Études Scripturaires:L’année sabbatique et le Jubilé

De mipe
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Étude sur Lévitique 25C.F. Recordon 1851

The time of rest, the promised Sabbath comes ! (Cowper)

L’année sabbatique

Qui est-ce qui pourrait encore douter de la divinité des Écritures, s’il lisait sans prévention et avec simplicité de cœur un chapitre tel que celui-ci ? Quel autre que le Dieu créateur a pu parler de cette manière, a pu donner à un peuple de semblables ordonnances ? Imaginez le plus puissant des rois de la terre, Nebucadnetsar ou Alexandre, César-Auguste ou Charlemagne, prescrivant à ses sujets de laisser la terre en friche, chaque septième année ; d’interrompre alors tous les travaux de l’agriculture, et leur promettant néanmoins l’abondance… chacun n’aurait-il pas le droit de se récrier contre l’absurdité barbare d’une pareille loi ? Ne serait-ce pas décréter la disette en permanence ? exposer, quatre fois par génération d’hommes, tout un peuple à mourir de faim ?

Ah ! non, Dieu seul, le Créateur de toutes choses, Celui qui ouvre Sa main et rassasie toute créature, a pu dire : « Pendant six ans tu sèmeras ton champ, et pendant six ans tu tailleras ta vigne, et en recueilleras le rapport. Mais la septième année, il y aura un sabbat de repos pour la terre ; ce sera un sabbat à l’Éternel ; tu ne sèmeras point ton champ et ne tailleras point ta vigne. Tu ne moissonneras point ce qui sera provenu de soi-même, de ce qui sera tombé en moissonnant, et tu ne vendangeras point les raisins de ta vigne non taillée[2] ; ce sera l’année du repos de la terre ».

En effet, Dieu seul peut résoudre les doutes, calmer les inquiétudes, dissiper les angoisses de ceux qui reculent devant une telle ordonnance et qui disent : « Que mangerons-nous en la septième année, si nous ne semons point et si nous ne recueillons point notre récolte ? ». Dieu seul peut leur répondre : « Je commanderai à ma bénédiction de se répandre sur vous en la sixième année, et la terre rapportera pour trois ans… et vous mangerez du rapport du passé jusqu’à la neuvième année ».

Dieu seul peut dresser la table à Son peuple dans le désert ; Il l’a fait pendant quarante ans, dans le grand désert, en envoyant chaque matin du ciel la manne pour nourrir Israël ; Il l’a fait encore en rassasiant, par deux fois, dans un lieu désert, des milliers de personnes avec quelques pains d’orge et quelques petits poissons ; Il le fera encore une fois en nourrissant, dans le désert, la femme pendant mille deux cent soixante jours (Apoc. 12, 6).

Sans doute Il a ordonné et infligé le travail à l’homme, comme une des conséquences du péché ; Il lui a dit : « Tu mangeras le pain à la sueur de ton visage ». Mais Dieu qui peut, quand il Lui plaît, suspendre les lois de la nature, peut aussi, quand Il le veut, suspendre une loi telle que celle dont nous parlons.

Quoique la sagesse et la bonté de Dieu aient lié, pour l’homme, le droit de manger au travail (2 Thess. 3, 10), il n’en est pas moins certain que ce n’est pas le travail de l’homme qui lui procure son pain. L’homme aurait beau labourer la terre, semer, planter, arroser, si le Créateur n’envoyait pas les pluies, les rosées et les saisons fertiles ; s’Il ne donnait pas l’accroissement, tout le labeur de l’homme serait complètement inutile. Il est donc tout aussi certain, d’un autre côté, qu’ici comme à tout autre égard, Dieu, quand Il le veut, peut se passer du travail de l’homme. Il n’a nul besoin du concours de la créature pour la nourrir ; et c’était là, nous le pensons, une première leçon que l’Éternel voulait donner à Son peuple en lui prescrivant l’année du repos de la terre.

Par là même, les enfants d’Israël devaient apprendre à se confier en Dieu, à vivre dans Sa dépendance, à s’attendre à Sa fidélité, à s’assurer, pour toute chose, en Ses promesses, en Sa puissance, et non pas en leurs propres forces. Quel admirable spectacle devait présenter ce peuple, tant qu’il eut assez de foi pour obéir à cette loi de son Dieu (et il en faut souvent plus pour attendre la délivrance sans rien faire que pour agir) ! Comme sa foi était récompensée ! Qu’il était beau de voir la promesse de Dieu se réaliser chaque sixième année, de telle sorte qu’alors la terre rapportait pour trois ans : pour cette sixième elle-même, pour la septième où l’on ne semait ni ne recueillait, pour la huitième où l’on ne moissonnait pas, mais où l’on recommençait à semer pour récolter seulement en la neuvième année ! Qu’il était beau de voir tout un peuple, ayant assez de confiance en son Dieu pour laisser ainsi le sol sans culture, et se trouvant néanmoins abondamment nourri ! Oh ! que la foi est admirable ; qu’il est doux de la voir en activité ; comme elle glorifie le Seigneur !

Et puis Canaan était tout spécialement la terre de Jéhovah, le pays d’Emmanuel. Les Israélites étaient comme Ses fermiers. Il voulait leur montrer qu’Il avait tout droit sur cette terre, en leur rappelant que Lui seul en était le propriétaire et le maître. « La terre est à moi, et vous êtes étrangers et forains chez moi »[3].

Si Canaan était la terre de Dieu, Israël était le peuple de Dieu ; issu d’une seule et même souche, d’un même père qui avait été l’ami du Seigneur et en considération duquel les Hébreux étaient et sont encore aimés. Les enfants d’Abraham étaient donc, dans l’intention de Dieu, une grande, une seule famille ; ils devaient s’envisager et se traiter comme des frères. Plusieurs de leurs institutions tendaient à leur rappeler ce fait et à leur faire revêtir des affections de fraternité les uns pour les autres : tel était évidemment, sinon le but essentiel et premier, du moins l’un des buts de leurs fêtes solennelles, comme la Pâque, par exemple ; tel était aussi l’un des buts de l’ordonnance de l’année sabbatique. Alors la terre de Dieu ou ses produits appartenait également à tous les habitants du pays. Nul ne pouvait moissonner son champ, ni vendanger sa vigne ; mais leur provenance servait d’aliment à chacun, aux Israélites, aux étrangers demeurant avec eux, à leurs bêtes et aux animaux du pays ; tout le rapport du sabbat de la terre était pour manger immédiatement. Ainsi, chaque septième année, on voyait un grand peuple réaliser sans difficulté ce qui fait depuis si longtemps, ce qui fait surtout de nos jours l’objet des rêves chimériques de tant de pauvres mondains. La communauté des biens ne peut s’établir que dans la famille de Dieu. Pour cela, il faut, comme ici, que Dieu la commande et la dirige ; ou bien que, comme en Actes 4, 32-37, une grande grâce soit accordée à ceux qui la mettent en pratique. Au reste elle existe de fait (d’une manière même plus bénie, en tant qu’elle n’exclut pas l’exercice de la foi de la part des pauvres) chez tout enfant de Dieu pour qui la vocation céleste de l’Église est une vérité d’expérience et l’attente du Seigneur Jésus l’objet de désirs journaliers. Lorsque nous savons que nous avons dans les cieux des biens meilleurs et permanents, et que, dans très peu de temps, Celui qui vient arrivera, nous pouvons accepter avec joie l’enlèvement de nos biens terrestres, à plus forte raison la communication de ces biens dont nous ne sommes que les administrateurs.

Enfin et surtout, cette institution se rattachait à toutes les ordonnances sabbatiques qu’elle complétait. Elle faisait partie de ces sabbats, dont Dieu disait, dans les reproches qu’Il adressait aux enfants d’Israël : « Je leur donnai aussi mes sabbats, pour être un signe entre moi et eux, afin qu’ils connussent que je suis l’Éternel qui les sanctifie » (Éz. 20, 12). En effet, il y avait plusieurs sabbats. Chaque septième jour ramenait le repos des pères, des enfants, des maîtres, des serviteurs, des étrangers et du bétail. Dès le lendemain du sabbat qui suivait la Pâque, on comptait sept semaines ou sept sabbats, au bout desquels on célébrait la fête des semaines ou la Pentecôte. Le septième mois était tout particulièrement le mois des sabbats et des fêtes. Au premier jour, il y avait repos et mémorial de jubilation, c’était la fête des trompettes ; le dixième jour était le grand jour des propitiations, c’était un sabbat bien solennel ; au quinzième jour commençait la fêtes des Tabernacles qui durait huit jours, dont le premier et le huitième étaient aussi des jours de repos. Plus qu’aucune autre cette dernière fête préfigurait le repos final du peuple de Dieu. — Après ces sabbats de jours et de mois, venait le sabbat d’années, où Dieu prescrivait le repos de la terre. Ce n’est pas ici le lieu de développer le sujet du sabbat ; nous nous bornons à rappeler qu’il renfermait l’idée, si précieuse pour nous aussi, de la participation au repos de Dieu. Pour Israël, il était un signe de l’alliance de Dieu ; en effet il était les arrhes de cette promesse : « Ma face ira, et je te donnerai du repos ». Rappelons encore que, toutes les fois que Dieu donne quelque nouveau principe ou quelque nouvelle forme de relation entre Lui et Son peuple terrestre, le sabbat est ajouté[4].

Recherchons maintenant, dans la Parole, quels étaient les détails de l’ordonnance relative à l’année sabbatique, nommée aussi l’année de relâche. Il en est fait mention, pour la première fois, en Exode 23, 10, 11, où nous voyons, clairement exprimé, l’un des buts que nous avons indiqués : « afin que les pauvres de ton peuple en mangent ». Dans Deutéronome 15, 1-15, il est encore parlé de l’année de relâche : « C’est ici la manière de la célébrer : que tout homme ayant droit d’exiger quelque chose que ce soit, qu’il puisse exiger de son prochain, donnera relâche et ne l’exigera point de son prochain ni de son frère, quand on aura proclamé le relâche en l’honneur de l’Éternel… Prends garde à toi, que tu n’aies dans ton cœur quelque méchante intention[5], et que tu ne dises : La septième année, qui est l’année de relâche, approche, et que ton œil étant malin contre ton frère pauvre, afin de ne lui rien donner, il ne crie à l’Éternel contre toi, et qu’il n’y ait du péché en toi. Tu ne manqueras point de lui donner, et ton cœur ne lui donnera point à regret ; car à cause de cela l’Éternel ton Dieu te bénira dans toute ton œuvre, et dans tout ce à quoi tu mettras la main ».

L’année sabbatique apportait donc encore ce bienfait signalé aux pauvres d’Israël. Elle était pour eux comme la quittance de toutes leurs dettes et mettait fin à toutes les exactions, dont ils pouvaient être les objets de la part de leurs frères.

Après quoi, nous avons, dans le même chapitre, l’affranchissement des esclaves, qui était aussi l’un des bénéfices de l’ordonnance du Jubilé : « Quand quelqu’un d’entre tes frères, soit hébreu soit hébreue, te sera vendu, il te servira six ans ; mais en la septième année tu le renverras libre de chez toi (cf. Exode 21, 2). Et quand tu le renverras libre de chez toi, tu ne le renverras point vide. Tu ne manqueras pas de le charger de quelque chose de ton troupeau, de ton aire et de ta cuve ; tu lui donneras de ce en quoi l’Éternel ton Dieu t’aura béni ». Les esclaves étaient donc renvoyés libres et avec un présent.

Enfin nous voyons, en Deutéronome 31, 10 et suivants, un acte important, qui devait se renouveler chaque septième année : « De sept ans en sept ans, au temps précis de l’année de relâche, en la fête des tabernacles, quand tout Israël sera venu pour comparaître devant la face de l’Éternel ton Dieu, au lieu qu’il aura choisi, tu liras alors cette loi devant tout Israël, eux l’entendant ». C’est probablement pour se conformer à cette ordonnance que Josué, Josias et Esdras lurent ou firent lire le livre de la loi à tout le peuple rassemblé.

Telle était en résumé l’institution de l’année sabbatique, à l’observation de laquelle, comme nous venons de le voir, de précieuses bénédictions étaient liées. — Le peuple de col roide ne tint pas grand compte, du moins pas longtemps, de ces bénédictions ; il ne tarda pas à transgresser cette ordonnance, comme les autres ordonnances de son Dieu ; il méprisa et profana bientôt les sabbats de Jéhovah, ceux d’années aussi bien que ceux de jours ; et ainsi il attira les jugements de Dieu. Il est hors de doute que le mépris du repos de la septième année fut une des iniquités des Juifs, qui amenèrent les soixante-et-dix ans de captivité à Babylone. — C’était là un accomplissement de cette menace de l’Éternel à Son peuple sous la loi : « Si vous ne m’écoutez point, et que vous ne fassiez pas tous ces commandements, et que vous rejetiez mes ordonnances… je vous disperserai parmi les nations, et je tirerai l’épée après vous, et votre pays sera en désolation et vos villes en désert. Alors la terre prendra plaisir à ses sabbats tout le temps qu’elle sera désolée ; et, lorsque vous serez au pays de vos ennemis, la terre se reposera, et prendra plaisir à ses sabbats. Tout le temps qu’elle demeurera désolée, elle se reposera, au lieu qu’elle ne s’était point reposée en vos sabbats lorsque vous y habitiez » (Lév. 26, 14, 15, 33-35). — Le second livre des Chroniques nous montre cette menace réalisée, quand il est dit au chapitre 36, 20, 21 : « Nebucadnetsar transporta à Babylone tous ceux qui étaient échappés de l’épée, et ils lui furent esclaves à lui et à ses fils, jusqu’au temps de la monarchie des Perses ; afin que la parole de l’Éternel, prononcée par Jérémie, fût accomplie, jusqu’à ce que la terre eût pris plaisir à ses sabbats, et durant tous les jours qu’elle demeura désolée, elle se reposa, pour accomplir les soixante-dix années ».

Voyez encore ce que Dieu dit au peuple, par la bouche de Jérémie (Jér. 34, 8-17), sur la non-observation d’une des ordonnances qui, comme nous l’avons vu, faisait partie de l’institution sabbatique : « Ainsi a dit l’Éternel, le Dieu d’Israël : Je traitai alliance avec vos pères, le jour que je les tirai hors du pays d’Égypte, de la maison de servitude, en disant : Dans la septième année vous renverrez chacun votre frère hébreu, qui vous aura été vendu ; il te servira six ans, puis tu le renverras libre d’avec toi ; mais vos pères ne m’ont point écouté, et n’ont point incliné leur oreille. Et vous vous étiez convertis aujourd’hui ; et vous aviez fait ce qui était juste devant moi, en publiant la liberté chacun à son prochain… Mais vous avez changé d’avis, et avez souillé mon nom ; car vous avez fait revenir chacun son serviteur, et chacun sa servante, que vous aviez renvoyés libres pour être à eux-mêmes, et vous les avez assujettis, afin qu’ils vous soient serviteurs et servantes. C’est pourquoi ainsi a dit l’Éternel : Vous ne m’avez point écouté pour publier la liberté chacun à son frère, et chacun à son prochain ; voici, je vais publier, dit l’Éternel, la liberté contre vous à l’épée, à la peste et à la famine ; et je vous livrerai pour être transportés par tous les royaumes de la terre ».

La captivité de Babylone eut quelques résultats extérieurs qu’il ne faut pas méconnaître : elle inspira aux Juifs l’horreur des dieux étrangers, auxquels leurs pères avaient si souvent sacrifié. C’est ce que veut dire le Seigneur Jésus dans la parabole de l’esprit impur qui est sorti d’un homme. L’homme figurait évidemment « la génération méchante » au milieu de laquelle Jésus vivait. Or quand le démon retourne dans la maison d’où il est sorti, il la trouve vide et balayée des souillures de l’idolâtrie (Matt. 12, 43-45).

