Écho du Témoignage:Notes sur l’évangile de Matthieu/Partie 4

De mipe
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Nous arrivons à cette partie de l’évangile où d’autres voies de Dieu, d’autres manifestations de Son caractère et de Sa gloire, sont substituées au judaïsme. Le royaume et la forme qu’il prendrait nous ont déjà été révélés au chapitre 13 ; mais, bien que la forme annoncée dans les paraboles serait nouvelle, le royaume même était déjà en vue depuis le temps de Jean-Baptiste, quoiqu’il ne pût être établi alors, Jésus étant rejeté, et des desseins de Dieu bien autrement importants devant s’accomplir par Sa mort. Aussi jusqu’à présent, quoique le jugement d’Israël ait été clairement déclaré et le nouvel état du royaume dépeint dans les paraboles du chapitre 13, la puissance et la patiente grâce du Seigneur ont été manifestées au milieu du peuple jusqu’à la fin du chapitre 15. Mais à présent tout cela est terminé, et l’Église et le royaume de gloire prennent la place d’un Messie Emmanuel au milieu du peuple. L’incrédulité des chefs de la nation est manifestée dans la demande d’un signe venu du ciel ; assez de signes avaient été donnés. Ce n’était pas de la bonne foi, et le Seigneur s’en va en les reprenant. Ils savaient assez remarquer les signes du temps qu’il allait faire, et comment ne pas voir les signes bien plus clairs de l’état d’Israël, précurseurs du jugement de Dieu ? Ce n’était que de l’hypocrisie. Ils n’auraient que le signe de Jonas, la mort et la résurrection de Jésus, amenant le jugement, le châtiment épouvantable de la nation, conséquence naturelle et nécessaire du rejet dédaigneux de leur Messie venu en grâce.

Mais les disciples eux-mêmes participent, non à la mauvaise foi, mais au moins au manque d’intelligence des Juifs. Leur foi ne comprenait pas plus que celle des Juifs la puissance qui s’était manifestée tous les jours devant leurs yeux. Jésus ne devait trouver nulle part un cœur qui Le comprît. Cet isolement est un des traits les plus frappants de la vie ordinaire du Sauveur, homme de douleurs dans ce monde. Le Seigneur introduit ce qui allait être substitué au royaume en Israël par une question destinée à faire ressortir la doctrine de Sa personne, grand fondement de tout reconnu par la foi. Qui disent les hommes que je suis, moi le Fils de l’homme ? C’est le caractère qu’Il se donne, celui en qui Dieu essayait l’homme selon Ses propres pensées et selon Ses conseils, héritier de toute la gloire qui appartenait à l’homme selon le propos arrêté de Dieu, prenant Sa place au milieu des hommes ici-bas et représentant de la race devant Dieu, race ainsi agréée de Dieu, bien qu’Il s’associât à toutes leurs misères, véritable héritier et représentant de la race, seulement parfait devant Dieu. Les psaumes 8 ; 80, 17, et Daniel 7 nous Le représentent selon les pensées de Dieu dans l’Ancien Testament. Les hommes frappés de Ses miracles et de Sa marche avaient leurs opinions ; la foi par la révélation de Dieu reconnaît Sa personne. Pierre répondant à la question adressée à tous, proclame cette vérité, fondement de toute espérance : Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant. Il vaut la peine de dire un mot sur le caractère du grand apôtre.

Nous savons quelle a été l’ardeur bouillonnante de l’homme, ardeur qui l’a placé en des difficultés d’où sa force morale n’a pas suffi pour le tirer, l’a amené quand Dieu l’a permis pour son bien à renier son Sauveur et son Maître. En tant que soutenu par la force humaine, cette ardeur était un piège continuel ; mais sous la main de Dieu, quand la grâce s’emparait du vase, l’instrument dans la main de Dieu d’une activité des plus bénies. Je trouve cette différence instructive. L’énergie humaine ne peut pas soutenir les épreuves de la foi. Elle peut nous introduire dans les circonstances où ces épreuves se trouvent, mais le ressort de la volonté de l’homme ne peut nous faire triompher. Si la force de Dieu y est on triomphe de la tentation ; la chair qui nous y a introduits ne peut pas. Mais Dieu peut se servir du vase qu’Il a formé, et alors la force de Dieu y est pour nous tenir debout, garantis du mal par Ses armes. Et c’est ce que je désire remarquer ici, que Dieu se sert du vase pour Sa gloire ; tandis que quand c’est le vase seul et l’énergie qui s’y trouve, il manque à l’épreuve, et l’énergie dont Dieu se sert comme instrument nous introduit, quand elle agit elle seule, dans la tentation où elle ne peut pas nous faire triompher. La sincérité et l’ardeur sont là pour nous faire tomber, parce qu’il y a trop de confiance en soi. Ici c’est l’ardente confession de ce que le Père Lui-même avait révélé à Pierre. Il y a deux parties dans cette confession. Jésus est le Christ, c’est ce que les Juifs niaient. Le premier point à reconnaître en Jésus, Il était Celui qui avait été promis aux pères et à Israël. Mais de plus Il était de la plénitude de cette divinité éternelle dans laquelle était la puissance de la vie, le Fils du Dieu vivant. La résurrection en était la preuve là où la mort avait eu lieu. Ainsi, au commencement de l’épître aux Romains, Il est de la semence de David selon la chair, et déterminé Fils de Dieu en puissance par la résurrection des morts. Ainsi il n’y avait pas seulement les promesses de Dieu accomplies dans Sa personne, mais cette personne, en qui elles étaient accomplies, était Fils de Dieu dans une puissance de vie qui est en Dieu seul ; pas seulement Fils de Dieu né dans ce monde selon le psaume 2 — Nathanaël avait reconnu cela — mais Fils du Dieu vivant quant à Sa personne. Jusqu’alors cela n’avait pas été reconnu. Le Père l’avait révélé à Pierre ; le Père dans le ciel lui avait fait connaître Son Fils sur la terre.

