Livre:Étude sur l’épître aux Galates/textev

De mipe
Sauter à la navigation Sauter à la recherche

Auteur: R. Brockhaus

Introduction

L’épître aux Galates n’est pas adressée à une assemblée locale, mais à l’ensemble des croyants dispersés dans la Galatie (comparez Actes chapitre 16 verset 6 et chapitre 18 verset 23). Faut-il entendre sous le nom de Galatie uniquement le pays qui se trouve au centre de l’Asie Mineure ou penser plutôt à la province romaine de « Galatia », plus étendue ? Dans ce cas il faudrait y inclure les assemblées d’Iconium, Lystre et Derbe.

De tout temps les avis ont divergé quant à l’époque de la rédaction de cette épître. Le plus probable est qu’elle a été écrite dans les années 56 ou 57 de l’ère chrétienne, c’est-à-dire environ deux ans avant l’épître aux Romains. Ce fait a quelque importance, car, à première vue, on serait enclin à considérer l’épître aux Galates comme étant postérieure à celle aux Romains.

L’épître elle-même ne développe pas tellement une vérité particulière, comme le font par exemple les épîtres aux Romains, aux Éphésiens, aux Colossiens, mais elle a plutôt le caractère d’une apologie. Par son contenu, c’est de l’épître aux Romains qu’elle se rapproche le plus. Mais si cette dernière enseigne le précieux évangile de Dieu touchant Son Fils, la justice de Dieu qui y est révélée, la justification du pécheur par la foi, sans œuvres de loi, et pose ainsi les fondements de la foi chrétienne, l’épître aux Galates, elle, s’oppose à des docteurs et des doctrines qui cherchaient à rattacher le christianisme au judaïsme, en plaçant les croyants d’entre les nations sous les ordonnances juives. La foi en Christ et en Son œuvre n’était pas rejetée, mais la saine doctrine était falsifiée en ce qu’on estimait nécessaire l’accomplissement d’ordonnances légales, celle de la circoncision en premier lieu ; le fondement de la grâce était abandonné et le croyant séparé de Christ.

À la falsification de la vérité par ces docteurs judaïsants se joignaient leurs attaques pleines de jalousie envers la personne de l’apôtre et son ministère. Un homme qui avait reçu son service sans aucune intervention humaine, mais directement du Seigneur glorifié, dont l’apostolat se basait uniquement sur l’autorité de Christ et la puissance du Saint Esprit, provoquait naturellement le dépit et l’hostilité de ces gens, qui aimaient une religion ayant l’homme pour centre ou, pour le moins, laissant place à ses opinions et à son activité. Les assemblées de Galatie avaient prêté l’oreille à ces séducteurs. C’est ainsi que non seulement l’ennemi avait réussi à influencer d’une manière pernicieuse leur attitude personnelle envers l’apôtre, mais le plus grave est que, sans s’en rendre compte, ils avaient entièrement perdu pied, ils étaient « déchus de la grâce » [chapitre 5 verset 4].

L’apôtre, en s’opposant aux efforts de l’ennemi, devait nécessairement mettre en lumière les premiers principes de la vérité chrétienne, savoir la justification par la foi. C’est ainsi que dans cette épître il a été conduit, pour le bien des croyants de tous les temps, à ramener l’évangile à ses éléments les plus simples et la grâce à sa plus simple expression. Il était immanquable qu’en le faisant, le contraste absolu entre la loi et la grâce, la distance infranchissable entre le judaïsme et le christianisme — la religion de la chair et celle de l’esprit — ne fussent mis en évidence avec une force particulière ; de même, l’apôtre insiste sur l’origine divine de son apostolat et de son appel avec plus d’énergie que peut-être partout ailleurs. De la même manière que l’évangile, l’heureux message de Jésus Christ, était venu directement de Dieu, ainsi aussi celui qui en avait la charge avait été appelé à son ministère directement par Dieu. Malheur à ceux qui mettaient cet appel en question, qui « bouleversaient » les Galates, qui les « troublaient et qui voulaient pervertir l’évangile du Christ » [chapitre 1 verset 7] ! Ils récolteraient ce qu’ils avaient semé.

Les déclarations du début de cette épître ont un caractère bien particulier. Alors que dans presque toutes les autres épîtres l’apôtre donne cours à ses sentiments envers ceux à qui il s’adresse par des paroles affectueuses, nous constatons ici une sérieuse retenue. Nous pouvons le comprendre. Le cœur du fidèle serviteur était attristé et rempli d’inquiétude. Son langage est mesuré, froid, et il reste froid dans toute l’épître, que d’ailleurs aucune salutation personnelle ne termine. Nous chercherions en vain une appréciation du bien qui pourrait encore exister chez les Galates. L’apôtre en vient tout de suite à parler de ce qui accablait tant son cœur : ils s’étaient détournés vers un évangile différent !

Nous savons que dans d’autres épîtres, l’amour de l’apôtre se manifeste précisément en ce qu’il reconnaît tout d’abord le bien produit par la grâce. Les corrections ou blâmes nécessaires ne viennent qu’en second ou en troisième rang. Même dans les épîtres aux Corinthiens, le ton est beaucoup plus chaleureux qu’ici ; et pourtant il y avait beaucoup de choses à blâmer à Corinthe. Les Corinthiens étaient fiers de leurs riches dons spirituels et en faisaient usage d’une manière charnelle pour se glorifier eux-mêmes. Il y avait des divisions et des partis, des jalousies et des disputes parmi eux ; ils allaient jusqu’à avoir des procès entre eux, et cela devant les incrédules ! Un mal moral de la pire espèce s’était montré et ils n’avaient pas mené deuil. Même quant à la célébration de la cène, ils devaient entendre les plus graves reproches. En vérité, dans de telles conditions, ne pouvait-on pas se demander si ces personnes étaient vraiment toutes converties ? L’apôtre semble en avoir douté lui-même (comparez 1 Corinthiens chapitre 10 versets 1 à 12).

Malgré tout cela Paul s’adresse à eux comme « à l’assemblée de Dieu qui est à Corinthe, aux sanctifiés dans le Christ Jésus, saints appelés » [1 Corinthiens chapitre 1 verset 2], et rend grâces à cause de la grâce de Dieu qui les avait enrichis dans le Christ Jésus en toute parole et toute connaissance, de sorte qu’ils ne manquaient d’aucun don de grâce. Il était aussi persuadé que, gardés par la fidélité de Dieu jusqu’à la fin, ils seraient irréprochables dans la journée de notre Seigneur Jésus Christ. Continuellement, et dans les deux épîtres, il exprime sa tendresse envers ceux à qui il s’adresse. Or, qu’en est-il ici ? Ni au début de l’épître, ni dans la suite, nous ne trouvons de telles expressions de son amour. Ce n’est pas que l’apôtre eût moins aimé les Galates que les Corinthiens. Non, c’est justement parce que son amour était réel et fidèle qu’il ne pouvait laisser libre cours à la tendresse et qu’il devait leur parler si sérieusement. Associé à tous les frères qui étaient avec lui (ceci aussi est caractéristique), il souhaite aux assemblées de la Galatie grâce et paix. Il ne les appelle ni assemblées de Dieu, ni en Dieu, ni dans le Christ Jésus ; il ne dit pas un mot quant à leur position personnelle comme étant saints et bien-aimés, appelés ou fidèles, ainsi qu’il le fait dans d’autres épîtres. Il ne les associe pas davantage aux croyants d’autres localités. Ce sont les assemblées de la Galatie qui, en contraste avec d’autres, étaient en danger de renoncer au sentier de la vérité et d’abandonner la foi des saints. L’apôtre, ainsi que les frères qui étaient avec lui, avaient de sérieuses inquiétudes à leur sujet. En effet, dans un sens, les Galates se trouvaient déjà isolés ; il n’était besoin que d’un pas pour les séparer tout à fait des autres croyants.

Que tout cela est remarquable et nous montre combien Dieu juge les choses tout autrement que l’homme ne le fait et que nous, croyants, ne sommes enclins à le faire ! L’homme naturel honorable est sévère, souvent inexorable dans son jugement du mal moral, de l’ivresse, du mensonge, de la tromperie, de l’immoralité et des autres choses semblables, alors qu’il est insensible lorsque la volonté de Dieu, telle qu’Il l’a fait connaître dans Sa Parole, est violée sur d’autres points, en particulier lorsqu’il s’agit du dédain des droits de Son Fils. Dans le domaine religieux les choses les plus fausses peuvent être dites, les pires choses peuvent être enseignées relativement à la personne ou à l’œuvre du Seigneur Jésus sans qu’une seule voix s’y oppose. La vérité divine peut être altérée et mutilée et la conscience des hommes rester insensible, se réveillant à peine lorsque le mal est dévoilé et l’erreur vigoureusement réfutée à la lumière de la Parole de Dieu. Comme l’ennemi n’a pas l’habitude de présenter des erreurs sans les voiler, ni de les présenter au jugement de la conscience éclairée par Dieu, mais de les parer de toutes sortes d’adjonctions propres à agir sur l’esprit et les sentiments, bien des croyants même sont en danger de prêter l’oreille à la séduction et en même temps de la fermer à la vérité.

L’épître aux Galates nous montre ce que Dieu pense des fausses doctrines et de ceux qui les apportent. Ses pensées n’ont pas changé depuis, elles ne peuvent pas changer. Il est et reste lumière. À Ses yeux les fausses doctrines sont aussi bien du « levain » que le mal moral ; elles agissent d’une manière semblable et même, suivant les circonstances, de façon bien plus grave.