À en juger par un fait que rapporte l’historien juif Josèphe, il paraît que le peuple de Juda, de retour de la captivité, serait aussi revenu à la fidèle observation de l’ordonnance relative à l’année sabbatique. Voilà ce fait : Le conquérant Alexandre le Grand, étant entré en ami à Jérusalem, demanda au souverain sacrificateur Jaddua, auquel il témoignait le plus grand respect, quelles faveurs les Juifs désiraient recevoir de lui. Jaddua répondit qu’ils le suppliaient de leur permettre de vivre selon les lois de leurs pères, et de les exempter, en la septième année, du tribut qu’ils lui payeraient durant les autres. Alexandre le lui accorda[6] ; et rien n’était plus juste. Les Juifs ne faisant aucune récolte cette année-là, il n’aurait pas été raisonnable d’exiger d’eux les contributions ordinaires.


L’année du Jubilé

« Tu compteras aussi sept semaines d’années, sept fois sept ans, et les jours de ces sept semaines feront quarante-neuf ans. Puis tu feras sonner la trompette de jubilation le dixième jour du septième mois ; le jour des propitiations, vous ferez sonner la trompette par tout votre pays ; et vous sanctifierez l’an cinquantième, et publierez la liberté dans le pays à tous ses habitants ; ce vous sera l’année du Jubilé, et vous retournerez chacun en sa possession et chacun en sa famille. Cette cinquantième année vous sera un Jubilé ; vous ne sèmerez point et ne moissonnerez point ce que la terre rapportera d’elle-même, et vous ne vendangerez point les fruits de la vigne non taillée ; car c’est un Jubilé ; elle vous sera sainte ; vous mangerez de ce que les champs rapporteront cette année-là ».

Telle est l’autre institution mentionnée dans ce précieux chapitre et dont nous désirons surtout nous occuper, en demandant à notre Dieu de nous assister par Son Esprit de lumière et de vérité dans l’étude de cette portion trop négligée de Sa sainte Parole.

Disons d’abord quelques mots sur le nom de Jubilé, donné par l’Éternel à cette cinquantième année. Il vient du mot hébreu Jobel, employé treize fois dans notre chapitre pour la désigner. On le trouve encore six fois, avec la même acception, au chapitre 27 et une fois en Nombres 36, 4. — Il ne se trouve ailleurs qu’en Exode 19, 13, où Martin le traduit par le cor, et en Josué 6, 4, 5, 6, 8, 13, où nous lisons : cors de bélier. Mais dans ces derniers passages de Josué, la plupart des traductions allemandes, d’accord avec les Septante et la Vulgate, disent : les sept trompettes du Jubilé. De Wette et van Ess traduisent de même cette expression en Exode 19, 13.

Les avis sont partagés sur l’étymologie de ce mot : les uns lui donnent le sens d’un son longuement prolongé, par opposition à un son saccadé et interrompu ; d’autres le font dériver d’un mot arabe qui voudrait dire un bélier, de là cor de bélier ou fait avec une corne de bélier ; d’autres encore de Jubal, l’inventeur des instruments de musique. Il nous semble plus probable, tout en conservant l’idée d’un son de trompette, qu’il vient d’un verbe, qui signifie restaurer ou ramener, parce que, au jour où commençait le Jubilé, la trompette d’argent proclamait le relâche, l’affranchissement, la restauration par tout Israël[7].

Notre mot jubilation qui signifie réjouissance, et le latin jubilatio : acclamations, cris de joie, viennent de l’hébreu Jobel, et sont en rapport avec les sentiments que réveillait la trompette du Jubilé dans les âmes angoissées, dans les cœurs brisés du nombreux troupeau des désolés en Israël.

Le Jubilé ne commençait pas avec l’année sacrée, avec le mois où les épis mûrissent, dont Dieu avait dit à Moïse : « Ce mois-ci vous sera le commencement des mois ; il vous sera le premier des mois de l’année », c’est-à-dire de l’année sacrée, en rapport avec les diverses fêtes de l’Éternel.

Le Jubilé commençait au septième mois, le premier de l’année civile ; il ramenait donc cette année civile, remplacée depuis l’Exode par l’année sacrée. Ainsi, comprenant la dernière moitié de la quarante-neuvième année et la première moitié de la cinquantième, il ne nécessitait pas deux ans successifs de repos de la terre. Sans doute durant son cours (v. 11 et 12), le peuple ne semait point la terre, parce que les semailles auraient dû se faire au neuvième mois de l’année sabbatique ; on ne moissonnait ni ne vendangeait, parce qu’on n’avait ni semé les champs, ni taillé la vigne l’année précédente ; mais le Jubilé finissant au septième mois de l’année sacrée, on pouvait en cette même année recommencer les travaux de l’agriculture, et ainsi cet ordre de Dieu avait son cours sans interruption : « Pendant six ans tu sèmeras ton champ, et pendant six ans tu tailleras ta vigne, et en recueilleras le rapport ».

Mais, de plus, le jour de l’ouverture du Jubilé est clairement indiqué au verset 9 ; c’est le dixième jour du septième mois, le grand jour des expiations, l’un des plus solennels de l’année, ce jour où tout Israélite, sous peine d’être retranché, devait affliger son âme devant Dieu ; ce jour du deuil, de l’humiliation, des larmes de tout le peuple avait été choisi par l’Éternel, comme le premier jour de l’année de la liberté, de la grâce et de l’allégresse.

Ah ! c’est que les actes du souverain sacrificateur dans le jour des expiations mettent sous nos yeux, de la manière la plus frappante, l’œuvre parfaite de Jésus pour Son peuple, seule source de tout pardon, de toute grâce, de tout affranchissement, et par conséquent de toute joie vraiment digne de ce nom.

Le chapitre 16 du Lévitique est tout entier consacré à décrire ce qui se faisait par Aaron en ce jour solennel ; il agissait tour à tour pour lui-même et pour sa maison (type de l’Église), et pour toute l’assemblée des enfants d’Israël (type du peuple terrestre). Il revêtait les saints vêtements de lin (type de la nature humaine parfaitement sainte de Christ) ; il offrait un veau pour le péché, faisant propitiation pour soi et pour sa maison ; il jetait ensuite le sort sur deux boucs et présentait celui qui avait été désigné pour l’Éternel ; il entrait dans le lieu très saint, au-delà du voile, avec du parfum qu’il faisait fumer devant l’Éternel ; puis il faisait par sept fois aspersion du sang du veau sur et devant le propitiatoire. Après quoi, il égorgeait le bouc du peuple pour le péché ; il en portait le sang au-dedans du voile, et en faisait aspersion comme il avait fait du sang du veau. Il faisait expiation pour le sanctuaire, pour le tabernacle et pour l’autel d’or et les nettoyait des souillures des enfants d’Israël. Les péchés de toute la congrégation étaient confessés sur la tête du bouc vivant, lequel était envoyé au désert, emportant sur lui toutes leurs iniquités dans une terre inhabitable. Puis Aaron changeait de vêtements, et s’étant revêtu de ses vêtements (Ex. 28, 2), dans le sanctuaire, il en sortait et offrait son holocauste et l’holocauste du peuple, et faisait fumer sur l’autel la graisse de l’offrande pour le péché. Celui qui avait conduit le bouc pour azazel se lavait et rentrait au camp. Les victimes pour le péché, dont le sang avait été porté dans le sanctuaire, étaient brûlées hors du camp. C’était là un sabbat de repos et d’affliction qu’on devait célébrer chaque année ; une ordonnance perpétuelle.

Chaque fois que revenait cette grande journée, rien ne pouvait égaler la tristesse, l’humiliation, le deuil et la douleur, avec laquelle Israël la voyait commencer, si ce n’est la joie et les transports d’allégresse avec lesquels le même Israël la terminait. Chacun s’en retournait en paix dans sa demeure, emportant la précieuse assurance que la propitiation pour tous ses péchés était accomplie selon la loi. Tant que le souverain sacrificateur était encore dans le sanctuaire, tant qu’il lui restait quelque chose à faire, toute la congrégation, qui se tenait au-dehors, était dans l’appréhension, dans les larmes, dans le sentiment des transgressions qui pesaient encore sur la conscience des adorateurs. Mais quand, revêtu des vêtements de gloire et d’honneur, le sacrificateur oint sortait du tabernacle, quand, élevant ses mains, il mettait le nom de Jéhovah sur les enfants d’Israël, en les bénissant selon l’ordre de Dieu ; quand il avait prononcé ces paroles : « L’Éternel te bénisse et te garde. L’Éternel fasse luire sa face sur toi et te fasse grâce. L’Éternel tourne sa face vers toi, et te donne la paix » (Nomb. 6, 22-27) ! Alors on n’entendait plus, du milieu de cette immense multitude, que des acclamations de réjouissance, qu’un chant de triomphe royal.

Mais s’il en était ainsi à chaque retour ordinaire de cette fête de l’Éternel, combien la joie du peuple ne devait-elle pas être plus grande et plus vive encore, alors que le jour des expiations ramenait l’année du Jubilé. Après quarante-neuf de ces solennités, après sept années de relâche et de sabbat de la terre, au moment où la fête du dixième jour du septième mois touchait à son terme, lorsque la congrégation du peuple était congédiée par la bénédiction du souverain sacrificateur, alors les sacrificateurs embouchaient les trompettes d’argent (Nomb. 10, 8), dont le joyeux son proclamait le commencement de l’année de la bienveillance du Seigneur et publiait la liberté dans le pays à tous ses habitants.

Avant d’aller plus loin, arrêtons-nous encore un peu sur la précieuse instruction que Dieu nous donne par cet admirable rapprochement de la grande journée des expiations, immédiatement suivie de l’année de la plus vive allégresse.

L’épître aux Hébreux nous montre, en divers endroits, Jésus comme la grande réalité des institutions lévitiques, comme le corps qui projetait son ombre sur les rudiments du monde. Elle nous Le montre, en particulier, réalisant d’une manière parfaite tous les actes du souverain sacrificateur juif dans le jour des propitiations, qui, comme toute la parole prophétique, rendaient d’avance témoignage des souffrances du Christ et des gloires qui les suivraient. — S’Il a été proclamé de Dieu souverain Sacrificateur selon l’ordre de Melchisédec (5, 10), Il n’est pourtant point encore entré dans l’exercice de ce glorieux sacerdoce ; jusqu’ici, c’est le type de celui d’Aaron qu’Il a accompli et qu’Il accomplit encore. Ainsi Jésus a dû en toutes choses être rendu semblable à Ses frères, afin qu’il fût un miséricordieux et fidèle souverain Sacrificateur dans les choses qui regardent Dieu, afin de faire la propitiation pour les péchés du peuple (2, 17). Il nous convenait d’avoir un tel souverain Sacrificateur, saint, sans méchanceté, sans souillures, séparé des pécheurs et élevé plus haut que les cieux, qui n’a pas chaque jour besoin, comme les souverains sacrificateurs, d’offrir des victimes, premièrement pour ses propres péchés, ensuite pour ceux du peuple, vu qu’Il l’a fait une seule fois, s’étant offert Lui-même (7, 26, 27). Ces choses étant ainsi disposées (dans le lieu saint et dans le lieu très saint), les sacrificateurs qui accomplissent le culte entrent bien continuellement dans la première tente (le lieu saint) ; mais, dans la seconde (le lieu très saint), entre, une fois l’année, le souverain sacrificateur seul, non sans du sang qu’il offre pour lui-même et pour les erreurs du peuple… Mais Christ s’étant avancé, souverain Sacrificateur des biens à venir, à travers la tente plus grande et plus parfaite qui n’est pas faite par des mains, c’est-à-dire qui n’est pas de cette création, est entré une seule fois dans le sanctuaire, non au moyen du sang des boucs et des veaux, mais au moyen de Son propre sang, ayant trouvé un rachat éternel (9, 6, 7, 11, 12). Car ce n’est pas dans un sanctuaire fait par des mains, image correspondante au véritable, que le Christ est entré, mais dans le ciel même, afin de paraître maintenant devant la face de Dieu pour nous (9, 24).

Les sacrifices offerts par Aaron, dans le jour des expiations, son entrée dans le saint des saints avec de l’encens et du sang, son intervention devant le propitiatoire en faveur du peuple : voilà ce que Jésus a pleinement réalisé. À quoi nous pouvons ajouter que, comme Aaron devait après ces choses échanger ses vêtements de lin contre les magnifiques vêtements qui lui étaient affectés pour gloire et pour ornement, notre céleste Aaron a de même revêtu un corps glorifié ; et maintenant nous Le voyons couronné de gloire et d’honneur (Héb. 2, 9[8]).

Il ne reste donc à accomplir que le dernier acte d’Aaron dans le jour des expiations, c’est-à-dire qu’il faut encore que notre grand souverain Sacrificateur sorte glorieux du sanctuaire pour bénir le peuple ; il faut que le Christ, qui a été offert une seule fois pour porter sur Lui les péchés d’un grand nombre, soit vu une seconde fois sans péché, par ceux qui L’attendent pour le salut (Héb. 9, 28). Jusque-là l’antitype du Jubilé ne peut réellement pas être introduit.

Cependant l’Église, étant vivifiée avec Christ, étant ressuscitée ensemble, et assise ensemble dans les lieux célestes dans le Christ Jésus, participe déjà, par anticipation, d’une manière spirituelle, à toutes les bénédictions apportées par l’année du Jubilé. — Quelles étaient ces bénédictions ? On peut les résumer aux suivantes : 1° remise des dettes ; 2° affranchissement des esclaves ; 3° recouvrement des propriétés aliénées et rétablissement de toutes choses ; 4° provisions abondantes pour les pauvres, et repos de la terre et de l’homme durant toute l’année.

Nous lisons dans Luc 4 que Jésus, étant entré un jour de sabbat dans la synagogue de Nazareth, se leva pour lire. Alors on lui donna le livre d’Ésaïe le prophète ; et l’ayant déployé, il trouva l’endroit où il est écrit : « L’Esprit du Seigneur est sur moi, c’est pourquoi il m’a oint pour annoncer la bonne nouvelle à des pauvres ; il m’a envoyé pour guérir ceux qui ont le cœur brisé ; pour publier aux captifs la liberté, et aux aveugles le recouvrement de la vue ; pour mettre en liberté ceux qui sont écrasés ; pour publier l’année agréée du Seigneur » (És. 61, 1, 2). Puis ayant plié le livre, et l’ayant rendu au serviteur, il s’assit, et les yeux de tous, dans la congrégation, étaient arrêtés sur Lui. Alors Il se mit à leur dire : Aujourd’hui cette écriture est accomplie à vos oreilles. — On est généralement d’accord pour penser que cette « année agréée du Seigneur » était une allusion à l’année du Jubilé, au sujet de laquelle Dieu disait aussi : « Vous publierez la liberté[9] dans le pays à tous ses habitants ». Or comment, si le Jubilé, comme type, n’a pas reçu son accomplissement, comment Jésus a-t-Il pu dire : « Aujourd’hui cette écriture est accomplie à vos oreilles » ? La chose ne nous semble pas difficile à expliquer : Le fait seul que Jésus Lui-même, l’Oint de Dieu, lisait ces paroles que l’Esprit prophétique avait placées d’avance dans Sa bouche, ce fait, si l’on y fait attention, était un accomplissement de ces paroles. Jésus avait en effet l’Esprit du Seigneur ; Il avait en effet été oint pour évangéliser aux pauvres ; Il avait en effet été envoyé pour guérir ceux qui avaient le cœur brisé ; pour publier aux captifs la liberté etc. De Son côté et du côté du Père, tout était prêt pour l’accomplissement. D’où vient donc que la réalisation du Jubilé, de cette année agréée du Seigneur que Jésus publiait, a été ajournée et renvoyée aux derniers temps ? Ah ! c’est l’endurcissement des Juifs qui en a été la cause. — En vain le Roi les a conviés, en vain il leur a fait dire : « Toutes choses sont préparées, venez aux noces » ; eux, n’en tenant aucun compte, s’en sont allés, l’un à sa métairie et l’autre à son trafic. Quand à Israël, le Seigneur a dû dire : « Tout le jour, j’ai étendu mes mains vers un peuple rebelle et contredisant ». — Jésus a dû dire, comme cela était annoncé dans le même Ésaïe (chap. 49) : « J’ai travaillé en vain ; j’ai usé ma force pour néant et sans fruit… L’Éternel m’a dit que je lui ramène Jacob, mais Israël ne se rassemble point… ». « Jérusalem, Jérusalem ! combien de fois j’ai voulu rassembler tes enfants, comme une poule sa couvée sous ses ailes, et vous ne l’avez pas voulu ? ».