Mais le Seigneur aussi montre Son autorité en lui donnant un nom en accord avec la confession qu’il venait de faire, avec la vérité qui, en constatant Sa personne divine, Sa relation avec le Père et cela dans un homme, posait le fondement inébranlable de ce qui était plus que toutes les promesses, qui n’avait jamais été promis, la chose nouvelle, l’Église, « l’Église du Dieu vivant ». Contre cette puissance de vie dans la personne du Fils, la force de Satan qui avait l’empire de la mort ne saurait prévaloir. Ici ce n’est pas la mort et la résurrection de Jésus, Son œuvre, et la démonstration de cette puissance de vie qu’Il était Fils de Dieu en puissance ; c’est le vrai caractère de Sa personne révélé à Simon Barjonas par le Père. Christ aussi lui dit quelque chose. Comme le Père lui avait révélé le vrai caractère de Jésus, Jésus aussi, c’est ainsi qu’il faut prendre la phrase, donnait un nom et une place à Simon. Sa personne comme Fils du Dieu vivant était le fondement de l’Église appelée à avoir sa vraie place dans le ciel. Car c’est dans ce caractère qu’elle nous est présentée ici ; c’est Christ qui bâtit, et jusqu’à aujourd’hui l’édifice n’est pas encore achevé. Ce n’est pas ici ce dont Paul parle, 1 Corinthiens 3. Il avait, lui, Paul, posé le fondement de cette maison-là, d’autres apportaient des matériaux, et chacun sous sa propre responsabilité, de sorte que du bois, du chaume, du foin, se trouvaient dans l’édifice ; c’est ce qui a été bâti sous la responsabilité humaine sur la terre. Ce que nous avons ici se retrouve en 1 Pierre 2, 4, 5, où il n’y a pas d’architecte humain, mais des pierres vivantes viennent et sont bâties en édifice spirituel. Cela se retrouve aussi en Éphésiens 2, 20, 21 ; c’est Christ qui bâtit une maison spirituelle et la puissance de Satan n’y pouvait rien. C’est l’assemblée que Christ bâtit pour le ciel et pour l’éternité.

Mais il y avait aussi autre chose. Le Seigneur maître de tout donne les clefs du royaume des cieux à Pierre. Il avait autorité de la part de Christ pour l’administration du royaume sur la terre, et ce qu’il ordonnait ici-bas serait sanctionné. Il n’est pas question, remarquez-le bien, de clefs de l’Église ; on ne bâtit pas avec des clefs. De plus, bien que Simon reçoive le nom de Pierre, témoignage de sa foi personnelle qui le rattachait au Rocher, reconnaissait qu’il appartenait au Rocher comme une pierre dans sa nature, toutefois il ne fait rien du tout ni n’a aucune autorité ici, dans l’Église. Christ Lui-même bâtit : « je bâtirai mon Église » ; personne d’autre n’y a part, et c’est ce que Pierre lui-même reconnaît dans son épître, le passage faisant allusion évidemment à ce passage, les pierres vivantes viennent à la pierre vivante. L’administration du royaume des cieux lui est confiée, les clefs de ce royaume lui sont confiées, car, je le répète, il n’y a pas de clefs de l’Église. Christ la bâtit, voilà tout. Or, on voit bien dans les Actes que Simon Pierre était celui qui a été le principal instrument de Dieu dans l’œuvre, et aucun vrai chrétien ne doute que ce qu’il a établi par son autorité apostolique avait la sanction du Seigneur, soit du ciel. On peut remarquer que la seule succession dans cette autorité se trouve dans deux ou trois réunis au nom du Seigneur, Matthieu 18, 17-20. La chrétienté a accepté avec une étrange facilité l’idée qu’il y a des clefs pour l’Église, idée qui ne se trouve nulle part dans la Parole ; puis on a laissé passer cette erreur en en acceptant une autre, savoir, que l’Église et le royaume des cieux sont la même chose, ce qui n’a aucun fondement dans la Parole non plus. Le passage que nous considérons montre clairement que ce sont deux choses distinctes. Christ ne bâtit pas un royaume : Il en est Roi caché ou manifeste. De plus, un royaume n’est ni épouse ni corps comme est l’Église ; et le lecteur doit remarquer que c’est Christ qui bâtit ici, et ce qu’Il met dans la maison n’est sûrement que de vraies pierres vivantes. Tout au plus y a-t-il quelque analogie en des limites et des circonstances historiques avec la maison dont Paul parle, 1 Corinthiens 3, où se trouve du foin, du chaume, la bâtisse étant laissée à la responsabilité de l’homme. Mais le royaume et l’Église ne sont en aucun cas la même chose. De plus, avoir confondu l’Église que Christ seul bâtit et qui n’est pas encore achevée et la maison que Paul a fondée sur la terre, est une des causes du système romain et de la haute église où qu’elle soit.

L’Église donc en tant que bâtie par Christ est le royaume des cieux remplaçant le Christ venu au peuple juif selon la promesse ; et les disciples reçoivent l’ordre péremptoire de ne pas annoncer désormais Jésus comme tel. D’un autre côté le Seigneur, dès ce jour, commence à leur faire comprendre qu’Il devait être rejeté, souffrir et ressusciter. Pierre ne peut recevoir une telle déclaration. On voit ici comment on peut recevoir de la part de Dieu une révélation de la vérité et être dans son état pratique au-dessous de l’effet de cette vérité dans sa vie. Pierre avait été enseigné par Dieu Lui-même touchant une vérité qui amenait nécessairement la croix. Pour cela sa chair n’était nullement préparée. Et celui qui venait d’être appelé bienheureux par le Sauveur est maintenant dénoncé comme faisant l’œuvre et comme ayant les pensées de Satan. Comme affection naturelle, il n’y avait rien à blâmer ; mais c’était la pensée de la chair, pas celle de Dieu. C’est une pensée solennelle pour nous, qu’on peut avoir une vérité comme réellement enseigné de Dieu, et être opposé aux conséquences qui en découlent dans la vie. La chair n’est pas jugée dans la mesure de la vérité connue, pour que l’effet divin de cette vérité se produise en nous. Mais le Seigneur se place, toujours parfait, sous le joug de ce qui, pour la rédemption, pour réaliser ce qui était digne de Dieu, était absolument nécessaire. Ce qui est dans le monde, son aise, et sa gloire, ne sont pas du Père. L’homme est charnel, Pierre savourait ce qui était de l’homme. C’est terrible de voir qu’il suffit de dire les choses qui sont de l’homme pour montrer ce qui est mauvais et opposé à Dieu. Il n’y a que la croix qui soit vraiment digne de Dieu. Christ a toujours marché dans l’obéissance et dans l’amour du Père qui ont été pleinement manifestés en Lui ; et pour Lui, cette terre était une terre déserte, altérée et sans eau. Il savourait toujours et parfaitement les choses qui étaient de Dieu ; mais cela amenait la croix dans ce monde, et chacun de nous qui veut jouir de la bénédiction de Dieu doit charger sa croix et suivre Christ. Si on s’épargne, on épargne la chair, et pour autant on perd Christ, et l’on est en opposition avec Dieu. Celui qui perd sa vie pour l’amour de Christ l’aura avec joie où tout est selon Dieu. On perd son âme pour la vanité et l’égoïsme charnel ; on l’acquiert pour toujours en goûtant les choses de Dieu, et cela veut dire la croix dans ce monde opposé à Dieu dans tout ce qu’il est.

