Écho du Témoignage:Notes sur l’épître aux Éphésiens/Partie 3

De mipe
Sauter à la navigation Sauter à la recherche

Nous avons déjà jeté un coup d’œil sur le contraste présenté avec tant de force entre la condition de l’homme dans les trois premiers versets, et la puissante intervention de la grâce de Dieu qui les suit. Nous avons vu le Gentil présenté dans le sombre tableau de la corruption morale et abjecte et de l’idolâtrie insensée, le Saint Esprit mettant tout à nu par quelques touches puissantes. Ils étaient « morts » dans leurs offenses et dans leurs péchés, entièrement assujettis au prince de ce monde. Ils ne faisaient que suivre le train de ce monde ; ils étaient des fils de la désobéissance, n’ayant aucun égard à Dieu dans leurs voies. Il n’y a aucune pensée de faire ressortir en détail les formes affreuses de l’impiété humaine, ni la dépravation et la dégradation dans lesquelles l’homme était tombé, à l’instigation de Satan. Néanmoins nous avons ici une vue bien plus profonde de la condition où l’homme était plongé — un mal qui n’offrait aucun espoir — que dans les passages qui entrent pleinement dans tous les détails de l’impureté, de la superstition et de la rébellion. Dans la Parole de Dieu, combien peu la force dépend d’une énergie apparente de langage ! Encore moins est-ce ce que nous trouvons chez les hommes, lorsqu’ils veulent exprimer une chose avec force. L’Écriture ne contient rien, en fait d’expressions violentes ou exagérées.

Ce que nous trouvons (et quel fait que celui-là !) c’est Dieu Lui-même, sondant la condition de l’homme, ne regardant plus à son cœur, comme s’il s’agissait d’en réprimer les désirs, ce qu’Il avait fait sous la loi. Mais maintenant c’est l’état complet de mort où se trouve la nature humaine dans la présence de Dieu — la puissance de Satan substituée au gouvernement de Dieu — l’homme lui-même évidemment ruiné et sans espoir. Mais c’est dans cette scène de ruine que Dieu entre — Dieu qui est riche en miséricorde. Et il est sérieusement fait allusion à Son grand amour dont Il nous a aimés comme étant la source de tout ce qu’Il a fait. « Dieu qui est riche en miséricorde, à cause de son grand amour dont il nous a aimés, alors même que nous étions morts dans nos fautes » — « nous », soit Juifs, soit Gentils, quoique cela se rapporte ici plus particulièrement aux Juifs. Du moins il avait présenté le contraste entre les deux dans les versets 2 et 3. Il se peut que dans le verset 5 il les introduise tous les deux ; mais s’il en est un auquel il soit fait particulièrement allusion, c’est le Juif, car il est aussi mort que le Gentil — il n’y a point de différence quant à cela. « Alors même que nous étions morts dans nos fautes », « Dieu nous a vivifiés avec le Christ (vous êtes sauvés par [la] grâce), et nous a ressuscités ensemble, et nous a fait asseoir ensemble dans les lieux célestes dans [le] Christ Jésus ». Étant déjà entré dans le sujet général de la régénération, je désire seulement ajouter que, maintenant que le christianisme est proclamé, quoique la régénération se poursuive au moins autant que jamais, nous voyons, de fait, que le Saint Esprit imprime un caractère plus profond à la régénération du temps présent. Car ce n’est pas seulement que la vie est donnée, ni que des âmes soient nées de nouveau, mais elles sont vivifiées ensemble avec Christ. Un langage comme celui-ci n’aurait pu être employé avant la mort et la résurrection de Christ. Il ne peut y avoir aucune hésitation à dire que toute la vie que les saints, quels qu’ils soient, ont jamais reçue depuis le commencement du monde, venait de Christ et était par Christ. En Lui « était la vie ». Il est la vie éternelle qui était avec le Père, et il n’y a pas d’autre vie pour le pécheur. Il y avait un arbre de vie avant la chute de l’homme ; non seulement un « arbre de la science du bien et du mal », mais un « arbre de vie ». Mais ce n’était là qu’une vie de créature, qui aurait pu faire subsister jusqu’à la fin une créature innocente. Mais si la créature est tombée, quel en est le résultat ? Qu’arriva-t-il lorsqu’Adam devint un homme pécheur ? L’arbre de vie pouvait-il alors lui profiter ? Pas pour un moment. « Ainsi il chassa l’homme ». Dieu ne voulut point permettre que l’homme touchât le simple arbre naturel de la vie. Car en supposant qu’il en eût mangé après avoir péché, qu’en serait-il résulté ? Uniquement une perpétuation du mal dans une condition de péché misérable et sans remède — une existence éternelle dans une condition d’éloignement à l’égard de Dieu à laquelle il n’y aurait eu aucun moyen de se soustraire. Ainsi donc, bien que la mort soit intervenue comme la sentence sur l’homme coupable, il y a, en un certain sens, de la miséricorde en cela, maintenant que l’homme entre par sa naissance dans un monde pécheur, et qu’il est sujet à toute sorte de misères qu’un ennemi a introduites, et qu’on peut regarder, si vous considérez la mort comme en faisant partie, comme la juste sentence de Dieu sur l’iniquité de l’homme. Mais Satan s’empare de tout cela, et le fait servir à ses desseins, à quoi se joint une mauvaise conscience sur laquelle Satan agit, en sorte qu’un homme est rempli de terreur et d’horreur par rapport à Dieu. C’est de cela que Dieu, en présentant Christ, délivre l’âme. Ce n’est pas seulement que l’âme trouve une vie qui est adaptée à tous ses besoins ; ce n’est en aucune façon une simple perpétuation de l’existence de l’homme dans la misère ; mais la vie en Christ assure la délivrance du mal et de tous ses effets, et de la malédiction qui s’y rattache, une délivrance qui découle de Dieu en Sa grâce et qui est fondée sur Sa sainteté ; et une sainte position de bénédiction en la présence de Dieu, se trouve en ce même Christ qui introduit cette vie. Il y a aussi ceci — que l’âme retrouve Dieu, aussi sûrement que Dieu retrouve l’âme pour Lui-même. Ce n’était pas seulement que l’homme par le péché avait perdu sa vie naturelle ; mais il avait perdu Dieu ; et ce n’est pas seulement que Christ me donne maintenant une nouvelle vie et une vie meilleure que celle qu’aurait pu donner l’arbre de vie, mais Il me donne Dieu ; Il m’amène à Dieu et me place dans la présence de Dieu. Il fait connaître Dieu à mon âme, et me donne d’être assuré de Son amour, de l’intérêt qu’Il prend à moi, de Sa profonde pitié et même de Sa satisfaction ; car Dieu ne saurait seulement aimer d’une manière naturelle, mais Il aime d’un amour qu’accompagne Sa satisfaction, et une relation spéciale.

