Pas de religion, mais un Sauveur

S. Prod’hom
1916

Dans un village de la Suisse française, l’enterrement d’un jeune garçon avait réuni autour de la tombe un grand nombre de personnes de la localité et des environs. Ayant été invité par les parents à présenter l’évangile dans cette circonstance, je lus le verset 3 de l’évangile selon Matthieu, chapitre 18 : « En vérité, je vous dis : Si vous ne vous convertissez et ne devenez comme les petits enfants, vous n’entrerez point dans le royaume des cieux ». — L’enfant dont on descendait le corps dans la fosse, savait que Jésus était mort à sa place, que ses péchés avaient été effacés par le sang de Christ, et il s’était réjoui d’aller auprès de son Sauveur. Il était, à tous égards, un exemple de ce que dit le passage cité plus haut. Âgé de onze ans, il avait cru avec la simplicité d’un enfant, simplicité requise de tout homme pour obtenir le salut.

Je m’efforçai de montrer que l’homme est incapable d’accomplir l’œuvre de son salut, ni de faire quoi que ce soit pour le mériter. En présence de cette incapacité, Dieu a fait, pour le sauver, ce qui était nécessaire. Il lui offre gratuitement le pardon de ses péchés. En vue de cela, Il dut envoyer Son propre Fils. Celui-ci, dans Sa vie parfaite et pure, a révélé tout l’amour de Dieu pour les pécheurs et, par Sa mort sur la croix, Il a porté le jugement que nous avions tous mérité. C’est ainsi que le Dieu juste et saint, que nous avions offensé par nos péchés, a été satisfait par le sacrifice de Son Fils, et se présente à tous les hommes comme un Dieu Sauveur qui leur offre le pardon et la paix.

La seule condition pour obtenir une telle grâce, quand on a reconnu en avoir besoin, c’est de l’accepter en toute simplicité, sans raisonner et sans vouloir y associer nos œuvres ou notre religion sous quelque forme que ce soit. C’est pourquoi Jésus dit : « Si vous ne devenez comme les petits enfants, vous n’entrerez point dans le royaume des cieux ». Les petits enfants nous sont donnés comme exemple, parce qu’ils croient ce qui leur est dit sans raisonner, et qu’ils se fient entièrement à ceux qui leur parlent. De même, nous pouvons nous fier, non aux hommes, malgré toute l’autorité dont ils peuvent se revêtir comme représentants de Dieu, mais à Dieu qui parle directement à chacun par le moyen de l’évangile. En terminant, j’ajoutai qu’il n’y avait qu’une seule classe d’hommes dans le monde entier : des pécheurs perdus, et qu’un seul chemin qui pouvait les mener au ciel : le Fils de Dieu, le Sauveur mort sur la croix, puis ressuscité et glorifié à la droite de Dieu. Il ne s’agit donc pas, pour venir à Dieu, de nos diverses religions, que l’on dit être toutes bonnes, pourvu qu’on les pratique sincèrement, car au jour du jugement, Dieu ne demandera pas à chacun de ceux qui paraîtront devant Lui, chargés de leurs péchés, quelle religion ils ont eue, mais pourquoi ils n’ont pas accepté le salut gratuit qui leur était offert en vertu du sang de Jésus Christ, qui seul purifie de tout péché. Alors ils seront jugés chacun selon leurs œuvres.

Un an après, dans la même localité, je fus introduit auprès d’un mourant qui, peu de jours auparavant, avait accepté le Sauveur avec la simplicité d’un enfant. Cet homme, durant des mois de maladie, s’était révolté contre Dieu qui, en lui ôtant la santé, l’avait arrêté sur le chemin de la perdition. Il avait refusé d’entendre la Parole de Dieu et renvoyait grossièrement ceux qui voulaient lui parler de son âme. Ses jurements et ses blasphèmes contre Dieu et les chrétiens, scandalisaient son entourage et même le public de son village. Mais il avait une mère chrétienne qui ne cessait de prier pour lui. Finalement, Dieu, dans Sa grâce inlassable, eut raison de ce malheureux. Il fut forcé de se rendre à Celui dont l’amour cherche tous les pécheurs et ne repousse personne. Il reconnut qu’il était un grand pécheur, « pire qu’un païen », disait-il. L’amour de Dieu gagna son cœur ; il vit que là où le péché avait abondé, « la grâce a surabondé » (Rom. 5, 20) ; il reçut ce Jésus qu’il avait tant méprisé, comme l’unique moyen par lequel ses nombreux péchés avaient été expiés. Je trouvai donc en lui un homme transformé. Par phrases entrecoupées, à cause de sa grande faiblesse, il me parla de ce qui l’impressionnait le plus dans l’œuvre qui s’était accomplie en lui : la puissance de Dieu qui l’avait arrêté sur le chemin de la perdition et l’amour de Dieu pour un pécheur tel que lui. Alors il me dit, en s’exprimant avec peine : « Non, ce n’est pas la religion, catholique ou protestante, qui sauve ; il y a un seul chemin de salut, un seul, le Sauveur », et il ajouta : « Vous l’avez dit sur le cimetière ». Je savais que cet homme était présent à l’enterrement dont j’ai parlé plus haut, mais connaissant ses dispositions à l’égard de l’évangile, je ne pensais pas que ces paroles eussent été retenues dans ce cœur-là.