Mais il y a plus que le fait moral. Il y a les voies positives de Dieu. Si le Fils de l’homme est rejeté du monde comme présentant parfaitement les voies et le caractère de Dieu au milieu de lui, le temps viendra où Dieu fera valoir les droits de Celui qui a été fidèle, et où Il sera manifesté dans la gloire qui Lui est due et qui Lui appartient. Le Fils de l’homme viendra dans la gloire de Son Père, non dans l’humiliation de l’obéissance dans laquelle Sa perfection morale a été manifestée et dans laquelle, à Ses propres dépens, Il a parfaitement glorifié Dieu ; mais, car Il est Fils du Dieu vivant, dans la gloire de Son Père, et avec Ses anges. Alors Il récompenserait chacun selon Ses œuvres. Ceci donne lieu à la manifestation du royaume comme il sera manifesté quand le Fils de l’homme viendrait dans Sa gloire. C’est la transfiguration dépeinte au chapitre 17. Le 16 avait remplacé Israël et le Christ en Israël par l’Église et le royaume des cieux, par un Christ mis à mort et la résurrection, fondement de l’établissement des conseils de Dieu dans la justice divine, l’homme étant dans une position toute nouvelle. Le chapitre 17 remplace le système transitoire de la loi et du Christ en Israël, par le royaume de gloire et l’ordre de choses qui en découle. La montagne de la transfiguration n’est pas Horeb. Ce n’est pas le premier Adam mis à l’épreuve par une loi, règle parfaite de ce qu’il devrait être dans ce monde déchu. C’est le second Adam vu dans le résultat de l’épreuve à laquelle il a été exposé, victorieux rédempteur qui a pu en amener d’autres à la même gloire, et le chef de tous parfaitement approuvé du Père, homme en qui Il a trouvé tout Son bon plaisir, Son Fils, Son bien-aimé vu dans la gloire, et Moïse et Élie avec Lui. Aussi ceux-ci représentent-ils la loi et la prophétie dans son ordre le plus élevé, car Élie n’était pas un prophète où la loi de Dieu était reconnue. Il était au milieu d’Israël apostat comme Moïse au milieu d’un peuple captif. Il est retourné à Horeb pour annoncer cette apostasie et le refus du témoignage de Dieu quelle qu’eût été Sa patience ; car, de fait, il ne restait que l’élection de la grâce, et Élie est monté au ciel comme il avait déposé son grief à Horeb. Élisée était le prophète de résurrection revenu à travers le Jourdain qu’Élie avait traversé pour monter au ciel. On a voulu voir ici les vivants transmués et les morts ressuscités, et je n’ai rien contre. Car, en effet, les deux classes seront avec le Seigneur dans la gloire du royaume : mais je ne vois pas que ce soit le principal but de l’Esprit, mais la mise de côté de la loi et des prophètes, de la loi et de la patience de Dieu envers Israël. Ils laissent la place maintenant au Fils Lui-même bien-aimé de Dieu, tout en Lui rendant témoignage. Il reste encore quelque chose à remarquer.