Voilà donc ce que nous trouvons en Christ, et quoiqu’il pût être parlé de la vie, par rapport à tous les saints de l’Ancien Testament, avant que Christ fût mort et ressuscité, toutefois je doute fort que l’Esprit de Dieu eût pu parler de la vie qu’ils ont reçue, comme étant la vie avec Christ. Impossible que ce ne fût pas la vie par Christ et en Christ ; mais vivifier avec Christ va beaucoup plus loin. Or, c’est ce que nous avons maintenant. Car Dieu dirige nos regards vers Christ sous le poids de nos péchés, sous toutes les conséquences de ce que méritait notre nature à cause de son éloignement de Dieu et de son inimitié contre Lui — à cause de son esprit de désobéissance et de volonté propre. Tout le mal fut placé sur Lui, et Il fut traité comme s’Il eût été tout cela ; comme si Lui, souffrant pour nous sur la croix, avait en Sa propre personne la somme et la substance du mal de la nature humaine. Sans doute, s’il y en avait eu en Lui la moindre parcelle, Il n’aurait pu faire propitiation pour d’autres — le jugement de Dieu devait nécessairement frapper cette nature ; mais l’absence totale de cette nature en Sa propre personne, c’est ce qui indiquait qu’Il était parfaitement capable d’être la victime. En la personne de Christ sur la croix, Dieu agissait à l’égard de toute la hauteur, et la longueur, et la profondeur et la largeur du péché. Mais Dieu ressuscita ce même être béni, qui était descendu sous la colère de Dieu, et qui, après avoir goûté ce que c’était que d’être abandonné, et d’avoir la face de Dieu cachée arrière de Lui, ne quitta pas cette vie — et ne pouvait la quitter — sans dire : « Père ! entre tes mains je remettrai mon esprit », montrant ainsi la parfaite confiance et les parfaites délices de Son cœur en Dieu. « Nos pères se sont confiés en toi — ils ont crié vers toi, et ils ont été délivrés ». Mais Il ne pouvait être exaucé avant que l’épreuve complète fût terminée. Il fut exaucé seulement « d’entre les cornes des licornes ». Il a dû traverser tout cela — une tristesse et une angoisse inexprimables, que nul que Lui n’aurait pu endurer ; et pour Lui, néanmoins, que n’était-ce pas ? — Toute la colère de Dieu, si la délivrance devait être complète et selon Dieu. Mais Il l’a fait ; et Il nous fait connaître, en quittant la scène, que, quoi qu’Il souffrît, toutefois Son cœur se confiait vraiment en Dieu ; et Il confessa sans aucune hésitation, non seulement que Dieu était toujours saint, mais que le Père était plein d’amour. « Père ! entre tes mains je remettrai mon esprit ».

Mais maintenant nous avons une tout autre chose — c’est Dieu qui intervient pour délivrer entièrement. L’apôtre ne pouvait pas dire que Dieu a vivifié Christ d’une manière absolue. L’expression est toujours modifiée d’une manière ou d’une autre, parce que Christ était Lui-même la vie. Il était la vie éternelle avec le Père — au temps convenable manifestée sur la terre ; et comment dire aucune chose qui supposerait qu’Il dût Sa vie a un autre ? Il pouvait être dit que, comme homme « mis à mort en chair », Il fut « vivifié par l’Esprit », mais Sa gloire intrinsèque et personnelle demeure, et c’est elle qui en effet donna à toute l’étendue de Son humiliation et de Ses souffrances jusqu’à la mort leur vraie valeur. Le Père aussi Lui donna (comme homme) « d’avoir la vie en lui-même ». C’était là la perfection de Christ ici-bas ; Il ne voulut pas s’emparer de la vie comme étant Son propre droit ; Il ne voulut ni dire une parole, ni faire une œuvre, qu’Il n’eût entendue de la part de Dieu et en Dieu. Il fut l’homme parfaitement dépendant. Le même évangile qui insiste, comme aucun des autres ne le fait, sur Sa gloire divine, nous montre aussi Son absolue dépendance à l’égard de Dieu. D’un autre côté, qu’il est doux de voir dans les Écritures comment Dieu le Père veille sur la gloire de Christ ! Il ne voulait pas dire un seul mot qui pût en aucune manière porter atteinte à la gloire de Son Fils.

C’est pourquoi il est dit ici qu’Il « nous a vivifiés avec Christ ». C’est nous qui avions besoin de la vie. Christ avait pu descendre jusque dans la mort, mais Dieu nous a vivifiés ensemble avec Lui. Christ était mort d’une manière infiniment plus solennelle qu’aucun être qui serait simplement un homme ne pourrait mourir. Il était emphatiquement le saint de Dieu, le seul homme qui fût saint, et pourtant ce fut même ainsi qu’Il mourut. Sans doute aucun être qui n’eût pas été saint n’aurait pu mourir comme Il mourut. Il sut ce que c’était que de goûter la mort dans toute son amertume, le jugement et la colère de Dieu, comme nul autre ne l’aurait pu ; et pourtant Il était Celui qui le sentit d’autant plus, parce qu’Il était essentiellement au sein du Père. Mais ce Sauveur béni étant descendu complètement sous la mort, comme étant le jugement de Dieu sur notre nature et sur nos péchés, c’est alors qu’intervient la puissance de la force de Dieu, qui nous a vivifiés ensemble avec Christ. En un mot, cette vie est dans l’association la plus intime avec Christ, et nous sommes dans l’union avec Christ Lui-même, avec Christ « mis à mort en chair », mais maintenant « vivifié par l’Esprit ». Quant à la vie qu’Il avait ici-bas, elle fut laissée et quittée ; et maintenant Il ressuscite dans une nouvelle condition de vie, en résurrection. C’est pourquoi il est ajouté immédiatement après, que Dieu nous a non seulement vivifiés ensemble avec Christ, mais ressuscités ensemble ; et plus encore que cela, qu’Il nous a fait asseoir ensemble dans les lieux célestes dans le Christ Jésus. Ainsi la pleine valeur qui appartient à la vie, telle qu’elle est maintenant en Christ, nous est aussi donnée ; en sorte qu’il peut être parlé de nous, même pendant que nous sommes dans ce monde, selon la complète béatitude de vie telle qu’elle est maintenant vue en Christ à la droite de Dieu.

