La doctrine du Nouveau Testament sur le Saint Esprit
Méditation 1 — Jean 3, 5
Le sujet que je me propose de traiter, d’après la Parole de Dieu, envisagera essentiellement les opérations du Saint Esprit consécutives à la mort et la résurrection du Seigneur Jésus et particulières à la période chrétienne. Mais je suis heureux de commencer par présenter une vérité générale, s’étendant aux voies de Dieu en miséricorde envers Ses saints dans tous les temps. À la différence des révélations divines propres à des circonstances particulières et à une époque spéciale des voies de Dieu envers l’homme, ce dont nous allons nous occuper d’abord concerne tous les croyants, existait dès l’entrée du péché dans le monde, n’a jamais été remplacé et ne saurait l’être, jusqu’à ce que la dernière trace de mal ait disparu pour toujours. C’est la réponse au besoin fondamental de toute âme retirée de la condition de l’homme déchu, qui est de mourir une fois et après cela d’être jugé [Héb. 9, 27]. Le désir de Dieu était de se faire connaître. Il ne l’a fait d’abord que d’une manière partielle sans doute, selon diverses mesures, aussi bien qu’en plusieurs manières, comme l’apôtre le déclare en Hébreux 1 ; mais quelle que fût la mesure ou le mode de Ses révélations, Dieu a toujours agi en souveraine miséricorde envers les âmes, et Il a donné de Sa propre nature à ceux qui croient sur la terre. Tel est le sens de l’expression : être né de nouveau. Or il est nécessaire aujourd’hui plus que jamais, non seulement d’affirmer ce qui est particulier à l’économie chrétienne, mais de s’attacher à ce qui est universel. Ne perdons pas de vue ce qui ne change jamais, sans pour cela laisser de côté tout ce qu’il peut plaire à Dieu, selon Sa propre sagesse, d’introduire pour simplifier, éclaircir, jeter de la lumière sur ces sujets ou de leur donner de la profondeur. Dieu s’est manifesté de façon progressive jusqu’au moment où Christ parut et où Son œuvre fut accomplie. Le développement de la Parole de Dieu depuis le commencement fournit une vision des voies de Dieu qui s’élargit toujours, jusqu’au moment où Dieu Lui-même, et non Ses voies seulement, a été pleinement manifesté.
À travers tout le cours de ces économies diverses, nous trouvons la jouissance de cette bénédiction incomparable : la révélation divine. Et la raison en est manifeste : il y a d’un côté un Dieu de bonté, de l’autre l’homme perdu. « Mon Père travaille jusqu’à maintenant » (Jean 5, 17), dit le Fils, qui travaillait aussi en grâce. La conscience peut suggérer l’idée d’un Dieu et de Son jugement ; mais l’esprit de l’homme ne peut jamais s’élever plus haut que le fait, ou plutôt la conclusion, qu’il existe nécessairement un Dieu. Dieu Lui-même n’est jamais connu de cette manière. L’esprit humain, comme tel, est incapable de découvrir Dieu ; et de fait, qu’est-ce qui donna l’essor à la raison de l’homme, sinon sa propre ruine ? Il raisonne au sujet de Dieu parce qu’il a perdu Dieu ; et tout ce que le raisonnement peut découvrir, ce n’est pas ce qui est, mais seulement, à partir de faits et d’hypothèses, ce qui doit nécessairement être. Mais un Dieu dont l’existence est simplement une nécessité, est une chose terrible pour une conscience chargée de sa culpabilité. Le Dieu qui doit exister pour un tel homme — c’est-à-dire pour un pécheur — ne peut être qu’un juge ; et si Dieu est le juge du péché et du pécheur, quelle doit être la portion de ce pécheur ? Si le juste lui-même est sauvé difficilement, où paraîtra l’impie ? [1 Pier. 4, 18] Or en face de tout cela, Dieu ne s’est pas contenté de donner une révélation, de faire des promesses, de donner même des esquisses prophétiques de ce qu’Il avait l’intention de faire : Il a opéré dans l’homme. Et il est bien important de reconnaître qu’il ne s’agit pas seulement de l’âme du croyant tournée vers Dieu par la foi, mais d’une œuvre intérieure qui est et a toujours été bien autre chose. Penser que les âmes ne font que regarder à Dieu est une façon de voir bien limitée et même pernicieuse. Outre le regard de la foi, outre l’acte de saisir la Parole de Dieu par l’opération de l’Esprit dans l’âme, il y a ce qui s’appelle la vie spirituelle. Et elle a toujours existé, car c’est la condition nécessaire pour avoir affaire avec Dieu. Dans tous les temps, et aujourd’hui encore, une nature nouvelle, positive, a été donnée au croyant. Autrement dit, il ne s’agit pas seulement de la foi, mais d’une nouvelle vie. Sans doute la foi est-elle le seul moyen par lequel cette nouvelle nature est communiquée, et la foi est aussi le moyen pour l’âme de s’assurer qu’elle est vraiment née de Dieu. Il peut y avoir d’autres preuves pour ceux qui nous observent ; mais la foi est destinée, selon la pensée de Dieu, à donner à celui qui la possède la certitude qu’il est né de Dieu.