Jean-Baptiste, le précurseur qui devait préparer les voies du Seigneur, prêche dans les déserts de Judée, en disant : « Convertissez-vous, car le royaume des cieux s’est approché ». Il avait pour mission d’engager le peuple à revêtir les sentiments de vrais enfants d’Israël dans le jour des expiations, à affliger leurs âmes devant Dieu, pour être disposés à recevoir le Messie qui eût, dans ce cas, établi le royaume des cieux ou le vrai Jubilé. De grandes foules sortirent vers lui, et ils étaient baptisés par lui dans le Jourdain, confessant leurs péchés, tout comme ces péchés étaient confessés sur la tête du bouc azazel par le souverain sacrificateur. Jésus Lui-même commence par prêcher, comme Jean, la repentance et la conversion, parce que le royaume de Dieu était proche (Matt. 4, 17). C’est que, dans tous les cas, le Jubilé ne pouvait commencer qu’après la fête des propitiations. — Malgré tant de belles apparences dans l’origine, malgré l’empressement avec lequel on venait à Jean, Jésus a dû dire : « Qui a cru à notre prédication ? ». Cette piété des Juifs n’était que comme la rosée du matin qui se dissipe bientôt ; elle se montre encore un moment quand les multitudes accueillirent par des hommages le Roi débonnaire, monté sur le poulain d’une ânesse, et crièrent : « Hosanna ! Béni soit Celui qui vient au nom du Seigneur ! » mais quelques jours plus tard, ces mêmes Juifs, n’écoutant plus que la voix de leurs chefs, criaient plus fort encore : « Ôte, ôte ! Crucifie, crucifie ! » et au lieu de s’identifier par la foi avec la parfaite acceptation de l’Agneau sans défaut et sans tache qui allait être immolé, au lieu de se placer sous l’aspersion du sang précieux qui allait être répandu, ils ne craignent pas d’appeler ce sang en condamnation sur eux et sur leurs enfants.

Néanmoins, Jésus ayant prié pour Ses meurtriers, Jésus ayant dit sur la croix : « Père, pardonne-leur, car ils ne savent ce qu’ils font » ; en réponse à cette prière, Dieu appelle encore une fois en grâce ce malheureux peuple. — Alors le grand souverain Sacrificateur a achevé son œuvre de propitiation : Il s’est offert Lui-même en sacrifice ; Il est ressuscité ; Il est monté au ciel ; Il est entré dans le véritable sanctuaire ; Il a envoyé le Saint Esprit aux disciples.

Et dans ces mots qu’Il adresse aux apôtres, avant de monter au ciel, il y a encore une allusion au type du jour des expiations et du Jubilé : « C’est ainsi qu’il est écrit, et c’est ainsi qu’il fallait que le Christ souffrît, et qu’il se relevât d’entre les morts, le troisième jour, et qu’on prêchât en son nom la conversion et le pardon des péchés parmi toutes les nations, en commençant par Jérusalem » (Luc 24, 46, 47).

Aussi les douze parlent, avec hardiesse, des grandes choses de Dieu aux foules qui les entourent, et Pierre leur dit : « Que toute la maison d’Israël sache donc avec certitude, que Dieu l’a fait Seigneur et Christ, ce Jésus que vous avez crucifié » (Act. 2, 36). Plus tard le même apôtre, s’appuyant sur la prière de Jésus en croix, leur dit encore : « Je sais que vous avez agi par ignorance », et il leur offre, au nom du Christ mort et ressuscité, le pardon que le Christ avait demandé pour eux : « Convertissez-vous donc, ajoute-t-il, et retournez à Dieu, pour que vos péchés soient effacés ; en sorte que viennent les temps de rafraîchissement par la présence du Seigneur, et qu’il envoie Jésus Christ qui vous a été prêché d’avance, et que le ciel doit contenir jusqu’aux temps du rétablissement de toutes les choses, dont Dieu a parlé de tout temps par la bouche de tous ses saints prophètes » (Act. 3, 17, 19-21).

Qu’est-ce que c’était que cette prédication, sinon une dernière sommation adressée à Israël de réaliser, par la repentance et la conversion, la part qu’il devait prendre dans la fête des expiations, et l’assurance que, dans ce cas, le grand Sacrificateur, qui, Lui, avait parfaitement accompli Son œuvre, reviendrait comme Roi de gloire, apportant à Son peuple la rémission ou le pardon, le rafraîchissement ou le repos, et le rétablissement de toutes les choses dont Dieu a parlé ; en d’autres termes, les précieuses réalités qui se trouvaient voilées sous le type des bénédictions jubilaires ?

En entendant ces choses, un grand nombre de Juifs, il est vrai, eurent le cœur touché de componction, reçurent avec plaisir la parole et furent baptisés. Pierre, dont Jésus avait fait un pêcheur d’hommes vivants, eut la joie de voir, à son premier coup de filet, trois mille âmes arrachées aux pièges du diable et converties à Jésus Christ. D’autres milliers se séparèrent ensuite de la génération perverse et formèrent le premier noyau si béni de l’Église de Dieu sur la terre. Mais avec tout cela la nation demeura sous le jugement prononcé contre elle (És. 6). Étienne dut dire aux Juifs : « Gens de col roide et incirconcis de cœur et d’oreilles, vous vous opposez toujours au Saint Esprit ; vous êtes tels que vos pères ». Il paya de sa vie ce fidèle témoignage rendu contre leur endurcissement ; il fut comme cet ambassadeur que les concitoyens du roi envoyèrent après lui dans une contrée éloignée, pour lui dire : « Nous ne voulons pas que celui-ci règne sur nous » (Luc 19, 14). Et Paul, qui avait une grande affection pour ses frères, ses parents selon la chair, dut aussi témoigner contre eux : « qu’ils comblaient toujours la mesure de leurs péchés ». « Aussi, dit-il encore, la colère est-elle parvenue sur eux au dernier terme » (1 Thess. 2, 16).

La colère, et non la faveur de leur Dieu, voilà ce que jusqu’à cette heure moissonnent les malheureux Juifs. Le vrai Jubilé devait leur apporter la rémission de leurs dettes, le pardon de leurs péchés, et voici ils sont encore, comme nation, sous le poids de ces péchés et de la malédiction qu’ils ont prononcée contre eux-mêmes. C’est encore le temps de l’indignation de Jéhovah contre Son peuple. Au lieu de l’affranchissement et de la liberté, ils ne connaissent que l’esclavage et la servitude ; ils sont sous le joug humiliant de leurs préjugés, de leur ignorance, de leur aveuglement, de leur endurcissement. « Leurs entendements ont été endurcis… Lorsque Moïse leur est lu, un voile reste sur leur cœur ». Satan les tient dans ses chaînes. — Au lieu de se voir rétablis dans leur terre, leur maison est laissée déserte, leur pays est désolé ; ils sont toujours, depuis dix-huit siècles, errants dans le désert des peuples, et Jérusalem est toujours foulée aux pieds par les Gentils. — Ils n’ont pas davantage trouvé le repos ; le sabbat, ce signe entre l’Éternel et eux, leur a été ôté. « La Judée a été emmenée captive, tant elle est affligée, et tant est grande sa servitude, elle demeure maintenant parmi les nations, et ne trouve point de repos » (Lam. 1, 3). L’Éternel l’a dit et l’a fait : « Je ferai cesser toute sa joie, ses fêtes, ses nouvelles lunes, ses sabbats et toutes ses solennités. Et je gâterai ses vignobles et ses figuiers… et je les réduirai en forêt » (Os. 2, 11, 12).

Ainsi les Juifs ont perdu pour un temps tous les privilèges que promettait le Jubilé[10] ; ils ont été mis de côté, rejetés jusqu’à ce que l’indignation soit passée. Alors l’Église est intervenue. Dieu a visité les nations et les visite encore, afin d’en tirer un peuple pour Son nom. L’Église, corps de Christ, de Ses os et de Sa chair, est bénie en Christ de toute bénédiction spirituelle dans les lieux célestes. Coupée de l’olivier sauvage selon la nature, et entée sur l’olivier franc à la place des branches qui ont été retranchées, elle est devenue participante de la racine et de la graisse de l’olivier ; et par conséquent elle a droit, mais dans un sens infiniment supérieur, spirituel et céleste, à toutes les grâces que les types de la loi ou les promesses de Dieu garantissent aux enfants d’Israël, qui en jouiront un jour quand la plénitude des nations étant entrée, l’Église ne sera plus sur la terre.

C’est de cette manière que nous tous, croyants, membres du corps de Christ, nous participons aux bénédictions signalées dans l’institution de l’année du Jubilé, comme nous allons maintenant le faire voir.

Quels étaient, en Israël, les individus que réjouissait le plus le son de la trompette, annonçant le commencement de l’année agréable au Seigneur ? Évidemment, c’étaient les pauvres, les infortunés, les débiteurs insolvables ; ceux qui, dans leur misère, avaient dû se vendre à leurs frères, dont ils étaient les esclaves, ou qui avaient été expropriés de leurs maisons et de leurs biens ; tous ceux qui gémissaient accablés de peine et de travaux, consumés de jour par le hâle, et de nuit par la gelée, et voyant le sommeil fuir de devant leurs yeux. Quel bonheur, quels transports d’allégresse ne devaient pas leur causer ces joyeux sons, qui leur annonçaient la délivrance et la fin de leurs peines ! Eh bien ! c’est aux pauvres aussi que la bonne nouvelle est prêchée ; ce sont les malheureux pécheurs, perdus et enfants de colère par nature, que Jésus est venu chercher et sauver. — L’Église de Jésus Christ se recrute peu à peu comme celle de David : « Tous ceux qui étaient mal dans leurs affaires, et qui avaient des créanciers dont ils étaient tourmentés, et qui avaient le cœur plein d’amertume s’assemblèrent vers lui, et il fut leur chef » (1 Sam. 22, 2).

Ah ! c’était un beau jour pour les malheureux chargés de dettes, que celui où résonnait dans tout le pays la trompette de jubilation : c’était pour eux comme une quittance générale que Dieu leur donnait ; c’était la déclaration que tous les titres contre eux étaient déchirés, annulés, anéantis. Le matin, ils étaient des débiteurs insolvables ; le soir, ils ne devaient plus rien ; leur dette était censée payée, elle était remise. Il est vrai que ce n’est qu’à l’occasion de l’année du relâche qu’il est parlé de l’extinction des dettes, comme d’un des privilèges qui la caractérisaient. Mais si l’on se souvient que le Jubilé n’était que la continuation, la plénitude et la perfection d’une année de relâche, on comprendra que tout ce qui avait lieu en grâce dans cette dernière année, devait, par conséquent, avoir lieu aussi dans celle du Jubilé. D’ailleurs nous nous occupons ici de ces deux années bénies. Eh bien ! nous le répétons, oh ! quelle joie, quel bonheur pour les pauvres débiteurs en entendant le son de la trompette de réjouissance !

Mais que sont cette joie et ce bonheur en comparaison du bonheur et de la joie, qui inondent l’âme d’un pauvre pécheur, prêtant l’oreille avec foi au son doux et subtil de la grâce, à la voix de Jésus qui lui dit : « Tes péchés te sont pardonnés ; va-t’en en paix ! » ? — On le sait, les péchés sont souvent représentés comme des dettes ; notre créancier, c’est la justice de Dieu, qui avait le droit de nous demander jusqu’au dernier quadrant. Et par nature nous sommes tous des débiteurs insolvables ; bien loin de pouvoir, en quoi que ce soit, diminuer cette dette immense, l’homme ne fait que l’augmenter chaque jour et à chaque instant du jour. Aussi que serions-nous devenus si Dieu n’avait eu compassion de nous ; si Dieu, dans Son grand amour, ne nous avait donné Son Fils qui a payé pour nous, qui s’est offert en rançon pour nous ?

C’est « en Lui que nous avons le rachat par le moyen de son sang, le pardon (la rémission[11]) des offenses, selon la richesse de sa grâce ». Nous avions affaire à un maître compatissant qui nous a remis gratuitement toute notre dette (Matt. 18, 27). La mort de Jésus a été, en quelque sorte, le paiement de cette dette ; l’amende qui nous apporte la paix a été sur Lui ; Il s’en est volontairement chargé, et c’est pour cela qu’Il a goûté la mort et passé par la prison du sépulcre. Et la résurrection de Jésus a été comme la quittance que Dieu a publiquement donnée, témoignant que notre dette était pleinement acquittée. Quand un débiteur sort de prison, c’est une preuve qu’il a satisfait son créancier ; à plus forte raison quand il en sort glorieux. Ainsi Jésus, qui s’était constitué débiteur à notre place, a pleinement satisfait la justice de Dieu qui L’a ressuscité et glorifié.

« Tous les prophètes lui rendent témoignage, que tout homme qui croit en lui reçoit le pardon des péchés par son nom. Sachez donc, hommes frères, que par lui le pardon des péchés vous est annoncé, et que quiconque croit, est justifié par lui de toutes les choses dont vous n’aviez pu être justifiés par la loi de Moïse » (Act. 10, 43 ; 13, 38, 39). C’est ainsi que les apôtres prêchaient aux Juifs le jubilé évangélique. Et maintenant c’est à nous aussi que s’adressent ces paroles : « Vous qui étiez morts dans vos offenses, et dans l’incirconcision de votre chair, il vous a fait vivre ensemble avec lui, vous ayant fait grâce de toutes vos offenses ; ayant effacé l’acte écrit qui était contre nous, par les ordonnances, et qui nous était contraire, et il l’a annulé, l’ayant cloué à la croix » (Col. 2, 13, 14).

Voilà, pour nous, actuellement, la trompette du Jubilé ; voilà la bonne nouvelle qui a réjoui nos cœurs d’une joie ineffable et glorieuse, quand il nous a été donné de la recevoir et de la croire. Et, on le voit, cette bonne nouvelle, cette rémission, ce pardon gratuit et complet, se rattache intimement à l’œuvre parfaite de notre souverain Sacrificateur ; elle en dépend, elle en découle, ainsi que toutes les autres bénédictions dont nous avons à parler encore ; de la même manière que le Jubilé juif procédait du jour des expiations.