Dieu le laissa encore quelques jours avant de le prendre à Lui, et le rendit capable de parler de son Sauveur à tous ceux qui le visitaient et avaient été témoins de son endurcissement et de sa révolte contre Dieu. Il répétait à tous : « Pas de religion pour être sauvé, un seul chemin, le Sauveur ». En effet, cher lecteur, si Dieu eût exigé qu’un tel pécheur accomplît les devoirs de la religion pour être sauvé, qu’aurait pu faire ce pauvre malheureux à l’extrémité de sa carrière, quand la maladie le rendait incapable de se mouvoir ? Et combien, au contraire, il fut heureux d’apprendre que tout avait été accompli pour lui sur la croix, où le Fils de Dieu avait été offert en sacrifice pour ôter les péchés de dessus le coupable et de devant Dieu. Le premier homme qui entra au ciel après Jésus fut un brigand. Quels devoirs religieux cet homme aurait-il pu accomplir ? Tout ce qu’il avait pu faire dans sa vie l’avait conduit au gibet ; après la mort, il ne restait pour lui que le jugement ; mais, grâce merveilleuse, à côté de lui, le Fils de Dieu subissait le jugement à sa place, et, après avoir entendu ce brigand Le confesser, par la foi, comme Seigneur, Jésus put lui dire : « En vérité, je te dis : Aujourd’hui tu seras avec moi dans le paradis » (Luc 23, 43).

L’œuvre que Jésus a accomplie est parfaite, c’est pourquoi, en quittant ce monde, le croyant entre immédiatement au ciel. Tandis que celui qui meurt sans la foi est définitivement perdu. Aucun pardon n’est accordé après la mort. C’est ce que Jésus enseigne dans la parabole de Lazare et de l’homme riche, au chapitre 16 de l’évangile selon Luc. Lazare est entré directement dans la félicité éternelle, et le riche dans les tourments. Un gouffre infranchissable existe entre le ciel et l’enfer ; il n’y a pas de lieu intermédiaire. « Celui qui croit en Lui n’est pas jugé, mais celui qui ne croit pas est déjà jugé, parce qu’il n’a pas cru au nom du Fils unique de Dieu » (Jean 3, 18). Le seul juste au monde est mort pour les injustes, selon la parole de l’apôtre Pierre : « Christ a souffert une fois, le juste pour les injustes, afin qu’il nous amenât à Dieu » (1 Pier. 3, 18). Le même apôtre dit aussi : « Il n’y a point d’autre nom sous le ciel, qui soit donné aux hommes, par lequel il nous faille être sauvés » (Act. 4, 12). Tout homme qui s’approche d’un mourant pour le tranquilliser au sujet de son salut en lui présentant un autre moyen que la foi en l’œuvre unique et parfaite de Christ à la croix, trompe cette âme et l’expose au malheur éternel ; tandis que le plus simple croyant peut indiquer au plus grand pécheur le chemin du ciel, par la foi au sacrifice de Christ, même si son cœur endurci l’avait conduit, jusqu’à la onzième heure, sur le chemin de la perdition. Un mourant, sur le champ de bataille, peut, aussi bien que chez lui, élever un regard de foi vers le Sauveur, et recevoir avec la simplicité d’un petit enfant, la déclaration que Dieu fait entendre au pécheur qui a cru : « Je ne me souviendrai plus jamais de leurs péchés, ni de leurs iniquités » (Héb. 10, 17).