Prenons donc garde aux sérieux enseignements de cette épître pour que nos pieds soient gardés dans l’étroit chemin de la vérité et que nous n’achevions pas par la chair après avoir commencé par l’Esprit (chapitre 3 verset 3).

Il sera peut-être utile de donner au lecteur un bref aperçu de l’épître avant d’en commencer la méditation.

Dans le premier chapitre l’auteur met l’accent sur l’entière indépendance vis-à-vis des hommes, tant de sa charge que de son service. Tous deux n’étaient ni de la part des hommes, ni par l’homme. Paul n’avait rien reçu non plus des autres apôtres. Son autorité apostolique et les révélations qu’il avait reçues venaient directement du Seigneur Lui-même.

Jusqu’au verset 10 du chapitre 2, l’apôtre s’occupe du même sujet, et il montre ensuite combien l’évangile et la loi sont inconciliables. Tandis que la loi est une règle parfaite, mais sans puissance, pour l’homme dans la chair, l’évangile révèle des choses célestes — Christ dans la gloire — et nous transforme à Son image. Lorsque Pierre veut retourner à la loi, Paul lui résiste en face.

Le troisième chapitre établit tout d’abord le contraste entre la loi et la foi (versets 1 à 14), traite ensuite des rapports entre les promesses et la loi (versets 15 à 20) et présente, dans les derniers versets, le but de la loi comme conducteur jusqu’à Christ.

Dans la première moitié du chapitre 4, l’apôtre parle de la condition des croyants sous l’ancienne alliance et dit comment, étant sous la loi, ils ont été rachetés par Christ pour recevoir l’adoption. Ensuite, après une touchante évocation de ses relations personnelles avec les Galates, il montre, en prenant Agar et Sara pour types, comment la loi enfante pour la servitude et exclut de l’héritage, alors que la grâce a pour résultat la liberté et conduit à la bénédiction.

Le chapitre 5 traite de plus près, et cela sous deux aspects, de cette liberté pour laquelle Christ nous a affranchis. Premièrement en rapport avec la justification. Si les Galates voulaient trouver leur justification dans la loi, ils étaient séparés de Christ, ils étaient déchus de la grâce. La chair et l’Esprit sont, de par leur nature, entièrement opposés l’un à l’autre. Si la chair pouvait obtenir la justice, Christ serait alors mort en vain. Le croyant attend par l’Esprit, par la foi, l’espérance de la justice, c’est-à-dire la gloire. Sur le chemin qui y conduit — et ceci nous amène au second aspect — il marche de fait dans la puissance de l’Esprit ; il est libre d’accomplir ce qui est de l’Esprit, autrement dit « de marcher par l’Esprit ».

Le chapitre 6 contient des exhortations adressées d’abord à ceux qui sont « spirituels », puis à l’ensemble. Pour terminer, l’auteur revient encore une fois aux séducteurs qui cherchaient à ramener les Galates à la circoncision et en cela à l’ancien Israël. Il souhaite au vrai Israël, l’Israël de Dieu, paix et miséricorde, et termine par une courte mais d’autant plus impressionnante allusion aux « marques du Seigneur Jésus » qu’il portait en son corps, comme fidèle témoin de la vérité.

Chapitre 1

« Paul, apôtre, non de la part des hommes, ni par l’homme, mais par Jésus Christ, et Dieu le Père qui l’a ressuscité d’entre les morts ». Comme nous l’avons déjà remarqué dans l’introduction, les premières paroles de l’épître sont particulières. Dans plusieurs autres épîtres, Paul insiste sur son appel comme esclave et apôtre de Jésus Christ « par la volonté de Dieu », mais nulle part ailleurs il ne relève l’absence de toute intervention humaine avec autant de force. De même l’adjonction « qui l’a ressuscité d’entre les morts » est inhabituelle et caractéristique de cette épître. Non seulement l’appel de l’apôtre n’avait aucune intervention humaine comme point de départ, mais l’homme n’y avait participé ni comme intermédiaire, ni comme instrument. Cet appel avait été adressé directement par Jésus Christ, non pas à Jérusalem, le domicile et la sphère d’activité du jeune Saul, mais loin du grand centre du monde religieux de l’époque, sur le chemin de Damas. C’est là que Dieu le Père l’avait rencontré en Son Bien-aimé, que Saul haïssait si ardemment, mais que Dieu avait ressuscité d’entre les morts. Paul n’avait pas été introduit dans sa charge, comme les autres apôtres, par un Messie vivant sur la terre, mais tout à fait indépendamment d’eux, par le Seigneur ressuscité d’entre les morts et glorifié à la droite de Dieu. C’est ainsi que ce fait, employé par les séducteurs pour amoindrir Paul aux yeux des Galates, devenait une preuve de l’importance particulière et de la puissance de son appel. L’inconsistance totale des affirmations de ces mauvais ouvriers était mise à nu d’un seul coup.

« Non de la part des hommes, ni par l’homme ». Sur un chemin dans lequel la haine de Christ l’avait conduit, muni par les hommes de lettres de recommandation et investi de pleins pouvoirs, Paul avait été arrêté subitement et de merveilleuse façon : une lumière du ciel l’avait éclairé et une voix lui avait parlé d’en haut. Puis, trois jours après, quand un messager fut envoyé à celui qui était devenu aveugle, pour qu’il recouvrât la vue et fût rempli de l’Esprit Saint, Dieu n’avait pas employé un homme éminent, un apôtre ou au moins une colonne dans l’assemblée, mais « un certain disciple », « un homme pieux selon la loi ». C’est lui qui lui imposa les mains et qui l’engagea à être baptisé (Actes chapitres 9 et 22). Ainsi Dieu avait dirigé les circonstances extérieures de la conversion et de l’appel de l’apôtre pour qu’il ne restât pas la moindre place à l’homme et à son intervention. Tout eut lieu non pas seulement de la part du Seigneur, mais « par Jésus Christ, et Dieu le Père ». Et lorsque le temps vint pour Paul de commencer son service comme apôtre des nations, « l’Esprit Saint dit : Mettez-moi maintenant à part Barnabas et Saul, pour l’œuvre à laquelle je les ai appelés » (Actes chapitre 13 verset 2). C’est ainsi que Dieu eut soin que l’homme destiné à occuper une place si particulière dans Son œuvre et à devenir le grand héraut de Son évangile et l’administrateur richement béni de Ses mystères, fût appelé sans intervention ou légitimation d’hommes éminents.

En principe il en est toujours ainsi : le Seigneur donne des évangélistes, des pasteurs et des docteurs, Dieu opère tout en tous, l’Esprit Saint distribue comme il Lui plaît (Éphésiens chapitre 4 ; 1 Corinthiens chapitre 12). Des hommes fidèles, craignant Dieu, ou les frères les plus âgés d’une assemblée peuvent donner, par la prière en commun, peut-être par l’imposition des mains, leur accord au service d’un frère ; ils peuvent le recommander à la grâce spéciale de Dieu pour un long voyage ou une œuvre particulièrement pénible (comme par exemple en Actes chapitre 13 verset 3), mais cela n’a rien à faire avec l’appel au service. Bien sûr nous ne voulons et ne pouvons oublier à ce propos que le service et la charge d’un apôtre étaient une chose tout à fait particulière. Les apôtres et les prophètes ne devaient-ils pas poser le fondement [Éphésiens chapitre 2 verset 20] du temple saint dont Christ est la maîtresse pierre du coin ?

Dans d’autres épîtres l’apôtre joint volontiers à son nom celui d’un frère ou d’un autre, de Timothée, de Silvain, etc. ; ici il dit : « et tous les frères qui sont avec moi ». Le fait-il pour rehausser le sérieux et l’importance de ses déclarations ? Ou pour montrer aux Galates : Voyez, tous les frères qui sont auprès de moi sont du même avis que moi, considérez bien où vous en êtes arrivés ? Les deux choses peut-être. En tout cas, le fait de s’en référer à tous les frères qui étaient avec lui, et d’un même avis, était sérieux pour les Galates. Il était non moins remarquable pour eux qu’à sa salutation habituelle : « Grâce et paix à vous, de la part de Dieu le Père et de notre Seigneur Jésus Christ », l’apôtre ajoutât ces paroles : « qui s’est donné lui-même pour nos péchés, en sorte qu’il nous retirât du présent siècle mauvais, selon la volonté de notre Dieu et Père ».

C’est justement cela qu’ils avaient oublié. Leur Seigneur Jésus Christ avait souffert pour leurs péchés, était mort pour eux, alors qu’ils étaient encore pécheurs et ennemis, et ils voulaient se placer maintenant sous une loi qui ne pouvait jamais ôter les péchés ! Leur Sauveur avait dû devenir malédiction pour eux, afin de les retirer du présent siècle mauvais, et ils voulaient retourner dans ce monde-là ! La loi avait été donnée pour l’homme « dans la chair », pour ceux qui appartenaient à ce présent siècle. C’est à eux qu’elle devait servir de règle, c’est eux qu’elle devait convaincre tout à la fois de leur état de péché et de leur complète impuissance. Mais le croyant, lui, n’est plus « dans la chair » ; il est « dans l’Esprit », c’est un homme en Christ pour lequel il n’y a plus de condamnation, un homme qui ne marche plus selon la chair, mais selon l’Esprit (Romains chapitre 8). Bien que la chair soit encore en lui, elle a été jugée dans la mort de Christ et le croyant « l’a crucifiée avec ses passions et ses convoitises » [chapitre 5 verset 24].