Une nuée resplendissante arrive et les enveloppe : c’était la schékina de gloire. La nuée avait conduit Israël et rempli le tabernacle de la gloire de Dieu, de sorte que les sacrificateurs ne pouvaient pas s’y tenir pour le service ; le mot employé ici est le même que celui employé par les septante quand la nuée remplissait le tabernacle. C’est dans la nuée que Jéhovah est venu parler avec Moïse à la porte du tabernacle qu’il avait dressé hors du camp ; 2 Pierre 1, 17, 18 l’appelle la gloire magnifique. Toutefois, ce qui nous est présenté ici, c’est la gloire du royaume où Jésus est reconnu du Père comme Fils. On n’entre pas dans la nuée comme Élie et Moïse, ainsi que je le suppose, en Luc. — C’est-à-dire la partie céleste, la maison du Père ne se trouve pas en Matthieu ; la gloire bien, et le Fils venu en gloire avec les siens, mais pas la demeure auprès du Père en haut : nous sommes en relation avec le ciel, mais pas dans le ciel. Mais, « Écoutez-le », nous présente la voix du Fils seule à être entendue. Non que Moïse et Élie n’eussent pas la parole de Dieu, mais l’ordre des choses qu’ils représentent est passé et les paroles du Fils révélant le Père sont celles que nous avons à écouter. La loi et les prophètes ont rendu témoignage au Sauveur Lui-même, ainsi qu’il est dit ; mais ils s’adressent à l’homme dans la chair. Maintenant c’est le Fils de l’homme après la mort, ressuscité et glorifié ; la rédemption étant accomplie, les conseils de Dieu en grâce sont révélés. Les témoins précédents disparaissent et Jésus reste seul : Fils de Dieu à qui le Père rend témoignage, en qui le Père se révèle. Pierre, comme tant de chrétiens, aurait voulu mêler les trois, mais ce n’est pas l’enseignement du Père. Mais jusqu’à ce que Christ fût ressuscité, ce nouveau témoignage n’avait pas de place, sa raison d’être. La difficulté, suggérée par l’opinion tirée de Malachie par les scribes, dernier témoignage rendu par les prophètes qu’avant le jour glorieux du Seigneur Élie devait venir, se présente à Ses disciples. Le Seigneur confirme ce témoignage et en parle comme d’une chose qui devait arriver. Il vient premièrement, l’idée est juste, et il rétablira toutes choses. La prophétie de Malachie sera accomplie : mais comme Jésus venait pour souffrir avant Sa gloire, ainsi aussi il en était venu un pour aller devant Sa face et qui avait dû être rejeté comme Celui qu’il annonçait. Alors les disciples ont compris qu’Il parlait de Jean venu dans l’esprit et dans la puissance d’Élie devant Lui. Pour ce qui regardait le royaume, tout en effet n’était que provisoire. Le Roi était bien là, le Fils de Dieu Lui-même, mais pour une œuvre bien plus grande encore que le royaume, pour sauver les pécheurs et glorifier Dieu Lui-même par Sa mort. Pour établir le royaume, Il reviendra, mais tout était préparé pour que la foi eût son fondement et que l’homme fût sans excuse ; mais c’est à cause de cela que le Seigneur a pu dire : « Vous n’aurez pas parcouru les villes d’Israël jusqu’à ce que le Fils de l’homme soit venu », quoiqu’Il fût là. Mais Son établissement comme Roi a été différé ; la dernière demi-semaine de Daniel reste encore non accomplie, et même pour l’incrédulité toute la semaine ; et Christ est assis à la droite de Dieu jusqu’à ce que Ses ennemis soient mis pour le marchepied de Ses pieds, ayant fait par Lui-même la purification de nos péchés, rassemblant, ainsi que nous le savons, Ses cohéritiers selon les conseils de Dieu, cohéritiers donnés à Lui avant la fondation du monde.

Mais ici nous trouvons sur notre chemin ce qui n’arrêtait nullement l’accomplissement des conseils de Dieu, mais rendait impossible toute idée de l’établissement de Sa puissance sur la terre comme elle se manifestait alors. Les disciples même ne savaient pas profiter par la foi de cette puissance pour la faire valoir. La puissance de Satan était dans le monde, soit directement, soit indirectement. Tous les effets de cette puissance et les conséquences du péché, le Seigneur était là pour les ôter. Il avait lié l’homme fort. Un cas de cette puissance du mal se présente à Ses disciples et ils ne peuvent pas se servir de la puissance du Seigneur pour la dominer. C’était inutile de continuer celle-ci dans le monde, si même Ses disciples ne savaient pas profiter de ce qui s’y trouvait. Et le Seigneur par conséquent de dire : Jusques à quand serai-je avec vous, jusques à quand vous supporterai-je ? Toutefois aussi longtemps que la puissance est là, Jésus, immuable dans Sa fidèle bonté, l’exerce en grâce : Amène ton fils ici. Grande consolation pour nous ! Si la foi de tous fait défaut, la bonté du Seigneur jamais. Nous pouvons compter sur Sa puissance et sur Sa grâce comme toujours sûres et indéfectibles jusqu’à ce que tout soit fini. Toutefois c’est le manque de foi dans les siens qui est le signe que la patience de Dieu est prête à ne plus trouver de place pour son exercice ; la puissance du mal a amené le Seigneur ici ; l’incrédulité pratique des siens Le chasse, met fin à ces voies à l’égard desquelles l’incrédulité se manifeste. Deux grands principes sont posés par le Seigneur en réponse à la question de Ses disciples : 1° la foi peut tout selon l’action voulue de Dieu au moment qu’elle s’exerce ; mais pour vaincre l’ennemi là où il montre spécialement sa force, il faut une vie de recueillement qui se rapporte, dans la conscience du combat où nous nous trouvons, à la présence de Dieu, et se place devant Lui dans l’abaissement de la chair et dans une entière confiance qui se déploie dans une dépendance de Lui avouée dans la prière pour chercher l’action divine.

Le Seigneur revient à Ses instructions à l’égard de Son rejet et de Son crucifiement. Livré à l’homme, Il doit être mis à mort et ressusciter. Les disciples entièrement ignorants du salut en sont vivement peinés. Mais à la fin du chapitre le Seigneur place Ses disciples, au moins Pierre, et selon Sa grâce nous tous, dans la même relation avec Son Père que celle où Il se trouvait, tout en se montrant une personne divine. C’est une explication des plus touchantes de ce qui allait arriver dans le changement que produirait Son œuvre, la révélation d’une position vraie quant à Sa personne toujours, vraie quant à Sa relation, étant devenu homme avec Dieu, et qui allait être démontré d’une manière glorieuse par Sa résurrection. En même temps Il introduit d’avance les siens dans Sa propre position, maintenant qu’Il allait renoncer à la royauté en Israël telle qu’elle Lui appartenait alors, et qu’Il venait d’annoncer à Ses disciples la mort et la résurrection nécessaires pour les introduire en de plus grandes bénédictions que celles dont ils jouissaient par Sa présence. Pierre voulait qu’Il fût tenu pour un bon Juif. Sur la demande si son Maître payait la didrachme (due par les Juifs pour le service du temple), il répond : Oui. Quand Pierre rentre, le Seigneur le prévient, sachant, sans y avoir été, tout ce qui s’est passé, et lui demande si c’est de leurs enfants ou des étrangers que les rois de la terre prennent tributs ou impôts. Pierre répond que c’est des étrangers. Alors, dit le Seigneur, les enfants en sont exempts. Lui et Pierre, enfants du grand roi du temple, n’étaient pas dans le cas de payer. Mais, ajoute le Seigneur, afin que nous ne les scandalisions pas, va à la mer et jette un hameçon et prends le premier poisson qui vient, ouvre sa bouche et tu trouveras un statère (deux didrachmes). Voilà Celui qui non seulement sait tout, mais dispose de la création avec autant de puissance que de connaissance, mais de nouveau place Pierre dans la même position que Lui-même. « Donne cela pour moi et pour toi ». Voilà Pierre aussi fils du grand Roi du temple. Au moment où le Seigneur montre qu’Il sait tout d’une manière divine et qu’Il dispose de tout comme maître de la création, Il place Pierre dans la même relation que Lui-même avec Jéhovah. Il se soumet aux prescriptions du judaïsme pour ne pas scandaliser les Juifs, mais Lui et Pierre sont réellement exempts comme fils du grand roi. Quelle grâce parfaite ! au moment où Il doit quitter Sa relation avec le peuple infidèle, Il introduit pour ceux qui Le suivent une relation bien autrement intime avec le Dieu d’Israël et en même temps avec Lui-même. Il est fils étant homme et les siens avec Lui dans cette même relation bénie.