Considérons quelles sont les choses comprises dans une si merveilleuse pensée — quelles sont celles avec lesquelles elle nous met en association. Nous savons ce qu’est notre vieille nature, ce qu’elle aime et fait ; nous savons trop bien quelles sont les choses dans lesquelles nous a plongés la vie ou plutôt la mort d’Adam. Qu’avons-nous reçu de notre premier père — qu’avons-nous mérité et attiré sur nous-mêmes, sinon le péché, la tristesse, la souffrance, la maladie, la mort, une mauvaise conscience et une attente terrible de jugement ? Nous avons toutes ces choses comme les mouvements et les effets de cette existence que nous avons héritée, le triste héritage que nous a laissé le premier homme. Mais maintenant vient la source de vie — nouvelle et surnaturelle — dans le second homme ; et où apprendrons-nous le mieux à en connaître le caractère ? Portons nos yeux en haut, sur Christ. Comment Dieu le Père Le regarde-t-Il ? Trouve-t-Il Ses délices en Lui ? Il en fut toujours ainsi ; et jamais plus assurément, que lorsqu’Il contemplait la vie de Christ, lorsqu’Il marchait comme homme parmi les hommes. Mais il y avait la terrible question du péché — de notre péché. Est-ce maintenant là une question encore à régler ? ou bien, est-ce que Christ y a réellement répondu de fait et pour toujours en la croix ? Oui ; Il l’a fait ; et c’est la chose même qui a fourni à Dieu l’occasion de nous montrer Son amour, comme nulle autre ne le pouvait. Comment aurais-je pu savoir combien Dieu m’aime, si je ne m’étais trouvé dans un tel abîme de détresse, comme ennemi de Dieu, abîme insondable sinon pour Sa miséricorde en Christ, qui apporte le salut ? Je ne dis pas cela pour atténuer le péché de mon inimitié contre Dieu, ni pour laisser subsister l’idée qu’il y avait ou qu’il pouvait y avoir le moindre titre à la faveur de Dieu. Mais mon mal sans ressource devient la mesure de la profondeur de Son amour ; et cela, parce que c’est ce qui amène Christ sur la scène, et même, Christ comme Rédempteur et Sauveur de la part de Dieu — Christ, le don infini de la grâce de Dieu — Christ, que rien ne pouvait détourner — Christ, qui souffrit tout de la main de l’homme et de Satan, et du juste jugement de Dieu, afin que nous fussions sauvés selon un mode divin. Et en réalité nous le sommes ainsi. Et que ne devons-nous pas au Sauveur et au Dieu qui L’a donné ? Mais qu’est-ce que Christ n’a pas porté ? Notre affreuse ruine et notre horrible péché ont précisément manifesté ce que Dieu est dans Son grand amour envers nous, et ce que Christ est en Sa valeur aux yeux de Dieu, et la puissance de la force de la vie, dans laquelle Il est ressuscité et monté en haut, et est assis — et nous-mêmes en Lui — dans les lieux célestes. Demandez-vous encore quel est le caractère de la vie que le chrétien possède maintenant ? Regardez Christ, et voyez combien Il est précieux à Dieu — combien il est impossible à Dieu de ne pas avoir ce Sauveur béni, qui est la pleine expression de cette vie, placé tout près de Lui-même ! Il L’a ressuscité, et « l’a fait asseoir à sa droite dans les lieux célestes ». Dans Éphésiens 2 c’est simplement : « Il nous a fait asseoir ensemble dans les lieux célestes dans [le] Christ Jésus ». Il n’est pas ajouté ici, comme dans Éphésiens 1, « à sa droite ». De telles paroles ne sont jamais, que je sache, employées à l’égard des enfants de Dieu ; et je ne crois pas non plus qu’elles pourraient l’être. Ne semblent-elles pas plutôt indiquer la place personnelle de Christ ? Mais il est dit : « Dans les lieux célestes », parce que c’est à eux, et non à la terre, que nous appartenons. Israël, comme tel, dans ses meilleurs jours, appartenait à la terre (comme nous y appartenions — loin de Dieu — dans nos plus mauvais jours) ; mais maintenant, ce n’est pas seulement que nos « noms sont écrits dans les cieux », bien que cette expression même montre le merveilleux amour de Dieu qui nous destine à être en haut et nous enregistre pour cela — qui nous lie avec le ciel pendant que nous sommes sur la terre : tout cela est vrai ; mais nous avons beaucoup plus dans l’épître aux Éphésiens. Là nous trouvons qu’en vertu de notre union avec Christ, il est dit de nous, non seulement que nous sommes ressuscités avec Lui, mais assis avec Lui dans les lieux célestes. En un mot, tout ce qui est dit de Christ Lui-même, est (par la grâce) vrai de nous, à la seule exception de ce qui peut être personnel en Lui, comme Dieu le Fils, ou exprimé à l’égard du Seigneur à un degré prééminent. Car après tout, il y a une distinction entre la tête et le corps, même comme tel ; quoique d’un autre côté, cette différence elle-même montre l’association la plus étroite possible : nous sommes Sa plénitude ou Son complément.