Mais il y a plus. Bien qu’étant encore dans le monde, nous ne sommes plus du monde. Nous appartenons à un monde nouveau. « Si quelqu’un est en Christ, c’est une nouvelle création : les choses vieilles sont passées ; voici, toutes choses sont faites nouvelles » (2 Corinthiens chapitre 5 verset 17). La loi s’adresse aux hommes du présent siècle. Elle est bonne « si quelqu’un en use légitimement », c’est-à-dire s’il l’applique à ceux à qui elle est destinée (1 Timothée chapitre 1 versets 8 à 10). Cependant, sur ceux qui ne sont pas du monde, comme Christ n’est pas du monde, la loi n’a plus aucun droit. Ils sont « à un autre, à Celui qui est ressuscité d’entre les morts », pour porter du fruit pour Dieu (Romains chapitre 7 verset 4). Ils ont été envoyés dans le monde par le Seigneur après Sa résurrection, comme Lui avait été envoyé par le Père. Messagers de paix, ils doivent témoigner envers le monde par leur parole et par leur marche, qu’étant un peuple affranchi, ils ne lui appartiennent plus, mais appartiennent au ciel. Retirés du monde et transportés dans une toute nouvelle sphère par suite de la révélation du Père dans le Fils, ils ne sont absolument plus considérés comme étant « encore en vie dans le monde » (Colossiens chapitre 2 verset 20). Morts et ressuscités avec le Christ, ils sont appelés à chercher les choses qui sont en haut et à Le glorifier selon la position qu’Il occupe maintenant à la droite de Son Dieu et Père. « À Lui soit la gloire aux siècles des siècles ! ». C’est ainsi que l’apôtre termine ses paroles d’introduction. C’est de tout cœur que nous ajoutons notre « Amen » à cette action de grâces.

Dans le verset suivant Paul arrive sans aucun préambule au sujet si important qui remplissait son cœur. Cela fait penser aux paroles d’Élihu, qui adressait en son temps à Job et à ses amis ces mots sortant du fond de son cœur oppressé : « Je suis plein de paroles, l’esprit qui est au-dedans de moi me presse » (Job chapitre 32 verset 18).

« Je m’étonne de ce que vous passez si promptement de celui qui vous a appelés par la grâce de Christ, à un évangile différent, qui n’en est pas un autre » (versets 6 et 7). Nous aussi nous pourrions nous étonner de ce que l’ennemi ait réussi, après si peu d’années, à troubler ces chrétiens récemment encore si heureux, et à les détourner du fidèle enseignement de l’apôtre. Mais nous ne devons pas oublier qu’ils ne possédaient pas la Parole de Dieu comme nous l’avons aujourd’hui entre nos mains. Ils ne pouvaient pas confronter les enseignements qui leur étaient apportés, avec cette pierre de touche infaillible. Il était pourtant étonnant qu’ils se soient laissés détourner si vite de Celui qui les avait appelés par la grâce de Christ.

Et à qui ces Galates avaient-ils prêté l’oreille ? Aux prédicateurs d’un autre évangile qui différait essentiellement de celui que Paul prêchait et qui, en réalité, n’en était pas un autre. Car comment aurait-il pu y avoir un autre évangile, une bonne nouvelle autre que celle dont Dieu avait rendu témoignage au sujet de Son Fils ? Toute autre chose n’était pas, n’est pas, ne peut pas être la vérité. Dès que l’on ôte quelque chose à l’évangile de Dieu ou que l’on y ajoute quoi que ce soit d’humain, ce n’est plus l’évangile de Dieu ; en acceptant cet autre message, on se détourne en réalité de Dieu Lui-même, de Celui qui nous a appelés par la grâce de Christ.

Cette brève expression « par la grâce de Christ » dirige immédiatement nos pensées sur le moyen de séduction dont l’ennemi s’était servi dans le cas présent. C’était la loi, la loi qui dit à l’homme : « Fais ceci et tu vivras », c’est-à-dire absolument le contraire de ce que l’apôtre leur avait annoncé. Il avait apporté le message de la grâce de Dieu, gratuite et imméritée, à ces pauvres Gentils, qui l’avaient acceptée et avaient été de cette manière « justifiés gratuitement par sa grâce, par la rédemption qui est dans le Christ Jésus » [Romains chapitre 3 verset 24]. Tout était l’œuvre de Dieu, l’action de Dieu, rien ne venait d’eux, rien n’était d’eux. C’est la grâce qui les avait approchés si intimement de Dieu et avait rempli leur cœur d’une joie ineffable, eux qui autrefois étaient sans Dieu et sans espérance dans le monde [Éphésiens chapitre 2 verset 12]. Ils voulaient se détourner maintenant des richesses qui leur avaient été données par grâce en Christ, pour se tourner vers l’homme et ses œuvres misérables ! Ils voulaient quitter le terrain de la grâce et se placer sous une loi qui ne pouvait apporter à l’homme que malédiction, mort et condamnation !

Ils ne pensaient certes pas abandonner Christ et se passer de Lui, mais ils voulaient placer leur propre œuvre à côté de Sa personne et de Son œuvre, y ajouter la circoncision, mélanger la grâce et la loi. Ils avaient écouté des docteurs qui pensaient de cette manière pervertir l’évangile. Ce n’était pas un autre évangile que ces gens apportaient : leur but n’était que de troubler les Galates et de pervertir l’évangile du Christ (verset 7). En vérité, prêter l’oreille à de tels hommes était plus que funeste, c’était un grand mal.

L’état général de la chrétienté de nos jours nous montre combien ce mal, qui à ce moment-là se trouvait à ses débuts, a agi d’une manière néfaste, pernicieuse. Si la différence entre le catholicisme et le protestantisme est grande, très grande sous plus d’un rapport, ils sont à cet égard tous deux sur le même terrain. Certes, on ne prêche pas la circoncision, on ne parle pas d’un retour à la loi cérémonielle (bien qu’il ne manque pas de voix qui réclament l’observation du sabbat et le paiement de la dîme), mais on place sa propre activité sous les formes les plus diverses, les unes plus raffinées, les autres plus grossières, à côté de l’œuvre de Christ ou même à sa place. On va jusqu’à employer à cela le baptême et la cène. Il est vrai que l’Esprit de Dieu agit avec puissance de nos jours pour dégager les vrais croyants de leurs relations avec une religion qui laisse place à la chair (il y a aussi une chair religieuse) et à la volonté de l’homme, une religion qui consiste principalement en l’observance de préceptes moraux et en l’accomplissement de simples formes et règles chrétiennes extérieures. L’Esprit de Dieu s’efforce plus que jamais de les ramener à Christ seul, à Sa Parole et à Son nom. Mais partout se montre, à des degrés divers il est vrai, la tendance à mélanger à la grâce des œuvres légales, des œuvres de propre justice. De nos jours le christianisme dans son ensemble porte plus ou moins le caractère de cette fatale confusion de principe entre la loi et la grâce, entre la chair et l’Esprit, et cette confusion vise à troubler les âmes et à pervertir l’évangile de Christ.

La manière dont l’apôtre parle ensuite de la proclamation d’un évangile qui ne concordait pas avec celui qu’il annonçait lui-même, est des plus sérieuses : « Mais quand nous-mêmes, ou quand un ange venu du ciel vous évangéliserait outre ce que nous vous avons évangélisé, qu’il soit anathème » (verset 8). Pouvons-nous imaginer déclaration plus solennelle ? Et n’oublions pas que c’est l’Esprit Saint qui parle par l’apôtre. Si donc quelqu’un, que ce fût Paul lui-même ou un ange venu du ciel, annonçait comme évangile autre chose que ce qu’il leur avait annoncé, ou, comme il l’ajoute avec emphase, outre ce qu’ils avaient reçu, l’anathème devait atteindre un tel homme. Rien ne devait être mêlé à ce qu’il avait annoncé, il n’y fallait pas toucher. Rien ne devait être ajouté à ce qu’ils avaient reçu. Si quelqu’un le faisait, qu’il fût anathème !

Qu’est-ce qui poussait l’apôtre à parler d’une manière si sévère ? Pensait-il à son honneur comme apôtre ? Ou était-ce même de la jalousie à l’égard de ces autres docteurs ? Non, aucune de ces choses ! Les Galates connaissaient mieux leur apôtre. Et de plus il se plaçait lui-même sous les conséquences terribles qu’une telle manière de faire aurait entraînées. Non, ce qui le poussait, c’était l’amour, un amour pur, divin envers les Galates, une profonde sollicitude quant à leur bien spirituel. Ce qu’il leur avait annoncé, ce qu’ils avaient reçu, était l’évangile de Dieu. Le pervertir ne pouvait provenir que de l’ennemi des âmes et devait nécessairement tourner à leur perte.

De tels sentiments ne devraient-ils pas remplir nos cœurs lorsque nous voyons et entendons tout ce que l’on offre aujourd’hui aux âmes des hommes, et avant tout aux croyants, que ce soit en paroles ou par écrit ? À la faiblesse de tels sentiments en nous, nous pouvons mesurer combien petits sont et notre amour pour nos frères et notre sollicitude pour eux. Puisse le Saint Esprit éclairer davantage les cœurs des enfants de Dieu et réveiller leurs consciences ! Et n’oublions pas, en ce qui nous concerne, que nous sommes responsables d’être vigilants à l’égard de ce que nous entendons ou lisons, et de prendre garde à qui nous prêtons l’oreille. Plus d’un pense avoir la liberté de tout lire, d’aller partout. Combien de ravages cette prétendue liberté a déjà occasionnés ! Plusieurs pourraient, s’ils le voulaient, en rapporter des conséquences affligeantes.