Or il est évident que cette vérité, je dirai même cette nécessité de la vie nouvelle, quoiqu’elle fût toujours réalisée dans les âmes, était bien faiblement comprise avant Christ. De fait, dans les temps de l’Ancien Testament, elle était plutôt sous-entendue qu’enseignée explicitement. Nous pouvons l’y trouver présentée en figure, ou sous la forme d’une expression morale ; mais nous n’y trouvons nulle part la déclaration distincte d’une nouvelle naissance, sinon comme un privilège annoncé. Aussi lorsque Nicodème vint au Seigneur Jésus, frappé par ce qu’il avait vu, mais ayant en même temps le sentiment d’un besoin plus profond dans son âme (bien qu’il ignorât totalement de quoi il avait besoin), il demeura tout interdit et confondu par la déclaration formelle du Seigneur que si quelqu’un n’est né de nouveau, il ne peut même voir le royaume de Dieu. Les Juifs s’étaient tranquillement reposés sur la conviction que le Messie pourrait et voudrait tout faire pour eux. Or, dans un sens, ils n’avaient pas tort. Lorsqu’Il vint, les Samaritains même étaient convaincus que le Messie leur ferait connaître toutes choses [Jean 4, 25] ; et les Juifs savaient que non seulement Il enseignerait, mais qu’Il accomplirait toutes choses. Il introduirait la justice éternelle, Il scellerait la vision, Il oindrait le Saint des saints, Il en finirait avec les péchés et ferait propitiation pour l’iniquité (Dan. 9, 24). Ils ne savaient guère comment la chose se ferait. Néanmoins il y avait dans l’esprit de tout Juif, sauf chez la portion incrédule de la nation, une conviction vague que l’avènement du Messie changerait la face du monde, en même temps qu’il introduirait plus particulièrement pour Israël la bénédiction promise et attendue. Dès lors, combien il était saisissant d’entendre annoncer cela solennellement par Celui qui se trouvait maintenant présent au milieu d’eux, par Celui que Son précurseur, Jean le baptiseur, avait déclaré être le Messie, par Celui qui avait manifesté par des miracles qu’Il était réellement, à tout le moins, un docteur venu de Dieu [v. 2]. Et pourtant c’est Lui qui, dès l’abord, arrête Nicodème en déclarant sans équivoque une nécessité dont celui-ci n’avait jamais eu conscience auparavant. Et cette condition était présentée d’une manière si générale, qu’elle devenait aussi absolue pour un Juif que pour un Gentil. « Si quelqu’un n’est né de nouveau… ». Aucune exception n’est supposée, aucune question soulevée au sujet de la famille d’Abraham qui avait été choisie. Dieu l’exigeait aussi bien de ceux qui étaient près que de ceux qui étaient loin. « Si quelqu’un n’est né de nouveau, il ne peut voir le royaume de Dieu » [v. 3].
C’est pourquoi Nicodème adresse à notre Seigneur une question dépourvue d’intelligence : « Comment un homme peut-il naître quand il est vieux ? Peut-il entrer une seconde fois dans le sein de sa mère et naître ? ». L’étonnement de Nicodème prouve la force de l’expression employée par le Seigneur ; je n’en connais même pas de plus forte dans l’Écriture : être né de nouveau. Mais la question posée conduit notre Seigneur à faire la déclaration sur laquelle je désire m’étendre un peu : « En vérité, en vérité, je te dis : Si quelqu’un n’est né d’eau et de l’Esprit, il ne peut entrer dans le royaume de Dieu ». Celui qui voit le royaume (v. 3) entre dans le royaume (v. 5) ; mais il n’existe pas de possibilité de voir ni d’entrer, à moins d’avoir passé par cette nouvelle naissance. Quels en sont donc la source et le caractère ?
Ici le Seigneur explique la chose ; Il le fait d’une manière figurée, selon Son habitude dans les discours qu’Il adresse aux Juifs dans cet évangile. Dans le chapitre précédent, Il s’est servi de l’image du temple pour désigner Son propre corps. Dans le chapitre qui suit, Il prend occasion des besoins de la femme samaritaine ; et « une fontaine d’eau » devient l’image de cette bénédiction infinie sur laquelle nous espérons nous arrêter un peu tout à l’heure. Je pourrais parcourir ainsi cet évangile et prouver que ce choix de quelques figures bien connues, s’il embarrasse peut-être d’abord par le fait même qu’il s’agit de figures, ne jette aucune obscurité ; car ce n’est jamais là le but des figures dans l’Écriture, pas plus que dans aucun écrit honnête. Leur véritable but est plutôt de renfermer dans une seule expression une vérité qui, autrement, demanderait à être longuement développée ; en sorte que cette expression devient l’illustration d’une vérité, et dès lors brille de la lumière même de Dieu. Or les mêmes images étaient employées par les prophètes de l’Ancien Testament pour désigner les mêmes bénédictions. C’est pourquoi le Seigneur pouvait, avec une pleine justice qui en appelait à la propre conscience de Nicodème, censurer celui qui avait la responsabilité d’être le docteur d’Israël et ne connaissait pas ces choses [v. 10].
Notre Seigneur rappelle par allusion plusieurs passages de l’Ancien Testament qui auraient dû rendre le sens de Ses paroles intelligible pour Nicodème. Prenez par exemple Ésaïe 44. Dieu n’y avait-Il pas promis de verser de l’eau sur celui qui a soif (v. 3) ? N’avait-Il pas promis de répandre Son Esprit sur la postérité de Jacob ? N’avait-Il pas encore plus clairement déclaré, dans Ézéchiel 36, 24-26, que lorsqu’Il aurait rassemblé Israël dans sa terre, Il ôterait leur cœur de pierre, et mettrait en eux un cœur de chair, qu’Il répandrait sur eux des eaux pures et mettrait Son Esprit au-dedans d’eux — ce qui constitue précisément les deux éléments de la déclaration du Seigneur ? Ainsi, dans notre passage, le Sauveur parle clairement, ayant toujours en vue ces figures de l’Ancien Testament. Ce n’était donc pas quelque privilège nouveau qu’Il annonçait, mais au contraire le rappel d’un besoin universel. Le Seigneur, avec la dignité et la gloire qui Lui sont propres, ne fait que donner sa pleine portée à une vérité qui se trouve dans toute l’Écriture, en la revêtant de l’autorité même du Fils de Dieu prenant la place de docteur sur la terre. « Jamais homme ne parla comme cet homme » (Jean 7, 46). Tout en ne faisant que se servir d’une image existante et supposée connue, Jésus donne néanmoins à la vérité une profondeur caractéristique par la forme sous laquelle Il la présente à Nicodème. Il ne s’agit ici ni du baptême d’enfants, ni de recevoir un nouveau cœur, ou un nouvel esprit ; mais de la naissance d’eau et de l’Esprit, vérité capitale et de la plus grande portée pratique.