Le Jubilé ouvrait encore une source de grande joie à une autre classe de malheureux, savoir à tous ceux qui, par excès de misère, s’étaient vus dans la dure nécessité de se vendre à leurs frères ou à l’étranger (v. 39 à 55). « Quand ton frère sera devenu pauvre auprès de toi, et qu’il se sera vendu à toi,… il te servira jusqu’à l’année du Jubilé. Alors il sortira de chez toi avec ses enfants ; il s’en retournera dans sa famille »… Sans doute, Dieu ne voulait pas qu’un Israélite fût traité comme un esclave par un autre Israélite. Sans doute, Il ne voulait pas qu’un étranger dominât rigoureusement sur un fils d’Abraham ; et, de plus, il y avait droit de rachat pour l’esclave, au cas où un de ses proches parents pût ou voulût le racheter ou que lui-même en eût les moyens (v. 47-50). « Car, dit l’Éternel, ils sont mes serviteurs, que j’ai retirés du pays d’Égypte ; c’est pourquoi ils ne seront point vendus comme on vend les esclaves »[12]. — Malgré ces précautions de la bonté compatissante de Dieu, il n’en restait pas moins certain qu’elle était bien cruelle et amère, la position de ces pauvres qui ne s’appartenaient plus à eux-mêmes, qui ne pouvaient disposer ni de leur temps, ni de leurs forces pour eux et pour leurs familles. — Aussi avec quelle ardeur ne soupiraient-ils pas après l’heureuse journée qui devait ramener l’année de la délivrance ! Et avec quels transports d’allégresse n’accueillaient-ils pas les sons de la trompette qui publiait la liberté dans le pays à tous ses habitants, qui leur permettait de dire à leurs maîtres : « Nous voilà affranchis et libres comme vous ; vous n’avez plus de domination sur nous : nous rentrons dans la pleine jouissance de nos droits. Dieu l’a déclaré ; la trompette sacrée le proclame de Sa part ».

Eh bien ! quels que pussent être les transports de joie d’un pauvre Israélite, affranchi de la servitude par l’introduction du Jubilé, ils étaient peu de chose comparés à ceux qui remplissent ou qui devraient remplir le cœur d’un malheureux pécheur, affranchi par la grâce d’un joug bien autrement pesant, ignominieux et odieux. En effet, nous étions tous, par nature, les pauvres esclaves du péché, de Satan et de la mort. — Car, dit la Parole, « on est asservi à celui par lequel on est subjugué » (2 Pier. 2, 19). Et « tout homme qui pratique le péché est esclave du péché » (Jean 8, 34). « Ne savez-vous pas que si vous vous présentez à quelqu’un comme esclave pour obéir, vous êtes esclaves de celui à qui vous obéissez, soit du péché pour la mort, soit de l’obéissance pour la justice… Lorsque vous étiez esclaves du péché, vous étiez libres à l’égard de la justice. Quel fruit aviez-vous donc alors ? — Des choses dont maintenant vous avez honte ; car la fin de ces choses, c’est la mort » (Rom. 6, 16, 20, 21).

Et n’est-il pas vrai que, nous aussi, « nous étions asservis à diverses convoitises et à diverses voluptés, esclaves de la corruption, marchant selon le train de ce monde, selon le chef de l’autorité de l’air, de l’esprit qui déploie maintenant son efficace dans les fils de la rébellion » (Tite 3, 3 ; Éph. 2, 2) ? N’étions-nous pas, nous aussi, du nombre des captifs de l’homme fort, enserrés dans les pièges du diable, « par lequel nous avions été pris vivants pour faire sa volonté » (2 Tim. 2, 26) ? — N’était-ce pas « un esprit de servitude » que celui qui nous animait ; et ne connaissions-nous pas, par une bien triste expérience, l’humiliant esclavage auquel sont condamnés tous ceux qui sont encore dominés par « la crainte de la mort » (Héb. 2, 15), solde du péché ?

Eh bien ! l’évangile est encore pour nous la bonne nouvelle, la proclamation de la liberté à tous ces égards. La connaissance de la vérité nous a rendus libres. Le Fils nous ayant affranchis, nous sommes réellement libres (Jean 8, 32, 36). Nous sommes les enfants de la femme libre (Gal. 4, 7). C’est un Esprit d’adoption que nous avons reçu ; or là où est l’Esprit du Seigneur, là est la liberté (2 Cor. 3, 17), en sorte que tu n’es plus esclave, mais fils (Gal. 4, 31). « Tenez-vous donc fermes à la liberté, par laquelle Christ vous a rendus libres, et ne soyez pas de nouveau retenus au joug de l’esclavage » (Gal. 5, 1). « Ayant été rendus libres du péché, vous avez été asservis à la justice… asservis à Dieu » (Rom. 6, 14, 18, 22). Oui, « la loi de l’Esprit de la vie qui est dans le Christ Jésus, nous a affranchis de la loi du péché et de la mort » (8, 2). « Le péché n’a plus domination sur nous, car nous sommes sous la grâce ». — Jésus, Celui qui est plus fort que l’homme fort, est survenu et l’ayant vaincu, il lui a enlevé toute son armure et a fait le partage de ses dépouilles. Il a délivré les captifs de ce tyran. Étant monté en haut, Il a emmené captive la captivité (Éph. 4, 8). « Ayant dépouillé les principautés et les autorités, il les a produites ouvertement en spectacle, ayant triomphé d’elles en la croix » (Col. 2, 15). Il a vaincu le monde et son prince (Jean 16, 33). Par Sa mort, Il a rendu impuissant celui qui a le pouvoir de la mort, c’est-à-dire le diable, et Il a délivré ceux qui, par la crainte de la mort, méritaient toute leur vie l’esclavage (Héb. 2, 14). — Bien loin de craindre encore ce roi des épouvantements, chacun de nous peut dire avec Paul : « Pour moi, vivre c’est Christ, et mourir est un gain… Mon désir est de m’en aller et d’être avec le Christ, car c’est beaucoup meilleur » (Phil. 1, 21, 23). « Ô mort ! où est ton aiguillon ? où est, lieu invisible ! ta victoire ?… Grâces à Dieu qui nous donne la victoire par notre Seigneur Jésus Christ ! » (1 Cor. 15, 55, 57).

Une troisième classe d’infortunés dont la trompette de jubilation réjouissait les cœurs, se composait de tous ceux que la pauvreté avait contraints de vendre leurs maisons et leurs terres. Dès que le Jubilé commençait, ils rentraient de plein droit en possession de leurs propriétés aliénées[13]. « Ce vous sera l’année du Jubilé, et vous retournerez chacun en sa possession, et chacun en sa famille »[14] (v. 10, 13). — Quel bonheur pour ces pauvres dépossédés ! Ils peuvent aller avec assurance aux créanciers qui leur ont succédé dans la jouissance de leurs champs ou de leurs demeures — et leur dire : « C’est assez — maintenant ces biens nous appartiennent de nouveau. La trompette l’a proclamé ; Dieu l’a dit ». Quelle douceur pour eux que de se retrouver possesseurs de ces lieux, qui leur rappellent tant d’heureux souvenirs ; de ces maisons où s’est écoulée leur enfance au milieu de leur famille ! Quelle joie pour eux qui recouvrent ainsi gratuitement tout ce qu’ils avaient perdu !

Mais encore ici, que pouvait être cette joie auprès de celle que nos cœurs éprouvent à la pensée et dans la conviction de tout ce que l’œuvre de Christ nous fait recouvrer ? — L’homme, comme on l’a dit, est un roi dépossédé. Le diable l’a dépouillé des privilèges qu’il possédait ; le péché a effacé en lui l’image de son Créateur, l’a banni d’Éden, de la présence de Dieu. Maintenant, par nature, il n’y a point de différence entre les hommes, puisque tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu (Rom. 3, 23). Dans l’histoire solennelle de la passion du Sauveur, où même les paroles des adversaires du Fils de l’homme semblent se ressentir de l’excessive gravité du moment, ou sont suggérées par l’Esprit de Dieu soit pour accomplir les Écritures soit pour exprimer, à l’insu de ceux qui les prononçaient, d’importantes vérités, l’impie Caïphe prophétisa, et Pilate, le païen, l’indifférent, le profane Pilate prophétisa de même, lorsqu’il dit : « Voici l’homme ». Pilate avait pris Jésus, et l’avait fait battre de verges. Et les soldats ayant tressé une couronne d’épines, la lui avaient mise sur la tête et l’avaient revêtu d’un vêtement de pourpre. C’est dans cet état, que Pilate présente Jésus aux Juifs et qu’il leur dit : « Voici l’homme » ! Oui, c’était bien là « l’homme », ô Pilate ! — Jésus, le Saint de Dieu, était là comme le représentant des pécheurs, offrant à tous les regards l’image de ce que l’homme était devenu par le péché.

Voilà, en effet, ce qu’est maintenant la royauté primitive de l’homme. Sa couronne est une couronne d’épines ; le manteau royal qu’il porte encore est un vêtement dérisoire qui, comme celui de Jésus, recouvre des épaules meurtries et saignantes. Son sceptre n’est plus qu’un sceptre de roseau ! Gloire, dignité, excellence morale, il a tout perdu par la connaissance du bien et du mal.

Mais, en Jésus mort et ressuscité pour nous, nous recouvrons tous ces biens, ou plutôt des biens infiniment plus précieux et que personne ne peut plus nous ravir. Le nouvel homme, dont nous sommes revêtus en Christ, est créé selon Dieu dans la justice et la sainteté de la vérité (Éph. 4, 24) ; il se renouvelle pour la connaissance, selon l’image de Celui qui le créa (Col. 3, 10). « Si quelqu’un est dans le Christ, c’est une nouvelle création » (2 Cor. 5, 17). Nous qui autrefois étions loin, nous avons été rapprochés par le sang de Christ ; nous avons, par Christ, accès auprès du Père en un seul Esprit (Éph. 2, 13, 18). En Jésus, nous sommes déjà glorifiés ; Il nous a faits rois aussi bien que sacrificateurs à Son Dieu et Père (Apoc. 1, 6). Participants de la vocation céleste, nous avons notre droit de bourgeoisie dans les cieux. C’est là qu’est notre patrie, et nous nous en approchons tous les jours, en traversant ce monde comme des étrangers et des voyageurs. C’est là qu’est notre héritage, incorruptible, sans souillure, inflétrissable, conservé dans les cieux pour nous, qui, par la puissance de Dieu, sommes gardés par le moyen de la foi, pour le salut prêt à être révélé dans le dernier temps (1 Pier. 1, 4, 5). Aussi chacun de nous, chrétiens, a-t-il le privilège de pouvoir s’écrier comme l’apôtre des Gentils : « Je suis persuadé que ni mort, ni vie, ni anges, ni principautés, ni puissances, ni choses présentes, ni choses à venir, ni hauteur, ni profondeur, ni aucune autre créature ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu dans le Christ, Jésus notre Seigneur » (Rom. 8, 38, 39).

Cependant les terres et les maisons pouvaient être recouvrées avant le Jubilé, si le vendeur avait quelque proche parent, ayant droit de rachat qui pût et voulût racheter la chose vendue par son frère, ou si celui-ci trouvait de soi-même suffisamment de quoi faire le rachat de ce qu’il avait vendu (v. 25-27). Il en était de même, comme nous l’avons vu, du rachat d’un Hébreu devenu l’esclave de l’étranger (v. 47-50). C’est là un détail que nous ne pouvons pas passer sous silence, car il met encore sous nos yeux l’œuvre d’amour et de rédemption de Jésus à notre égard. Aucun homme n’était en état de se racheter par soi-même ; nul de nous n’aurait jamais trouvé suffisamment de quoi faire le rachat de son âme vendue au péché et à Satan. — Nul homme, nul parent de la terre ne pouvait « avec ses richesses racheter son frère, ni donner à Dieu sa rançon ; car le rachat de leur âme est trop considérable », et il n’eût jamais pu se faire (Ps. 49, 7, 8) par l’homme. Mais Jésus, qui, étant en forme de Dieu, n’a point estimé usurpation d’être égal à Dieu, Jésus a pris la forme de serviteur fait à la ressemblance des hommes. Comme les enfants participent à la chair et au sang, lui aussi semblablement a participé aux mêmes choses. Il s’est fait semblable à nous, sauf le péché ; il est devenu notre parent, notre proche parent, et comme tel, Il a été, Il est le Racheteur, le Rédempteur, Celui « qui avait le droit de rachat », droit qu’Il a exercé en répandant Son sang pour la rançon de Son peuple. Il a parfaitement accompli le rôle de notre Goël[15] ; Il a pu et voulu nous racheter de la main de l’étranger et nous rendre infiniment au-delà de tout ce que le péché avait fait perdre à notre premier père. Il nous a acquis un rachat éternel, et cela avant le Jubilé. À Lui la gloire et la louange !

Enfin, tous les pauvres, en général, avaient sujet de se réjouir de l’approche et de l’arrivée du Jubilé, comme, au reste, de l’année sabbatique ; car, en ces années, il y avait à la fois pour eux, abondance de provisions et repos. Point de récoltes : tout le produit des champs, des vignes, des oliviers appartenait à tous également, aux indigents tout aussi bien qu’aux riches propriétaires — et même l’un des buts clairement indiqués de ces institutions, était, comme nous l’avons déjà dit : « afin que les pauvres de ton peuple en mangent » (Ex. 23, 11). Et d’un autre côté, repos entier, du moins, quant à tous les travaux de l’agriculture, car on ne labourait, on ne semait pas plus qu’on ne récoltait. « Tu donneras du relâche à la terre et tu la laisseras reposer ». C’était pour les pauvres hébreux la réalisation de cette parole des Proverbes (10, 22) : « La bénédiction de l’Éternel est celle qui enrichit, et il n’y ajoute aucun travail ».

Eh bien ! voilà encore des bénédictions dont nous jouissons spirituellement par la foi en Jésus. Il y a, en Lui, abondance de provisions pour les âmes des pauvres qui croient en Son nom. Ceux qui ont faim et soif de la justice sont rassasiés. « Je suis », dit-il, « le pain de vie ; qui vient à moi, n’aura jamais faim, et qui croit en moi, n’aura jamais soif » (Jean 6, 35). Il dit encore : « Je suis la porte ; si quelqu’un entre par moi, il sera sauvé ; et il entrera, et sortira, et trouvera de la pâture… Je suis venu afin que mes brebis aient la vie et qu’elles l’aient en abondance » (Jean 10, 9, 10). Dieu a établi Jésus l’héritier de toutes choses — toute gloire Lui a été donnée (Héb. 1, 2). Et Il veut tout partager avec l’Église, Son Épouse, Sa cohéritière. « Nous avons tous reçu de sa plénitude et grâce pour grâce » (Jean 1, 16), et maintenant le Saint Esprit nous déclare que toutes choses sont à nous, soit les ouvriers du Seigneur, soit le monde, soit la vie, soit la mort, soit les choses présentes, soit les choses à venir. Oui, « toutes choses sont à vous, et vous à Christ, et Christ à Dieu » (1 Cor. 3, 22, 23). — En Lui aussi nos âmes trouvent le repos et la paix ; en Lui dont la voix d’amour appelle encore les pauvres pécheurs, en leur disant : « Venez à moi, vous tous qui vous fatiguez et qui êtes chargés, et je vous donnerai du repos… Soyez instruits par moi… et vous trouverez du repos pour vos âmes » (Matt. 11, 28, 29). « Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix » (Jean 14, 27). Nous avons la paix auprès de Dieu par notre Seigneur Jésus Christ (Rom. 5, 1) ; la paix de Dieu pour garder nos cœurs et nos pensées dans le Christ Jésus (Phil. 4, 7), et le Dieu de la paix qui écrasera bientôt Satan sous nos pieds (Rom. 16, 20), et qui, en attendant, peut nous sanctifier entièrement et nous garder sans reproche à l’arrivée de notre Seigneur Jésus Christ (1 Thess. 5, 23). — Nous avons donc tout sujet de nous écrier : « L’Éternel est mon berger, je n’aurai point de disette » (Ps. 23, 1). « Mon âme, retourne en ton repos, car l’Éternel t’a fait du bien » (Ps. 116, 7).