Dans ce domaine, le désir de plaire aux hommes joue souvent un grand rôle. On va ici ou là pour ne pas offenser des voisins ou des amis. On désire être connu comme quelqu’un qui a un cœur assez large pour passer par-dessus ce qui est plus ou moins erroné quant à la doctrine ou à la vie pratique. Mais quelque bons et recommandables que soient, à leur place, un cœur large et un esprit tolérant, ils deviennent inquiétants, affligeants même, lorsque la vérité de Dieu est en jeu ; lorsque, pour ne mentionner qu’une chose, la personne ou l’œuvre de Christ sont attaquées. Paul veillait avec une sainte jalousie sur la pureté de la doctrine, que cela plût ou déplût aux hommes. « Car maintenant, est-ce que je m’applique à satisfaire des hommes, ou Dieu ? Ou est-ce que je cherche à complaire à des hommes ? Si je complaisais encore à des hommes, je ne serais pas esclave de Christ » (verset 10).

Être un esclave fidèle de Christ et aspirer à l’approbation des hommes sont deux choses qui ne peuvent absolument pas aller de pair, et pourtant combien sont nombreux ceux qui s’efforcent de les unir. Paul savait très bien qu’en tenant ferme, d’une manière inflexible, à la pureté de l’évangile de Christ, il choquait les hommes et qu’il pouvait même être incompris de croyants. Il n’en est pas autrement aujourd’hui : celui qui défend la vérité avec fidélité doit s’attendre à des accusations telles que celles-ci : « sans amour », « orgueilleux », « intolérant ». Mais qu’importe ? Paul ne parlait ni n’écrivait pour plaire aux hommes. Il ne recherchait que l’approbation de Dieu et désirait être trouvé en toutes choses un esclave de Christ. Ne voulons-nous pas l’imiter ?

C’est ainsi que l’évangile qu’il avait annoncé n’était pas « selon l’homme » (verset 11). Son contenu merveilleux correspondait aussi peu aux pensées des hommes que la manière dont l’apôtre avait été établi dans son service ne correspondait à ce que les hommes auraient attendu. Les Galates savaient qu’il avait rencontré Jésus d’une manière tout à fait extraordinaire. Mais ils devaient entendre, et nous avec eux, de plus amples détails à ce sujet. Paul n’avait entendu prêcher l’évangile par personne et si ce fut le cas occasionnellement, comme par exemple à la lapidation d’Étienne, cela n’avait servi qu’à augmenter sa haine envers Christ et à remplir son cœur d’une fureur débordante envers les disciples de Jésus. De plus, lors de sa conversion sur le chemin de Damas, il n’avait pas appris à connaître Christ comme le roi des Juifs, mais comme le Fils de l’homme glorifié, la tête de l’Assemblée, qui est Son corps. La voix venue du ciel l’avait appelé : « Saul ! Saul ! pourquoi me persécutes-tu ? » [Actes chapitre 9 verset 4]. Jésus dans le ciel en haut et les saints sur la terre en bas étaient un : ils formaient un tout, un corps, le Christ. C’est ainsi qu’il dit, en parlant de l’évangile : « Je ne l’ai pas reçu de l’homme non plus, ni appris, mais par la révélation de Jésus Christ » (verset 12).

Personne ne pouvait mettre en doute la sincérité et l’authenticité de sa conversion. Comme les Galates le savaient aussi, il avait été dans le passé un ardent zélateur des traditions de ses pères, il avait devancé tous ceux de son âge dans la stricte observation des ordonnances juives et, dans ce chemin, il était devenu « outre mesure » un persécuteur et un dévastateur de l’Assemblée de Dieu (versets 13 et 14). En même temps, combien ces faits condamnaient les Galates dans leur penchant à retourner aux choses qui avaient conduit cet homme dans un tel chemin ! Qu’est-ce qui aurait pu l’arrêter dans sa course et lui faire faire volte-face, si ce n’était la miséricorde puissante de Dieu ? Il l’avait « mis à part dès le ventre de sa mère » et l’avait « appelé par sa grâce ». Et c’est en lui qu’il plaisait maintenant à Dieu de révéler Son Fils. Quel Dieu merveilleux, digne d’adoration ! Lui qui peut tirer le bien du mal, et le fait souvent, s’est servi de la folie des Galates pour nous apprendre tant de choses qui autrement nous seraient sans doute restées cachées. Un fait après l’autre doit être mis en lumière pour nous faire connaître de plus près la personne et l’histoire de ce « vase d’élection » (Actes chapitre 9 verset 15), à la confusion des Galates, mais pour notre joie et notre affermissement dans la foi.

L’apôtre Pierre avait eu aussi, une fois, une révélation particulière de la part de Dieu, et en cela il y a une ressemblance entre lui et Paul. Lorsqu’il confesse Jésus comme étant « le Fils du Dieu vivant », le Seigneur lui adresse les paroles connues : « Tu es bienheureux, Simon Barjonas, car la chair et le sang ne t’ont pas révélé cela, mais mon Père qui est dans les cieux » (Matthieu chapitre 16 verset 17). Mais il y a pourtant une différence remarquable dans la manière et le contenu de ces deux révélations. Dans le premier cas, la révélation fut faite à Pierre lui-même : Dieu lui révéla Son Fils. Dans le cas de Paul, il plut à Dieu « de révéler son Fils en lui ». Si petite que paraisse cette différence au premier abord, elle devient de la plus haute importance lorsqu’on l’examine de plus près. C’est encore un des nombreux exemples qui montrent que nous ne pouvons jamais lire la Parole de Dieu, « affinée sept fois » [Psaume 12 verset 6], avec trop d’attention ; au contraire, nous la lisons souvent avec trop peu d’attention.

Nous avons relevé plus haut que la merveilleuse vérité de l’union des croyants avec Christ avait déjà été révélée à Paul lors de sa conversion ; l’action du Saint Esprit allait compléter en lui la connaissance de cette vérité qu’il devait annoncer ensuite aux Juifs et aux Gentils. Elle n’a pas été confiée à Pierre ni aux autres apôtres. Elle était un mystère dont l’administration était remise à Paul. C’est pourquoi il parle à plusieurs reprises de « son évangile ». Cela ne signifie pas qu’il en avait annoncé un autre, un évangile édifié sur un autre fondement — cela était impossible — mais bien un évangile auquel une vérité jusque-là non révélée avait été ajoutée, précisément cette vérité de l’union de Christ et de l’Assemblée, Son corps. Il est vrai que le passage qui nous occupe ne fait qu’allusion à cette vérité ; mais sans doute était-elle dans la pensée de l’auteur lorsqu’il disait qu’il avait plu à Dieu de révéler Son Fils en lui.

Rappelons à cette occasion que Paul désigne aussi le message qui lui était confié comme « l’évangile de la gloire du Christ » (2 Corinthiens chapitre 4 verset 4). C’est l’évangile d’un Sauveur qui n’est pas seulement mort et ressuscité, mais qui a aussi été glorifié en haut à la droite de Dieu et qui maintenant est donné comme chef sur toutes choses à Son corps, l’Assemblée (Éphésiens chapitre 1 versets 20 à 23). Les autres apôtres ne développent pas cette glorification du Fils de l’homme ni les conseils de Dieu qui s’y rattachent. C’est pourquoi Paul pouvait aussi écrire aux Colossiens qu’en communiquant les choses qui lui avaient été révélées, il avait, comme serviteur de l’Assemblée, « complété la parole de Dieu » [Colossiens chapitre 1 verset 25], c’est-à-dire y avait ajouté ce qui manquait encore. La révélation du mystère de Christ et de l’Assemblée, mystère qui était caché dès les siècles et dès les générations, fermait le cercle des communications de Dieu. Au-delà de cela il n’y avait plus rien.

En considérant tout ceci nous comprenons encore mieux que l’évangile de Paul n’était « pas selon l’homme », ni ne pouvait avoir été « reçu de l’homme non plus », mais avait été communiqué par une révélation directe du Seigneur. Lorsqu’il plut donc à Dieu de révéler ainsi Son Fils en lui pour qu’il L’annonçât aux nations, il n’avait pas pris conseil de la chair ni du sang, ni n’était monté à Jérusalem vers ceux qui étaient apôtres avant lui (versets 16 et 17). Il ne se concerta pas avec l’homme : ni avec lui-même, ni avec d’autres ; il n’alla pas non plus à Jérusalem pour annoncer son appel aux apôtres qui y séjournaient et le faire confirmer par eux. Dieu l’avait appelé et c’est à Lui qu’il laissait la disposition de tout son chemin futur. Les pensées de Dieu ne sont pas nos pensées et nos voies ne sont pas Ses voies [Ésaïe chapitre 55 verset 8]. Il conduisit Son esclave dans le silence de l’Arabie, après qu’il eut prêché pendant quelques jours dans la synagogue de Damas que Jésus est le Fils de Dieu (Actes chapitre 9 versets 19 et 20). C’est là qu’il séjourna trois ans. Rien d’autre ne nous est communiqué quant à cette longue période. Mais nous ne nous tromperons pas en la considérant comme un temps sérieux de préparation, comme l’école de Dieu pour Son esclave, en vue de son service futur. Nous constatons cette façon d’agir de Dieu envers plus d’un de Ses serviteurs dont Il voulait se servir d’une manière éminente (Joseph, Moïse, Élie, etc.). Avant de leur confier un service public, Il les conduisait à part, dans la solitude, non seulement pour leur donner une connaissance plus intime de Ses pensées, mais aussi pour leur enseigner leur propre néant.