D’autres vérités sont peut-être plus propres à attirer les affections et à les fixer sur la personne du Sauveur, amenant l’âme dans une plénitude de liberté, de paix, de joie, aussi bien que de puissance ici-bas. Mais aucune n’a le caractère fondamental de celle-ci (à l’exception de l’œuvre de Christ dans laquelle Dieu Lui-même fut glorifié au point de pouvoir avec justice bénir un pauvre pécheur en lui donnant Sa propre nature). Ici le Seigneur, avec la divine perfection qui Lui est propre, confère à la vérité une nouvelle beauté, et une autorité divine. En sorte que nous discernons combien doit être glorieuse la personne qui profère la vérité d’une telle manière. « Si quelqu’un n’est né d’eau et de l’Esprit… ». Il s’agit bien d’une nouvelle nature, de quelque chose qui n’a aucun fondement dans l’homme et n’a de source qu’en Dieu. N’est-ce pas en effet Dieu Lui-même, qui a Son propre royaume dont Il est le centre, qui seul par conséquent peut donner une nouvelle nature ? Et quelle est la nature qu’il Lui convient de communiquer ? Ce ne peut être que la nature divine. « Si quelqu’un n’est né d’eau et de l’Esprit, il ne peut entrer dans le royaume de Dieu ». Ainsi en arrivons-nous aux conditions.
J’ai attiré l’attention sur la force de l’expression « être né de nouveau » que nous trouvons dans les premières déclarations du Seigneur. Mais maintenant, si nous considérons la manière dont cette naissance est caractérisée, nous lisons : « né d’eau ». L’eau, dans l’Écriture, est employée habituellement comme la figure de la Parole de Dieu appliquée par l’Esprit. Elle peut aussi représenter l’Esprit Lui-même dans Sa propre puissance. Mais ici nous avons l’eau distincte de l’Esprit parce que Dieu veut attirer l’attention sur la Parole appliquée à l’homme en vue d’agir moralement sur lui. Au premier abord celui-ci pourrait ignorer que c’est l’Esprit de Dieu qui lui a donné le sentiment de sa souillure ; mais ce qu’il sait toujours très bien, c’est que la Parole le juge, qu’elle le déclare coupable et entièrement incapable de se tenir en la présence de Dieu. Ainsi l’eau exprime l’action morale de la Parole sur une âme, non seulement pour la purifier, mais pour la convaincre de sa souillure. Il s’agit d’abord de la communication d’une nouvelle nature que l’homme ne possédait pas auparavant. Et de même que nous avons vu le côté extérieur de cette action divine, de même nous en trouvons le côté intérieur : « si quelqu’un n’est né d’eau et de l’Esprit… ».
Arrivé à ce point, il peut être bon de rappeler quelques passages de l’Écriture qui confirment indiscutablement le sens de cette expression. Dans l’épître à Tite, chapitre 3, Paul déclare que Dieu nous a sauvés « par le lavage de la régénération et le renouvellement de l’Esprit Saint ». À dessein je ne cite pas la suite du passage qui présente un caractère plus complet de bénédiction que ce que le Seigneur exprime ici. Jusque-là, il existe une liaison bien évidente avec notre passage. Le lavage de la « régénération » correspond à la vérité que le Seigneur a ici devant Lui, et qu’Il présente avec force à Nicodème. En outre, quand nous lisons dans l’épître de Jacques (1, 18) : « De sa propre volonté il nous a engendrés », nous y voyons le commencement d’une vie que nous ne possédions pas auparavant. Ce n’est pas seulement que Dieu nous ait ainsi éclairés ; ce n’est pas seulement que des pensées, des vues, des vérités nouvelles aient été communiquées à l’esprit ; mais une nouvelle sorte de vie ou de nature est conférée que l’âme n’a jamais eue auparavant. « De sa propre volonté il nous a engendrés par la Parole de la vérité ». Non seulement nous y trouvons le fait que nous sommes engendrés de la part de Dieu, mais aussi le moyen dont Il s’est servi : la Parole de vérité. Cela se lie évidemment avec l’expression « né d’eau » dans notre verset de Jean 3. Et encore, nous trouvons dans la première épître de Pierre, chapitre 1 versets 22 et 23 : « Ayant purifié vos âmes par l’obéissance à la vérité pour que vous ayez une affection fraternelle sans hypocrisie, aimez-vous l’un l’autre ardemment, d’un cœur pur, vous qui êtes régénérés, non par une semence corruptible, mais par une semence incorruptible, par la vivante et permanente parole de Dieu ».
Il n’est pas nécessaire d’accumuler des textes sur un point qui doit être familier à la plupart des lecteurs ; mais j’ai pensé qu’il serait bon d’en citer assez pour montrer que ce sujet se retrouve chez tous les écrivains inspirés de la dernière partie de la révélation de Dieu. J’ai donc à dessein choisi des passages de différents apôtres. Que ce soient Paul, Pierre ou Jacques, qui écrivent, à des Juifs ou à des Gentils, c’est toujours la même vérité fondamentale ; mais, de fait, elle a reçu son expression la plus riche et la plus complète, sa forme la mieux définie et en même temps la plus profonde, des lèvres divines de notre Seigneur Jésus Christ.