Les chapitres 18, 19 et 20 jusqu’à la fin du verset 28 forment une subdivision de l’évangile et nous montrent, de la part du Seigneur Lui-même, les principes qui doivent caractériser les disciples dans le nouvel ordre de choses dans lequel ils entraient, principes de vie et de conduite individuelle et collective. La nature en tant qu’établie de Dieu est reconnue, mais l’état du cœur sondé, la grâce et la croix caractérisant tout le système. Les premiers principes voulus de Dieu dans l’ordre chrétien, ce sont l’humilité et la simplicité. Les disciples, comme de coutume, voulaient avoir une bonne position dans le royaume, chacun pour lui-même, mais cette fois-ci avec plus de référence au caractère moral, aux qualités. La réponse du Seigneur est d’appeler un enfant et de le placer au milieu de Ses disciples comme exemple de l’esprit qui devait les caractériser : celui qui lui ressemblerait serait le plus grand dans le royaume des cieux. L’enfant ne prétendait à rien et ne passait pour rien aux yeux du monde. Celui qui n’était rien à ses propres yeux serait grand aux yeux de Dieu. Celui qui recevrait un petit enfant au nom de Jésus était entré dans Sa pensée dans l’estimation qu’il faisait du monde et des choses qui s’y trouvaient et recevait, quant aux principes de sa conduite, Jésus Lui-même agissant sur les principes qui le gouvernaient. D’un autre côté, s’il y avait dans l’enfant la foi en Jésus, celui qui le ferait broncher dans le chemin du Seigneur, mettrait un obstacle dans le chemin pour qu’il ne Le suivît pas, mettait une meule d’âne autour de son propre cou pour se noyer et pis encore : les pierres d’achoppement se trouvaient dans le monde, mais malheur à celui qui les plaçait devant les pieds des autres. Mais la question entre l’homme et Dieu était venue à son comble. On était pour ou contre Lui. Il ne s’agissait pas non plus d’une captivité en Babylone, d’un châtiment gouvernemental quelque sévère qu’il fût, mais d’être jeté définitivement en enfer ; il valait mieux perdre son meilleur membre que de se trouver là.

Mais le principe propre des voies de Dieu qui se manifestaient, c’était la grâce. Le Fils de l’homme était venu sauver ce qui était perdu : témoignage d’une portée immense ! Ce n’était plus l’accomplissement des promesses faites à Israël, ni le Christ chef du royaume attendu de ce peuple régnant au milieu d’eux, mais un Sauveur fils de l’homme, mais de l’homme perdu sans Lui. L’homme était perdu. La différence entre le Juif et le Gentil s’effaçait devant la ruine totale qui leur était commune, et devant le salut qui arrivait dans Sa personne. Dans cet esprit de grâce il ne convenait pas de mépriser le moins important des êtres humains. Le salut était là, et le petit enfant avait de la valeur aux yeux de Dieu. Dieu qui donnait Son Fils pour les perdus tenait compte des enfants ; Il tenait au bonheur des hommes, et l’enfant n’était pas le dernier. L’œuvre de Christ était valable pour eux, Il était venu sauver ce qui était perdu. Il ne s’agit pas ici de porter les péchés des coupables, mais du principe général de la venue du Sauveur. Perdu parle de notre état ; coupable de ce que nous avons fait : nous sommes tous perdus ensemble, chacun rendra compte de ce qu’il aura fait dans le corps : le jugement se rapporte à ce dernier point. Porter les péchés de plusieurs aussi : mais perdu est l’état commun à tous[1]. Or les enfants sous le bénéfice de l’œuvre de Christ se trouvent agréés de Dieu, leurs âmes voient toujours la face de mon Père qui est dans les cieux, dit le Seigneur. Passage consolant qui nous donne une heureuse assurance que les enfants qui meurent en bas âge s’en vont auprès du Seigneur, résultat de Son œuvre. Le Seigneur se sert de l’image du berger qui cherche la brebis perdue comme dans le cas d’autres pécheurs. Mais il s’agit non de porter les péchés, mais de sauver les perdus. Quant à l’état de l’homme, tous sont perdus ensemble ; les enfants comme état devant Dieu sont l’objet de Son amour, et, par l’œuvre de Christ, peuvent voir Sa face. Le Seigneur ne va pas plus loin que le fait de leur position par l’œuvre qu’Il a faite selon la grâce. Petits et méprisés par les hommes, par les docteurs, grands à leurs propres yeux, mais de ce siècle après tout, Dieu en faisant grand cas. Ils n’avaient pas encore appris l’esprit du siècle, et le mal même ne s’était pas développé devant les yeux de Dieu et il y avait la simplicité et la confiance, de sorte que comme état ils étaient un modèle. Toutefois l’œuvre de Christ est posée comme fondement de tout. Ce n’est pas l’homme dans ses prétentions, mais Dieu dans Sa grâce que nous avons devant nos yeux.

Le même principe de grâce s’applique à la marche chrétienne à l’égard des torts qui seraient faits à quelqu’un. Seulement, ce que nous venons de voir parlait de ce qui concernait l’individu et le péché devant Dieu. En ce que nous allons examiner, nous trouvons nos rapports les uns avec les autres, et avec cela l’assemblée et la discipline.