Qui enseigne comme Lui ? [Job chapitre 36 verset 22]

« Puis, trois ans après » (dans lesquels se situe un second séjour à Damas), « je montai à Jérusalem pour faire la connaissance de Céphas, et je demeurai chez lui quinze jours ; et je ne vis aucun autre des apôtres, sinon Jacques le frère du Seigneur » (versets 18 et 19). L’apôtre souligne expressément la brièveté de son séjour à Jérusalem (seulement quinze jours) pour exclure d’emblée toute pensée qu’il aurait pu suivre là un enseignement. Il est très compréhensible qu’il ait désiré faire la connaissance de Pierre, l’apôtre de la circoncision. Mais à part lui, il n’avait vu que Jacques, le frère du Seigneur. Après avoir encore témoigné solennellement : « dans les choses que je vous écris, voici, devant Dieu, je ne mens point » (verset 20), il poursuit : « ensuite j’allai dans les pays de Syrie et de Cilicie. Or j’étais inconnu de visage aux assemblées de la Judée qui sont en Christ, mais seulement elles entendaient dire : Celui qui nous persécutait autrefois, annonce maintenant la foi qu’il détruisait jadis ; et elles glorifiaient Dieu à cause de moi » (versets 21 à 24). Le contenu de ces versets est simple et ne demande pas d’explication. Les Galates aussi auront compris sans peine l’enseignement humiliant qu’ils contenaient. Les assemblées de Judée, auxquelles l’apôtre était inconnu de visage, et qui avaient seulement entendu que celui qui autrefois persécutait les disciples de Jésus annonçait maintenant la foi qu’il détruisait jadis, glorifiaient Dieu à cause de lui. Elles avaient reconnu avec gratitude la grâce que Dieu avait accordée à cet homme, et avec une joie profonde, elles s’étaient laissé conduire plus avant dans l’intelligence des pensées et des conseils de Dieu.

Mais qu’en était-il des assemblées de Galatie qui avaient été formées par Paul à la suite d’un travail pénible et persévérant ? Ne leur avait-il pas apporté le précieux évangile de la grâce à travers beaucoup de souffrances et de dangers ? N’avaient-elles pas appris, par un contact personnel, à connaître le zèle infatigable, l’amour plein d’abnégation et la fidélité de cet esclave de Jésus Christ ? Hélas, les Galates ne le comprenaient plus ! Ils trouvaient toutes sortes de choses à critiquer chez lui, blessaient son cœur en se laissant ensorceler par des séducteurs juifs, et se détournaient pour servir de nouveau les faibles et misérables éléments du monde. Qu’ils avaient été heureux jadis, alors que Paul avait dépeint Jésus Christ devant leurs yeux d’une façon si vivante, comme s’Il avait été crucifié au milieu d’eux ! Et maintenant ? Oh ! combien la solennelle affirmation du verset 20 et le rappel qui suit concernant les assemblées de Judée devaient toucher leur cœur et atteindre leur conscience ! Ne seront-ils pas revenus à la raison, n’auront-ils pas eu honte et n’auront-ils pas recommencé à glorifier Dieu à cause de Son serviteur ?

Chapitre 2

Le deuxième chapitre, qui nous informe d’abord de la suite des voies de Dieu envers Son serviteur, commence par ces mots : « Ensuite, au bout de quatorze ans » — comptés ici à partir de sa conversion comme au verset 18 du chapitre 1 — « je montai de nouveau à Jérusalem avec Barnabas, prenant aussi Tite avec moi. Or j’y montai selon une révélation » (versets 1 et 2). Onze années s’étaient écoulées depuis son premier séjour à Jérusalem. Paul les avait passées d’abord à Tarse, sa ville natale, puis — ayant été cherché là par Barnabas — à Antioche, d’où plus tard ils avaient commencé ensemble leur premier voyage missionnaire. Les chapitres 11 à 14 des Actes des apôtres nous renseignent d’une façon plus détaillée sur cette période. La fin du chapitre 11 nous apprend que Barnabas et Saul allèrent en Judée pour apporter le produit d’une collecte à leurs frères dans la disette. Ce n’est probablement qu’en passant que Saul a été à cette occasion à Jérusalem. La fin du chapitre 12 mentionne cette visite sans aucun commentaire.

La visite dont notre chapitre nous entretient est commentée en détail dans le chapitre 15 des Actes ; là, les raisons extérieures qui engagèrent l’apôtre à entreprendre son voyage nous sont données, tandis que dans notre épître, nous apprenons que c’est selon une révélation, c’est-à-dire selon une direction précise d’en haut, qu’il y monta. Dieu agissait d’une manière directe dans cette affaire. Il ne voulait pas que la sérieuse question de la circoncision fût tranchée à Antioche, ni que Paul allât seul dans le chemin qu’Il lui avait ordonné. La question devait être traitée à Jérusalem pour maintenir l’unité dans le témoignage et dans le service. En même temps, Paul devait être amené dans une communion plus proche avec les autres apôtres.

Dans le chapitre 15 déjà cité, Luc écrit : « Et quelques-uns, étant descendus de Judée, enseignaient les frères, disant : Si vous n’avez pas été circoncis selon l’usage de Moïse, vous ne pouvez être sauvés. Une contestation s’étant donc élevée et une grande dispute, entre Paul et Barnabas et eux, ils résolurent que Paul et Barnabas et quelques autres d’entre eux monteraient à Jérusalem vers les apôtres et les anciens pour cette question » (versets 1 et 2). Arrivés à Jérusalem, ils y trouvèrent la même discorde : « Et quelques-uns de la secte des pharisiens, qui avaient cru, s’élevèrent, disant qu’il faut les circoncire et leur enjoindre de garder la loi de Moïse » (verset 5). La question qui menaçait de conduire à une grande rupture devait nécessairement être résolue, et elle fut résolue. L’Esprit Saint dirigea les choses pour que les apôtres avec les anciens et toute l’assemblée se réunissent « pour examiner cette affaire ». Nous connaissons le résultat de ces débats, en partie assez agités. Les exigences des croyants qui inclinaient pour la loi furent repoussées et la vérité de l’évangile fut conservée aux chrétiens d’entre les nations.

Lors de cette rencontre importante, Tite, un Grec, se trouvait parmi les compagnons de l’apôtre. Paul, comme il l’écrit, le prit aussi avec lui. Nous pouvons supposer que cette décision hardie était en relation avec la révélation reçue d’en haut. Car c’était un fait qui devait contribuer grandement à résoudre la question : circoncision ou non. Tite, et Paul ne semble l’indiquer qu’en passant, « quoiqu’il fût Grec, ne fut pas contraint à être circoncis ». Timothée, « fils d’une femme juive croyante, mais d’un père grec », fut plus tard circoncis par l’apôtre, à cause des Juifs qui étaient dans ces lieux-là (Actes chapitre 16 versets 1 à 3). Tite ne le fut pas, car là il s’agissait de maintenir intactes la vérité de l’évangile et la liberté que nous possédons en Christ. Dieu justifie la façon de faire de Son serviteur. On reconnut Tite comme frère sans exiger sa circoncision. Par cela même l’importante question était déjà résolue.

Il est intéressant de voir de quelle manière Paul expose aux Galates comment Dieu avait tiré une bénédiction durable de cette sérieuse rencontre. Monté selon une révélation, il avait utilisé cette occasion pour exposer à ceux qui étaient assemblés l’évangile qu’il prêchait parmi les nations. Il l’avait fait « dans le particulier, à ceux qui étaient considérés, de peur qu’en quelque manière » il ne courût ou n’eût couru en vain (verset 2). L’apôtre, qui avait reçu son évangile directement du Seigneur Lui-même, était responsable de le transmettre exactement comme il lui avait été confié. Or il s’était efforcé en tout temps d’aller à la rencontre des croyants, en parole et par écrit, dans les conditions où il les trouvait et de les aider avec amour à progresser ; il se servait donc également de cette occasion pour présenter en détail aux conducteurs de l’assemblée à Jérusalem, moins avancés peut-être que lui en connaissance, ce qui lui avait été confié. Une entente paisible avec ceux qui étaient « considérés » était d’importance, tant en ce qui concernait son propre travail que pour l’unité d’action de toute l’œuvre. Que serait-il arrivé si, par suite d’une action irréfléchie de sa part, une discorde était intervenue entre lui et les apôtres ou les autres ouvriers ? Comme Satan aurait triomphé !

Comme il est beau de rencontrer en cet homme, si digne d’être imité, les sentiments qui étaient ceux de Christ ! Ne cherchant jamais son propre intérêt, ne pensant qu’à glorifier le Seigneur, ne travaillant que pour l’avancement de Son œuvre et le bien de Son troupeau bien-aimé, il réalisait pratiquement ce qu’il déclarait : « Je ne vis plus, moi, mais Christ vit en moi » [verset 20].

Cependant, si important que fût cet accord avec les autres apôtres, soit d’une manière générale, soit pour les Galates en particulier, le vrai motif du voyage de l’apôtre à Jérusalem et de son attitude énergique pour la vérité était autre. Nous le trouvons dans les versets 4 et 5 : « à cause des faux frères, furtivement introduits, qui s’étaient insinués pour épier la liberté que nous avons dans le christ Jésus, afin de nous réduire à la servitude ; auxquels nous n’avons pas cédé par soumission, non pas même un moment, afin que la vérité de l’évangile demeurât avec nous ». Paul ne songeait pas à disputer sur la vérité avec ces personnes égarées. Elles ne voulaient pas la vérité. Leur intention était d’épier perfidement la liberté que nous avons en Christ. C’est pour cela que Paul les appelle des « faux frères ». C’est un fait frappant, mais bien compréhensible, que l’acceptation de doctrines perverses va presque toujours de pair avec le manque de droiture, ou y conduit. S’il en est ainsi, à quoi bon disputer avec de telles personnes ? Il ne reste rien d’autre à faire que s’opposer à elles avec énergie, les repousser et se détourner d’elles, ce à quoi l’apôtre exhorte constamment dans ses épîtres et ce qu’il faisait précisément lui-même à cette occasion. Il ne leur avait pas cédé un seul moment par soumission. L’enjeu était digne d’une attitude aussi inflexible : « afin que la vérité de l’évangile demeurât avec vous ». Nous savons ce que ces personnes recherchaient ; elles voulaient remettre les croyants sous la servitude de la loi, qui ne pouvait apporter à l’homme que malédiction et perdition.

