Traduction:Le jeûne

De mipe
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Matthieu 6, 16-18

Traduit de l’anglaisW. Kelly

[Bible Treasury N5, p. 70-71]

Il nous reste à peser les paroles de notre Seigneur sur le jeûne, comme la troisième partie de Son enseignement sur « la justice » (non « les aumônes ») dans le premier verset du chapitre. La prière tient la place intermédiaire entre les aumônes et le jeûne, la base pieuse et sainte pour garder les deux autres, en les liant ensemble avec la foi contre le formalisme.

« Et quand vous jeûnez, ne prenez pas, comme les hypocrites, un air morne, car ils donnent à leur visage un air défait, en sorte qu’il paraisse aux hommes qu’ils jeûnent. En vérité, je vous dis : ils ont déjà leur récompense ! Mais toi, quand tu jeûnes, oins ta tête et lave ton visage, en sorte qu’il ne paraisse pas aux hommes que tu jeûnes, mais à ton Père qui [demeure] dans le secret ; et ton Père qui voit dans le secret, te récompensera ».

Le Seigneur n’ordonne pas tant le jeûne, qu’Il ne le place, comme la prière, sous le principe chrétien d’avoir affaire à notre Père dans le secret. Il relève de la vie de foi individuelle. Cependant, sans aucun doute, Il le sanctionne et l’approuve, quand il est pratiqué ainsi ; et cela, indépendamment d’un objet plus public et en commun, tel que nous le trouvons en Actes 13, 2-3 ; 14, 23. Il laisse aussi entendre la valeur qu’il a pour la puissance spirituelle. Les hommes pieux ont toujours senti, et doivent sentir, son à-propos pour humilier l’âme devant Dieu, là où un besoin public ou privé appelait à l’humiliation. Mais même en Marc 9, 29, il est bon de noter que les deux plus anciennes copies omettent « et par le jeûne », comme aussi, avec d’autres autorités, tout le verset 21 de Matthieu 17, et qu’il n’y a pas un mot qui y corresponde en Luc 9. Toutefois, l’apôtre qui, plus que tous les autres, a été donné pour défendre la liberté en Christ, parle (en 2 Cor. 6, 5 ; 11, 27) simplement et pieusement de « jeûnes » et de « jeûnes souvent » dans son service, pour réprimander cette légèreté que trahissait l’assemblée des Corinthiens, et qui caractérise le christianisme moderne, sauf là où la superstition et la propre justice lui donnent une importance artificielle, dans une perspective très différente.

En Matthieu 9, 14, etc., le Seigneur montre sa place et son moment convenables, en répondant aux disciples de Jean qui disaient : « Pourquoi, nous et les pharisiens, jeûnons-nous souvent, et tes disciples ne jeûnent pas ? Et Jésus leur dit : Les fils de la chambre nuptiale peuvent-ils mener deuil tant que l’époux est avec eux ? Mais des jours viendront, lorsque l’époux leur aura été ôté ; et alors ils jeûneront ». Ni ceux qui étaient seulement disciples de Jean, ni encore moins les pharisiens remplis de formes et de propre justice, n’avaient une appréciation vraie de la présence de l’Époux. C’était la joie des disciples croyants de Jésus. Tout faibles qu’ils étaient, ils avaient tout quitté pour Lui, et ils goûtaient en Lui un bonheur entièrement inconnu aux autres, qui n’étaient pas du tout prêts pour l’affreuse signification de Sa disparition, pour eux et pour les Juifs, bien que les vrais disciples ne saisissaient que peu ce fait solennel qui approchait avec ses immenses conséquences. La joie de la présence du Messie rendait le jeûne tout à fait inapproprié. Ceux qui n’en goûtaient rien étaient aveugles quant à Celui que la grâce de Dieu avait donné et envoyé. Leurs ténèbres seraient encore bien plus grandes, quand l’Époux aurait été ôté. Alors, ceux qui croyaient en Lui et L’aimaient jeûneraient, à la fois spirituellement et littéralement.

Ce ne devait pas être comme les Juifs, accompagné de vêtements déchirés ou de se vêtir de sac et de cendres, mais une communion plus profonde avec la pensée de Dieu que ce qui pouvait être connu avant que le Saint Esprit vienne le faire réaliser. Et le jeûne parmi les chrétiens est d’autant plus frappant du fait de la paix, de la joie et des délices illimitées qu’ils ont dans l’amour de Christ, et de la communion avec le Père et avec Son Fils Jésus Christ. Pourtant, si nous sommes loyaux envers Christ, nous ne pouvons qu’avoir le sentiment constant de Son rejet, et du jugement toujours imminent et certain qui va tomber sur un monde coupable, et ce d’autant plus, qu’il Lui rend un hommage des lèvres. Oui, les jours sont venus où l’Époux ainsi ignominieusement ôté est encore absent, et où le jeûne convient à ceux qui mènent deuil, quoi qu’il en soit de leur joie toujours plus grande d’être unis à Lui comme membres de Son corps, un privilège jamais imaginé auparavant, et de la joie de la grâce dans la révélation et le travail actif d’un Dieu Sauveur pour les pécheurs perdus, Gentils aussi bien que Juifs.

Mais la chrétienté a perverti le jeûne, par la vaine philosophie, en une réflexion sur la gloire créatrice de Dieu. Et l’abstention des viandes, qu’Il a créé pour rendre grâces, a été très tôt tournée en un mérite humain, et dans le mensonge du mal dans la matière. La grâce et la vérité par Jésus Christ ont été ainsi niées ; et des jours de jeûne ont été imposés, comme le rapporte l’histoire ecclésiastique, d’abord par habitude, et ensuite avec une sanction légale. Dans le deuxième siècle, si non dans le premier, l’erreur fatale, tirée aussi de la philosophie, battait son plein, non pour leur vie et leur purification entière par Son sang, mais comme une double règle, l’une pour le troupeau méprisé de Dieu, l’autre pour ceux spirituellement supérieurs ; pour les uns, les préceptes de toutes sortes, pour les autres, les conseils de perfection, pour ceux qui aspiraient à une vie plus élevée, provenant de l’ascétisme et se développant dans le monachisme. Qui peut s’étonner que Dieu ait versé le mépris sur ces efforts incrédules pour améliorer le premier homme, en laissant la chair avec tout ce qui l’enflait, éclater dans l’immoralité la plus grossière d’un côté, et dans un mensonge légendaire contre Dieu de l’autre ? Mais c’est aussi ce qui se trouvait parmi les anciens platoniciens et pythagoriciens, qui enseignaient qu’il n’était pas seulement légitime, mais recommandable, de tromper et de mentir, au nom de la vérité et de la piété. De là, même dans ces premiers jours, la plus grande moisson de contrefaçons que l’on découvre de nos jours, le témoin de l’éloignement rapide de la chrétienté enseignée par les apôtres inspirés, bien avant que le système papal l’ait systématisé et imposé sous peine de mort.