Dans ce qui précède nous avons vu ce qui doit caractériser l’individu, et le conseil du Seigneur à l’égard du mal qui existerait dans l’individu même, que l’homme devrait être comme un petit enfant lui-même ; et ayant à faire avec Dieu Lui-même dans la lumière, le mal doit lui être intolérable. Il doit l’écarter coûte que coûte. Avec les autres le mal n’est pas permis, mais le chrétien doit agir en grâce. Il avertit son frère si celui-ci lui a fait tort, puis prend deux ou trois avec lui afin que les faits soient constatés et que ce ne soient pas des récriminations personnelles sans preuves s’il ne cède pas à eux. Dans ce cas le plaignant dira tout à l’assemblée, et les témoins sont là ; et si celui qui a fait tort n’écoute pas l’assemblée, celui qui a souffert est libre de le tenir comme étranger à tous communs privilèges. Il ne s’agit pas ici de la discipline de l’assemblée. Il se peut que celui qui a fait tort mérite d’être exclu, mais ce que le Seigneur règle, c’est la conduite de l’individu qui a subi le tort. Le premier objet c’est de gagner le frère coupable ; si l’on ne peut pas, on ne doit plus agir de son chef et être juge de sa propre cause, mais avoir les faits constatés ainsi que la volonté perverse de l’individu par ceux qui n’ont aucun intérêt à faire prévaloir leur manière de voir ; puis l’assemblée intervient avec son autorité. Ici nous sommes entièrement sur un terrain nouveau. Il ne s’agit pas de la patience de Jéhovah en grâce avec Son peuple qui est sur la terre, mais de la conduite de ceux qui ont part aux nouveaux privilèges qui découlent de la nouvelle position prise par le Fils de l’homme. Mais des principes importants sont en évidence. L’autorité est placée dans l’assemblée, l’autorité de lier et de délier ; la vraie succession des apôtres est dans les deux ou trois réunis au nom de Jésus. Ce n’est pas en des successeurs individuels soit de Pierre, soit des autres apôtres, que l’autorité spirituelle sanctionnée du ciel se trouve, mais dans l’assemblée. Soit, que la sagesse d’un apôtre les dirige, s’il y en a ; c’est l’assemblée qui juge en dernier ressort, c’est l’assemblée qu’il faut écouter, l’autorité judiciaire se trouve là, le pouvoir de lier et de délier ; et la raison en est donnée, savoir que là où deux ou trois sont réunis au nom de Christ, Il s’y trouve. Le même principe s’applique aux demandes qu’on présente à Dieu. Là où deux ou trois s’accordent pour demander quelque chose, elle est accordée. Ce n’est pas la volonté individuelle ni un désir purement personnel ; les deux ou trois étant réunis au nom de Jésus, Jésus y est et la demande est le fruit d’un accord spirituel, et Dieu exauce la requête. La valeur de Christ et la pensée de l’Esprit s’y trouvent.

Cette position des deux ou trois, la relation dans laquelle la grâce les a placés en vertu du nom et de la présence de Jésus, est évidemment de toute importance. Le privilège qui a été donné à Pierre pour établir le royaume sur la terre échoit comme héritage aux deux ou trois vraiment réunis au nom de Jésus. Là et là seul se pose la sanction divine sur ce qui se fait sur la terre. Dieu peut approuver et diriger un individu sans doute, mais un individu n’a pas l’autorité conférée aux deux ou trois ainsi réunis. La promesse aussi faite à la prière de deux ou trois ainsi réunis au nom de Jésus d’accord sur les choses qu’ils veulent demander est infiniment précieuse. Ainsi placés les chrétiens disposent de la puissance de Dieu. C’est pour ces choses auxquelles l’Esprit de Dieu conduit leurs pensées d’un commun accord ; mais si une âme est sincère et ne cherche que la volonté de Dieu, être assuré de l’emploi de la puissance de Dieu dans ce but est une grande grâce. Et de quelle manière cela nous associe à l’activité divine en amour dans l’œuvre que cet amour veut faire sur la terre ! La manière dont cette grâce nous est assurée est également précieuse : Jésus Lui-même est présent là où deux ou trois sont réunis en Son nom. Quel encouragement ! Maintenant qu’Il est loin dans le ciel corporellement, Il est Lui-même présent spirituellement avec ceux qui se confient en Lui ici-bas. Mais quel immense privilège que de sentir que, jusqu’à ce que le Seigneur Jésus vienne nous prendre à Lui, nous pouvons compter sur Sa présence au milieu de nous en nous réunissant en Son nom ! Le reste du chapitre nous présente l’esprit dans lequel le chrétien doit agir à l’égard de celui qui l’aurait offensé. Il ne s’agit pas ici de la voie tracée plus haut s’il refusait de reconnaître son tort, mais de la disposition du chrétien à le lui pardonner quand même il le répéterait souvent. Le chrétien devrait toujours pardonner, ne jamais se lasser de montrer de la grâce envers celui qui l’aurait offensé ; car un homme pouvait reconnaître son tort et le répéter. Est-ce que cela devait continuer toujours et le chrétien être prêt à pardonner ? Oui, toujours agir en grâce. Dieu nous a pardonné bien davantage. En Luc 17 la repentance de celui qui a offensé son frère est nommée comme ayant lieu. Ici c’est le principe qui est posé que le pardon, cas échéant, doit être toujours accordé. C’est l’esprit chrétien qui est constaté. Je ne doute pas, bien que le principe soit universellement établi comme principe chrétien, qu’il soit fait allusion à ce qui est arrivé aux Juifs ; lesquels, Dieu leur ayant pardonné, quant à Ses voies avec la nation, le crucifiement de Son Fils, n’ont pas voulu la grâce envers les Gentils, et ont été placés par conséquent sous la discipline, sous la punition, jusqu’à ce qu’ils aient payé le dernier quadrant. Il ne s’agit pas d’expiation, ni de l’individu, mais de la nation et du gouvernement de Dieu.