Nous apprenons donc par là, que nous possédons le titre même de Christ, pendant que nous sommes dans ce monde — il y a même plus que cela : la vie même de Christ est la nôtre, en vertu de quoi il est dit de nous que nous sommes vivifiés avec Lui, et même ressuscités, et assis dans les lieux célestes en Lui. Mais rappelons-nous soigneusement que tout cela n’est jamais dit de personne, par rapport au dessein et à l’élection de Dieu, mais seulement où existe la foi. Cela ne nous est pas applicable avant que nous croyions : cela ne serait vrai de personne, avant qu’il y ait une association positive et vivante avec Christ. Ce qu’on appelle vulgairement théologie calviniste, quoiqu’elle renferme bien des vérités, est totalement fausse sur ce chef. Un de ses principaux traits, ce sont les efforts pour établir que, l’amour de Dieu demeurant d’âge en âge, notre relation est toujours précisément la même ; que Dieu, parce qu’Il a le dessein de faire de nous Ses enfants, nous regarde toujours comme Ses enfants ; qu’en supposant qu’un homme est un élu, s’il est encore un incrédule ou un blasphémateur, il est tout autant un enfant de Dieu, que s’il était régénéré par le Saint Esprit, et marchant dans les voies de Dieu. Elle soutient que Dieu l’aime exactement du même amour (tandis qu’il est par exemple, un buveur ou un jureur) qu’après. Que peut-on imaginer, parmi des croyants, de plus déshonorant pour Dieu, de plus destructeur pour l’homme que cette doctrine-là ? Il est évident que l’apôtre parle ici, non de personnes simplement élues, bien que, naturellement, elles fussent élues, mais de personnes vivifiées. C’est-à-dire qu’elles avaient actuellement la vie. Non seulement il y avait un dessein de Dieu à leur égard, mais elles étaient alors vivantes à Dieu, comme étant ceux qui avaient foi en Christ : vous ne pourriez pas dire qu’un homme a la vie, avant qu’il ait la foi. C’est la réception de Christ par le Saint Esprit, qui est appelée d’une part la foi, et de l’autre la vie. Vous ne pourriez pas avec raison mettre l’une de ces deux choses avant l’autre. S’il est vrai que vous ne pourriez guère dire que la foi existait avant la vie, il est certain que la vie n’existe pas avant la foi. Le premier exercice de la foi, est aussi le premier exercice de la vie. C’est la puissance de l’Esprit de Dieu, présentant Christ à l’âme ; c’est pourquoi il est dit : « L’heure vient, et elle est maintenant, que les morts entendront la voix du Fils de Dieu, et [l’]ayant entendue, ils vivront ». Le fait de vivre, ici, est plutôt, s’il y a aucune différence, l’effet de l’ouïe, que l’ouïe ne serait l’effet de la vie. Cela est bien important ; parce que nul ne peut affirmer que des personnes sont vivifiées avec Christ, avant qu’elles soient ici pour être appelées ; et il est impossible de dire qu’elles ont la vie, avant qu’elles aient entendu la voix du Fils de Dieu. La première preuve qu’un homme est une brebis du Seigneur, c’est qu’il entend la voix du bon Berger. Il n’est pas laissé à certaines indications (ou plutôt à des indications incertaines) de la vie au-dedans de lui-même, mais ce qui est placé devant lui, c’est la grande pierre de touche objective, la grande preuve objective, que Dieu demande ; — non pas simplement ce que je fais, ou ce que je ne fais pas (c’est ce que la loi demandait), mais si je reçois le Fils de Dieu, et si je me repose sur Lui. Suis-je arraché à tous les vains sons qui se font entendre dans le monde ? Et la voix de Christ attire-t-elle mon âme ? S’il en est réellement ainsi, vous avez assurément la vie. « Qui croit au Fils a la vie éternelle ». « Celui qui a le Fils a la vie ». Je prouve que je l’ai par le fait bien simple, bien certain, et béni, que j’entends la voix du Fils de Dieu. Ce n’est qu’ainsi que j’ai la vie — ce n’est qu’alors que je suis assuré d’être vivifié et ressuscité avec Christ. Remarquez-le bien : ce qui constitue le caractère chrétien du fait d’être vivifié, c’est l’association avec Christ après qu’Il a enduré la mort pour nos péchés. Il est dit aussi de nous que nous sommes assis dans les lieux célestes, parce que nous avons la vie de Christ qui est là, et il est parlé de nous selon la place dans laquelle est entré Celui qui est notre vie. Ainsi donc l’Écriture ne veut pas seulement dire que nous sommes tels selon le décret ou la pensée de Dieu, lorsqu’elle dit que Dieu nous a ressuscités et nous a fait asseoir ensemble dans les lieux célestes. Cela ne se réfère pas à notre résurrection future, mais expressément à l’association présente du croyant en vertu de son union avec Christ, qui est en la présence de Dieu. Et en faisant allusion à la première chose, le fait d’être vivifiés, l’apôtre dit : « Vous êtes sauvés par [la] grâce ». C’est là la source de toute la bénédiction. En conséquence l’expression est très forte. Car ce qu’implique la forme de l’expression, c’est que le salut était complet, et qu’ils jouissaient maintenant de son résultat actuel. Il n’est pas toujours parlé ainsi du salut dans l’Écriture ; il y a des épîtres entières où le sujet n’est jamais traité de cette manière. Ainsi, particulièrement dans l’épître aux Philippiens, le salut est envisagé comme une chose future — comme n’étant pas complète jusqu’à ce que nous voyions Christ en gloire. Dans cette épître le salut est une chose solennelle qui se poursuit maintenant (quoiqu’elle ne soit nullement précaire), parce qu’il est clair que nous ne sommes pas avec Christ dans la gloire, mais dans nos corps naturels. D’après cela, Christ y est présenté comme un Sauveur, non seulement parce qu’Il est mort et ressuscité, mais parce qu’Il va revenir pour ma pleine délivrance et pour ma parfaite joie. C’est ce qui explique la signification de ce texte qui a tant embarrassé quelques personnes. — « Travaillez à votre propre salut avec crainte et tremblement » ; parce que dans le sens que la Parole a en vue ici, nous ne posséderons le salut que lorsque nous serons glorifiés avec Christ. En attendant, nous y travaillons avec crainte et tremblement, nous rappelant que Satan nous hait parce que nous devons être en gloire avec Christ. Nous sommes envisagés comme des personnes en ce monde, qui savons que nous devons avoir le prix, mais nous avons à combattre et à courir pour l’avoir, quoique nous devions retenir ferme l’assurance que nous l’aurons quand nous verrons Christ venir d’en haut pour nous.

Mais quand nous examinons le langage de l’épître aux Éphésiens, tout est différent. Là le salut est regardé comme une chose absolument passée : « Vous êtes sauvés par [la] grâce » — ce n’est pas seulement que la chose se poursuit, et doit bientôt être complétée ; mais nous sommes sauvés et, en Christ, nous ne pouvons l’être plus que nous ne le sommes. Tandis que d’après l’épître aux Philippiens, Paul ne possédait pas encore son salut : « Non que j’aie déjà atteint [le but], ou que je sois déjà parfait ». La perfection dont il y est parlé se rapporte entièrement et uniquement au temps où nous serons transformés à la glorieuse ressemblance de Christ. Alors nous serons sauvés, et non auparavant. Si vous appliquez le même sens du mot salut aux deux épîtres, vous rendez la doctrine contradictoire. Prenez encore l’épître aux Hébreux. Là aussi, le salut est toujours représenté comme une chose future. « C’est pourquoi aussi », y est-il dit, « il peut sauver entièrement ceux qui s’approchent de Dieu par lui ». Il s’agit ici du peuple de Dieu, et non des inconvertis, quand il est dit qu’ils s’approchent de Dieu par Christ. Pour qui est-Il sacrificateur ? Pour le croyant seulement. Ainsi donc c’est le saint qui a besoin d’être sauvé dans l’épître aux Hébreux ; parce que le salut dans cette épître s’applique à toutes les difficultés de notre voyage à travers le désert. Toute la doctrine est fondée sur ce type, que nous, maintenant, comme Israël jadis, nous traversons le désert, et que nous ne sommes pas encore entrés dans Canaan ; tandis que l’enseignement caractéristique de l’épître aux Éphésiens, c’est que Christ est entré en Canaan, et que nous sommes là en Lui. C’est parce que nous sommes occupés d’une portion de la Parole de Dieu, et non de toute la Parole, parce que nous saisissons fortement une certaine vérité, et non la vérité généralement, que nous parvenons à des vues confuses et fautives qui mènent à une pratique vicieuse.

