« Retournons maintenant visiter les frères par toutes les villes où nous avons annoncé la parole du Seigneur, pour voir comment ils vont ».
Une devise pour l’évangéliste est l’expression : « évangéliser dans les lieux qui sont au-delà ». C’est le grand but de l’évangéliste, quels que soient ses talents ou sa sphère d’action.
Mais le pasteur a son travail aussi bien que l’évangéliste, et nous désirons aussi lui fournir une devise. Nous trouvons une telle devise dans les paroles : « retournons ». Nous ne devons pas simplement considérer cette expression comme le récit de ce qui a été fait, mais comme un modèle de ce qui doit être fait. Si l’évangéliste est responsable de prêcher l’évangile dans les lieux qui sont au-delà, tant qu’il y a des régions à évangéliser, le pasteur est responsable de « retourner visiter ses frères », tant qu’il y a des frères à visiter. L’évangéliste forme le lien vital ; le pasteur le maintient et le fortifie. L’un est l’instrument pour créer ce beau lien, l’autre celui pour le perpétuer. Il est tout à fait possible que les deux dons existent dans la même personne, comme dans le cas de Paul, mais que ce soit ou non le cas, chaque don a sa sphère et son objet propres. L’affaire de l’évangéliste est de faire venir les frères ; l’affaire du pasteur est de s’occuper d’eux. L’évangéliste va d’abord et prêche la Parole du Seigneur ; le pasteur vient ensuite et visite ceux sur qui la Parole a fait effet. Le premier fait venir les brebis ; le second les nourrit et s’occupe d’elles.
L’ordre de ces choses est divinement beau. Le Seigneur ne veut pas rassembler Ses brebis et les laisser errer sans soin et sans nourriture. Ce serait tout à fait contraire à Sa manière de faire, tendre, prévenante et pleine de grâce. C’est pourquoi Il fournit non seulement le don par lequel Ses brebis doivent être appelées à l’existence, mais aussi ce don par lequel elles doivent être nourries et entretenues. Il trouve Son intérêt en elles et dans chaque étape de leur histoire. Il veille sur elles avec grand soin, à partir du moment où elles ont entendu les premières paroles vivifiantes, jusqu’à ce qu’elles soient en sûreté dans les demeures d’en haut.
Son désir de rassembler les brebis se manifeste dans la largeur de cœur de l’expression : « les lieux qui sont au-delà ». Son désir pour leur bien-être se voit dans ces paroles : « retournons ». Les deux choses sont intimement liées. Partout où la Parole du Seigneur a été prêchée et reçue, vous avez là la formation de liens mystérieux, quoique vrais et très précieux, entre le ciel et la terre. L’œil de la foi peut discerner le plus magnifique lien de sympathie divine entre le cœur de Christ dans le ciel et « toute ville » où « la Parole du Seigneur » a été prêchée et reçue. C’est vrai maintenant tout autant qu’alors. Bien des choses peuvent entraver notre discernement spirituel de ce lien, mais il est là. Dieu le voit, et la foi le voit de même. Christ a Son œil — un œil rayonnant d’un immense intérêt et resplendissant d’un tendre amour — sur chaque cité, chaque ville, chaque village, chaque rue, chaque maison dans lequel Sa Parole a été reçue.
La certitude de cela est très consolante pour tous ceux qui sentent qu’ils ont vraiment reçu la Parole du Seigneur. Si on nous demandait de prouver d’après l’Écriture la vérité de notre affirmation, nous le ferions par la citation suivante : « Or il y avait à Damas un disciple nommé Ananias ; et le Seigneur lui dit en vision : Ananias ! Et il dit : Me voici, Seigneur. Et le Seigneur lui dit : Lève-toi, et va dans la rue appelée la Droite, et cherche dans la maison de Judas un nommé Saul, de Tarse ; car voici, il prie » (Act. 9, 10-11). Peut-il y avoir quelque chose de plus touchant que d’entendre le Seigneur de gloire donnant, avec une telle minutie, l’adresse de Sa brebis nouvelle-née ? Il donne la rue, le numéro (pour ainsi dire) et l’occupation même de Saul à ce moment-là. Son œil plein de grâce saisit tout ce qui est en lien avec chacun de ceux pour qui Il a donné Sa précieuse vie. Il n’y a pas une circonstance, quelque triviale qu’elle soit, dans le chemin du plus faible de Ses membres, dans laquelle le Seigneur Jésus ne trouve pas d’intérêt. Son nom soit loué pour une telle assurance consolante ! Que nous puissions entrer plus pleinement dans la réalité et la puissance d’une telle vérité !
Or notre Berger plein de grâce voudra remplir le cœur de chacun de ceux qui agissent sous Sa direction, de Son plus tendre soin pour les brebis. Ce fut Lui qui anima le cœur de Paul pour exprimer et réaliser le dessein compris dans ces paroles : « retournons ». Ce fut la grâce de Christ découlant dans le cœur de Paul, et donnant au service zélé de cet apôtre très dévoué et travailleur, son caractère et sa direction.
Remarquez la force du mot : « retourner ». Peu importe combien de fois vous pouvez déjà avoir été là. Ce peut être la première, la deuxième, la troisième. Là n’est pas la question. « Retournons » est la devise d’un cœur de pasteur, car il y a toujours besoin d’un don pastoral. Des problèmes surgissent constamment dans les différents endroits où « la Parole du Seigneur » a été prêchée et reçue, demandant les travaux d’un pasteur divinement doué. C’est particulièrement vrai dans ce jour de pauvreté spirituelle. Il y a une demande immense pour que le pasteur « retourne visiter ses frères dans chaque ville » où « la Parole du Seigneur » a été prêchée, « et voir comment ils vont ».
