit chez lui en ce même jour, et ils habitèrent là ensemble dans l’amour et l’unité. Dans cette troisième parole, Il avait exprimé Sa volonté pour tous ceux qui L’aiment, et cela ne devrait-il pas émouvoir profondément nos cœurs ? Il nous a dit : « Que vous vous aimiez les uns les autres, comme je vous ai aimés », et dans ce même évangile, nous lisons qu’Il est mort pour rassembler en un les enfants de Dieu dispersés. Pouvons-nous penser à la croix et nous quereller ? Pouvons-nous traiter l’un de Ses bien-aimés avec indifférence, quand nous nous tenons près de Sa croix ? Sa mort est la révélation de Son amour pour chacun d’eux, et ne devrions-nous pas les aimer aussi ? Ces bras étendus embrassent toute la famille de Dieu, et Il nous dit : « Voici ma mère et mes frères » !

« Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? ». Quel esprit mortel peut comprendre ce cri, ou quels mots mortels l’expliquer ? C’est le cri central des sept paroles, et à juste titre, car de sa profonde signification mystérieuse dépendent toute la gloire de Dieu et notre salut. Pourquoi cela ? Le Seigneur Lui-même répond à la question. « Et toi, tu es saint » (Ps. 22, 3). Mais Jésus n’était-Il pas saint ? Oui, Il était aussi saint dans Sa parfaite humanité que dans la gloire divine ; tout aussi saint dans Sa propre personne quand Il était pendu à cette croix que quand Il créait les anges. Alors, pourquoi donc fut-Il abandonné ? Je réponds pour moi-même — c’était pour moi. Ce que nous étions, Il le fut fait. Il fut fait péché, lequel est éternellement et infiniment odieux pour Dieu, afin que l’amour de Dieu puisse nous atteindre dans Sa justice absolue. L’inflexibilité de la justice de Dieu et la grandeur de Son amour ont été révélées quand ce cri jaillit des ténèbres et de la malédiction du Calvaire. Il fut abandonné afin que nous soyons sauvés. Oh, que nous soyons toujours préservés de pensées superficielles quant à notre salut ! J’admets le mystère de ce cri. Aucun esprit de la créature ne pourra jamais sonder ses profondeurs. Le Père, le Fils et le Saint Esprit seuls le comprennent ; mais pendant toute l’éternité, il sera l’émerveillement de nos cœurs et le thème de notre cantique. Jésus notre Sauveur, qui n’avait pas connu le péché, a été fait péché pour nous, afin que nous devinssions justice de Dieu en Lui.

Pour la première fois, le Seigneur parle de Ses souffrances physiques. Sa vigueur était desséchée comme un têt, et Sa langue était attachée à Son palais. Alors éclata Son cri : « J’ai soif ». Dix mille anges ne répondraient-ils pas à ce cri et ne se ceindraient-ils pas pour servir leur Seigneur souffrant et, perçant à travers les armées des ennemis qui L’assaillaient, rafraîchir Sa bouche fiévreuse avec une eau meilleure que celle du puits de Bethléhem ? Non. Il n’y eut pas de réponse venant du ciel à ce cri. Et de la part des hommes ? S’adouciraient-ils ? Ils L’avaient contemplé dans Son agonie : la compassion s’éveillerait-elle à la fin dans leurs cœurs ? « Ils ont mis du fiel dans ma nourriture, et, dans ma soif, ils m’ont abreuvé de vinaigre ». Non, il n’y eut pas de secours pour Lui de la part des hommes. La réponse de l’homme au besoin le plus profond du Seigneur fut du vinaigre, la chose la plus aigre que la nature puisse produire. Mais il y avait davantage qu’une soif physique derrière ce cri. Pourquoi était-Il là, en fin de compte ? Pourquoi devait-Il souffrir ? Parce qu’Il avait soif de l’amour des hommes. Et le défi est placé devant chacun de nous ce soir. Quelle sera notre réponse à Sa soif ? Laisserons-nous s’écouler pour Lui l’amour de nos cœurs tout entiers, de cœurs qui ont été gagnés par Son grand amour ? « Le Fils de Dieu, qui m’a aimé et qui s’est livré lui-même pour moi ». Quelle sera la réponse à cela ? Le monde Lui donne encore du vinaigre. Oh, chrétiens, hâtons-nous à Ses pieds et donnons-Lui le riche vin pur de notre amour !

Maintenant, nous émergeons dans la lumière. Maintenant, nous atteignons le triomphe ; car de Ses lèvres sort le cri triomphant : « C’est accompli ». Chaque parole quant à Ses souffrances est accomplie. Il devait encore baisser Sa tête dans la mort et Son côté devait être percé, mais par anticipation de cela, Il pouvait s’écrier : « C’est accompli ». Nous nous reposons sur une œuvre accomplie. Nous avons bien des raisons pour avoir une paix du cœur parfaite pour ce qui regarde nos relations avec Dieu, et celle-ci n’est pas la moindre d’entre elles ; l’œuvre de la rédemption a été accomplie par le Fils de Dieu, qui seul pouvait l’entreprendre. Il n’y a pas failli. Nous nous glorifions dans la rédemption accomplie. Dieu est glorifié ; le diable est défait ; nous sommes sauvés.

Sa première parole était : « Père ». Sa dernière parole est : « Père » ; et entre les deux, les ténèbres et la tempête. « Père, entre tes mains je remets mon esprit ». C’est seulement dans l’évangile de Luc que ce cri est rapporté, l’évangile qui donne aussi Sa première parole enregistrée : « Ne saviez-vous pas qu’il me faut être aux affaires de mon Père ? ». Ces affaires étaient maintenant terminées, pas la moindre d’entre elles n’était laissée inaccomplie, et dans la sérénité et le calme de cette connaissance, Il remet Son esprit à Son Père et baisse Sa tête dans la mort.

Quelle sera notre réponse à un amour si exceptionnel, si divin ? Quoi, sinon nous livrer entièrement nous-mêmes à Lui et, étreints par cet amour, ne plus vivre pour nous-mêmes, mais pour Celui qui pour nous est mort et a été ressuscité ?

« Amour si merveilleux, si divin,
Demande mon âme, ma vie, mon tout. »