Messager Évangélique:Une halte auprès de la rivière d’Ahava

De mipe
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On voit, dans le chapitre précédent, que Dieu avait disposé et préparé Esdras à aller rejoindre, en Judée, ceux de son peuple qui étaient remontés de Babylone avec Zorobabel, Joshua et Néhémie. Nous y voyons de plus que Dieu, qui incline même le cœur des rois à ce qu’il veut, avait préparé Artaxerxès à favoriser le projet d’Esdras, en sorte qu’il ordonna que tous les Israélites du royaume, qui se présenteraient volontairement pour aller à Jérusalem, fussent libres d’y monter avec Esdras. Et non seulement cela, mais encore le roi et ses sept ministres offrirent volontairement de l’or et de l’argent au Dieu d’Israël dont la demeure est à Jérusalem. Mais ce n’est pas tout, car Artaxerxès, dans son décret, dit à Esdras : « Et quant au reste qui sera nécessaire pour la maison de ton Dieu, autant qu’il t’en faudra employer, tu le prendras de la maison des trésors du roi. Et de ma part, Artaxerxès, roi, il est ordonné à tous les trésoriers qui sont au-delà du fleuve, que tout ce qu’Esdras, sacrificateur et scribe de la loi du Dieu des cieux, vous demandera, soit fait incontinent, jusqu’à cent talents d’argent, et jusqu’à cent cors de froment, et jusqu’à cent baths de vin, et jusqu’à cent baths d’huile, et du sel sans mesure », etc. (7, 21 et suiv.). À la fin du chapitre, Esdras bénit Dieu qui a mis une telle chose au cœur du roi, puis il assemble les chefs d’Israël, afin qu’ils montent avec lui. Dans la première partie du chapitre 8, nous avons le dénombrement des chefs des pères qui retournèrent avec Esdras, et leur rassemblement près de la rivière d’Ahava, d’où le départ eut lieu. Ce qui se passe là, au bord de cette rivière, au milieu de ces Israélites, est digne de toute notre attention.

Jusqu’ici la bonne main de Dieu avait été sur Esdras, il avait réussi bien au-delà de ses désirs. Toutefois il n’était pas au bout de son entreprise ; il y avait encore bien des difficultés à surmonter, car il fallait effectuer un voyage long, pénible et dangereux. Les Israélites avaient des ennemis qui leur dressaient des embûches sur le chemin. Comment surmonter ces obstacles ? Comment résister à ces ennemis ? Les Israélites n’étaient pas nombreux, tout au plus deux mille hommes, peut-être sans armes ; ils étaient faibles, bien faibles, et ils le sentaient, en présence des difficultés et des ennemis qui étaient sur le chemin. Ils ne pouvaient entreprendre un tel voyage sans protection, sans secours ! Mais le puissant roi Artaxerxès n’était-il pas là ? N’avait-il pas montré, par ses paroles et par ses actes, tant de bienveillance, tant d’intérêt pour cette entreprise, qu’il était impossible de supposer qu’Esdras essuyât un refus de sa part, s’il lui demandait des forces, des gens de cheval, des soldats, pour l’accompagner et le défendre lui et les siens ? Cette idée de demander des forces à Artaxerxès se présenta naturellement à l’esprit d’Esdras et occupa son cœur, mais la honte la lui fit bientôt abandonner. « Car, dit-il, j’eus honte de demander au roi des forces et des gens de cheval, pour nous défendre des ennemis, par le chemin, à cause que nous avions dit au roi, en termes exprès : La main de notre Dieu est favorable à tous ceux qui l’invoquent ; mais sa force et sa colère est contre ceux qui l’abandonnent » (v. 22).

En effet, demander des soldats au roi après lui avoir tenu de tels propos, c’eût été vraiment honteux, c’eût été manifestement mettre en contradiction sa profession avec sa conduite, ce qui est toujours honteux. Si Esdras avait donné suite à l’idée qu’il avait eue, et qu’il eût adressé sa demande au roi, celui-ci n’aurait-il pas été, par cela même, porté à penser et à dire : « Mais, ces gens me vantent leur Dieu — ils me disent qu’Il protège tous ceux qui L’invoquent et qu’Il punit tous ceux qui L’abandonnent ; ils me parlent de Sa grandeur et de Sa force : si ce qu’ils disent est vrai, qu’ont-ils donc à craindre ? Quel besoin ont-ils de mes soldats ? Ah ! sans doute qu’ils ne croient pas eux-mêmes ce qu’ils me disent ! Ce ne sont que des paroles ! Leur Dieu est comme les autres dieux ! ». On ne peut pas l’affirmer, mais il est probable qu’Esdras fit des réflexions de cette nature. Ce qu’il y a de certain, c’est qu’il vit bien que, s’il réclamait ce secours, il mettrait grossièrement en contradiction ses paroles avec sa conduite, et cela devant les yeux du roi. Ici encore la main de Dieu se montre bonne envers Esdras. Le Seigneur lui fit sentir ce qu’il y avait de honteux dans la pensée de demander des soldats au roi, et il y renonça.