Maintenant je m’adresse à vous, mon cher lecteur. Si, comme j’aime à l’espérer, vous êtes un enfant de Dieu par la foi en Jésus, vous connaissez par une précieuse expérience toutes les grâces que je viens de rappeler. Vous savez et vous croyez que vos péchés vous sont pardonnés ; vous appréciez, en quelque mesure, la liberté des fils de Dieu à laquelle vous avez été appelé ; vous savez que le ciel est à vous avec la faveur, la bienveillance et tous les trésors de la grâce du Dieu du ciel ; vous avez part à toutes les bénédictions dont le Père vous a béni en Christ, et vous savourez, j’espère, avec délices l’ineffable paix de Jésus. Que puis-je vous dire de plus ? Rien, si ce n’est : Réjouissez-vous dans le Seigneur ; oh ! oui, réjouissez-vous toujours en Lui. — Soyez joyeux dans l’espérance — et marchez d’une manière digne de votre vocation ; marchez en Christ comme des rachetés, des bourgeois des cieux, des enfants de la lumière et du jour, des affranchis du Seigneur, des témoins de Jésus, des amis de la paix. Autant qu’il est en vous procurez la paix, soyez en paix entre vous et avec tous les hommes et que vos paroles donnent une grâce à ceux qui les entendent. En un mot, glorifiez Dieu dans votre corps et dans votre esprit, qui appartient à Dieu, car ayant été achetés à prix vous n’êtes plus à vous-mêmes.

Mais si vous étiez encore étranger à Jésus, à la grâce et à la paix de Dieu, je ne pourrais que vous exhorter sérieusement à croire en Jésus Christ pour être sauvé. Plus d’une fois la trompette évangélique, annonçant le jubilé des âmes, a retenti à vos oreilles. Plus d’une fois la bonne nouvelle du salut vous a été prêchée sans doute. Ne l’eût-elle pas été auparavant, elle l’est dans ce moment, elle se fait entendre à vous dans ces pages que vous parcourez. Oh ! prenez donc garde comment vous l’écoutez. Si vous entendez la voix du Seigneur, n’endurcissez pas votre cœur. Pendant qu’il en est temps, pendant que cet aujourd’hui dure encore, avant le Jubilé final, qui sans cela ne vous apporterait que le jugement et la condamnation, croyez, oh ! croyez à l’évangile. Que le Dieu de toute grâce vous donne des oreilles pour entendre et vous fasse grâce. Que le Seigneur Jésus, l’ami des pécheurs, prononce sur vous un puissant Ephphatha, afin que vous puissiez entendre Sa voix qui vous appelle, et voir s’accomplir pour vous aussi cette déclaration du Sauveur : « Amen, amen, je vous dis que l’heure vient, et qu’elle est maintenant, où les morts entendront la voix du Fils de Dieu, et ceux qui l’auront entendue, vivront ! » (Jean 5, 25). Le désir de mon cœur pour vous, c’est que vous soyez sauvé. Dieu veuille l’accomplir selon Sa puissante grâce en Jésus !

Mais, je le répète, il faut voir dans ce qui précède une application morale plutôt qu’un accomplissement du type du Jubilé. Le temps de cet accomplissement n’est pas encore venu ; c’est Israël, plutôt que l’Église, qui est directement intéressé dans la réalisation de ce magnifique type ; c’est aussi la terre d’Israël, et, dans un sens plus éloigné, la création toute entière.

Le sabbat du septième jour, venant après six jours de travail, comme l’année du repos de la terre succédant à six ans de labeurs, préfiguraient le repos de Dieu, sans doute, mais aussi une période bénie pour la terre et pour ses habitants, après d’autres périodes de souffrances, de gémissements et de travaux de toute espèce. Or le Jubilé, qui revenait après sept années sabbatiques, après sept fois sept ans, après la perfection de la plénitude ou la plénitude de la perfection, désignait, d’une manière plus frappante encore, cette époque de paix, de bonheur, de liberté et de repos ; cette époque que le Saint Esprit appelle « l’administration (ou l’économie) de la plénitude des temps » (Éph. 1, 10), et que l’on nomme généralement le millénium. — Alors seulement aura lieu la réalisation complète des types qui nous ont occupés, par l’établissement du royaume de Christ et de Dieu sur la terre.

En effet, je rappelle que le Jubilé ne commençait qu’à la fin du jour des expiations, après que les rôles du souverain sacrificateur et du peuple, en cette journée solennelle, étaient pleinement accomplis[16]. — Or, nous l’avons vu, Israël, par son endurcissement et son impénitence, a méconnu le temps de sa visitation, et a refusé de se convertir. Et, d’un autre côté, Jésus, le grand souverain Sacrificateur, n’est point encore sorti du véritable sanctuaire pour venir bénir son peuple au nom de Jéhovah.

Mais bientôt le long intervalle, sans fêtes, qui succédait à la Pentecôte, prendra fin pour Israël ; bientôt commencera pour ce peuple de Dieu l’antitype des fêtes du septième mois. Bientôt ces paroles auront de nouveau, pour les Juifs, un sens actuel, une réalité bénie : « Sonnez de la trompette en la nouvelle lune, en la solennité, pour le jour de notre fête ; car c’est un statut à Israël, une ordonnance du Dieu de Jacob » (Ps. 81, 3, 4). — « Et il arrivera en ce jour-là, qu’on sonnera de la grande trompette, et ceux qui s’étaient perdus au pays d’Assyrie, et ceux qui avaient été chassés au pays d’Égypte, reviendront, et se prosterneront devant l’Éternel, en la sainte montagne, à Jérusalem » (És. 27, 13). — Plus tard encore (car il s’agit dans ces passages soit de la trompette de rassemblement (Nomb. 10, 3) soit de celle du Jubilé), plus tard, « le Fils de l’homme, venant sur les nuées du ciel avec grande puissance et grande gloire, enverra ses anges avec une grande voix de trompette ; et ils rassembleront ses élus, des quatre vents, depuis l’une des extrémités des cieux jusqu’à l’autre extrémité » (Matt. 24, 30, 31)[17].

C’est surtout dans Joël 2, que nous voyons le peuple convoqué au son de la trompette, avant le grand jour de l’humiliation et invité à s’y préparer : « Maintenant donc, dit l’Éternel, retournez-vous jusqu’à moi de tout votre cœur, avec jeûne, avec larmes et lamentation. Et déchirez vos cœurs, et non pas vos vêtements, et retournez à l’Éternel, votre Dieu ; car il est miséricordieux et pitoyable, tardif à la colère, et abondant en miséricorde, et qui se repent d’avoir affligé. Qui sait si l’Éternel, votre Dieu, ne viendra point à se repentir, et s’il ne laissera point après soi bénédiction, gâteau et aspersion ? Sonnez du cor en Sion, sanctifiez le jeûne, publiez l’assemblée solennelle. Assemblez le peuple, sanctifiez la congrégation, amassez les anciens, assemblez les enfants, et ceux qui sont à la mamelle ; que le nouveau marié sorte de son cabinet, et la nouvelle mariée de sa chambre nuptiale. Que les sacrificateurs qui font le service de l’Éternel pleurent entre le porche et l’autel, et qu’ils disent : Éternel, pardonne à ton peuple, et n’expose point ton héritage à l’opprobre… » (vers. 12-17).

Le résidu fidèle prête l’oreille à ces exhortations et connaît enfin, par la grâce de son Dieu, la sérieuse réalité, quant à lui, du grand jour des propitiations. C’est ce que nous voyons dans Zacharie 12, 10-14, où le Seigneur parle ainsi : « Je répandrai sur la maison de David, et sur les habitants de Jérusalem, l’Esprit de grâce et de supplications ; et ils regarderont vers moi, qu’ils auront percé ; et ils en mèneront deuil, comme quand on mène deuil d’un fils unique ; et ils en seront en amertume, comme quand on est en amertume à cause d’un premier-né. En ce jour-là, il y aura un grand deuil à Jérusalem, tel que fut le deuil de Hadadrimmon dans la plaine de Meguiddo[18]. Et la terre mènera deuil, chaque famille à part… ». Dès cet instant, « il y aura une source ouverte en faveur de la maison de David, et des habitants de Jérusalem, pour le péché et pour la souillure » (Zach. 13, 1). — Israël ou le résidu, ayant affligé son âme devant Dieu, comme l’exigeait la loi relative au jour des expiations, Jésus achèvera Son office de souverain Sacrificateur selon l’ordre d’Aaron ; Il sortira du sanctuaire céleste et viendra régner selon l’ordre de Melchisédec ; « il sera sacrificateur sur son trône » (Zach. 6, 13). « Et l’Éternel sera roi sur toute la terre » (Zach. 14, 9).

Alors les enfants d’Israël jouiront, d’une manière parfaite et à certains égards littérale, de toutes les bénédictions préfigurées par le Jubilé, et cela toujours en considération de l’œuvre parfaite de Jésus, Messie, Roi et Sacrificateur. Ainsi, s’agit-il de la remise des dettes : ces paroles prophétiques auront leur entier accomplissement : « Consolez, consolez mon peuple, dira votre Dieu. Parlez à Jérusalem selon son cœur, et lui criez que son temps marqué est accompli, que son iniquité est tenue pour acquittée, qu’elle a reçu de la main de l’Éternel le double pour tous ses péchés » (És. 40, 1, 2). « Ils seront miens, a dit l’Éternel des armées, lorsque je mettrai à part mes plus précieux joyaux ; et je leur pardonnerai ainsi que chacun pardonne à son fils qui le sert » (Mal. 3, 17). « Je serai apaisé à l’égard de leurs injustices, et je ne me souviendrai plus de leurs péchés ni de leurs iniquités » (Héb. 8, 12).

S’agit-il de la délivrance de l’esclavage : « Quant à toi aussi, à cause du sang de ton alliance, je mettrai tes prisonniers hors de la fosse où il n’y a point d’eau. Retournez à la forteresse, vous prisonniers qui avez espérance ; même aujourd’hui je t’annonce que je te rendrai le double » (Zach. 9, 11, 12). — « Ainsi a dit l’Éternel (à son Christ) : Je t’ai exaucé au temps de la bienveillance, et je t’ai aidé au jour du salut : je te garderai, et je te donnerai pour être l’alliance du peuple, pour rétablir la terre, et afin que tu possèdes les héritages désolés : disant à ceux qui sont garrottés : Sortez ; et à ceux qui sont dans les ténèbres : Montrez-vous… Le pillage sera-t-il ôté à l’homme puissant ? et les captifs du juste seront-ils délivrés ? Ainsi a dit l’Éternel : Même les captifs pris par l’homme puissant lui seront ôtés, et le pillage de l’homme fort sera enlevé ; car je plaiderai moi-même avec ceux qui plaident contre toi, et je délivrerai tes enfants… et toute chair connaîtra que je suis l’Éternel qui te sauve, et ton Rédempteur (Goël), le Puissant de Jacob » (És. 49, 8, 9, 24-26). Car « l’année de mes rachetés est venue » (És. 63, 4)[19].

S’agit-il du bénéfice que le Jubilé apportait aux pauvres dépossédés, bénéfice exprimé par ces mots : « Vous retournerez chacun en sa possession », c’est surtout ici que le type se réalisera vraiment à la lettre. Selon la promesse positive et inconditionnelle faite par l’Éternel à Abraham, la terre de Canaan a été donnée aux enfants d’Abraham en possession perpétuelle (Gen. 13, 14, 15, etc.). Ils en ont été chassés à cause de leurs infidélités, mais ce n’est que pour un temps. La promesse de Jéhovah demeure et bientôt les oracles, annonçant leur réintégration dans leur terre, auront aussi leur accomplissement. Entre une foule de passages sur ce sujet, je ne citerai que les suivants : « Ainsi a dit le Seigneur, l’Éternel : Voici, je vais prendre les enfants d’Israël entre les nations parmi lesquelles ils sont allés ; je les rassemblerai de toutes parts et je les ferai rentrer en leur terre… Et ils habiteront au pays que j’ai donné à Jacob, mon serviteur, dans lequel vos pères ont habité ; ils y habiteront, dis-je, eux et leurs enfants, et les enfants de leurs enfants, à toujours ; et David, mon serviteur, sera leur prince à toujours. Et je traiterai avec eux une alliance de paix ; et il y aura une alliance éternelle avec eux ; et je les établirai, et les multiplierai ; je mettrai mon sanctuaire au milieu d’eux à toujours… Et je serai leur Dieu, et ils seront mon peuple » (Éz. 37, 21-27)[20]. « Et je ramènerai de la captivité ceux de mon peuple d’Israël qui auront été emmenés captifs, et on rebâtira les villes désertes et on y habitera ; ils planteront des vignes, et ils en boiront le vin ; ils feront aussi des jardins, et ils en mangeront les fruits. Je les planterai sur leur terre, et ils ne seront plus arrachés de leur terre, laquelle je leur ai donnée, dit l’Éternel, ton Dieu » (Amos 9, 14, 15). Dans la renaissance, dit encore Jésus au résidu juif qui l’avait suivi, « tout homme qui aura laissé maisons, ou frères… ou champs, à cause de mon nom, recevra le centuple, et héritera de la vie éternelle » (Matt. 19, 28, 29).

S’agit-il enfin de l’abondance et du repos, que le Jubilé procurait aux pauvres, c’est encore là ce qu’une foule de prophéties annoncent à Israël pour les derniers temps. — Après les longs siècles de désolation pendant lesquels la terre se sera reposée, en prenant plaisir à ses sabbats, elle sera de nouveau habitée ; alors « le désert et le lieu aride se réjouiront, et le lieu solitaire s’égaiera, et fleurira comme une rose » (És. 35, 1) : « Voici, les jours viennent, dit l’Éternel, que le laboureur atteindra le moissonneur, et que celui qui foule les raisins atteindra celui qui jette la semence ; et les montagnes distilleront le moût, et tous les coteaux en découleront » (Amos 9, 13). « Sion, dit le Seigneur, est mon repos à perpétuité ; j’y demeurerai, parce que je l’ai chérie. Je bénirai abondamment ses vivres : je rassasierai de pain ses pauvres » (Ps. 132, 14, 15). « L’Éternel a juré par sa droite, et par le bras de sa force… : Ceux qui auront amassé le froment, le mangeront, et ils loueront l’Éternel ; et ceux qui auront recueilli le vin, le boiront dans les parvis de ma sainteté » (És. 62, 8, 9). « En ces jours-là, Juda sera délivré, et Jérusalem habitera en assurance, et c’est ici le nom dont elle sera appelée : L’Éternel, notre justice » (Jér. 23, 6). « Tous tes enfants seront enseignés de l’Éternel, et la paix de tes fils sera abondante » (És. 54, 13). « Ceux dont l’Éternel aura payé la rançon, retourneront, et viendront en Sion avec chant de triomphe, et une joie éternelle sera sur leur tête ; ils obtiendront la joie et l’allégresse ; la douleur et le gémissement s’enfuiront » (És. 35, 10). « Chacun se reposera sous sa vigne et sous son figuier, et il n’y aura personne qui les épouvante ; car la bouche de l’Éternel des armées a parlé » (Mich. 4, 4).