Une autre vérité d’une grande importance se rattache à celle-là. Pas plus que la nature de l’homme ne peut jamais être rendue spirituelle, ni améliorée ou modifiée de manière à s’élever jusqu’à une certaine connaissance des choses de Dieu, ni non plus être changée en une nature divine par un procédé spirituel quelconque ; de même, d’un autre côté, la nouvelle nature ne peut se détériorer, ne peut dégénérer en « la chair », ou en la nature de « l’homme animal » [1 Cor. 2, 14]. D’un côté, comme notre Seigneur le dit : « ce qui est né de la chair est chair » ; ainsi de l’autre : « ce qui est né de l’Esprit est esprit » [v. 6]. La chose participe du caractère de sa source. La source de la vie nouvelle est donc le Saint Esprit, grand agent vivant qui la communique par un instrument : la Parole de Dieu. Si le Seigneur n’avait présenté que cette dernière, la porte aurait été laissée ouverte à l’activité de l’esprit de l’homme, autrement dit à « la chair ». Et ses prétentions à comprendre la Parole par ses propres moyens ne pouvaient que le mener au plus subtil des rationalismes. Mais il n’en est rien ; « ce qui est né de l’Esprit est esprit ». La Parole de Dieu est incontestablement le moyen que Dieu emploie ; mais, précisons-le bien, l’homme est né par la Parole, non de la Parole seule. Par contre il est né de l’Esprit, qui est la source réelle, active et personnelle de la vie divine.
« Ne t’étonne pas », dit le Seigneur à Nicodème, « de ce que je t’ai dit : Il vous faut être nés de nouveau » [v. 7]. Non seulement Il présente cette vérité comme une nécessité pour tout homme qui désire entrer dans le royaume de Dieu, mais Il enjoint : « Il vous faut être nés de nouveau ». Ce qui conduit Nicodème à poser sa nouvelle question : « Comment ces choses peuvent-elles se faire ? ». « Tu es le docteur d’Israël, et tu ne connais pas ces choses ? — répond Jésus — En vérité, en vérité, je te dis : Nous disons ce que nous connaissons, et nous rendons témoignage de ce que nous avons vu, et vous ne recevez pas notre témoignage » [v. 9-11]. Remarquons la place que prend notre Seigneur Jésus Christ dans ce chapitre. Il parle comme Celui qui est absolument et parfaitement intime avec Dieu. « Nous disons ce que nous connaissons », affirme-t-Il ; et l’expression implique une connaissance personnelle et intrinsèque ; non pas communiquée et retransmise, à la manière de ce qu’un prophète, par exemple, pourrait exprimer après en avoir reçu la révélation. Jésus s’exprime comme connaissant Dieu et Sa gloire, et en ayant la pleine conscience. « Nous disons ce que nous connaissons ». Dieu seul, Celui qui est Dieu, a le droit de parler ainsi. En même temps Jésus rend témoignage de ce qu’Il avait vu. Il n’est pas seulement Celui qui était venu de Dieu et s’en allait à Dieu [Jean 13, 3] ; Il est aussi Celui qui, en tant que Dieu, parle de scènes de gloire qui Lui sont familières. Il était avec Dieu en même temps qu’Il était Dieu ; Il savait pour l’avoir vu ce qu’exigeait la présence de Dieu ; Il avait la pleine connaissance non seulement de ce qui convenait à Dieu Lui-même, mais aussi de la scène où Dieu habite.
Ainsi donc, selon cette parfaite connaissance de Dieu et cette absolue intimité avec le ciel, Jésus déclare : « Nous disons ce que nous connaissons, et nous rendons témoignage de ce que nous avons vu ». Or l’homme n’avait aucun goût pour une révélation céleste — pas plus les Juifs que l’homme en général. Leur scène était la terre, et, comme Juifs, leur idée constante, fondée sur le témoignage de Dieu, c’était Dieu se révélant ici-bas ; Dieu bénissant ici-bas ; Dieu abolissant le mal ici-bas ; Dieu délivrant Son peuple par des jugements ici-bas. Mais maintenant il y avait au milieu d’eux Celui qui différait essentiellement de tous ceux qui s’étaient jamais trouvés sur la terre, le Fils de Dieu Lui-même. Il n’est pas seulement Celui que le Père reconnaît sur la terre comme bien-aimé et Fils ; car ceci n’impliquerait pas obligatoirement qu’Il fût Dieu de façon absolue et dans le sens le plus étendu. Or nous discernons dans la personne de Christ, unies en elle, non seulement la relation qui est la sienne comme l’objet des délices infinies du Père, mais la nature même de Dieu. En conséquence, il n’existe ni n’a jamais existé une seule pensée dans la divinité à part de Lui, si toutefois il nous est permis de parler de la pensée comme appartenant à Dieu — car, de fait, c’est une expression peu exacte. Dieu ne pense pas à la façon de l’homme : Dieu connaît. Ainsi Jésus, le Fils de Dieu, possédait entièrement en dehors d’une révélation cette connaissance absolue de Dieu, de ce qui était en harmonie avec la présence de Dieu, avec la nature et le royaume de Dieu ; en sorte qu’ici-bas sur la terre Il peut communiquer cette connaissance. Quelle place que la nôtre ! Quelle communion que celle dans laquelle nous sommes introduits, chers frères et sœurs, au milieu de cette mer de péché et d’iniquité, au milieu de la rébellion des hommes dont l’orgueil ne fait que souligner leurs propres pensées, et prouve combien ils sont éloignés de Dieu ! Quelle merveilleuse chose que nous soit ainsi présenté Celui même que l’homme rejette en niant qu’Il soit Dieu !