L’apôtre en revient maintenant aux hommes qui étaient considérés à Jérusalem. Ce qu’ils étaient et la place qu’ils avaient prise ne lui importait guère — car Dieu n’a point égard à l’apparence de l’homme ; en outre ces hommes considérés ne lui avaient « rien communiqué de plus ». Au contraire, ils avaient dû reconnaître que la grâce qui lui avait été donnée dépassait de beaucoup ce qu’ils avaient reçu eux-mêmes. Si l’apostolat de la circoncision, limité à Israël, avait été donné à Pierre, c’est à Paul que Dieu avait confié l’apostolat de l’incirconcision, englobant tous les peuples de la terre. C’est pourquoi, en ce qui concernait la sphère qui lui était dévolue, la grâce qui lui avait été donnée allait déjà bien au-delà du domaine des douze, sans tenir compte de la différence fondamentale qui existait entre eux quant aux vérités révélées. Le même Dieu avait opéré en Paul et en Pierre, et de telle manière que les douze ne pouvaient que reconnaître avec gratitude ce que Dieu avait produit sans eux par Paul. Il avait déjà derrière lui des années d’un service béni et fructueux, et des preuves évidentes de sa mission et de ses aptitudes exceptionnelles avaient été données. Il s’ensuivit que Jacques, et Céphas, et Jean, qui étaient considérés comme étant des colonnes, lui donnèrent, à lui et à Barnabas, la main d’association, afin que Paul et ses compagnons allassent « vers les nations, et eux vers la circoncision ». Ils lièrent à cela que Paul, avec les croyants d’entre les nations, se souviendrait des pauvres parmi les Israélites ; on sait qu’il le fit toujours en toute fidélité (verset 10). Ainsi, non seulement les efforts de l’ennemi en vue de placer les croyants sous le joug de la loi furent anéantis, mais aussi le lien de la communion dans le service entre les différents conducteurs fut affermi. Une fois encore, du mal que se proposait l’ennemi, Dieu fit sortir du bien.

Mais plus que cela. Dans les versets suivants, conduit manifestement par le Saint Esprit qui n’a aucun égard aux personnes lorsqu’il s’agit de maintenir la vérité, Paul raconte un épisode qui nous montre combien peu il considérait les hommes qui étaient apôtres avant lui comme des supérieurs dont il fallait chercher l’approbation. En même temps, cet épisode infligeait aux légalistes un coup d’autant plus sévère qu’il n’était pas prémédité et qu’il n’était nullement à la louange du très estimé apôtre de la circoncision. Qu’il est heureux que la Parole de Dieu soit, sous tous les rapports, pure, fidèle et sûre ! La balance juste n’épargne personne. Qu’il est beau d’autre part que Pierre n’ait jamais gardé rancune à son fidèle frère et co-esclave de l’avoir blâmé pour tous les temps, et en apparence sans ménagement ! Dans sa dernière épître, peu avant sa mort, il l’appelle « notre bien-aimé frère Paul » et recommande « toutes ses lettres » à l’attention particulière des croyants (2 Pierre chapitre 3 versets 15 et 16). Précieux exemple que nous avons à suivre dans les choses moins importantes !

Suivons cependant le compte-rendu lui-même. « Mais quand Céphas vint à Antioche, je lui résistai en face, parce qu’il était condamné » (verset 11). À Jérusalem, Pierre avait donné la main d’association à Paul ; ici, à Antioche, l’apôtre lui résiste en face, c’est-à-dire sans avoir égard à sa personne. Pourquoi cela ? Écoutons. Il n’était pas permis à un Juif gardant fidèlement la loi d’entrer chez les incirconcis et de manger avec eux (comparez Actes chapitre 11 verset 3). Pierre, instruit par Dieu, n’était pas seulement entré autrefois chez Corneille, centurion romain, mais avait aussi mangé à Antioche chez des croyants d’entre les nations ; cependant, lorsque quelques-uns furent venus d’auprès de Jacques, généralement tenu comme le représentant d’un christianisme encore en relation avec la synagogue et la loi, il s’était de nouveau détourné d’eux par crainte de ceux de la circoncision (versets 12 et 13). Il avait entraîné les autres Juifs par sa dissimulation, et même Barnabas, l’homme rempli du Saint Esprit (Actes chapitre 11 verset 24). Combien l’influence d’une opinion généralement admise peut être grande et pernicieuse, surtout lorsqu’il s’agit de principes charnels, de coutumes et d’usages religieux ! Combien il est difficile de se dégager de préjugés légaux et combien les conséquences sont graves si nous nous laissons dominer par eux et ne marchons pas droit selon la vérité de l’évangile (verset 14) ! Plus nous serons considérés au point de vue religieux, plus les conséquences en seront graves. Dans le cas qui nous occupe, c’est le premier et le plus en relief des douze apôtres qui agissait ainsi !

À ce sujet un autre a écrit : « Si bénigne qu’ait pu paraître la chose, elle était de toute importance aux yeux de Dieu et de Son serviteur. Paul discernait que par cet acte, à première vue insignifiant, la vérité de l’évangile était abandonnée. Nous oublions si facilement que dans telle circonstance de la vie journalière en apparence peu importante, il peut s’agir effectivement d’un abandon de Christ et de la vérité de l’évangile. Mais Dieu veut que nous considérions les choses selon leur relation avec Sa vérité et Sa grâce. Nous sommes enclins à traiter légèrement ce qui se rapporte à Dieu et à donner une grande importance aux choses qui nous concernent personnellement. Dieu désire cependant voir en nous un sentiment plus profond pour tout ce qui regarde Christ et l’évangile. Pourquoi Paul blâme-t-il si sévèrement l’apôtre de la circoncision ? Parce qu’il s’agissait des fondements de la grâce. Là, la sagesse humaine ou la crainte d’offenser n’étaient pas de mise ; là, il ne pouvait y avoir de ménagements ou de considération de personnes. C’était le moment pour Paul de ne rien céder du terrain sur lequel il était particulièrement responsable de maintenir la vérité. Si Pierre se dérobait et ne se montrait pas comme Pierre (une pierre) mais comme Simon, fils de Jonas, Paul devait intervenir d’une manière d’autant plus décidée. Ce qui donne à son blâme une énergie si particulière, c’est le fait que ce qui se passait à Antioche eut lieu peu après la solennelle rencontre de Jérusalem, au cours de laquelle Pierre était intervenu avec tant de hardiesse pour la liberté que Dieu avait donnée aux croyants des nations. C’est lui précisément que Dieu avait choisi, comme Pierre le dit lui-même, « afin que par ma bouche les nations ouïssent la parole de l’évangile, et qu’elles crussent » [Actes chapitre 15 verset 7]. Il avait terminé son discours par ces paroles : « Dieu… n’a fait aucune différence entre nous et eux… mais nous croyons être sauvés par la grâce du Seigneur Jésus, de la même manière qu’eux aussi » [versets 9 et 11]. Il n’aurait guère pu s’exprimer de façon plus forte ; l’orgueil juif n’aurait pu être touché de manière plus sensible que par la déclaration que le salut de ceux des nations était un modèle pour le salut des Juifs et non pas le contraire, comme on aurait pu s’y attendre. Et après tout cela, un tel errement ? Et avec Pierre, Barnabas aussi usa de dissimulation, lui le fidèle compagnon de Paul pendant son premier voyage missionnaire et qui avait été choisi avec lui pour « monter à Jérusalem vers les apôtres et les anciens pour cette question » (W. Kelly — The Bible Treasury, 1862).

Que dire de tout cela ? Involontairement nous nous rappelons cette parole : « Finissez-en avec l’homme, dont le souffle est dans ses narines, car quel cas doit-on faire de lui ? » (Ésaïe chapitre 2 verset 22). « Un roseau agité par le vent » [Matthieu chapitre 11 verset 7] — tels sont les meilleurs, un Jean le baptiseur, un Simon Pierre et d’autres, lorsque l’œil ne demeure pas simple. Il n’y en eut qu’Un qui fut parfait dans Ses voies, un seul dont le pied n’a jamais bronché. Ces hommes, et nous avec eux, avaient cependant un grand prix pour Dieu et étaient richement bénis de Lui. Qu’est-ce que cela doit être aux yeux d’un tel Dieu lorsque les siens se détournent de Sa merveilleuse grâce pour retourner à leur misérable façon d’agir, à leur vanité !

Nous comprenons que Paul, dont la clairvoyance discernait ce mauvais penchant dans la conduite de son compagnon de service, l’interpelle devant tous, dans une sainte indignation : « Si toi qui es Juif, tu vis comme les nations et non pas comme les Juifs, comment contrains-tu les nations à judaïser ? » (verset 14). Pierre avait prouvé par ses relations avec les croyants des nations qu’il était libéré, avec ses frères juifs dans la foi, du joug intolérable de la loi. Voulait-il maintenant mettre les nations sous ce même joug et les obliger à judaïser ? À Jérusalem, le centre du judaïsme, il avait pris hardiment fait et cause pour la liberté qui appartient à tous en Christ ; à Antioche, la ville païenne, voulait-il retourner aux ordonnances juives et les imposer à d’autres comme condition d’une entière communion chrétienne ?