Chers frères, nous professons l’évangile et nous disons, nous aussi, de grandes et belles choses de notre Dieu. C’est très bien : quelles que soient les louanges que nous en fassions, elles sont encore au-dessous de la réalité, car on ne peut pas, par des paroles, dire parfaitement ce que Dieu est. Sa majesté, Sa puissance, Sa justice, Son amour, tout cela est infiniment au-dessus de ce que nous pouvons penser et exprimer. Mais la profession publique de ma foi, si elle est sérieuse, me lie sérieusement. Elle détermine la conduite que j’ai à tenir, devant tous ceux qui l’entendent ou la connaissent : tout désaccord entre mes actes et ma profession déshonore Celui que je loue par mes paroles. Plus ma profession sera parfaite, plus mes paroles seront vraies, magnifiques, plus Dieu sera déshonoré, s’il y a contradiction entre ces paroles et mes actes. Je professe publiquement que Dieu est tout-puissant, qu’Il ne me perd jamais de vue, qu’Il est pour moi, qu’Il est mon père, et moi Son enfant qu’Il chérit — et l’on me voit inquiet, troublé, agité, sans confiance — contradiction ! inconséquence ! Je professe publiquement que le croyant n’est pas du monde, qu’il a été arraché au présent siècle mauvais — qu’ici, dans ce monde, il n’est qu’un étranger céleste — que sa portion, ses biens, sa vie sont en Christ, étant mort avec Lui, ressuscité avec Lui et assis avec Lui dans les lieux célestes — je professe que, d’un jour à l’autre, Jésus peut venir m’enlever et que je L’attends, mais voici que moi, ce croyant, ce professant, je manifeste que j’aime le monde et les choses qui y sont ; on voit, à n’en pas douter, que je prends plaisir à ajouter un champ à un autre, une somme à une autre, une gloire à une autre — contradiction ! inconséquence ! Or ces contradictions, quand elles existent, portent un préjudice considérable à l’évangile ; elles déshonorent, devant le monde, notre Dieu et Père, et éloignent de la vérité que nous professons bien des âmes encore faibles. Pénétrons-nous de tout ce qu’il y a de honteux dans ces contradictions. La Parole nous exhorte à marcher d’une manière digne de notre vocation — digne de Dieu. Si nous disons que nous avons communion avec Lui (et nous le disons) et que nous marchions dans les ténèbres, nous mentons. Celui qui dit : Je Le connais (et nous le disons), et qui ne garde pas Ses commandements, est menteur. — Celui qui dit demeurer en Lui (et nous le disons), doit lui-même aussi marcher comme Lui a marché. Celui qui dit qu’Il est dans la lumière (et nous le disons), et qui hait son frère est dans les ténèbres jusqu’à maintenant. Si quelqu’un dit : J’aime Dieu (et nous le disons) et qu’il haïsse son frère, il est menteur… (1 Jean). Nous professons, nous disons toutes ces choses et bien d’autres très belles, c’est très bien ; mais jugeons par les déclarations ci-dessus ce que vaut le dire, la profession, quand la marche le contredit.

Mais revenons un instant au bord de la rivière. Il fallait renoncer aux soldats du roi, la pensée seulement de demander un tel appui était un sujet de honte. Cette pensée n’était pas de Dieu, mais de l’ennemi. Cependant les dangers, les difficultés et les ennemis sont toujours là, et la faiblesse, l’impuissance aussi est là. On ne peut affronter tous ces dangers, résister à tous ces ennemis avec la force qu’on a. Que faire ? Que devenir ? Oh ! que Dieu est bon envers les siens ! Que Sa main fut miséricordieuse envers Esdras et sa troupe ! Dieu lui fit comprendre et sentir ce qu’il y avait de honteux dans la pensée qu’il avait eue de demander la protection d’une armée — Il lui donna ensuite la force de rejeter cette pensée — puis Il dirigea les yeux d’Esdras vers la montagne d’où le secours lui viendrait. Esdras publie le jeûne : on s’humilie, on prie ; on cherche, on demande le secours de Dieu, on se place corps et biens, sous sa protection. C’est avec la force qu’Esdras et ses compagnons avaient trouvée en Dieu, c’est avec le sentiment que Dieu s’était chargé de les protéger, qu’ils « partirent de la rivière d’Ahava le douzième jour du premier mois pour aller à Jérusalem ». Et dans ce voyage Esdras fit l’expérience que ce qu’il avait dit de son Dieu au roi, était parfaitement véritable. Il lui avait dit : « La main de notre Dieu est favorable à tous ceux qui l’invoquent » (v. 22) et au verset 31 dont j’ai cité la première moitié, il dit : « Et la main de notre Dieu fut sur nous ; et il nous délivra de la main de nos ennemis et de leurs embûches sur le chemin ». Oh ! qu’il serait désirable que quelque Esdras, sentant vivement ce qu’il y a de honteux dans les contradictions, les inconséquences nombreuses des chrétiens de nos jours, se levât du milieu de nous, pour « publier le jeûne, afin de nous humilier devant notre Dieu » ! Oh ! qu’il serait désirable que la honte d’Esdras devînt plus commune, et remplît nos cœurs chaque fois qu’une pensée indigne de Dieu, de Sa grâce, de Son amour, de Sa lumière, s’élève dans notre esprit ! Tout ce que nous disons, d’après l’Écriture, de notre Dieu est exactement vrai, et si, imitant Esdras, nous sommes conséquents avec ce que nous disons et professons ; comme lui aussi, nous ferons, dans notre voyage, la précieuse expérience de ce qu’il est pour nous, pour celui qui se confie en Lui, et ne veut dépendre que de Lui seul !