Ensuite les pharisiens soulèvent la question du mariage, ce qui donne occasion au Seigneur de poser quelques principes, bases des relations de la nature et de la grâce chez le chrétien, et en même temps de faire ressortir le véritable état moral de l’homme selon la nature, puis les conséquences et le principe du dévouement selon la grâce. Ce que Dieu a ordonné au commencement est strictement maintenu. Dieu a créé l’homme mâle et femelle et a uni les deux pour n’être qu’une chair, et l’union est indissoluble selon Dieu. Le péché peut rompre le lien, mais le divorce est totalement défendu sous toute autre condition que le fait que le lien est déjà rompu ainsi. C’est Dieu qui l’a formé, l’homme n’a pas droit de le rompre. Mais alors une puissance est venue travailler dans l’homme en dehors et au-dessus de la nature, et peut le placer en dehors des relations naturelles ; peut le prendre et l’énergiser de sorte qu’il se tient à l’écart de ces relations pour le service du royaume. La relation est pleinement reconnue, sa sainteté, son indissolubilité ; mais Dieu a pris possession de l’homme pour qu’il soit à Lui. La création, c’est-à-dire, Dieu a fait le mariage, mais le Saint Esprit agissant en puissance s’approprie un homme. Il reconnaît le mariage et ne se marie pas pour l’amour du royaume de Dieu.

Ensuite nous avons la nature vue de son beau côté : les enfants et un jeune homme d’un charmant caractère. Dans l’évangile de Marc nous lisons : « Quand le Seigneur l’eut vu, Il l’aima » ; mais son cœur a dû être mis à l’épreuve. Les enfants, où la malice et la fausseté et l’esprit du monde n’étaient pas encore en jeu, fournissaient le modèle de ce qui convenait au royaume des cieux : la racine du mal sans doute était là ; mais c’était la création dans sa simplicité et sa confiance que le monde méprisait, non la volonté qui portât les fruits de la méchanceté et de la corruption. Ainsi leur caractère comme tels servait de modèle. La différence entre l’amabilité de la nature et l’état du cœur devant Dieu devait se montrer dans le cas du jeune homme. Irréprochable dans sa conduite, il cherchait le docteur qui semblait à sa conscience pouvoir donner la plus excellente direction pour bien faire. Il vient sur le pied qu’il y a de la bonté dans l’homme, et la bonté se manifestait à ses yeux davantage en Jésus qu’ailleurs. Il cherche Ses conseils pour gagner la vie éternelle par son faire. Il s’adresse au Seigneur comme à un homme, à un rabbi, mais attiré par ce qu’il avait vu en Lui. Il L’appelle bon. Le Seigneur l’arrête court. Il n’y a pas de bon sinon Dieu. Or, le jeune homme ne Le connaissait pas tel. Il n’avait pas demandé ce qu’il fallait faire pour être sauvé, mais pour avoir la vie éternelle. Le Seigneur rappelle les commandements, règle pour l’homme s’il veut vivre par la loi : « fais ces choses et tu vivras ». Mais le jeune homme ne se connaissait pas, ni ce que la loi de Dieu était dans sa sainteté. Il voulait faire pour gagner la vie éternelle. Le Seigneur ne parle pas de vie éternelle, mais prend le jeune homme sur le pied de la loi qui promettait la vie à ceux qui l’accomplissaient. Le jeune homme, irréprochable dans sa conduite comme Saul, ne connaissant pas la spiritualité de la loi, répond qu’il a observé la loi en tout ce dont le Sauveur parle. Qu’est-ce qui lui manquait encore ? S’il voulait être parfait, vendre ce qu’il avait et suivre Jésus. L’état de son âme est aussitôt manifesté. Le cœur de l’homme irréprochable dans ses mœurs était sous le joug de l’amour de ce qu’il possédait. Il quitte le Seigneur triste, son cœur mis en évidence dans la lumière. Pauvre humanité qui ne peut jamais la supporter. La nature, quelque aimable qu’elle puisse être dans son caractère, est moralement entièrement éloignée de Dieu. Voici un jeune homme aimable, cherchant à bien faire, manifestant ce qui est appelé les meilleures dispositions, et avec les moyens de faire beaucoup de bien, démontré, aussitôt que la lumière arrive, être sous la domination d’une idole, préférer à Celui qu’il connaissait être bon et où il avait cherché la direction comme de Celui qui pouvait le diriger le mieux, ses richesses et son aise. Son cœur était entièrement dans la possession du mal, d’une idole.

Le Seigneur avait déjà jugé l’homme en déclarant qu’il n’y avait pas de bon, sinon Dieu Lui-même, mais Il va plus loin. Les disciples étonnés d’un tel résultat et de ce que le Seigneur avait dit des richesses, lesquelles aux yeux d’un Juif étaient le signe de la faveur de Dieu et, en tout cas, fournissaient l’occasion de faire de bonnes œuvres, s’écrient : « Et qui donc peut être sauvé ? ». S’il n’y avait pas de bon, et si les bonnes dispositions avec les moyens de bien faire ne valaient rien, que ces moyens étaient plutôt un empêchement, qui pourrait échapper ? La réponse du Sauveur est catégorique. S’il s’agit de l’homme, personne. Quant à l’homme, c’est impossible, le bien n’y est pas, il est esclave du mal par sa volonté et par ses convoitises. Mais Dieu est au-dessus du mal ; Lui peut sauver. Il est évident que nous sommes sur un terrain tout nouveau, le terrain, non d’une loi qui éprouve, mais de la vérité même qui reconnaît ce qui est créé de Dieu, mais qui constate la totale ruine morale de l’homme. Dieu peut sauver, c’est la seule ressource. Voilà le fond de la vérité quant à l’homme naturel. Maintenant voyons ce qu’il en est de l’effet et du principe de la grâce là où elle avait agi et qu’on avait tout laissé et suivi le Seigneur.