Toutes ces bénédictions qui attendent Israël se trouvent admirablement résumées dans le chapitre 36 d’Ézéchiel, versets 22 à 38 : « Ainsi a dit le Seigneur, l’Éternel : Je ne le fais point à cause de vous, ô maison d’Israël ! mais à cause du nom de ma sainteté, que vous avez profané parmi les nations, au milieu desquelles vous êtes venus. Et je sanctifierai mon grand nom, qui a été profané parmi les nations, et que vous avez profané parmi elles ; et les nations sauront que je suis l’Éternel, dit le Seigneur, l’Éternel, quand je serai sanctifié en vous, en leur présence. Je vous retirerai donc d’entre les nations, je vous rassemblerai de tous pays, et je vous ramènerai en votre terre. Et je répandrai sur vous des eaux nettes, et vous serez nettoyés ; je vous nettoierai de toutes vos souillures, et de toutes vos idoles. Je vous donnerai un nouveau cœur ; je mettrai au-dedans de vous un esprit nouveau ; j’ôterai de votre chair le cœur de pierre, et je vous donnerai un cœur de chair. Et je mettrai mon Esprit au-dedans de vous ; je ferai que vous marcherez dans mes statuts, et que vous garderez mes ordonnances, et les ferez. Et vous demeurerez au pays que j’ai donné à vos pères ; et vous serez mon peuple, et je serai votre Dieu. Je vous délivrerai de toutes vos souillures ; j’appellerai le froment, je le multiplierai, et je ne vous enverrai plus la famine ; mais je multiplierai le fruit des arbres, et le revenu des champs, afin que vous ne portiez plus l’opprobre de la famine entre les nations. Et vous vous souviendrez de votre mauvaise voie, et de vos actions qui n’étaient pas bonnes ; et vous détesterez en vous-mêmes vos iniquités et vos abominations. Je ne le fais point pour l’amour de vous, dit le Seigneur, l’Éternel, afin que vous le sachiez. Soyez honteux et confus à cause de votre voie, ô maison d’Israël ! Ainsi a dit le Seigneur, l’Éternel : Au jour que je vous aurai purifiés de toutes vos iniquités, je vous ferai habiter dans des villes, et les lieux déserts seront rebâtis. Et la terre désolée sera labourée, au lieu qu’elle n’a été que désolation en la présence de tous les passants. Et on dira : Cette terre-ci, qui était désolée, est devenue comme le jardin d’Éden ; et ces villes, qui avaient été désertes, désolées et détruites, sont fortifiées et habitées. Et les nations qui seront demeurées de reste autour de vous, sauront que, moi, l’Éternel, j’aurai rebâti les lieux détruits, et planté le pays désolé. Moi, l’Éternel, j’ai parlé, et je le ferai. Ainsi a dit le Seigneur, l’Éternel : Encore serai-je recherché par la maison d’Israël, pour leur faire ceci, savoir, que je multiplie leurs hommes comme un troupeau de brebis. Les villes qui sont désertes seront remplies de troupes d’hommes, tels que sont les troupeaux des bêtes sanctifiées, tels que sont les troupeaux des bêtes qu’on amène à Jérusalem en ses fêtes solennelles ; et ils sauront que je suis l’Éternel ».

Telles sont les délivrances, telles les bénédictions qu’apportera avec lui le Rédempteur (le Goël), lorsqu’il « viendra en Sion, vers ceux de Jacob qui se convertissent de leur péché » (És. 59, 20). Quelle vérité auront alors ces paroles du psalmiste : « Heureux le peuple qui connaît l’appel de la trompette ! Éternel ! il marche à la clarté de ta face » (Ps. 89, 15Perret-Gentil). — « Jérusalem, loue l’Éternel ; Sion, loue ton Dieu… Car il a béni tes enfants au milieu de toi. C’est lui qui rend paisibles tes contrées, et qui te rassasie de la moelle du froment » (Ps. 147, 12, 14).

Ainsi le Jubilé millénial sera bien réellement pour Israël, par la présence du Seigneur, le temps du rafraîchissement, et aussi celui du rétablissement de toutes les choses dont Dieu a parlé ; mais il le sera de même pour toutes les créatures. « Car le vif désir de la création attend la révélation des fils de Dieu (car la création fut soumise à la vanité, non volontairement, mais à cause de celui qui l’y soumit), dans l’espérance que la création elle-même sera aussi rendue libre de l’esclavage de la corruption, pour avoir part à la liberté de la gloire des enfants de Dieu. Car nous savons que toute la création à la fois soupire et est en travail jusqu’à maintenant » (Rom. 8, 19-22).

Alors prendra fin pour toujours cet immense soupir, incessamment poussé par toutes les créatures, gémissants sous le poids de la malédiction, et souffrant, elles aussi, des conséquences de l’introduction du péché et de la mort dans ce monde. Alors il y aura repos pour la terre, rétablie dans l’état où elle était avant la chute. Alors aussi affranchissement, soulagement, restauration dans leur état primitif, de tous les animaux. Le même Dieu, qui fait cette promesse à Israël : « Voici, je vais créer Jérusalem, pour n’être que joie, et son peuple, pour n’être qu’allégresse », dit immédiatement avant : « Voici, je m’en vais créer de nouveaux cieux et une nouvelle terre ; et on ne se souviendra plus des choses précédentes, et elles ne reviendront plus au cœur » (És. 65, 17, 18). — Alors « le loup demeurera avec l’agneau, et le léopard gîtera avec le chevreau ; le veau, et le lionceau, et le bétail qu’on engraisse seront ensemble, et un petit enfant les conduira. La jeune vache paîtra avec l’ourse, leurs petits gîteront ensemble, et le lion mangera du fourrage comme le bœuf. Et l’enfant qui tette s’ébattra sur le trou de l’aspic ; et l’enfant qu’on sèvre mettra sa main au trou du basilic. On ne nuira et on ne fera aucun dommage à personne dans toute la montagne de ma sainteté ; parce que la terre aura été remplie de la connaissance de l’Éternel, comme le fond de la mer des eaux qui le couvrent » (És. 11, 6-9).

« Et il arrivera que tous ceux qui seront restés de toutes les nations… monteront en foule chaque année pour se prosterner devant le Roi, l’Éternel des armées, et pour célébrer la fête des tabernacles » (Zach. 14, 16). « Les nations des sauvés marcheront à la lumière » de la sainte cité (Apoc. 21, 24). Alors on chantera des cantiques tels que ceux-ci qui auront une glorieuse actualité : « L’Éternel règne ; que la terre s’en égaie, et que plusieurs îles s’en réjouissent… Les cieux annoncent sa justice, et tous les peuples voient sa gloire » (Ps. 97, 1, 6). — « Louez de la terre l’Éternel ; louez-le, baleines et tous les abîmes ; feu et grêle, neige et vapeur ; vent de tourbillon, qui exécutez sa parole ; montagnes, et tous coteaux ; arbres fruitiers, et tous cèdres ; bêtes sauvages, et tout bétail ; reptiles, et oiseaux qui avez des ailes ; rois de la terre, et tous peuples ; princes, et tous gouverneurs de la terre ; ceux qui sont à la fleur de leur âge, et les vierges aussi, les vieillards, et les jeunes gens : qu’ils louent le nom de l’Éternel ; car son nom seul est haut élevé ; sa majesté est sur la terre et sur les cieux. Alléluia ! » (Ps. 148, 7-14).

Et remarquez-le bien : cette glorieuse délivrance de la création sera la conséquence de l’œuvre de Christ, tout aussi bien que notre rédemption et celle d’Israël. Il est aussi le Goël pour la terre. La terre est aussi « la possession que Jésus a acquise » par sa mort ; le monde est le champ dans lequel était caché un trésor (l’Église) et Jésus est l’homme qui a vendu tout ce qu’Il avait (ou donné Sa vie) pour acheter le champ. Bientôt Il viendra délivrer Son acquisition qui est encore sous le joug de l’adversaire. Bientôt Il rompra les sceaux du livre qui contient comme le contrat d’acquisition, ou les titres de l’Agneau Rédempteur à la possession et à l’héritage de toutes choses. Quand tous ces sceaux auront été ouverts, le Jubilé de la création commencera, car le Seigneur entrera dans Son règne (Apoc. 5 ; 11, 15, 17).

Mais nous aussi, chrétiens, nous-mêmes qui avons les prémices de l’Esprit, nous-mêmes qui sommes unis à Christ et rendus participants de la nature divine, nous aussi nous soupirons en nous-mêmes, parce que si, par l’homme intérieur, nous appartenons à la nouvelle création, par nos corps nous tenons encore à cette création-ci qui soupire et est en travail. Sans doute, notre vie est cachée avec Christ en Dieu, mais nous n’avons pas encore revêtu l’immortalité. Nous gémissons étant chargés, attendant le moment d’échanger notre maison terrestre, qui est une tente, contre la maison éternelle que nous avons de Dieu dans les cieux, c’est-à-dire contre un corps glorifié. Dès à présent notre droit de bourgeoisie est dans les cieux, mais nous en sommes encore à attendre pour Sauveur, le Seigneur Jésus Christ, qui transformera le corps de notre humiliation, pour qu’il soit conforme au corps de sa gloire. — En Jésus, nous avons la rédemption, savoir la rémission de nos péchés, mais nous soupirons après la rédemption de nos corps, toujours misérables, vils, faibles et mortels, et à cet égard nous ne sommes sauvés qu’en espérance. Nous sommes les affranchis du Seigneur, mais toujours exposés aux attaques de l’ennemi, toujours en lutte avec les malices spirituelles dans les lieux célestes ; portant en nous l’Esprit de Dieu, sans doute, mais aussi une chair constamment rebelle qui a des désirs contraires à ceux de l’Esprit. Nous sommes du ciel, sans doute, mais vivant encore au milieu d’un monde qui est tout entier plongé dans le mal, d’un monde toujours hostile à la vérité de Dieu, à Jésus qu’il a crucifié, d’un monde qui est déjà jugé. Aussi quoique jouissant par la foi de la paix du Sauveur, ce n’est point ici le lieu de notre repos, et pour nous aussi, cette terre est un désert aride, altéré et sans eau. Nous avons à rencontrer, en le traversant, des épreuves, des combats, des tribulations de tout genre. « Vous aurez de l’angoisse au monde », nous a dit Jésus. — Le repos, le bonheur, la gloire sont encore au-devant de nous. Eh bien ! chers frères, nous savons qu’il « reste un sabbatisme pour le peuple de Dieu » (Héb. 4, 9). La gloire nous est promise par le même Dieu qui nous a fait part de la grâce. Dès à présent, nous sommes adoptés par Lui en Jésus Christ, à la louange de la gloire de Sa grâce. Bientôt nous serons à la louange de Sa gloire (Éph. 1, 6, 12). Bientôt, oui bientôt, l’Église réalisera, mais d’une manière toute céleste, les types de l’année du relâche et du Jubilé… « Il est juste, devant Dieu… qu’à vous qui êtes dans la tribulation, il donne du relâche avec nous, en la révélation du Seigneur Jésus » (2 Thess. 1, 6, 7). Bientôt, grâce à l’œuvre expiatoire de Christ, nous serons revêtus d’un corps glorifié, et introduits par Lui, selon Sa promesse, dans la maison du Père où il y a beaucoup de demeures. « Je vais, dit-il, vous préparer une place ; et quand je serai allé, et que je vous aurai préparé une place, je reviendrai, et je vous prendrai auprès de moi, afin que là où je suis vous soyez aussi » (Jean 14, 2, 3). « Quand le Christ aura été manifesté, lui qui est notre vie, alors nous aussi serons avec lui manifestée en gloire » (Col. 3, 4). Toute gloire appartient à Jésus, mais nous sommes, par adoption et rédemption, devenus Ses cohéritiers — et Il a dit au Père : « Je leur ai donné la gloire que tu m’as donnée » (Jean 17, 22).

Ces « très grandes et précieuses promesses » s’accompliront pour nous au moment où le Seigneur descendra du ciel. Alors les saints qui se sont endormis en Lui ressusciteront à Sa voix, et nous, les vivants qui resterons, serons enlevés ensemble avec eux, sur les nuées, à la rencontre du Seigneur en l’air (1 Thess. 4, 16, 17). Et chose remarquable ! de la même manière que le Jubilé était introduit au son de la trompette, c’est aussi au son de la trompette de Dieu, car la trompette sonnera, que les morts en Christ se réveilleront incorruptibles, et que nous serons transmués, en un instant, en un clin d’œil (1 Cor. 15, 52).

Est-ce là, chers frères, ce que nous attendons tous ? Est-ce là pour nous l’avenir, le seul avenir ? — La dernière parole que, dans les Écritures, le Seigneur Jésus adresse à Son Église : « Voici, je viens bientôt » — est-elle une précieuse réalité pour nos âmes ? Les derniers mots que, dans les Écritures, le Seigneur Jésus ait mis dans la bouche de son Église : « Oui, viens, Seigneur Jésus ! » sont-ils souvent répétés par nous, comme l’expression sincère du désir de nos cœurs ?

Il est bien important de pouvoir répondre affirmativement à ces questions ; en effet, l’attente du Seigneur Jésus a pour nous l’influence la plus active sur tous les détails de la sanctification pratique. C’est ce que nous désirons faire voir en développant encore deux passages de notre chapitre, les seuls, nous semble-t-il, qui nous restent à traiter pour que le sujet en soit épuisé, du moins selon nos faibles lumières et notre petite mesure d’intelligence.

Versets 14 à 16 : « Si tu fais quelque vente à ton prochain, ou si tu achètes quelque chose de ton prochain, que nul de vous ne foule son frère ; mais tu achèteras de ton prochain selon le nombre des années après le Jubilé ; pareillement on te fera les ventes selon le nombre des années du rapport. Selon qu’il y aura plus d’années, tu augmenteras le prix de ce que tu achètes ; et selon qu’il y aura moins d’années, tu le diminueras ; car on te vend le nombre des récoltes ».

Cette clause de l’ordonnance est bien facile à concevoir : Chaque Israélite rentrant, au Jubilé, en ses possessions, il est bien évident que ce n’était proprement pas les terres que l’on vendait, mais seulement un nombre de récoltes plus ou moins considérable, selon que le Jubilé était plus ou moins éloigné. Ainsi celui qui vendait son champ deux ans après le Jubilé n’en vendait que l’usufruit de quarante-sept ans, ou plutôt de quarante ans, car il fallait retrancher encore les années du repos de la terre, pendant lesquelles il n’y avait point de récoltes. Celui qui vendait sa vigne deux ans avant le Jubilé ne vendait donc qu’une ou deux vendanges de cette vigne. Ainsi donc les propriétés foncières variaient de prix, suivant que le Jubilé était plus ou moins rapproché. Plus cette année de rédemption et de rétablissement de toutes choses était éloignée, plus les biens de la terre avaient de valeur ; plus, au contraire, elle était proche, et moins toutes les possessions terrestres avaient de valeur. — Eh bien ! chers amis, il en a toujours été, il en est toujours ainsi dans l’Église.

Tant que les rachetés de Christ ont gardé la parole de l’attente du Seigneur (Apoc. 3, 10) ; tant qu’ils ont réellement cru que « la nuit est fort avancée et que le jour est approché » (Rom. 13, 12) ; tant qu’ils ont pu répéter avec Paul : « Nous les vivants qui resterons » à l’arrivée de Jésus ; tant que chacun d’eux a pu dire avec David : « Mon âme attend le Seigneur, plus que les sentinelles n’attendent le matin, plus que les sentinelles n’attendent le matin » (Ps. 130, 6), leurs affections, déprises des choses d’en bas, se portaient sans effort vers celles du ciel : là étaient leurs biens, leur trésor, leur vie, leur repos, leur gloire, leur cité, leur patrie, leur maison éternelle, Celui qu’ils aimaient, et, par conséquent, leurs cœurs, leurs pensées, leur conversation. C’étaient des nazaréens plus nets que la neige, et plus blancs que le lait. Ils marchaient sur la terre, en étrangers et voyageurs, en bourgeois des cieux ; n’aimant point le monde ni les choses qui sont dans le monde, mais au contraire montrant par toute leur vie, par leur modération, leur désintéressement, leur sobriété à tous égards, leur esprit toujours content, qu’ils étaient morts au monde. Ils comprenaient d’autant mieux qu’ils la réalisaient chaque jour, cette exhortation de Paul aux saints de Corinthe : « Or je dis ceci, frères, que le temps se resserre désormais ; afin que même ceux qui ont des femmes soient comme n’en ayant point ; et ceux qui pleurent, comme ne pleurant pas ; et ceux qui se réjouissent, comme ne se réjouissant pas ; et ceux qui achètent, comme ne possédant pas ; et ceux qui usent de ce monde, comme n’en usant pas ; car la figure de ce monde passe » (1 Cor. 7, 29-31). Leurs richesses étant au ciel, ils prenaient au sérieux et à la lettre la défense du Seigneur Jésus : « Ne vous amassez point des trésors sur la terre » (Matt. 6, 19). Ils n’avaient pas l’idée « d’entasser pour eux-mêmes de la boue épaisse » (Hab. 2, 6). Leurs mœurs étaient sans amour de l’argent, étant contents de ce qu’ils avaient (Héb. 13, 5). Comme Paul ils pouvaient dire : « Je suis initié, en tout et partout, soit à être rassasié soit à avoir faim, soit à être dans l’abondance soit à être dans l’indigence. Je puis tout dans le Christ qui me fortifie » (Phil. 4, 12, 13).