La raison de ces différences est extrêmement intéressante. Vous avez dans chaque épître précisément ce qui convient à son caractère propre. Dans celle aux Éphésiens ce n’est pas la révélation de Christ comme Celui qui intercède pour nous devant Dieu : c’est ce que nous avons dans les Hébreux. Pourquoi est-Il sacrificateur ? Afin qu’Il ait « de l’indulgence pour les ignorants et les errants ». C’est là exactement notre danger, pendant que nous sommes voyageurs ici-bas : nous sommes ignorants, et toujours exposés à la tentation de nous détourner, par le moyen d’un méchant cœur d’incrédulité, c’est pourquoi nous avons besoin de l’épître aux Hébreux. La doctrine de celle aux Éphésiens ne suffirait pas à elle seule pour répondre à ma faiblesse, à mes difficultés, à mes tristesses. Supposons que je me sois égaré, que trouvé-je dans les Éphésiens pour rappeler et consoler mon âme ? J’y lis : « Afin que nous fussions saints et irréprochables devant lui en amour ». Mais alors je me suis égaré, et je ne peux trouver là aucun soulagement pour mon angoisse. Je puis essayer d’affermir mon cœur en m’appuyant sur l’élection de Dieu et sur Ses conseils si élevés, mais, si j’ai une conscience tendre, ces choses, si elles sont seules, me rendront plus misérable. Mon cœur raisonnera et dira : Si Dieu m’a réellement tant aimé, comment se fait-il que je Le déshonore ainsi ? Dans l’épître aux Hébreux, je ne trouve pas un mot sur le fait que je suis assis dans les lieux célestes, mais je trouve Christ à la droite de Dieu, et plaidant pour moi, après avoir fait par Lui-même la purification de mes péchés. Le premier chapitre même a pour point de départ cette glorieuse vérité — que Christ ne s’est assis dans les hauts lieux que lorsqu’Il put prendre cette place sur le fondement qu’Il avait complètement effacé nos péchés, et cela « par lui-même », c’est-à-dire à l’exclusion de tout autre moyen de secours. Ce fut Sa propre tâche, et Il l’a accomplie, et Il ne pouvait trouver du repos même dans cette gloire qui Lui était familière, à Lui, sinon sur ce fondement-là. En cela nous avons un fondement bien ferme. Mais tout en ayant la purification de nos péchés par Christ, nous sommes dans un lieu de tentation, où, par le moyen de l’ignorance, de la faiblesse, et de mille autres choses qui peuvent survenir, nous sommes constamment en danger de nous écarter et de glisser. Que deviendrons-nous donc alors ? Qu’est-ce qui nous soutiendra et nous conduira à travers cette scène ? Dieu révèle le Sacrificateur béni qui prend soin de l’âme. — Celui qui possède la pleine confiance de Dieu le Père, qui Lui a donné la plus entière satisfaction — Celui qui est assis à la droite de Dieu, et qui y est occupé sans cesse de nos besoins, sur cette base, que nous appartenons à Dieu et que nous sommes déjà rachetés, et que nous n’avons plus aucune conscience de péché. Il se peut que nous ne nous rendions guère compte comment il se fait que des personnes, qui sont si bénies de Dieu, soient si faibles et misérables, si peu semblables à Celui qui, à Ses propres dépens, a acquis et nous a assuré notre bénédiction. Mais la foi reçoit de Dieu et Lui demande ce qu’Il destine à être notre force et notre consolation au milieu de notre faiblesse et de nos dangers. Sa réponse est que Christ est là pour plaider notre cause, aussi certainement que l’Esprit est ici pour nous en donner la conscience. Et c’est par le moyen de l’intercession de Christ à la droite de Dieu, que nous sommes amenés à sentir nos besoins et nos manquements. Car nous ne jugeons jamais ces choses sans recevoir par le moyen de ce jugement une bénédiction morale. Toute la puissance de Christ, en tant que reposant sur nous, se réalise en raison de la profondeur de l’appréciation morale produite dans notre âme par l’Esprit de Dieu en réponse à l’intercession de Christ ; et c’est une partie de l’effet de l’intercession de Christ pour nous que nous soyons amenés à sentir les choses, quand nous nous sommes égarés dans nos pensées et de fait. Dans l’épître aux Hébreux, il ne pouvait être parlé du salut comme d’une chose passée. Nous savons que nous serons pleinement sauvés, et que Christ doit venir pour cela. Mais quoiqu’il soit réservé aux hommes de mourir, il n’en est pas nécessairement ainsi pour le saint. Nous savons qu’il peut se faire qu’ils ne s’endorment jamais, comme nous savons que certainement ils ne seront jamais jugés, quoique tout ce qu’ils ont fait doive assurément être manifesté devant le tribunal de Christ. Mais Il est passé par la mort pour eux, et par conséquent il n’y a aucune nécessité qu’ils meurent ; et Il a enduré le jugement comme nul autre ne le pouvait, et nous avons Sa propre Parole pour nous assurer que, dans tous les cas, nous ne viendrons jamais en jugement. Celui qui croit au Fils de Dieu « a [la] vie éternelle et ne viendra pas en jugement » (Jean 5, 24). La conséquence en est que, quoique nous attendions qu’Il vienne, nous savons que quand Il apparaîtra une seconde fois, ce sera sans péché, à salut. Il a si parfaitement aboli le péché par le sacrifice de Lui-même, que, quand Il sera ainsi vu une seconde fois par ceux qui L’attendent, ce sera « sans péché » (à part toute question de péché, du moins pour ce qui les concerne), « à salut », et non pour le jugement. Le salut et le jugement sont les deux choses qui, par-dessus toutes autres, présentent le plus complet contraste. Vous ne pouvez avoir le jugement et le salut comme appliqués au même individu. Ainsi donc dans l’épître aux Hébreux, vous avez le salut lié avec l’apparition de notre Seigneur une seconde fois.