Les apôtres avaient fait ce que le Seigneur avait engagé le jeune homme à faire — avaient tout quitté et suivi Jésus ; qu’est-ce, demandent-ils, qu’ils recevraient ? Le Seigneur répond en tournant leurs regards vers le royaume établi en gloire. Ils seraient sur des trônes jugeant les douze tribus d’Israël. Le Fils de David, Fils de l’homme assis sur le trône de Sa gloire, aurait Ses princes sur les douze tribus, jugeant celles-ci, assis eux aussi sur des trônes. Mais Il sera Fils de l’homme et aura ôté de Son royaume tout scandale et tous ceux qui commettent l’iniquité ; alors les princes domineront en justice (És. 32). Et pas seulement les apôtres, mais quiconque aurait quitté ce que la nature aime et que Dieu même reconnaît à sa place, et renoncerait à lui-même pour Christ en renonçant à ce qui lui était cher, aurait cent fois autant comme récompense et hériterait de la vie éternelle. Il ne s’agit pas de position spéciale en Israël comme dans le cas des douze compagnons de Christ lors de Son humiliation en Israël ; mais en tout temps, en tout lieu, celui qui aurait renoncé à la vie présente pour Son nom aurait cent fois plus et la vie éternelle. C’est le principe, car on a cent fois plus déjà ici-bas, puis la vie éternelle. Ici le Seigneur dit la vie éternelle ; au jeune homme Il a dit seulement : « tu entreras dans la vie ». Car la loi n’avait aucune promesse de la vie éternelle d’une manière formelle ; seulement, « fais ces choses et tu vivras ». La vie et 1’incorruptibilité ont été mises en évidence par l’évangile. Dieu l’avait promis avant les temps des siècles, mais Il a manifesté Sa Parole dans son propre temps par la prédication de l’apôtre (Tite 1, 2). Deux fois la vie éternelle est nommée dans l’Ancien Testament : Psaume 133, et Daniel 12, mais les deux passages se rapportent au millénium. Sans doute, par des faits et des passages, comme Énoch, Élie, psaume 16, il y avait ce qui donnait lieu à cette croyance, et les pharisiens l’avaient reçue et ils avaient raison ; les sadducéens n’avaient pas connu ni les Écritures ni la puissance de Dieu, mais le passage que cite le Sauveur montre avec quelle obscurité, à moins d’avoir l’œil spirituel, cette doctrine était révélée. Christ était la vie éternelle descendue du ciel (1 Jean 1), et avec Lui et spécialement après Sa mort elle a été pleinement mise en évidence. Ceci a déjà lieu ici ; on renonce aux biens de la vie d’ici-bas, à soi-même, on reçoit cent fois plus et hérite la vie éternelle. Quand Il dit hérite, Il tourne nos regards vers ce qui est proprement dit éternel. Je l’ai déjà dit, on peut avoir cent fois plus ici-bas, ainsi que le dit Marc, quoique avec persécution, mais l’héritage ne se borne sûrement pas à ce monde, et, bien qu’on la possède déjà ici-bas, la vie éternelle appartient à un autre et ne finit jamais. Le Seigneur le révèle ici clairement, mais en transportant nos pensées à des choses nouvelles, et en déclarant que ce renoncement à soi apporterait des avantages cent fois plus grands.

Il y avait danger, comme cela n’a pas manqué d’arriver, que l’homme songeât à une espèce de contrat avec Dieu : tant de travail et de sacrifice, et récompense proportionnelle. Misérable principe, mais ce dont l’homme est bien capable ! Le Seigneur ajoute donc qu’il y aurait des premiers qui seraient les derniers, et des derniers qui seraient les premiers ; et Il montre pour l’expliquer que tout en récompensant fidèlement dans Sa bonté tout sacrifice, Dieu est souverain en ce qu’Il donne, et, s’Il trouve bon, peut trouver l’occasion de donner à ceux qui selon la pensée de l’homme n’auraient pas travaillé autant, autant qu’à ceux qui voulaient gagner selon le travail. Le premier ouvrier a pour principe : tant de travail, tant de paie ; les autres s’en rapportent à la bienveillance du maître de la vigne. Vous recevrez ce qui est juste, et la grâce a fait au-delà de tout droit de travail. C’est là le grand principe de tout vrai service rendu au Seigneur. C’est le principe qui est en question, et la phrase finale se rapporte à ce qui est dit au commencement : ainsi les derniers seront les premiers et les premiers les derniers. L’inverse, toutefois, de ce qui est dit au commencement de la parabole où la parole se rapporte à la pensée de l’homme : Qu’est-ce que nous aurons, nous ? Cette phrase finale a la pensée de Dieu qui prend plaisir à bénir selon les richesses de Sa grâce et donne selon Sa bonté. Il en est toujours ainsi en tout cas. L’ouvrier recevra selon son travail, cela est arrivé au premier appelé ; Dieu donne selon Sa bonté et selon Sa grâce. Il est bon. Il n’y avait pas eu de refus à l’invitation chez les derniers ; Dieu les appelle quand le moment voulu est là.

Dans les dernières paroles par lesquelles Il termine la parabole, le Seigneur constate d’une manière formelle ce principe de la grâce. Il y a beaucoup d’appelés, mais peu d’élus. Ce principe est posé comme base de tout : car il y a, etc. Nous trouvons le même principe 22, 14, où il est aussi posé comme tel. Un seul homme en fournit l’exemple. Il y a une masse qui se réunit sous le drapeau du christianisme, se rendant à l’appel de Dieu, un petit nombre qui subissent l’influence de la Parole de Dieu et en sont les fruits. C’est cette grâce souveraine qui est la vraie source de toute bénédiction, et la seule. Ici le Seigneur, après avoir parlé de Son opération dans la parabole, la pose d’une manière abstraite comme base de tout.

Mais il y a quelques autres traits moraux qui s’y rapportent en connexion avec l’humiliation du Sauveur d’un haut intérêt (v. 17-28). Le Seigneur avertit Ses disciples en allant à Jérusalem qu’Il doit être condamné à mort par les autorités juives et livré aux Gentils, mais qu’Il ressuscitera le troisième jour.



  1. C’est la différence développée ailleurs entre Romains 1, 17 à 5, 11 et 5, 12 jusqu’à la fin de 8.