L’apôtre poursuit : « Nous qui, de nature, sommes Juifs et non point pécheurs d’entre les nations, sachant néanmoins que l’homme n’est pas justifié sur le principe des œuvres de loi, ni autrement que par la foi en Jésus Christ, nous aussi, nous avons cru au christ Jésus, afin que nous fussions justifiés sur le principe de la foi en Christ et non pas sur le principe des œuvres de loi : parce que sur le principe des œuvres de loi nulle chair ne sera justifiée » (versets 15 et 16). Remarquons qu’ici Paul ne parle pas directement de la loi, de la loi du Sinaï, mais d’une manière générale « d’œuvres de loi ». Quelle que soit la loi que l’on puisse mettre en avant, tout principe légal détruit la grâce et rend toute justification impossible.

« Or si, en cherchant à être justifiés en Christ, nous-mêmes aussi nous avons été trouvés pécheurs, Christ donc est ministre de péché ? Qu’ainsi n’advienne ! » (verset 17).

Être trouvé lui-même pécheur et faire Christ ministre de péché — cela Pierre ne l’avait certainement pas voulu ! Il n’avait pas pensé à cela. Mais Paul n’avait-il pas raison ? Si Pierre, et d’autres avec lui, après avoir renoncé à la loi comme moyen de justification et s’être réfugiés en Christ, commençaient maintenant à réédifier le système de la loi autrefois abandonné, ils déclaraient de la sorte condamner leur première manière de faire. Ils étaient ainsi trouvés pécheurs et transgresseurs (verset 18). Et Christ, qui les avait incités à tourner le dos à la loi et à ne chercher la justification qu’en Lui, était devenu ainsi un ministre de péché, car c’était sur la base de Ses enseignements qu’ils avaient quitté le terrain de la loi. Quel résultat ! Combien Pierre a dû être effrayé !

Puissent tous ceux qui, aujourd’hui encore, sont en danger de se reposer sur des ordonnances religieuses extérieures, reconnaître que, sur ce chemin, ils ne font rien d’autre que mettre la chair, l’homme, à la place de Christ ! Dans le christianisme il n’y a que deux institutions religieuses ordonnées du Seigneur : le baptême et la cène. Mais combien l’on a cherché à faire précisément d’elles un oreiller pour la conscience et, par leur emploi extérieur, à détourner les yeux de la personne et de l’œuvre de Christ ! Être baptisé et participer occasionnellement à la cène, voilà les deux grands points d’appui pour d’innombrables chrétiens professants. Ils ne possèdent rien de plus. Mais comme nous venons de le dire, se reposer sur des ordonnances signifie se reposer sur la chair. Cela est particulièrement sérieux dans ce cas ! Le baptême et la cène témoignent précisément de l’état désespéré de l’homme dans la chair, de la mort dans laquelle il se trouve et de l’œuvre qui a été nécessaire pour le délivrer de cet état. Pauvre chrétienté ! Elle tient ferme aux ordonnances extérieures, mais nie la vérité qu’elles représentent.

L’apôtre continue : « Car moi, par la loi, je suis mort à la loi, afin que je vive à Dieu » (verset 19). La loi était sainte, juste et bonne (Romains chapitre 7 verset 12), mais, faible par la chair, elle ne pouvait apporter que la mort et la perdition à l’homme dans son état de chute et d’impuissance. Paul, qui autrefois avait été sous la loi, avait fait l’expérience de tous ses effets ; il les avait réalisés en lui-même. Il était mort par la loi, elle avait prononcé sa sentence de mort sur lui et cette sentence s’était exécutée sur lui en Christ. Mort et ressuscité avec Christ, il ne vivait plus maintenant selon son ancien état d’homme dans la chair. C’est pourquoi la loi n’avait plus aucun droit sur lui, il était mort à la loi et de ce fait délivré pour toujours de sa domination et de sa puissance. Un parfait substitut avait accompli pour toujours les justes exigences de la loi ; délivré maintenant de la loi par la mort, Paul appartenait à un autre, au ressuscité d’entre les morts, pour « vivre à Dieu » désormais.

Quel homme bienheureux ! Mais avec quelles peines, quelles contradictions, quelles persécutions il avait à lutter, en cherchant à vivre lui-même ces précieuses vérités et à les communiquer à d’autres ! Hélas la chair ne veut pas mourir. Se voir entièrement corrompue et impuissante, condamnée à l’inaction, et même à la mort, n’être que péché, est insupportable à la vieille nature. Dans le croyant aussi, elle cherche toujours à revivre et à agir ; et quand cela arrive il ne peut en résulter que péché et profonde humiliation pour lui. Dieu soit loué, comme morts et ressuscités avec Christ nous avons le droit de nous tenir pour morts, et comme vivants en Lui, nous en avons aussi la puissance. Appelés à suivre le grand apôtre dans son sentier, nous en sommes rendus capables. Que le Seigneur fasse de nous de zélés « imitateurs » de cet homme heureux !

Remarquons que Paul ne parle que de lui personnellement dans tout ce passage. Non pas que les vérités exprimées ne concernent pas tous les croyants et ne soient pas valables pour eux, mais il les présente comme sa possession personnelle, comme il les avait saisies pour lui-même par la foi et comme il les réalisait. De la même manière qu’il dit en Romains chapitre 8 verset 2 : « La loi de l’Esprit de vie dans le Christ Jésus, m’a affranchi de la loi du péché et de la mort », nous l’entendons répéter ici : « Je suis mort…, je suis crucifié…, je vis, etc. ». Ce n’est pas sans intention. La manière de s’exprimer de l’apôtre provoque d’elle-même en chaque lecteur sincère cette question : Ceci est-il vrai de moi ? Puis-je parler de cette façon ? Bonne et utile question ! Que tous les croyants soient morts et ressuscités avec Christ et affranchis de la loi du péché et de la mort est un fait, Dieu en soit béni ! Mais c’est une autre affaire de savoir dans quelle mesure chacun d’entre nous a personnellement saisi ce fait par la foi et dans quelle mesure il le réalise dans la vie pratique. Ce n’est pourtant que dans ce chemin que nous serons heureux comme l’était l’apôtre.

« Je suis crucifié avec Christ ; et je ne vis plus, moi, mais Christ vit en moi » (verset 20). Que Christ ait porté tous les péchés de l’apôtre sur la croix, cela est évident, mais ce n’est pas ce dont il parle ici. Il s’agit ici de la manière dont il était mort à la loi. Comment cela avait-il eu lieu ? Nous l’avons déjà dit plus haut. Dieu l’avait identifié avec Christ dans Sa mort à la croix, il était « crucifié avec Christ », et il réalisait ce fait par la foi. Celui qui avait subi à la croix la condamnation de la loi, après avoir achevé Son œuvre, vivait maintenant là-haut, à la droite de Dieu, et Paul vivait en Lui. En tant que vieux Paul, il n’existait plus ; il avait été devant Dieu comme un pécheur justement condamné ; en son substitut, la mort avait mis fin à la vie dans laquelle il avait vécu autrefois. C’est pourquoi il pouvait dire, bien qu’il se trouvât encore dans ce corps sur la terre : « Je ne vis plus, moi, mais Christ vit en moi ». Son moi, son vieil homme, tout ce qu’il avait été jadis moralement, tout ce qui concernait son être dans sa relation précédente avec la loi, et sous la loi, avait trouvé sa fin dans la mort de Christ, tout cela n’existait plus devant Dieu. Il possédait maintenant une vie nouvelle et cette vie était Christ. En d’autres termes : Christ vivait maintenant en lui, de la vie dans laquelle Il était ressuscité d’entre les morts, comme vainqueur du péché, de la mort et de Satan, après avoir porté la malédiction de la loi.

Comme cela a déjà été mentionné plus haut, ce que Paul dit ici de lui-même est vrai en principe pour tous les croyants. Ils ont tous été crucifiés avec Christ, ils sont tous morts et ressuscités avec Lui. Christ a été pour tous la fin de la loi et le commencement d’une toute nouvelle existence, d’une vie entièrement nouvelle. À cet égard il n’y a aucune différence, l’un n’a rien de plus ni rien de moins que l’autre. Le même don a été fait à tous. La différence, et elle est grande, n’existe que dans la manière de saisir cette vérité par la foi et de la réaliser pratiquement. Paul ne dit pas : « Nous ne vivons plus, nous », ou « Christ vit en nous », mais, comme nous l’avons déjà dit, il parle d’une manière toute personnelle, il ne parle que de lui. Depuis qu’il avait vu Jésus sur le chemin de Damas, il n’y avait plus pour lui que ce seul but, que ce seul objet : vivre Christ, Le représenter et être transformé à Son image. Il pouvait dire en vérité : « Pour moi, vivre c’est Christ » [Philippiens chapitre 1 verset 21]. Le début, le centre et la fin, le sommaire et la raison d’être de sa vie n’étaient plus que Christ ; c’est pourquoi aussi la mort était pour lui un gain [Philippiens chapitre 1 verset 21], elle le conduisait vers Christ ; et être avec Christ, libéré de ce corps, est de beaucoup meilleur [Philippiens chapitre 1 verset 23] que de L’attendre étant encore dans ce corps.