Pendant que nous nous occupons de ce sujet — sujet du plus profond intérêt possible — savoir, que Celui-là seul qui était homme pouvait faire connaître Dieu à l’homme, ajoutons qu’il n’est pas dans la nature de la divinité de se faire connaître à l’homme. Et le plan béni que Dieu a conçu est tout aussi nécessaire pour que nous Le connaissions, qu’il l’était pour nous sauver. Nous regardons volontiers aux moyens de notre délivrance, c’est-à-dire à l’incarnation du Seigneur Jésus Christ ici-bas, et au fruit de Son œuvre dans l’expiation ; nous sommes, au contraire, portés à moins estimer le privilège infini de connaître Dieu ; alors qu’après tout, connaître le seul vrai Dieu et celui qu’Il a envoyé, c’est la vie éternelle [Jean 17, 3]. Dieu n’est jamais appelé la vérité dans aucune partie de l’Écriture, ni désigné par aucun terme équivalent, alors que le rationalisme et l’incrédulité en ont fait leur expression favorite. Et voici pourquoi : c’est que l’homme, de lui-même, prétend connaître Dieu et s’approcher de Lui par ses propres raisonnements ; mais de fait il ne Le connaît jamais, et ne peut y atteindre. Car Dieu n’est connu qu’en Christ. Il m’est impossible de connaître Dieu, à moins d’être participant de la nature divine ; c’est là la raison pour laquelle je viens d’insister sur la vérité de la nouvelle naissance qui est la communication de cette nature. Ce n’est pas simplement la foi, bien que celle-ci soit nécessaire, car elle est le seul moyen d’être introduit dans la possession de cette nature. Et ce n’est pas non plus accompli seulement par la Parole, mais par l’application que le Saint Esprit fait de la Parole. Ainsi participons-nous à une nouvelle nature en vertu de laquelle nous connaissons Dieu. Or je crois pouvoir affirmer que cette participation à Sa nature ne pourrait avoir lieu par la simple et unique action de Dieu, car un Être uniquement divin ne saurait ainsi donner de Sa propre nature à l’homme, à moins qu’Il ne se révèle dans l’homme : c’est ce qui a eu lieu en Christ, et seulement en Christ, de sorte qu’aucune âme n’aura jamais été rendue participante de la nature divine, qu’aucune âme ne sera jamais née de Dieu, sans que ce soit en rapport avec Christ. Je n’ai pas besoin de dire que les saints de l’Ancien Testament étaient ainsi nés de Dieu. Ainsi notre Seigneur Jésus ne parle pas ici en vue de l’avenir seulement, mais d’une manière absolue et universelle en vertu du caractère qu’Il prend dans l’évangile de Jean, celui du Fils de Dieu. Il a devant les yeux à la fois l’avenir et le passé ; Son regard embrasse tout le cours du temps jusque dans le royaume de Dieu. Et voici quel est le passeport pour y entrer : il faut qu’un homme soit né de Dieu, ou, comme cela est expliqué ici, né d’eau et de l’Esprit.
Il appartient à Dieu selon Son bon plaisir, Son amour souverain et Sa propre sagesse, de s’introduire Lui-même, pour ainsi dire, dans la nature de l’homme — de se révéler dans l’homme, aussi bien qu’à l’homme. Ne demeure-t-Il pas en effet Lui-même dans une condition qui Lui est propre, dans laquelle il est parfaitement impossible que l’homme soit introduit, si ce n’est de cette manière bénie ? Mais maintenant qu’Il se révèle dans un homme, moi qui suis un homme je puis Le connaître. Par l’opération de l’Esprit Saint, selon Sa propre Parole, je puis être introduit dans une association vitale avec cet homme béni qui est Dieu. Tout se trouve étroitement lié dans la foi des enfants de Dieu ; et si ces derniers admirent la merveilleuse manière dont il a plu à Dieu d’envoyer Son Fils, né de femme, seulement en voyant la chose comme nécessaire pour l’abolition du péché, ils peuvent apprendre qu’elle était nécessaire aussi pour toute connaissance réelle de Dieu et toute communion avec Lui. Je ne puis rien connaître de Dieu, ni jouir aucunement de Lui, comme je Le connais et jouis de Lui maintenant dans le christianisme, à moins que Lui ne trouve bon de se révéler par le moyen de l’homme Christ Jésus. Autrement dit, pour me servir du langage du jour, tant qu’Il est simplement Celui qui est absolu, je ne puis Le connaître. Il faut qu’Il daigne devenir relatif quant à moi, qu’Il accepte de descendre dans la condition dans laquelle je me trouve.
Il semble que c’est précisément là le besoin que notre Seigneur a ici en vue. Il affirme de la manière la plus forte Sa divine prérogative : « Nous disons ce que nous connaissons, et nous rendons témoignage de ce que nous avons vu ». Descendu ici-bas pour parler à l’homme, il s’agissait pour Lui d’un témoignage à rendre. Il rendait témoignage à la vérité qu’il n’y a pas d’autre moyen par lequel l’homme puisse être introduit dans la félicité dont nous jouissons maintenant ; il faut que l’homme soit né d’eau et de l’Esprit. Mais comment fut reçu ce témoignage ? L’homme voyait les choses qui lui étaient propres, autour de lui, là où il était né et avait été élevé. Il ne se souciait pas des choses divines ; bien plus, il était ennemi de Dieu. Éloigné de Dieu, il n’aimait pas entendre parler des choses de Dieu, ni de la sphère dans laquelle ces choses-là, et celles-là seules, apparaîtraient, c’est-à-dire le royaume. Telle est la tendance de l’homme naturel : « Vous ne recevez pas notre témoignage ». Or il est remarquable que cette constatation suive immédiatement ce que nous lisons dans le chapitre précédent (v. 23-25), et qui semble une bien prompte réception des choses concernant le Seigneur. Il est question de ceux qui crurent, contemplant les miracles que Jésus faisait. En fait il n’y avait de leur part aucune réception de Son témoignage. Ils acceptaient des faits, autrement dit ils recevaient ce qu’ils pouvaient voir, et ce dont ils pouvaient juger. Une telle attitude a pour effet de renforcer la bonne opinion que l’homme a de lui-même, parce que le fait de recevoir les choses d’après des preuves le place dans la position de juge : il conçoit, déduit, conclut, et ne fait ainsi que s’enfler de sa propre importance. Cela s’accorde avec l’orgueil de l’homme, qui s’érige en juge, même pour apprécier un miracle opéré par la puissance de Dieu ; tandis qu’il s’agit ici du témoignage de Dieu.