Dans l’épître aux Éphésiens, au contraire, nous sommes déjà sauvés, et dans cette épître, il n’est jamais fait allusion au retour de Christ pour recevoir Son peuple. Dans les épîtres où le salut est présenté comme devant être complété bientôt, là nous trouvons la venue de Christ pour l’accomplir. Dans l’épître aux Philippiens, il est dit : « Notre conversation est dans les cieux, d’où aussi nous attendrons le Seigneur Jésus Christ [comme] Sauveur ; qui transformera le corps de notre abaissement [afin qu’il soit rendu] conforme au corps de sa gloire, selon l’opération de cette puissance par laquelle il peut même s’assujettir toutes choses ». Là nous trouvons notre Seigneur transformant ce corps d’abaissement, afin qu’il soit rendu conforme au corps de Sa gloire, prouvant qu’Il est le Sauveur ; parce que ce n’est pas une délivrance partielle, mais un salut complet pour l’homme entier. Mais dans l’épître aux Éphésiens, où la venue de notre Seigneur n’est jamais introduite, ceci se lie avec le fait que le salut est déjà regardé comme étant un fait accompli, dont nous jouissons maintenant. C’est là une manière d’envisager le salut, qui se trouve rarement dans l’Écriture : il est généralement envisagé comme quelque chose que nous avons devant nous. Les gens confondent le salut avec la justification ou la réconciliation avec Dieu ; mais dans l’épître aux Romains la distinction est présentée d’une manière évidente : — « Si étant ennemis, nous avons été réconciliés avec Dieu par la mort de son Fils, beaucoup plutôt, ayant été réconciliés, serons-nous sauvés par sa vie ». Ainsi nous avons la réconciliation, mais non le salut, dans le sens où il est parlé ici. « Serons-nous sauvés ». Il est vivant pour nous ; et, comme conséquence, nous sommes en voie d’être sauvés. Le salut se poursuit ; et quand Christ reviendra en gloire, alors le salut sera complet. D’après cela, dans Romains 13, nous avons la doctrine encore appliquée : « Maintenant le salut est plus près de nous que lorsque nous avons cru ». Nous ne l’avons pas encore ; mais il est plus près ; et nous l’aurons bientôt entièrement et parfaitement. Avant d’avoir cru, nous étions ennemis, et perdus ; puis, ayant cru, nous avons été réconciliés avec Dieu par la mort de Son Fils. Maintenant Il vit pour nous ; et bientôt Il reviendra pour nous, et alors tout sera complet.

De plus, prenez les épîtres aux Corinthiens, et vous y trouverez le même enseignement. Le salut n’y est pas envisagé comme complet. Dès lors l’apôtre dit qu’il mortifie son corps et l’asservit. Il ne veut pas permettre qu’aucune mauvaise convoitise ait de l’empire sur lui. Il pourrait prêcher au monde entier ; mais si le mal avait le dessus sur lui, comment pourrait-il lui-même être sauvé ? Il présente la chose de la manière la plus forte possible par rapport à lui-même ; et il montre que la prédication (dont quelques-uns paraissaient occupés plutôt que de Christ) n’a rien à faire avec la question de savoir si un homme sera sauvé, mais qu’il s’agit de la vie en Christ ; car la grâce de Christ se manifeste dans une sainte soumission à Dieu et dans le jugement de soi-même quant au mal. Ce sont là les conséquences inséparables du fait que l’on a la vie de Christ par la puissance du Saint Esprit dans l’âme. « Je mortifie mon corps », dit-il, « et je l’asservis, de peur qu’après avoir prêché à d’autres, je ne sois moi-même réprouvé ». Je prends le dernier mot dans le sens le plus fort, ce qui est même le seul sens scripturaire, c’est-à-dire celui de réprouvé. Ce mot, dans le Nouveau Testament, ne signifie pas simplement qu’un homme va perdre quelque chose, mais qu’il va perdre sa propre âme et perdre Christ. Il n’y a aucun exemple dans les épîtres où le mot soit employé dans un sens modifié : il signifie invariablement perdre pour toujours ; et il n’y a ni foi ni intelligence à en modifier la force. Ce n’est pas que Paul eût aucune crainte d’être perdu ; mais il rapporte ce cas à lui-même, pour rendre la chose plus forte, en supposant qu’il en vînt à renoncer à Christ et à Sa sainteté. Quelle est la conséquence ? Il aurait pu être alors le prédicateur le plus actif, et pourtant se trouver être un réprouvé ; mais nul homme qui a jamais été régénéré ne pourrait devenir un réprouvé ; aussi ne dit-il pas : Quoique je sois né de Dieu, je pourrais être un réprouvé. Une telle chose ne pourrait ni ne devrait être supposée. Mais il donne un exemple bien sérieux de ce qui, hélas ! n’a été que trop commun, savoir, qu’un homme pourrait prêcher à d’autres et être un réprouvé. Nous savons que l’un des apôtres prêchait et faisait des miracles ; mais le Seigneur ne l’avait jamais connu.