*
*     *

Dans un des nombreux combats de la guerre actuelle, un jeune soldat français, converti depuis le commencement des hostilités, vit un de ses camarades tomber, mortellement atteint, à une cinquantaine de mètres de lui. Il demanda à Dieu la force de porter au pauvre mourant le message de grâce à travers cet espace criblé de balles. Agenouillé devant son camarade, sous les projectiles qui sifflaient autour de lui, il demanda à Dieu d’ouvrir son cœur, et lui présenta la nécessité d’accepter le Sauveur pour recevoir, par la foi en Lui, la rémission de ses péchés. Le mourant fit un signe affirmatif, dit : « Merci », et son âme quitta l’enveloppe mortelle qu’une balle venait de frapper. Notre jeune ami regagna son rang sain et sauf, sous la protection de Celui qu’il venait d’annoncer comme Sauveur à son camarade mourant.

Quel bonheur, en de pareils moments, de pouvoir présenter un salut gratuit à une âme qui va franchir le seuil de l’éternité ; mais quelle inexprimable faveur, pour un mourant, de n’avoir à se reposer que sur une œuvre accomplie en dehors de lui et pour lui, pour passer en pleine paix de ce triste monde en la présence bienheureuse de son Sauveur.

Cependant, cher lecteur, il vaut mieux ne pas attendre d’être arrivé à cette extrémité pour s’occuper de son âme. Tous ne voient pas venir l’heure de la mort, c’est pourquoi il importe d’être prêt à partir à un moment quelconque. Que l’on soit en pleine santé ou que l’on soit à l’agonie, Dieu ne demande rien au pécheur, sinon de reconnaître sa culpabilité et le jugement qui en est la conséquence, afin de lui offrir un plein pardon pour toutes ses fautes. En recevant le pardon de ses péchés, le croyant reçoit la vie éternelle, et, s’il a encore des jours à passer ici-bas, c’est par cette vie qu’il peut faire des œuvres agréables à Dieu, par lesquelles il exprime sa reconnaissance à Celui qui l’a aimé et sauvé gratuitement.

Dans les jours sérieux où nous sommes arrivés, la voix de Dieu se fait entendre à tous les hommes ; Il leur dit, par les Saintes Écritures, qu’Il les aime, qu’Il veut leur bonheur et qu’Il a tout préparé pour qu’ils puissent y parvenir ; mais, hélas ! Il ne rencontre généralement qu’indifférence ou incrédulité. Aussi Dieu a trouvé bon de parler solennellement à chacun par les maux terribles que la guerre actuelle répand dans ce monde. Beaucoup ont compris que c’est Dieu qui parle ; plusieurs reconnaissent que l’incrédulité sous toutes ses formes ne donne aucun secours au jour de la détresse, et qu’ils ont eu tort de s’éloigner de Dieu ; d’autres, qui n’étaient pas incrédules, confessent, quant à l’état de leur âme, qu’ils étaient indifférents et préféraient jouir de la vie présente, renvoyant à plus tard de s’occuper de leur salut. Tous prennent de bonnes résolutions, chose bonne, mais qui ne suffit pas. Une repentance réelle pousse l’âme vers Dieu, et donne le besoin d’une pleine réconciliation avec Lui. C’est ce que Dieu veut produire dans votre cœur ; Il veut vous faire sentir le poids insurmontable de vos péchés, afin que vous éprouviez le besoin d’en être délivrés ; et cette délivrance, vous ne l’obtiendrez que par la foi au Sauveur qui a porté sur la croix le jugement divin dû au coupable. Jésus ne dit-Il pas à la femme pécheresse qui pleurait en sentant le poids de ses nombreux péchés : « Ta foi t’a sauvée, va-t’en en paix » (Luc 7, 50) ? Dieu use d’une grande patience envers tous ; ne la méprisez donc pas. Il vous dit dans Sa Parole : « Méprises-tu les richesses de sa bonté et de sa patience, ne connaissant pas que la bonté de Dieu te pousse à la repentance ? » (Rom. 2, 4). Aujourd’hui, le nombre est grand de ceux dont la vie a été épargnée dans les batailles, dans les dangers, dans les maladies. Comprenez-le tous : les jours que Dieu vous accorde sont un sursis, d’une durée déterminée par Lui, mais qui nous est inconnue. Il faut en profiter pour s’occuper sérieusement de son âme, en prêtant une oreille attentive à la Parole de Dieu, qui seule peut indiquer le chemin du salut. Jésus dit : « Je suis le chemin, et la vérité, et la vie » (Jean 14, 6). Il dit aussi : « Venez à moi, vous tous qui vous fatiguez et qui êtes chargés, et je vous donnerai du repos » (Matt. 11, 28).


« Sachez donc, hommes frères, que par lui vous est annoncée la rémission des péchés, et que, de tout ce dont vous n’avez pu être justifiés par la loi de Moïse, quiconque croit est justifié par lui » (Act. 13, 38, 39).