Lecteur, possédez-vous quelque chose d’un don pastoral ? Si c’est le cas, pensez à cette large parole : « retournons ». Avez-vous agi d’après elle ? Avez-vous pensé à vos « frères » — à ceux « qui ont reçu en partage une foi de pareil prix » — à ceux qui, en recevant « la Parole du Seigneur », sont devenus des frères spirituels ? Vos intérêts et vos sympathies sont-ils engagés en faveur de « toute ville » dans laquelle un lien spirituel a été formé avec la Tête en haut ? Oh ! combien le cœur aspire a une manifestation plus grande de saint zèle et de sainte énergie, de dévouement individuel et indépendant — indépendant, je veux dire, non de la communion sacrée de ceux qui sont véritablement spirituels, mais de toute influence qui tendrait à obstruer et entraver ce service élevé auquel chacun est clairement appelé dans sa responsabilité envers le Maître seul.
Prenons garde aux contraintes de l’encombrante machinerie religieuse, de la routine religieuse, d’un faux ordre. Prenons garde aussi à l’indolence, à l’amour de ses aises, à une fausse économie qui nous conduirait à attacher une importance injustifiée aux questions de dépense. L’argent et l’or sont au Seigneur, et Ses brebis Lui sont bien plus précieuses que l’argent et l’or. Ses propres paroles sont : « M’aimes-tu ? Pais mes brebis ». Et si seulement il y a le cœur pour le faire, les moyens ne manqueront jamais. Combien souvent nous trouvons-nous dépenser inutilement des sommes d’argent pour la table, la garde-robe et la bibliothèque, qui seraient amplement suffisantes pour nous conduire dans « les lieux qui sont au-delà » pour prêcher l’évangile, ou dans « chaque ville » pour « visiter nos frères » !
Que le Seigneur nous accorde un esprit fervent de renoncement au moi, un cœur dévoué pour Lui et pour Son très saint service, un vrai désir pour répandre Son évangile et pour la prospérité des siens. Qu’il nous suffise que, durant le temps déjà écoulé de nos vies, nous ayons vécu et travaillé pour le moi et ses intérêts, et que le temps à venir soit consacré à Christ et à Ses intérêts. Ne permettons pas à notre cœur traître de nous tromper par des raisonnements plausibles sur les obligations domestiques, commerciales ou autres. Il faut les respecter strictement, sans doute. Un esprit bien réglé n’offrira jamais à Dieu un sacrifice résultant de la négligence de quelque juste obligation. Si je suis à la tête d’une famille, je dois répondre convenablement aux obligations de cette famille. Si je suis à la tête d’une affaire, je dois répondre convenablement aux obligations de cette affaire. Si je suis un domestique, je dois m’occuper de mon travail. Manquer en quelqu’une de ces choses serait déshonorer le Seigneur au lieu de Le servir.
Mais, en accordant la plus grande place possible à toutes les justes obligations, demandons-nous si nous faisons bien tout ce que nous pouvons pour « les lieux qui sont au-delà » et pour « nos frères dans chaque ville où nous avons prêché la Parole du Seigneur ». N’y a-t-il pas eu un abandon blâmable à la fois du travail évangélique et du travail pastoral ? N’avons-nous pas permis aux liens domestiques et commerciaux d’agir sur nous excessivement ? Et quel en a été le résultat ? Qu’avons-nous gagné ? Nos enfants ont-ils bien tourné et nos intérêts commerciaux ont-ils prospéré ? N’est-il pas souvent arrivé que, là où l’œuvre du Seigneur avait été négligée, les enfants ont grandi dans la négligence et la mondanité ? Et quant aux affaires, n’avons-nous pas souvent travaillé toute la nuit pour contempler un filet vide au matin ? D’un autre côté, là où la famille et les circonstances ont été laissées entre les mains de Jéhovah-Jiré (l’Éternel y pourvoira) avec une entière confiance, n’ont-elles pas été bien mieux soignées ?
Que ces choses soient profondément pesées, avec un cœur honnête et un œil simple, et nous serons sûrs d’arriver à de justes conclusions.
Je ne peux pas poser la plume sans attirer l’attention du lecteur sur la plénitude de l’expression : « voir comment ils vont ». Combien de choses impliquent ces mots ! « Comment ils vont » publiquement, socialement, en privé. « Comment ils vont » dans la doctrine, dans leurs associations, dans leur marche. « Comment ils vont » spirituellement, moralement, dans leurs relations — « comment ils vont » de toutes manières. Que l’on se souvienne bien que voir comment vont nos frères ne doit jamais se transformer en un esprit curieux, indiscret, bavard, fouineur — un esprit qui blesse et ne guérit pas, qui se mêle de tout et ne répare rien. À tous ceux qui voudraient nous visiter dans un tel esprit, nous dirions assurément : « restez loin d’ici ». Mais à tous ceux qui réaliseraient Actes 15, 36, nous désirons dire : « nos mains, nos cœurs, nos maisons sont grand ouverts ; entrez, bénis du Seigneur. Si vous jugez que je suis fidèle au Seigneur, entrez dans ma maison, et demeurez-y ».
Ô Seigneur, qu’il te plaise de susciter des évangélistes pour visiter « les lieux qui sont au-delà », et des pasteurs pour visiter, encore et encore, « les frères dans chaque ville ».