Mais dès que les chrétiens ont perdu de vue cette précieuse vérité, dès que les serviteurs ont dit : « Le Seigneur tarde à venir » ; dès qu’une science faussement ainsi nommée eut traité d’exaltation l’attente de Jésus et eut enseigné à n’appliquer qu’à la mort les passages si nombreux relatifs à l’événement du Christ ; dès l’instant où l’on confondit généralement l’arrivée de Jésus dans les nuées pour l’Église, et la venue du Fils de l’homme, avec l’Église et sur la terre, pour le jugement du monde, et qu’en conséquence on mit arbitrairement avant la première l’accomplissement de certains événements que les Écritures disent devoir précéder la seconde ; dès l’instant où l’on remplaça l’évangile du règne que prêchaient Jean, Jésus et les apôtres, par le règne de l’évangile qui n’est qu’une invention humaine ; dès l’instant que l’homme crut pouvoir travailler à l’avancement du règne de Christ, comme on le dit, et que l’on rêva la conversion de nations en masse, malgré les déclarations aussi formelles et aussi positives que Luc 17, 26-30 ; 2 Timothée 3, 1-5, 13 ; 2 Thessaloniciens 2, 1-12, etc., alors, tout naturellement, les enfants de Dieu ainsi égarés et mal enseignés attendirent, non plus le Seigneur, mais la réalisation des rêves de leur imagination et de leurs sentiments. Et quel fut le principal résultat moral de cette déviation de la vérité ? Hélas ! il n’est encore que trop manifeste en tout lieu : n’est-il pas évident que l’esprit mondain est entré dans l’Église et l’a envahie, à proportion que l’attente de Jésus s’en retirait ! Oui, l’Église en cessant de croire à la proximité du retour du Sauveur et par conséquent à celle de l’introduction du Jubilé céleste et glorieux qui l’attend lors même qu’elle ne l’attendrait plus… l’Église s’est mondanisée ; elle s’est placée sous le patronage des grands, des nobles, des riches et des puissants du siècle ; elle a méconnu et souillé son nazaréat et s’est enivrée du vin et de la cervoise du monde ; elle s’est unie et mélangée avec les ennemis de son Sauveur ; elle a cherché à s’établir ici-bas et à y trouver de l’aisance, de l’honneur et du repos. De là chez les saints une marche souvent si relâchée ; des pensées, des opinions, un langage, des actes, qui n’ont que trop de rapport avec les actes, le langage, les opinions et les pensées du monde, dont ils devraient être le contraste. Ils n’ont plus voulu être citoyens du ciel seulement ; les biens célestes qui seuls nous sont promis et assurés en Christ, ne leur ont plus suffi ; ils ont recherché leurs propres intérêts plus encore que ceux de Jésus Christ ; on a pu dire d’eux aussi que leurs pensées étaient aux choses de la terre. La vocation céleste a été méconnue et oubliée. Le caractère d’étrangers et voyageurs a été regardé comme une exagération ; le sel a perdu sa saveur ; l’égoïsme, l’avarice, la mondanité ont ravagé, affaibli et déshonoré, pendant de longs siècles, l’Église de Dieu. Hélas ! on ne pouvait plus dire comme aux premiers temps : « Ici est le peuple céleste du Seigneur, la réunion de ceux qui ne sont pas du monde, comme Jésus n’était pas du monde ; de ceux qui, à l’exemple de leur Maître, rendent du monde le témoignage que ses œuvres sont mauvaises ; — là est le monde, toujours ennemi de Jésus, le monde dont Satan est le dieu ».

Mais malgré toutes les infidélités de l’Épouse du Christ, le cœur de Jésus ne peut pas un instant l’oublier et la délaisser. Si nous ne croyons pas, Lui demeure fidèle : Il ne peut se renier Lui-même. Aussi, par Sa patiente grâce, de meilleurs jours semblent luire maintenant pour l’Église. Aujourd’hui plus que jamais peut-être, depuis les temps apostoliques, elle est de nouveau exhortée à se réveiller pour attendre son Seigneur. En tout lieu, Dieu suscite de nombreux témoins de la prochaine apparition de Jésus, cette vérité de toute importance sur laquelle la Parole insiste et revient peut-être plus fréquemment que sur aucune autre. Aujourd’hui plus que jamais, le Saint Esprit fait répéter de tous côtés : « Considérons la saison où nous sommes, parce que c’est ici l’heure de nous réveiller du sommeil ; car maintenant le salut (le vrai Jubilé) est plus près de nous que lorsque nous avons cru ». De toutes parts le cri se fait entendre : « Voici, l’Époux vient, sortez à sa rencontre ». — Qu’est-ce que cela prouve, sinon que le temps est proche ! — Veuille le Seigneur, qui agit ainsi en grâce envers Ses pauvres et pourtant bienheureux enfants, nous donner de comprendre, du cœur et d’une manière pratique, ces appels qu’Il nous adresse, et que l’on voie de plus en plus les saints frères se glorifier dans l’espérance de la gloire de Dieu, vivre comme étant toujours à la veille du jour solennel où la trompette sonnera, pour proclamer l’éternel Jubilé. Alors aussi ils comprendront toujours mieux, en s’y conformant avec bonheur, des exhortations telles que celle-ci : « Cherchez les choses d’en haut, où le Christ est assis à la droite de Dieu ; pensez aux choses d’en haut, et non à celles qui sont sur la terre ».

Mais si l’attente du Seigneur doit détacher nos cœurs des biens, des joies et des vanités d’en bas, elle n’a nullement pour tendance de nous détourner du chemin de l’obéissance et, en particulier, de l’œuvre de la foi et du travail de l’amour soit envers nos frères soit envers nos semblables. Rien n’est plus propre, au contraire, à en renforcer la responsabilité dans nos consciences. C’est ce que nous désirons faire voir en terminant.

Dieu avait bien prévu que la cupidité, l’égoïsme, la paresse ou l’insouciance de méchants Israélites pouvaient se prévaloir, à leur profit, de l’approche de l’année sabbatique ou de celle du Jubilé. Il y avait, en effet, moyen de spéculer là-dessus et d’en faire une occasion de gain, ou un moyen de justifier son avarice et sa dureté. On pouvait dire : « L’année de la réhabilitation des pauvres approche ; alors ils connaîtront de nouveau l’abondance ; je puis donc me passer de leur tendre la main et de les secourir : il leur reste si peu de temps à souffrir. D’ailleurs, alors toutes les dettes seront remises : ce serait une duperie et une perte pour moi que de leur prêter maintenant ; aussi je m’en garderai bien. Tel ou tel de mes frères est l’esclave d’un étranger ; je pourrais le racheter, mais voici bientôt le Jubilé qui le rendra libre ; pourquoi donc emploierais-je mon argent pour lui épargner un temps si court de servitude ? Attendons tranquillement que la trompette de l’affranchissement sonne : il peut bien se passer de moi ».

Or voici comment Dieu répondait à ces calculs de l’intérêt personnel : « Quand un de tes frères sera pauvre au milieu de toi, en quelque lieu de ta demeure, dans le pays que l’Éternel, ton Dieu, te donne, tu n’endurciras point ton cœur, et tu ne resserreras point ta main à ton frère, qui sera pauvre. Mais tu ne manqueras pas de lui ouvrir ta main, et de lui prêter sur gages, autant qu’il en aura besoin pour son indigence, dans laquelle il se trouvera. Prends garde à toi, que tu n’aies dans ton cœur quelque méchante pensée, et que tu ne dises : La septième année, qui est l’année de relâche, approche, et que ton œil étant malin contre ton frère pauvre, afin de ne lui rien donner, il ne crie à l’Éternel contre toi, et qu’il n’y ait du péché en toi. Tu ne manqueras point de lui donner, et ton cœur ne lui donnera point à regret » (Deut. 15, 7-10).

Et dans notre chapitre, voyez aussi toutes les recommandations, en rapport avec le Jubilé, que Dieu fait à Son peuple : « Quand ton frère sera devenu pauvre, et qu’il tendra vers toi ses mains tremblantes, tu le soutiendras ; tu soutiendras aussi l’étranger et le forain, afin qu’il vive avec toi. Tu ne prendras point de lui d’usure ni d’intérêt ; mais tu craindras ton Dieu, et ton frère vivra avec toi. Tu ne lui donneras point ton argent à usure, ni ne lui donneras de tes vivres à surcroît. Je suis l’Éternel, votre Dieu, qui vous ai retirés du pays d’Égypte, pour vous donner le pays de Canaan, afin de vous être Dieu. Pareillement, quand ton frère sera devenu pauvre auprès de toi, et qu’il se sera vendu à toi[21], tu ne te serviras point de lui comme on se sert des esclaves ; mais il sera chez toi comme serait le mercenaire et l’étranger, et il te servira jusqu’à l’année du Jubilé… Tu ne domineras point sur lui rigoureusement ; mais tu craindras ton Dieu » (vers. 35-43).

On le voit, la glorieuse perspective du Jubilé ne nous dispense point de nos devoirs actuels, mais au contraire elle nous y encourage et nous y excite. Quelque rapprochée que soit pour nos cœurs cette perspective de « la bienheureuse espérance, et de l’apparition de la gloire de notre grand Dieu et Sauveur Jésus Christ, la grâce de Dieu ne nous instruit pas moins à renoncer à l’impiété et aux désirs mondains, et à vivre dans le présent siècle sagement, justement et pieusement ».

Sans doute, en divers temps, d’impies fanatiques ont su habilement exploiter de téméraires et absurdes prédictions d’une prétendue fin du monde, pour s’enrichir aux dépens des foules crédules ; mais les enfants de Dieu, dociles aux enseignements de la Parole, seront toujours gardés de pareilles énormités. Rien, plus que la conviction du retour prochain de Jésus, ne les poussera à l’obéissance et à la sainteté : c’est là, ne l’oublions pas, le grand motif, le motif ordinairement présenté par l’Écriture à l’appui des préceptes qu’elle donne aux saints ; on peut dire qu’il n’est pas un devoir, pas un détail de la marche de l’enfant de lumière qui ne soit étayé sur ce fait si prochain, si certain, si solennel, si glorieux.

Dira-t-on, par exemple, que l’attente journalière de l’avènement de Jésus nous rendra indifférents aux misères morales ou temporelles de notre prochain ? Quant à nous, nous estimons que rien n’est plus capable de nous donner une chrétienne sympathie pour ces misères. En effet, ne pensez-vous pas que Noé, prédicateur de la justice, Noé, averti d’avance des jugements qui allaient fondre sur le monde des impies, conjurait avec d’autant plus d’ardeur ses contemporains de se convertir et de fuir la colère à venir, en se réfugiant dans l’arche, que le répit des cent vingt ans accordés par l’Éternel, s’approchait de son terme ? Et nous, bien-aimés, si nous croyons véritablement que le Seigneur est près, et qu’une fois Celui qui maintenant fait obstacle ôté, l’inique sera révélé, en toute séduction d’injustice en ceux qui périssent ; l’efficace d’erreur leur sera envoyée pour qu’ils croient le mensonge ; le temps de la patience et de la grâce sera passé pour eux ; l’apostasie sera à son comble, amenant à sa suite la grande tribulation et le jugement… oui, si nous croyons vraiment ces choses, dont, nous aussi, nous avons été divinement avertis — ah ! je vous le demande, pourrons-nous demeurer indifférents au sort de ceux qui nous entourent ? Ne serons-nous pas pressés de leur crier de se sauver du milieu de la génération perverse qui va à la perdition, de croire en Jésus afin qu’ils soient rendus dignes d’éviter toutes ces choses qui doivent arriver, et d’être mis au nombre de ceux que Jésus gardera hors de l’heure de la tentation qui doit venir sur toute la terre, pour tenter ceux qui habitent sur la terre (Apoc. 3, 10) ? Ces convictions ne sont-elles pas puissantes pour pousser chaque racheté de Christ à rendre un fidèle témoignage à la grâce et à la vérité de son Dieu, à porter au-devant de lui la Parole de la vie ; puis aussi pour exciter ceux que le Seigneur a donnés comme messagers de la bonne nouvelle à proclamer le salut en Jésus, seul nom sous le ciel qui ait été donné aux hommes, par lequel ils puissent être sauvés ? Et d’un autre côté, n’est-elle pas aussi décourageante que décevante, l’attente d’un règne spirituel de Christ et de la conversion des peuples par le moyen de la prédication de l’évangile, attente toujours trompée depuis des siècles, toujours plus démentie par les faits, et qui n’en continue pas moins à être le mobile des travaux missionnaires d’un grand nombre de pieux ouvriers du Seigneur ?

Quant aux misères temporelles du prochain, comment serait-il possible que l’espérance de la gloire et de l’apparition de Jésus nous rendît indifférents à leur soulagement : puisque, d’un côté, comme nous l’avons vu, cette espérance détache nos cœurs des biens de la terre, et que, d’un autre, nous savons que le Seigneur se plaira tout particulièrement à reconnaître et à récompenser, en grâce, les œuvres de l’amour ? Au reste, ouvrons la Parole et nous verrons comment elle sait rattacher ces œuvres à l’attente de Jésus Christ.

1 Thess. 3, 12, 13 : « Que le Seigneur vous fasse augmenter et abonder en amour les uns à l’égard des autres et à l’égard de tous… pour affermir vos cœurs sans reproche dans la sainteté, devant notre Dieu et Père, à l’arrivée de notre Seigneur Jésus Christ avec tous ses saints ».

Héb. 10, 24, 25 : « Prenons garde les uns aux autres, pour nous exciter à l’amour et aux bonnes œuvres ; n’abandonnant pas notre rassemblement entre nous, comme c’est la coutume de quelques-uns, mais nous exhortant, et cela d’autant plus que vous voyez approcher le jour ».

Citons enfin quelques passages, entre beaucoup d’autres, qui prouvent la tendance pratique et sanctifiante, en général, de la croyance à la proximité du céleste Jubilé ; ils démontreront l’importance majeure que doit avoir cette vérité aux yeux de tout chrétien qui désire glorifier le Seigneur. — En effet elle nous est présentée comme motif à l’amour pour Christ.

1 Cor. 16, 22 : « Si quelqu’un n’aime pas le Seigneur Jésus Christ, qu’il soit exécration, Maranatha, c’est-à-dire : Notre Seigneur vient ».

À la mortification des convoitises charnelles.

Col. 3, 4, 5 : « Quand le Christ aura été manifesté, lui qui est notre vie, alors vous aussi serez avec lui manifestés en gloire. Faites donc mourir vos membres qui sont sur la terre, la fornication, l’impureté, les passions, les mauvais désirs, et l’avarice qui est une idolâtrie ».

À l’obéissance, à la sainteté, en général.

1 Jean 2, 28 : « Et maintenant, petits enfants, demeurez en lui ; afin que, lorsqu’il sera manifesté, nous ayons assurance, et que nous ne soyons pas couverts de honte de par lui, à son arrivée ». — Ibid. 3, 2, 3 : « Nous savons que, lorsqu’il aura été manifesté, nous lui serons semblables, parce que nous le verrons tel qu’il est. Et quiconque a cette espérance en lui se purifie, comme lui est pur ».

2 Pier. 3, 14 : « C’est pourquoi, bien-aimés, en attendant ces choses, empressez-vous à être trouvés par lui sans tache et sans défaut dans la paix ».

À nous garder des jugements téméraires.

1 Cor. 4, 5 : « Ne jugez de rien avant le temps, jusqu’à ce que vienne le Seigneur, etc.

À la vigilance.