Ceci montrera l’importance qu’il y a à laisser à la doctrine du salut la place que l’Écriture lui donne, selon toutes les manières dont elle l’envisage. Dans la plus grande partie de l’Écriture, elle n’est pas envisagée de la même manière que dans l’épître aux Éphésiens, mais de la manière que je viens de décrire, dans l’épître aux Romains, etc. On ne peut légitimement élever aucune question quant à la possibilité de retomber, quand l’apôtre parle du salut dans ce sens ; mais le fait est que tout le résultat de la bénédiction — toute la plénitude de la délivrance, n’est pas encore notre portion. Et qui pourrait dire qu’elle l’est ? Ici, nous souffrons encore : alors nous serons tout entièrement en dehors de la scène de la tentation. Dans l’épître aux Éphésiens, l’apôtre dit, en considérant le caractère de notre vie, qu’elle est entièrement en dehors de tout danger, de toute tentation, et de toute chose de cette nature. « Vous êtes sauvés par [la] grâce ». Il veut dire par là que nous avons été et que nous sommes sauvés ; c’est-à-dire que nous avons la jouissance actuelle de ce qui est déjà passé et complet devant Dieu. C’est un fait accompli, parce que c’est en Christ, et toutes choses sont ici considérées comme étant en Christ, comme, par exemple, notre paix. En conséquence, plus loin, Il est Lui-même appelé notre paix. Dès lors aussi, tant il est vrai que le salut est envisagé comme étant en Christ, il est dit de nous, le Sauveur étant assis dans les lieux hauts, que nous sommes, non pas en voie d’être sauvés, mais complètement sauvés, tellement qu’il ne nous faut rien de plus quant à ce qui concerne ce point. Et il est ajouté, en parfaite harmonie avec ce que nous venons de voir, que Dieu « nous a ressuscités ensemble, et nous a fait asseoir ensemble dans les lieux célestes dans [le] Christ Jésus ; afin qu’il montrât dans les siècles à venir les immenses richesses de sa grâce, par sa bonté envers nous dans [le] Christ Jésus ». Que peut-il y avoir de plus clair que la nature complète de ce salut ? Combien il est manifeste qu’il a un caractère d’association avec Christ, qui est tout à fait au-delà de toute conception humaine ! Il est facile de concevoir qu’une telle béatitude puisse exister bientôt ; mais voici la chose merveilleuse, c’est que cela soit déclaré comme la portion actuelle de pauvres et faibles chrétiens, maintenant de ce monde. Si nous nous arrêtons beaucoup sur des choses humaines, elles deviennent communes et sans valeur, et nous cessons de nous émerveiller ; mais quand il s’agit de cette œuvre glorieuse de Dieu en Son Fils bien-aimé, plus nous y pensons, plus nous demeurons frappés d’étonnement devant elle ! Remarquez aussi que c’est dans ce but même : « Afin qu’il montrât dans les siècles à venir les immenses richesses de sa grâce, par sa bonté envers nous dans [le] Christ Jésus ». C’est-à-dire que ce n’est pas seulement Dieu qui a Ses yeux sur nous, et qui nous donne ce dont nous avons besoin, mais Dieu qui agit pour satisfaire Ses propres affections, par le moyen de Son Fils. Dieu dit, en quelque sorte : Je désire montrer ce que je suis, et non pas simplement pourvoir à ce dont vous avez besoin. Ainsi, c’est Dieu, s’élevant à la hauteur de Sa propre bonté, et agissant d’après ce qu’Il est, d’une manière complètement indépendante de ce que nous sommes, sinon que nous devenons l’occasion pour Dieu de montrer Son amour sans égal ; et cela, non pas simplement maintenant, mais « dans des siècles à venir », ou comme je le suppose, pour un temps illimité.

Mais ce n’est pas tout. L’apôtre nous met encore en garde contre certaines conceptions erronées, en reprenant ou répétant l’expression : « Car vous êtes sauvés par la grâce », avec cette addition : « par la foi », ce qui est une forte confirmation de ce qui a été déjà dit. Nous ne sommes pas sauvés par le dessein et l’élection de Dieu, quelque vraie et bénie que soit la chose, mais par le moyen de la foi dans nos cœurs, par le moyen de cette persuasion divine que le Saint Esprit opère dans le cœur d’un homme qui était auparavant un incrédule. « Vous êtes sauvés par la grâce, par la foi ». Il n’y a pas une telle chose que Dieu introduisant quelqu’un dans la relation d’enfant sans l’action de son cœur et de sa conscience. Le Saint Esprit donne à un tel homme de sentir sa propre condition telle qu’elle est vue de Dieu et pourtant de connaître ce que Dieu est envers lui en Christ. Il ne s’agit pas d’un simple contrat, d’un froid parchemin, d’un salut mécanique, pas plus que d’un tel changement de la vieille nature, qu’il pourrait être un fondement d’espérance à l’égard de Dieu. Mais si on ne peut se fier au sentiment humain, on ne peut se fier non plus à l’assentiment donné aux décrets de Dieu, quelqu’orthodoxe qu’il soit. Quand Dieu parle en Son Fils, et de Son Fils, c’est une chose réelle, et celui qui écoute doit avoir, d’une manière plus ou moins profonde, la conscience de la solennité de ce qu’Il a dit. Il n’est plus rebelle ni indifférent quant à Christ. Il peut sentir le péché et se haïr lui-même comme jamais il ne le fit, précisément parce qu’il est sous la main de Dieu et sous l’enseignement de Dieu. Ainsi la chose même que vous alléguez pour prouver que vous n’êtes pas de ceux qui appartiennent à Dieu, est plutôt la preuve que vous en êtes un. Si vous étiez mort quant à Dieu, sentiriez-vous ce qui L’attriste ? C’est quand Christ a commencé à reluire sur votre âme, que vous commencez à réaliser que vous aviez été plongé dans tout ce qui est ténébreux et dégoûtant, quoiqu’une lueur d’espérance puisse percer à travers les nuages. Vous avez sérieusement la conscience des choses qui sont mauvaises, auxquelles vous étiez insensible auparavant. C’est là un effet de la puissante opération de Dieu dans Sa grâce ; mais il n’y a pas une telle chose que la vie sans la foi ou sans que l’âme ait la conscience de ce qui est. Il y aura toujours quelque chose qui réveille de nouvelles pensées et de nouveaux sentiments à l’égard de Dieu, une crainte et un désir à l’égard de Dieu, une horreur du péché, et une haine de soi-même. Toutes ces choses, et d’autres encore, se passeront dans l’esprit de celui qui est né de Dieu ; et ce qui produit tous ces sentiments par l’Esprit de Dieu, c’est Christ — rien d’autre ne le fera. S’il n’en est pas ainsi, c’est en vain qu’un homme fréquente une église ou une chapelle — se joigne au meilleur ou au plus mauvais témoignage ; mais voici le principe d’après lequel il est là — il pense que c’est son devoir d’y assister peut-être tous les jours — c’est l’idée d’un service religieux qu’il croit devoir rendre à Dieu, et il pense que s’il le fait diligemment, Dieu se souviendra de lui à son lit de mort et au jour du jugement. Telle est une partie des devoirs que l’homme accomplit dans l’espoir d’échapper à l’enfer. Mais tout cela se fait sur ce fondement, que l’homme place Dieu en quelque sorte sous une obligation à son égard. L’homme fait quelque chose, et il pense qu’à cause de cela Dieu doit lui faire miséricorde. Qu’est-ce qui peut nier d’une manière plus flagrante et le péché de l’homme et la grâce de Dieu ? Or, voici ce qui est dit : « Vous êtes sauvés par la grâce, par la foi ». Et l’expression, être sauvé par la grâce, veut dire que c’est par le moyen de ce que Dieu est pour moi en Son Fils, sans qu’il y ait en moi une seule chose qui le mérite. Consentez-vous à vous confier pour votre salut à Dieu seul, en Son Fils bien-aimé ? C’est là la foi. « Vous êtes sauvés par la grâce, par la foi ». Si j’y mêle une parcelle de ce qui vient de moi, ce n’est à proprement dire ni grâce ni foi ; car la foi renonce à soi-même pour Christ, et la grâce est la pure faveur de Dieu envers moi, pécheur, à la croix. Quand j’écoute Christ, alors la Parole de Dieu commence à agir à l’égard de tout ce qui en moi est égoïste et opposé à Dieu, et il ne faut pas que j’essaie de modifier la Parole de Dieu, ni de l’accommoder à mes propres pensées, ménageant ainsi un moyen d’accorder un peu d’indulgence à la chair.