N’est-ce pas là ce que nous constatons tous les jours ? Tant que les âmes demeurent sans être exercées, elles ne s’inquiètent pas de ce qu’elles entendent. Quand les hommes sont sérieux, ils doutent, ou tout au moins ils examinent et ils pèsent. Tout autant qu’une résistance opiniâtre, la réception indifférente d’un témoignage, prouve qu’aucune œuvre réelle n’est opérée dans la conscience. La raison en est simple. Si la Parole pénétrait le cœur, celui-ci prenant en elle un profond intérêt, il s’y trouverait aussitôt de l’activité. L’anxiété elle-même conduirait une personne à un plus ample examen. En même temps il y aurait le désir que cette Parole soit vraie. Par contre, quand une personne est entièrement morte dans ses fautes et dans ses péchés, le témoignage de Dieu ne produit aucun effet. Il est tout aussi facile de mépriser ce témoignage que d’en faire profession. L’effet de l’indifférence, c’est tantôt la profession facile, tantôt l’opposition ouverte à la vérité. En apparence totalement différentes, ces dispositions de l’esprit humain sont au fond deux manifestations de la même incrédulité. Tandis que, toutes les fois qu’une âme réalise l’importance de la vérité, celle-ci, lorsqu’elle a été crue, touche nécessairement le cœur. Si je sens ma culpabilité et combien j’ai mérité l’éternelle condamnation et si je crois que la grâce de Dieu en Christ m’en a délivré pour me donner une part au ciel avec Jésus, il m’est impossible, croyant tout cela, d’envisager froidement une vérité qui me concerne de si près. C’est pourquoi, lorsque vous rencontrez cette espèce de foi traditionnelle, inerte et sans portée, qui reçoit les choses avec une extrême rapidité et sans que se produise aucune action réelle sur la conscience et sur le cœur, il est tout à fait évident qu’elle ne correspond à aucune œuvre vitale de Dieu : c’est tout simplement une conviction humaine, une affaire de sentiments, et par conséquent une chose sans valeur. Notre Seigneur, qui connaît ce qui est dans l’homme (chap. 2, 25), ne cache pas la résistance ou l’indifférence qu’Il rencontre de sa part. Mais en même temps Il fait entrevoir des choses plus élevées : « Si je vous ai parlé des choses terrestres, et que vous ne croyiez pas, comment croirez-vous, si je vous parle des choses célestes ? » [v. 12]. Et si ces « choses célestes » conduisent plusieurs d’entre nous en dehors de leurs pensées ordinaires, qu’ils veuillent bien peser les paroles du Seigneur ; car c’est sur celles-ci que je désire insister, et non sur des spéculations humaines.
Le Seigneur Jésus avait affirmé, de la manière la plus forte possible, la nécessité absolue et générale de la nouvelle naissance pour entrer dans le royaume de Dieu. Tous ceux qui doivent se trouver dans les différentes sphères de ce royaume, soit ici-bas, soit en haut, quand il sera établi et manifesté dans ses deux parties, doivent être nés de nouveau. Une âme qui reçoit l’évangile maintenant est donc née de Dieu. Mais dans Sa réponse à Nicodème, le Seigneur va bien au-delà de cette vérité. « Personne n’est monté au ciel, dit-Il, sinon celui qui est descendu du ciel, le Fils de l’homme qui est dans le ciel » [v. 13]. Il confirme ainsi qu’Il est bien véritablement homme, le Christ rejeté, le Fils de l’homme, mais aussi certainement Dieu. Le ciel était le lieu auquel Il appartenait, ou plutôt qui Lui appartenait. Comme né de femme, né sous la loi [Gal. 4, 4], Il fut Lui-même vu et connu sur la terre et dans les limites du temps. Et malgré toute Sa grâce, toute Sa puissance et toute Sa gloire, l’homme ne voulut point de Lui. Mais Celui qui était maintenant manifesté en chair ici-bas était réellement « le Fils unique, qui est dans le sein du Père » [Jean 1, 18], et revendiquait, même étant rejeté, le titre de « Fils de l’homme qui est dans le ciel ». Ce n’est pas seulement, remarquons-le bien, qu’Il avait été dans le ciel ; Il est là ; peu importe quand ou comment — Il est toujours le Fils de l’homme qui est dans le ciel. Son humiliation ne faisait que fournir l’occasion d’une nouvelle gloire pour Dieu et pour l’homme, en même temps qu’elle constituait le point de départ d’une nouvelle et plus pleine connaissance de Dieu de la part de l’homme. Il y avait là Celui qui, étant Lui-même l’infini, entra dans ce qui était limité, afin que les hommes comme tels puissent eux-mêmes entrer dans la connaissance de Dieu et voir le Père en Lui. Il faut qu’ils aient affaire à la Parole ; qu’ils écoutent celui qui est à la fois Dieu et homme. C’était la grâce, mais c’était en même temps la vérité : la seule manière dont celle-ci pouvait être révélée. La vérité n’avait eu jusque-là qu’une manifestation partielle ; mais, chose merveilleuse, sa pleine manifestation se trouve maintenant dans l’homme — dans Celui qui est Dieu, mais qui n’en est pas moins homme. Cette venue en chair du Fils de Dieu apparaissant dans une sphère limitée cacherait-elle la vérité ? Au contraire, celle-ci ne pouvait être pleinement révélée qu’au moment où la Parole a été faite chair. C’est précisément dans la combinaison d’éléments en apparence incompatibles, unis dans la personne de Jésus, que vous trouvez la vérité. « Car la loi a été donnée par Moïse ; la grâce et la vérité vinrent par Jésus Christ » [Jean 1, 17]. Cet homme béni, modèle de toute débonnaireté, efface d’un seul mot toute la gloire de l’homme : « Personne », dit-Il, « n’est monté au ciel, sinon celui qui est descendu du ciel ». Or ce n’était pas seulement qu’Il en fût descendu. D’autres pouvaient y être ravis, comme nous le savons, par un acte de puissance ; mais Lui pouvait y prendre Sa place comme la portion même qui Lui était propre, et y entrer aussi simplement que possible quand l’heure serait venue. Plus encore, comme nous l’avons vu, Il est dans le ciel, non seulement Celui qui peut monter au ciel, mais « le Fils de l’homme qui est dans le ciel ». Cette gloire Lui appartient en tant que personne divine et n’appartient qu’à Lui.