Luc 12, 35-37 : « Que vos reins soient ceints, et vos lampes allumées. Et soyez semblables à des hommes qui attendent leur Seigneur, quand il s’en ira des noces ; afin que lorsqu’il sera venu, et qu’il aura heurté, ils lui ouvrent aussitôt. Bienheureux ces esclaves-là que le Seigneur, en arrivant, trouvera veillant !

Marc 13, 33-37 : « Voyez, veillez et priez ; car vous ne savez quand est le temps. Comme un homme qui s’en va au loin laisserait sa maison, et donnerait autorité à ses esclaves, et à chacun son œuvre, et commanderait au portier qu’il veillât, veillez donc, car vous ne savez quand vient le maître de la maison, au soir, ou à minuit, ou au chant du coq, ou au matin, de peur qu’arrivant tout à coup, il ne vous trouve endormis. Or ce que je vous dis, je le dis à tous : Veillez »[22].

À la patience et au support.

Héb. 10, 36, 37 : « Vous avez besoin de patience, afin qu’après avoir fait la volonté de Dieu, vous remportiez la promesse. Car encore un peu, très peu de temps, et Celui qui vient arrivera, et il ne tardera pas ».

Jacq. 5, 7, 8 : « Usez donc de patience, frères, jusqu’à l’arrivée du Seigneur. Voici, le cultivateur attend le précieux fruit de la terre, usant en cela de patience… Usez de patience, vous aussi ; affermissez vos cœurs ; parce que l’arrivée du Seigneur est proche ».

1 Pier. 4, 12, 13 (conf. 1 Pier. 1, 6, 7) : « Bien-aimés, ne trouvez point étrange qu’il y ait au milieu de vous une fournaise pour votre tentation, comme s’il vous arrivait quelque chose d’étrange ; mais, selon que vous participez aux souffrances du Christ, réjouissez-vous ; afin qu’aussi, en la révélation de sa gloire, vous vous réjouissiez avec allégresse ».

À la douceur, à la sobriété, à une confiance sans inquiétude.

Phil. 4, 5, 6 : « Que votre modération soit connue de tous les hommes. Le Seigneur est près ; — ou Le Seigneur est près. Ne vous inquiétez de rien ».

1 Pier. 1, 13 : « Ayant ceint les reins de votre entendement, et étant sobres, espérez parfaitement dans la grâce qui vous est apportée, en la révélation de Jésus Christ ».

À la fidélité dans le service et dans l’exercice des dons que l’on a reçus du Seigneur pour l’avantage commun.

1 Tim. 6, 13-15 : « Je te recommande devant le Dieu qui fait vivre toutes choses, et le Christ Jésus qui fit la belle confession devant Ponce Pilate, de garder le commandement, sans tache, sans reproche, jusqu’à cette apparition de notre Seigneur Jésus Christ, que montrera en ses propres temps le bienheureux et seul Souverain, le Roi de ceux qui règnent, et le Seigneur de ceux qui dominent ». Voir aussi 2 Timothée 4, 1, 2.

1 Pier. 5, 1-4 : « J’exhorte les anciens qui sont parmi vous, moi qui suis ancien avec eux, et témoin des souffrances du Christ, et qui ai aussi communication de la gloire qui doit être révélée ; paissez le troupeau de Dieu qui est parmi vous ; surveillant, non par contrainte, mais de bon gré ; non pour des gains honteux, mais de bon cœur ; non point comme dominant sur les héritages, mais en étant les modèles du troupeau. Et lorsque le souverain berger aura été manifesté, vous recevrez la couronne inflétrissable de la gloire ».

Combien de déclarations scripturaires ne pourrions-nous pas citer encore ! S’agit-il du but de Dieu en convertissant à Lui les pécheurs, ce but est double : 1° servir le Dieu vivant et véritable ; 2° « attendre des cieux son Fils qu’il a réveillé d’entre les morts, Jésus, qui nous délivre de la colère à venir ». 1 Thess. 1, 9, 10. — S’agit-il de consolations à donner à ceux qui mènent deuil sur des parents qui se sont endormis en Jésus : « Consolez-vous les uns les autres par ces paroles », dit l’apôtre. Voyez dans 1 Thess. 4, 13-17 quelles sont ces paroles. — S’agit-il de savoir à qui le Seigneur se manifestera quand Il reviendra, nous lisons qu’Il « sera vu une seconde fois sans péché, par ceux qui l’attendent pour le salut » (Héb. 9, 28). — S’agit-il de la question de savoir jusqu’à quand l’Église doit faire la cène en mémoire de Jésus, il est dit qu’en mangeant ce pain, et en buvant cette coupe, nous annonçons la mort du Seigneur, jusqu’à ce qu’Il vienne. — S’agit-il de la confiance que nous pouvons et devons avoir en Celui qui nous a aimés, chaque fidèle peut dire, quant à lui-même, comme Paul : « Je sais qui j’ai cru, et je suis persuadé qu’il est puissant pour garder mon dépôt jusqu’à ce jour-là » (2 Tim. 1, 12). — Et quant à nos frères : « Étant bien persuadé de ceci, que celui qui a commencé en vous une bonne œuvre, l’achèvera jusqu’au jour de Jésus Christ » (Phil. 1, 6). Enfin, s’il est une couronne de la justice, dont Paul, près de sceller par la mort son fidèle service, disait : « Le Seigneur, le juste juge, me la rendra en ce jour-là », qui sont ceux qui doivent recevoir avec lui cette distinction spéciale ? « Et non seulement à moi, ajoute-t-il, mais à tous ceux qui auront aimé son apparition » (2 Tim. 4, 8).

Que pourrais-je ajouter à cette masse de témoignages en faveur de la sérieuse responsabilité, sous laquelle nous sommes de garder la parole de l’attente du Seigneur, et par conséquent de l’attente du vrai Jubilé, sinon cette exhortation de Jésus Lui-même à chacun de ceux qui gardent cette parole : « Retiens ce que tu as, afin que nul ne prenne ta couronne » (Apoc. 3, 11) ; sinon encore ce vœu de Paul, que j’élève pour nous tous au Père de toute grâce : « Que le Seigneur dirige nos cœurs vers l’amour de Dieu et vers l’attente patiente du Christ (2 Thess. 3, 5) ?

Or, à Celui qui peut nous garder exempts de chute, et nous présenter devant Sa gloire, sans défaut et dans l’allégresse, à Dieu seul sage, notre Sauveur, gloire et majesté, pouvoir et autorité, et maintenant et pour tous les siècles, Amen !




  1. Voir Messager Évangélique 1951.
  2. Littéralement : « les raisins de ta séparation », ou de « ta vigne dans son état de nazaréat » [allusion aux longs cheveux du nazaréen] ; ou encore « les raisins dans leur état de consécration » à Dieu.
  3. Voir encore 2 Chron. 7, 20 ; Ps. 39, 12 ; És. 8, 8 ; 14, 2, 25 ; Joël 2, 18.
  4. Voir pour le développement de ces pensées, une note, p. 130 ss. des Études sur la Parole, par J.N. Darby, t. 1.
  5. « Une parole de Bélial ». Voir Études Scripturaires n° 3.
  6. Flavius Joséphus. — Antiquités Judaïques, Livre 11, chap. 8.
  7. Un autre mot hébreu (Theroumah) traduit quelques fois par jubilation, par exemple, au verset 9 de notre chapitre, en Lévitique 23, 24 ; Nombres 29, 1, l’est ailleurs par retentissement bruyant (Nomb. 10, 5, 6 ; 2 Chron. 13, 12 ; Jér. 4, 19 ; 20, 16) ; par cris de joie (Jos. 6, 5, 20 ; 1 Sam. 4, 5, 6, etc.) ; par cris de réjouissance (Ps. 27, 6 ; 33, 3 ; 47, 5 ; 89, 15 ; 150, 5 ; voir ces passages dans la version de Perret-Gentil) ; et enfin par alarme (Jér. 49, 2 ; Éz. 21, 27 ; Amos 1, 14 ; 2, 2 ; Soph. 1, 16 ; — dans tous ces passages Perret-Gentil dit : cris de guerre). Une idée commune à toutes ces diverses acceptions du même mot, c’est encore le son des trompettes.
  8. Comparez le grec avec Exode 28, 2, dans les Septante, vous trouverez les mêmes expressions, rendues ici par gloire et honneur et dans l’Exode par gloire et ornement. J’ai déjà rappelé (Études scripturaires n° 2) que, en général, c’est d’après les Septante que l’auteur de l’épître aux Hébreux cite l’Ancien Testament ; j’ajouterai, en passant, qu’il est tel passage (Héb. 11, 5, par exemple) qui n’est intelligible qu’autant que l’on tient compte de ce fait… « Avant sa translation, Énoch avait reçu le témoignage d’avoir été agréable à Dieu ». Cela n’est pas dit formellement dans nos traductions de Genèse 5, 22, 24 ; mais c’est ainsi que les Septante ont traduit le commencement de ces versets : « Énoch fut agréable à Dieu », au lieu de : « Énoch marcha avec Dieu ». De même dans Genèse 6, 9 ; 17, 1, etc. où le même verbe se trouve.
  9. Le mot rendu deux fois par liberté dans le verset 19 de Luc 4, est ἄφεσις ; c’est le même mot qui est employé par les Septante dans Lévitique 25, 10, 11, 12, 13, etc., pour dire Jubilé et liberté. Au verset 10 : διαβοήσετε ἄφεσιν, vous publierez la liberté. Versets 10-13 : ἔνιαυτὸς ἀφέσεως, ou ἀφέσεως σημασία, année ou signal de liberté. Le même mot est traduit par relâche et appliqué à l’année sabbatique dans Deutéronome 15. Josèphe appelle le Jubilé l’année de la liberté (ἐλευθερίας).
  10. L’arc de triomphe, érigé à Rome pour célébrer la victoire de Titus sur les Juifs, subsiste encore et, selon toute probabilité, subsistera jusqu’à ce que les temps des Gentils soient accomplis, redisant d’âge en âge l’opprobre d’Israël et son assujettissement aux Gentils. En témoignage de quoi, sont sculptées sur ce trophée les principales dépouilles enlevées par le vainqueur au temple de Jérusalem ; telles que le chandelier d’or, représentant jadis Israël comme lumière au milieu des ténèbres ; la table des pains de proposition, dépouillée de ses pains, vu que les douze tribus qu’ils figuraient, sont dispersées ; et enfin les deux trompettes d’argent, dont on sonnait jadis dans les jours de réjouissance du peuple, et aussi pour annoncer le Jubilé. Ces objets, qui faisaient un jour la gloire des enfants de Jacob, n’existent plus qu’en effigie, sur ce monument de l’orgueil de leurs oppresseurs gentils. Preuve frappante de l’I-Cabod prononcé sur eux, et de leur privation de Jubilé.
  11. ἂφεσις, proprement rémission, acquittement, libération (voir une note précédente). À cet égard, nous dirons encore qu’un résidu juif comprenait probablement dans un autre sens que nous, cette demande de la prière du Seigneur : « Remets-nous nos dettes, comme nous les remettons nous-mêmes à nos débiteurs » (Matt. 6, 12), ou comme dans Luc 11, 4 : « Remets-nous (même verbe ἂφες qu’en Matt. 6) nos péchés, car nous aussi, nous remettons les dettes à quiconque nous doit ». Ce motif (car) faisait allusion à un fait positif ; chaque septième année, tout Juif fidèle était tenu de remettre les dettes à tous ses débiteurs. Que ceux à qui Jésus parlait constituassent alors un résidu de disciples juifs et non pas l’Église, c’est ce qu’il est bien facile de prouver. Sans vouloir ici traiter ce sujet, je me bornerai à rappeler ces paroles que, plus tard, le Seigneur adressait à Pierre après la confession de celui-ci : « Sur cette pierre j’édifierai mon Église ». Elles montrent suffisamment que l’Église était à venir et n’avait pas encore reçu l’existence (voir dans les Études Scripturaires n° 2, une note au début).
  12. Ces mots rappelleront probablement à plus d’un lecteur les versets 22 et 23 de 1 Corinthiens 7 : « L’esclave appelé en notre Seigneur est un affranchi du Seigneur ; pareillement aussi l’homme libre appelé est un esclave de Christ. Vous avez été achetés à prix ; ne devenez pas esclaves des hommes ».
  13. Il n’y avait d’exception que pour les maisons des Israélites, non-Lévites, placées dans des villes fermées de murailles. Si ces maisons n’étaient pas rachetées dans l’année accomplie, elles demeuraient à l’acheteur absolument (v. 29, 30). C’est-à-dire probablement, que ce qui était tout spécialement l’ouvrage de l’homme, pouvait bien être aliéné, Dieu ne garantissant la possession que de la terre, et des campagnes dont les villages étaient censés faire partie. Tout ce qui est racheté par le Seigneur subsistera ; tout ce qui est de l’homme sera consumé. Quant aux maisons des Lévites, mêmes dans les villes, elles ne pouvaient pas être aliénées, parce qu’elles étaient un don de Dieu à leur égard (Rom. 11, 29). Barnabas, Lévite, en vendant son champ, montrait que ses possessions étaient maintenant ailleurs qu’ici-bas (Act. 4, 36, 37).
  14. Et c’était encore là le rétablissement de toutes choses, car chacun rentrant dans sa possession, à chaque Jubilé, la terre de Canaan se trouvait ainsi de nouveau répartie entre les familles d’Israël, comme elle l’avait été dans l’origine par Josué.
  15. Goël, c’est le mot hébreu, traduit aux versets 25 et 26, par « celui qui a le droit de rachat ». — Il y aurait toute une étude à faire sur le Goël. Nous nous bornons à dire ici, que dans la traduction de Martin, il est tour à tour : celui qui garantit, Gen. 48, 16 ; Ps. 103, 4 ; celui qui a le droit de retrait lignager, Nomb. 5, 8 ; Ruth (neuf fois) ; celui qui a le droit de venger (le sang), ou de faire la vengeance (du sang), Nomb. 35, 12, 19, 21, 24, 25, 27 ; Deut. 19, 6, 12 ; Jos. 20, 3, 5, 9 ; le garant (du sang), 2 Sam. 14, 11 ; un garant, Prov. 23, 11 ; un parent, 1 Rois 16, 11 ; celui qui délivrait, Ps. 78, 35 ; ton défenseur, És. 41, 14 ; et enfin le Rédempteur, Job 19, 25 ; Ps. 19, 14 ; És. 43, 14 ; 44, 6, 24 ; 47, 4 ; 48, 17 ; 49, 7, 26 ; 54, 5, 8 ; 59, 20 ; 60, 16 ; 63, 16 ; Jér. 50, 34.
  16. J’ajoute que ce jour des expiations s’était répété pendant sept fois sept années, avant que le Jubilé fût proclamé : ce qui indique la plénitude et la perfection de l’expiation faite par Jésus une fois pour toutes.
  17. Les élus de ce dernier passage sont évidemment les dix tribus d’Israël.
  18. Juges 20, 45, 47 ; 21, 13 ; 2 Chron. 35, 22-25.
  19. « l’année de mes rachetés » ; de ceux en faveur de qui j’ai rempli le rôle de Goël (racheteur).
  20. En lisant attentivement ce passage, il est facile de voir qu’il n’avait pas rapport au retour de Babylone, car, ici, il s’agit de Juda et d’Éphraïm qui doivent être une seule nation, n’avoir qu’un seul roi etc., verset 22.
  21. Comme les deux fils de la pauvre veuve, 2 Rois 4, 1.
  22. Ces deux passages ont rapport au retour du Fils de l’homme, et par conséquent ils ne concernent pas directement l’Église ; mais ils sont aussi écrits pour nous quant à leur application pratique, qui, dans le dernier surtout, est des plus générales. On sait qu’il en est plusieurs autres dans le même sens.