Je maintiens donc que le salut dont il est parlé dans l’épître aux Éphésiens est déjà complet pour celui qui croit — si absolu même, que nul ne peut rien y ajouter, parce que ce serait ajouter quelque chose à Christ, et à ce que Christ a fait. Et c’est ce qui ne doit pas être, ce qui ne peut pas être, voyant que tout vient de la miséricorde gratuite de Dieu, non méritée, sans mélange. Or c’est là la grande chose pour l’âme. Puis-je, sans aucune question de ce que je suis ou de ce que j’espère être, ou de ce que je devrais faire pour Dieu, me confier en Lui maintenant ? Puis-je me reposer sur Christ, quant à tout ce que j’ai été et tout ce que je suis, sans aucune promesse ni aucun gage de ma part — sans aucune espérance ni aucune pensée quant à ce que je puis faire, parce que Dieu pourrait m’enlever en un moment ? Puis-je me reposer en Lui entièrement, avec une confiance absolue ? Pensez au cas du brigand mourant, qui est un témoignage vivant et notable quant au salut par grâce, dans tous les âges. D’autres peuvent avoir une œuvre à accomplir ensuite ; mais là nous voyons un homme qui fut l’objet de la grâce dans les dernières heures de sa vie. Et il n’y a aucun autre moyen. Eût-il vécu pendant mille ans après, il n’aurait pas été le moindrement plus en sûreté, par grâce, qu’il ne l’était alors. Il est d’une haute importance de soumettre nos âmes à la pierre de touche de temps en temps — de voir si nous nous reposons uniquement sur la grâce de Dieu envers nous, et non sur ce que les gens appellent la grâce en nous, c’est-à-dire notre fidélité envers Lui. Car c’est là une idée de la grâce qui est bien commune. On veut parler d’un grand changement qui a eu lieu dans le cœur par rapport à Dieu. Ce n’est pourtant pas là ce que Dieu appelle grâce ; mais ce qui la constitue, c’est ce qu’Il nous a donné gratuitement dans l’œuvre que Christ a accomplie pour le péché. « Vous êtes sauvés par la grâce, par la foi ». L’Esprit exclut toute pensée que l’homme, en venant à Christ, contribue par sa foi à la chose, ou se procure quelque crédit ; car l’apôtre dit immédiatement après : « Et cela ne vient pas de vous, c’est le don de Dieu ». Ceci se rapporte probablement, non seulement au salut, mais aussi à la foi ; c’était tout le don de Dieu, et non la production de l’homme : « Non par des œuvres ; afin que personne ne se glorifie ». Au contraire, au lieu d’être une question de nos œuvres, c’est nous qui sommes l’œuvre de la main de Dieu, la nouvelle création pour Sa propre louange. « Car nous sommes son ouvrage, étant créés dans [le] Christ Jésus pour les bonnes œuvres que Dieu a préparées, afin que nous marchions en elles ». Vous avez là une preuve des plus claires qu’il ne saurait y avoir aucune négligence dans la marche du croyant ; mais le même verset enlève toute pensée que l’acte de l’homme puisse être le fondement ou le moyen de salut.

Ici donc nous voyons que le croyant est l’ouvrage de Dieu en Christ, et cela « pour les bonnes œuvres que Dieu a préparées, afin que nous marchions en elles ». C’est là une expression bien remarquable, une expression que nous ne saurions trop peser. Il ne s’agit pas des bonnes œuvres de la loi — ni de celles qui pourraient paraître telles au jugement de l’homme, mais d’une offrande d’un nouveau caractère, céleste et toute de grâce ; c’est là ce qui était dans la pensée de Dieu, et tout était déterminé par Lui à notre égard, avant qu’existât la scène, dans laquelle nous sommes maintenant introduits. Le même Dieu qui avait le dessein de nous sauver et de nous bénir avec Christ, avant que le monde fût fait, avait une marche d’un certain caractère, une ligne d’action spéciale, dans laquelle Sa pensée était que ceux qui auraient reçu une telle faveur, marchassent. Ce n’est pas la pensée du bien que nous devrions faire en tant qu’hommes, comme un moyen de montrer que nous désirons obéir à Dieu sous la loi. Ce n’est pas simplement aimer Dieu, et son prochain comme soi-même, mais tout entièrement un autre type et une autre manifestation de l’amour. Il découle de nos nouvelles relations, et s’il s’exerce en aimant Dieu et en aimant ceux qui sont autour de nous, c’est d’après le grand amour que Dieu nous a montré en Christ. Ce n’est pas seulement le devoir, quand même on prendrait la forme d’obligation la plus élevée. Si un homme marchait uniquement de cette manière-là — aussi bien qu’on peut le supposer — il demeurerait au-dessous de ce qu’un chrétien devrait être, et ce ne sont pas là « les bonnes œuvres que Dieu a préparées, afin que nous marchions en elles ». La loi fut introduite par suite de la présomption d’Israël et de sa confiance en lui-même ; ce n’était pas quelque chose que Dieu avait préparé afin que Son peuple y marchât. C’est pourquoi il est dit dans l’épître aux Romains que la loi intervînt (παρειηλθεν). C’était quelque chose qui entra incidemment, comme une sorte de parenthèse introduite dans un but spécial, mais d’une profonde importance. Or elle a fait son œuvre, et le croyant, alors même qu’il a été sous la loi, est amené absolument hors de sa sphère, et est devenu vivant à Dieu. Il a un nouveau mari, et il est mort quant au premier. Mais ici la vérité est présentée dans une forme bien belle, en harmonie avec le caractère de l’épître entière. Comme la vocation et le dessein de Dieu, et toutes les pensées que Dieu avait à notre égard, existaient avant que le monde fût, ainsi le caractère même de la marche d’un croyant fut préparé avant que jamais nous vinssions dans le monde, et dans sa nature même est entièrement au-dessus de ce monde. Il est question pour nous de manifester Dieu comme il convient, selon qu’Il se manifeste Lui-même maintenant. « Soyez donc imitateurs de Dieu comme de bien-aimés enfants ».

Quelle place merveilleuse que celle où nous avons été introduits ! Nous avons été « créés dans le Christ Jésus pour les bonnes œuvres que Dieu a préparées, afin que nous marchions en elles ». Nous avons un caractère de vie tout entièrement nouveau, que la loi n’avait jamais contemplé, et nous avons pour y correspondre un nouveau caractère de bonnes œuvres.