Le Fils de Dieu s’étant ainsi présenté va montrer qu’une œuvre doit être accomplie qui permette à Dieu de conférer à l’homme pécheur la bénédiction de Sa propre nature. « Comme Moïse éleva le serpent dans le désert, ainsi il faut que le Fils de l’homme soit élevé, afin que quiconque croit en lui, ne périsse point, mais » — quoi ? qu’il naisse de nouveau ? Non — « qu’il ait la vie éternelle » [v. 14-15]. Il y a évidemment ici une différence importante et significative. Le Seigneur a déjà proclamé la nécessité pour tous d’être nés de nouveau. Mais lorsqu’Il en vient à exprimer l’application au croyant de cette vérité fondée sur la rédemption, sur Sa propre mort comme le Fils de l’homme élevé sur la croix, Il ne veut pas décrire la chose simplement comme une nouvelle naissance, mais Il se sert d’une expression différente. Sans doute est-Il, Lui, le Fils, Celui qui vivifie tous les saints, et par conséquent pour ma part je ne mets nullement en doute que les saints de l’Ancien Testament n’aient été aussi réellement vivifiés que nous-mêmes. Il n’y eut jamais qu’un seul Sauveur, et par conséquent, la nouvelle naissance, dont tous ont besoin pour le royaume de Dieu, ne peut être autre chose que la communication, par l’Esprit, de la vie qui est dans le Fils de Dieu.
Ce n’est pas sans raison cependant que le Sauveur refuse, quand il lui plaît de décrire notre place, de la confondre simplement avec ce qui appartenait aux saints de tous les temps. Pour parler de cette vérité universelle et commune, dans son application aux croyants du Nouveau Testament, Il emploie une expression particulière. L’Esprit de Dieu souligne ainsi l’honneur qu’Il attribue à Christ et à la rédemption, lorsqu’Il présente ce fait glorieux, cette œuvre digne de Dieu, la plus grande en laquelle Dieu se soit jamais montré. Bien qu’elle concerne tous Ses rachetés à travers tous les âges et toutes les économies, le Sauveur en présente maintenant les effets sous un jour et à un titre nouveaux et beaucoup plus élevés. Si nous sondons l’Ancien Testament, nous y trouvons la mention de la vie éternelle, ou de ce qui lui est équivalent ; car nous ne tenons pas à des termes techniques, mais nous considérons ces vérités sous un point de vue pratique. En les exprimant ici, le Seigneur change certains termes de Ses phrases et ce n’est pas fortuitement qu’Il emploie une autre tournure. Ne pas tenir compte de ces différences serait de notre part indifférence et manque de sagesse.
Il est par exemple question dans Daniel 12 de la vie éternelle, et nous trouvons « la vie pour l’éternité » à la fin du psaume 133. Mais nous pouvons remarquer que ces deux expressions sont liées avec l’espérance de la présence et du règne du Messie quand Il introduira le royaume de Dieu d’une manière visible. Tandis que la merveilleuse vérité qui apparaît dans Jean, c’est que la gloire de la personne du Fils, maintenant manifestée, nous introduit dans la bénédiction indépendamment de toute cette manifestation future. Nous n’attendons rien de plus ; et pour quelle raison ? Parce que nous le possédons Lui. En conséquence, quoique le royaume terrestre n’ait pas encore paru avec la bénédiction publique correspondante, quoique les Juifs, au lieu d’être bénis, soient encore soumis à la malédiction sous laquelle ils se sont eux-mêmes placés (Matt. 27, 25), et que la colère soit venue sur eux au dernier terme [1 Thess. 2, 16] (c’est-à-dire, pour le moment, la suspension complète des promesses à leur égard), malgré tout cela, nous sommes introduits dès maintenant dans une scène illimitée de bénédictions riches et divines réunies dans Sa personne.
Ce qui rend cette vérité aussi touchante qu’instructive, c’est qu’elle nous assure maintenant la consolation et la joie d’une association personnelle avec Lui-même. Être « né de nouveau », est assurément une grande miséricorde mais ne confère rien de semblable. Sans doute, ce titre est-il indispensable pour avoir part au royaume de Dieu, privilège dont Christ est à la fois la source et le dispensateur. Mais il ne m’associe pas à proprement parler avec Christ. Dire de Christ qu’Il est né de nouveau serait un blasphème, la négation même de Sa personne. Ainsi donc, s’il n’était question pour nous que d’être « nés de nouveau », cela nous empêcherait plutôt de réaliser que nous sommes identifiés avec Christ, car cela nous rappellerait la différence essentielle qui subsiste entre ce que l’homme acquiert par grâce, et ce qui était en Christ. Mais du moment qu’Il parle de la vie éternelle, j’ai part directement à cette bénédiction. Ma portion en Lui c’est la vie éternelle ; car Il est Lui-même cette vie éternelle qui était auprès du Père (1 Jean 5, 20 fin). De sorte qu’au lieu de souligner une différence avec Lui, comme l’implique le don qui m’est fait d’une nouvelle nature, cet état béni est maintenant présenté d’une manière qui est vraie de Christ Lui-même. Il n’est pas seulement question d’être introduit dans la position du corps en relation avec la Tête ; tel n’est pas le sujet ici, ni d’une manière générale dans les écrits de Jean, dont l’objet, plutôt que l’union du corps avec la Tête, est la communauté de vie et de nature. Nous voyons ainsi que la plénitude de la bénédiction est devenue nôtre. Le Seigneur ne se contente pas de dire : « Il vous faut être nés de nouveau ». Cela fut toujours vrai, et il ne peut en être autrement ; mais maintenant, bien qu’il s’agisse en substance de la même bénédiction, le caractère dont Jésus la revêt, et sous lequel Il la présente à mon âme, me donne cette pleine assurance : J’ai reçu par grâce ce qu’Il a et ce qu’Il est. Lui, le Fils, est la vie éternelle aussi bien que le Dieu véritable. Mais à quoi servait-il, pour ce qui nous concernait, que Dieu fût ainsi manifesté en Christ ici-bas ? Il demeurait seul ; et l’homme de son côté Lui restait étranger, mort aussi bien que plongé dans d’impénétrables ténèbres. Or Lui, le Sauveur, est mort et ressuscité ; et je le reçois, sachant que « celui qui a le Fils a la vie » [1 Jean 5, 12], et que cette vie est la vie éternelle.
Mais si j’envisageais simplement la croix du Seigneur Jésus Christ comme la base nécessaire de la justice divine, en même temps qu’elle était aussi la plus riche manifestation de miséricorde envers moi, pécheur coupable et ruiné, cela ne suffirait jamais en soi pour établir mon âme en parfaite paix devant Dieu. Encore moins cela me donnerait-il de Lui une connaissance adéquate. C’est pourquoi une autre expression est introduite conduisant au même résultat que dans les versets 14, 15, mais en réalité découlant d’une source plus élevée encore. « Car Dieu — dit le Fils — a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui, ne périsse pas, mais qu’il ait la vie éternelle » [v. 16]. Il n’y avait pas eu auparavant, dans ce discours, un mot au sujet de l’amour de Dieu pas plus qu’au sujet du monde ; c’était purement l’intervention, et l’intervention nécessaire, du Fils de l’homme. Tout comme il faut qu’un homme soit né de nouveau pour entrer dans le royaume, ainsi il faut que le Fils de l’homme soit élevé sur la croix. Telle est la double condition d’une œuvre efficace en justice pour le pécheur.
Mais une simple nécessité ne pouvait satisfaire l’amour de Dieu. Et s’il n’y avait pas davantage qu’un : « il faut », cet amour resterait bien imparfaitement connu. Eh bien, mon privilège est d’entrer dans Ses propres sentiments, d’apprécier le témoignage de Sa propre grâce en Christ ! Est-ce une faveur extorquée à Dieu ? Certes non ! N’aime-t-il point ? N’est-il pas amour ? Écoutons plutôt ce que Jésus nous dit, Lui qui savait ce que nul autre ne pouvait savoir ou déclarer ! Oui ; Lui, le Fils, connaissait Dieu parfaitement et voulait Le faire connaître tel qu’Il est, nous faire pénétrer dans Ses sentiments mêmes au sujet du monde. C’est pourquoi cette révélation bénie de la grâce et de la vérité de Dieu, manifestées dans Son œuvre comme aussi dans Sa personne même, est par Lui couronnée d’une déclaration vraiment divine : « Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui, ne périsse pas, mais qu’il ait la vie éternelle ». Quelle bénédiction, mes frères, d’avoir cette vie éternelle, et de savoir que nous la possédons ; de l’avoir, non seulement comme des dépouilles péniblement conquises dans la rédemption, mais aussi comme le fruit gratuit, complet et pour ainsi dire spontané de Son amour, manifesté en Celui qui était Lui-même l’objet le plus intime de l’amour du Père ! Ainsi, envers les plus indignes, Dieu veut se révéler dans le don le plus précieux qu’Il pouvait faire, non seulement parce que je ne pouvais, moi, être béni d’une autre manière, mais parce qu’Il voulait, Lui, selon Son propre cœur, me bénir pleinement. Il m’a donné en Son Fils cette vie dont il n’est jamais parlé comme étant en aucun autre, une vie dont je considère en Lui la perfection. Et parce que je la possède en Lui, je suis capable de communion avec Lui-même ici-bas.
Assurément c’est une grande bénédiction que de connaître l’œuvre qui répond à nos péchés et à notre misère. Mais c’en est une incomparablement plus grande que d’avoir part aux délices que Dieu Lui-même pouvait trouver et trouva en effet en Jésus, Le contemplant lorsqu’Il marchait en toute dépendance et obéissance, dans la lumière et dans l’amour. Et cette perfection était d’autant plus merveilleuse qu’elle brillait dans un homme sur la terre. Eh bien, cette vie en nous partage Ses propres pensées et Ses propres sentiments, entre dans toutes Ses joies, prend part à toute Sa douleur, celle avec laquelle Il contemple l’homme rebelle, un monde ruiné, et maintenant, hélas ! nous devons ajouter, une chrétienté coupable. En Lui « était la vie » [Jean 1, 4]. Quel privilège pour nous d’avoir en Lui cette vie, une vie déjà mise à l’épreuve au milieu et en dépit de tous, s’élevant à la plénitude de Dieu et pourtant exercée dans toutes les circonstances que peut rencontrer le cœur de l’homme ! Et c’est à cela que nous participons, mes frères, en possédant la vie éternelle en Christ selon la grâce de notre Dieu ; car ce que nous vivons maintenant dans la chair, nous le vivons dans la foi au Fils de Dieu [Gal. 2, 20], fondée sur la rédemption qu’Il a Lui-même accomplie en amour.
Que le Seigneur veuille bénir Sa propre Parole, donnant à nos âmes de retenir fermement toutes les vérités que nous connaissons, mais d’apprendre aussi que Dieu est toujours actif dans Son amour. Son désir est de nous donner une plus grande liberté et une plus grande plénitude par un sentiment croissant de notre association avec Christ ! Si nous avons déjà fait quelques progrès réels, cela n’a pu être que dans cette direction et le secret n’en est pas ailleurs. Telles sont nos plus précieuses bénédictions ; et l’éternité tout entière le confirmera. Puissions-nous, en attendant, « être fortifiés en puissance par son Esprit quant à l’homme intérieur » de sorte que le Christ habite par la foi dans nos cœurs, afin que nous soyons capables de comprendre la gloire qui est devant nous et de connaître son amour, lequel surpasse toute connaissance, de manière à en être remplis jusqu’à toute la plénitude de Dieu [Éph. 3, 16-19] !