Pour l’apôtre, Christ était ainsi la source de la vie, une vie qui l’avait séparé du passé et qui l’avait placé sur un terrain tout nouveau. Mais dans une créature cette vie ne peut subsister par elle-même et être indépendante. Elle a besoin d’un objet qui l’attire et l’entretienne, pour lequel elle vit et d’après lequel elle se forme. Cet objet, c’est de nouveau Christ. C’est pourquoi, après avoir dit : « Christ vit en moi », l’apôtre ajoute aussitôt : « Ce que je vis maintenant dans la chair, je le vis dans la foi, la foi au Fils de Dieu, qui m’a aimé et qui s’est livré lui-même pour moi » (verset 20).

C’est de nouveau la même manière personnelle de s’exprimer. À plusieurs reprises la Parole nous dit que Christ nous a aimés et s’est livré Lui-même pour nous (voir Éphésiens chapitre 5 versets 2 et 25). Mais ici l’âme de l’écrivain jouit d’une manière si vive et si personnelle de l’amour et du dévouement du Seigneur que le cœur du lecteur s’en trouve inconsciemment réchauffé. « Qui m’a aimé et qui s’est livré lui-même pour moi » — celui-là seul peut parler ainsi, qui vit d’une manière habituelle dans la proximité du Seigneur et qui, comme Jean jadis, jouit d’une relation intime et cachée avec Lui. Paul était un apôtre, un vase d’élection, mais, considéré simplement comme croyant, il faisait partie de ceux qui ont les commandements du Seigneur et qui les gardent, et ainsi le Seigneur pouvait l’aimer et se manifester à lui (Jean chapitre 14 verset 21). Nous pouvons tous le suivre dans ce chemin ; heureux quiconque le réalise ! C’est ainsi que la vie de Christ se manifeste en nous. Il deviendra Lui-même, toujours plus, le seul objet, Celui qui dominera toutes choses en nous. Bienheureux celui qui fait des expériences semblables à celles de l’apôtre et qui est à même de répéter ses paroles ! Connaissons-nous quelque chose de cette vie ?

Le souvenir de Celui qui dans Son amour pour nous, pour moi, est mort, qui m’a ainsi tiré de l’état misérable dans lequel je me trouvais et m’a fait don de Sa vie, si bien que maintenant je peux Le vivre et Le servir — ce souvenir délivre de Satan et de la puissance du péché. De plus, la pensée que c’est le Fils de Dieu qui a accompli cela saisit le cœur d’une énergie toujours plus vive et l’unit toujours plus intimement à Lui, le seul objet de la foi. L’œil ne se lasse pas dans l’admiration et l’adoration en contemplant Celui qui a pu aimer, et aime, un être tel que j’étais et que je suis. C’est ainsi que nous aussi, tant qu’il plaît à Dieu de nous laisser ici-bas, « ce que nous vivons dans la chair », nous le vivons dans la foi, la foi au Fils de Dieu, qui nous a aimés et qui s’est livré Lui-même pour nous. Christ comme source de cette vie et Christ comme objet des intimes inclinations de l’âme renouvelée — en vérité voilà une vie désirable, précieuse, digne d’être vécue ! Celui qui vit ainsi « n’annule pas la grâce de Dieu » (verset 21). En cela au contraire, Dieu est glorifié. N’est-ce pas Sa grâce seule qui a pu amener un tel changement et produire par ce moyen une nouvelle création dans laquelle les choses vieilles sont passées (2 Corinthiens chapitre 5 verset 17) ?

« Car si la justice est par la loi, Christ est donc mort pour rien » (verset 21). Par ces paroles l’apôtre termine son enseignement. Pauvres docteurs de la loi ! Où conduisaient leurs efforts ? C’est eux précisément qui annulaient la grâce de Dieu, qui privaient Dieu de Sa gloire, en mettant les œuvres de l’homme à côté des opérations merveilleuses de Dieu, et par là dépouillaient la mort de Christ de toute signification, de toute valeur. Car si un être humain peut être justifié par des œuvres de loi, par ses propres actions, pourquoi Christ est-Il mort ? Ses souffrances amères et Sa mort ont été pour rien. Il y aurait donc un autre chemin par lequel l’homme pourrait arriver au but et obtenir la justice. Ce qu’il en est de ce chemin et où il conduit, la dernière partie du chapitre 7 de l’épître aux Romains nous le montre. Son aboutissement est le cri désespéré : « Misérable homme que je suis, qui me délivrera de ce corps de mort ? ». Un chrétien lui-même, conscient de son salut et de sa qualité d’enfant de Dieu, s’il s’engage dans ce chemin, devra faire les mêmes expériences terrassantes. Il y a dans ses membres une loi qui combat contre la loi de son entendement renouvelé et qui le rend captif de la loi du péché !

Combien différentes étaient les expériences de l’apôtre ! En vérité, pour lui Christ n’était pas mort en vain. Nous ferons ces mêmes expériences si nous avons compris la signification de la mort de Christ et l’avons appliquée à nous-mêmes par la foi. Délivrés de la loi du péché et de la mort, nous pouvons nous tenir fermement dans la liberté pour laquelle Christ nous a affranchis et, vivants à Dieu, produire le fruit de l’Esprit à Sa gloire (chapitre 5). Rendant grâces à Dieu par Jésus Christ notre Seigneur, en qui nous sommes morts au péché, nous servons de notre entendement la loi de Dieu. Quant à la chair, elle sert la loi du péché ; elle ne peut faire autrement.

Souvenons-nous donc constamment de cette précieuse parole : « Je ne vis plus, moi, mais Christ vit en moi ». Il est tout : notre part, notre vie, notre force. Et que le Dieu de toute grâce accorde à l’auteur comme au lecteur de ces lignes la grâce personnelle de pouvoir dire encore avec l’apôtre : « Et ce que je vis maintenant dans la chair, je le vis dans la foi, la foi au Fils de Dieu, qui m’a aimé et qui s’est livré lui-même pour moi » !

Chapitre 3 versets 1 à 14

Dans la première moitié de ce chapitre l’apôtre poursuit encore le sujet de la loi, pour parler ensuite, depuis le verset 15, des promesses faites jadis à Abraham et, en rapport avec cela, des relations entre ces promesses et la loi.

Tout rempli encore de l’admirable description du changement qui s’était opéré pour lui-même par la grâce de Dieu, et de la délivrance qu’il avait connue — délivrance non seulement des exigences de la loi sous lesquelles il avait fait autrefois de vains efforts, mais aussi de lui-même — devenu un homme nouveau, un homme en Christ, qui ne vivait que par la foi au Fils de Dieu, il s’adresse en termes saisissants au cœur et à la conscience des Galates pour les amener à réaliser leur dangereuse position. On a comme la sensation de voir, au-dedans de ce fidèle apôtre, sa sollicitude pleine d’amour pour les croyants, lutter avec une sainte indignation envers les faux docteurs qui les avaient troublés.

« Ô Galates insensés », c’est ainsi qu’il les interpelle, « qui vous a ensorcelés, vous devant les yeux de qui Jésus Christ a été dépeint, crucifié au milieu de vous ? » (verset 1). En vérité, si la justice était venue par la loi, alors Christ était mort en vain. Alors tous les efforts dévoués de Paul étaient également vains, lui qui, avec tant de vérité et d’une façon si vivante, avait dépeint devant leurs yeux le Sauveur crucifié — comme s’Il avait été crucifié au milieu d’eux. La manière de s’exprimer de l’apôtre est frappante, et ce n’est certes pas sans intention qu’il ne rappelle pas seulement l’œuvre et le sacrifice de Christ, mais qu’il parle de la croix. Rien ne met plus en lumière l’état désespéré de l’homme, son impuissance, son néant et sa perdition, que la croix. Rien ne nous donne mieux à connaître la sainteté de Dieu et Son jugement impitoyable sur le péché. Rien n’est à même de nous séparer davantage du monde, au sens moral et religieux. C’est pourquoi Paul ne voulait se glorifier en rien « sinon en la croix de notre Seigneur Jésus Christ », par laquelle le monde lui était crucifié et lui au monde (chapitre 6 verset 14).

Mais où en étaient arrivés les Galates ? Qui les avait ensorcelés, qui avait dérangé leurs esprits ? Et quel était l’aboutissement de leur chemin ? Hélas, ils étaient en danger d’achever par la « chair » ce qu’ils avaient commencé par « l’Esprit ». Pauvres gens ! Mais sommes-nous en droit de tant nous étonner d’eux ? Le penchant du cœur humain n’a-t-il pas toujours été de faire place à la chair ? Tant que l’on n’a pas vraiment reconnu l’état entièrement désespéré de l’homme, on est tenté d’ajouter quelque chose venant de l’homme à ce que Dieu a opéré en Christ et qu’Il nous a donné gratuitement. Chez les Galates ce quelque chose était, comme nous le savons, de faibles et misérables ordonnances charnelles.

Affligé, l’apôtre continue : « Je voudrais seulement apprendre ceci de vous : avez-vous reçu l’Esprit sur le principe des œuvres de loi, ou de l’ouïe de la foi ? Êtes-vous si insensés ? Ayant commencé par l’Esprit, achèveriez-vous maintenant par la chair ? » (versets 2 et 3). Dans le chapitre précédent il a été fait mention de justification et de vie, ici de l’Esprit. Tout cela est nôtre par la foi. Des œuvres de loi ne peuvent apporter que jugement et mort. Cela, les Galates l’avaient bien compris. Ils savaient que s’il s’agissait de la réception de la vie ou du sceau du Saint Esprit, dans les deux cas la chair était absolument exclue. Ces deux précieux dons ne pouvaient être reçus que par la foi et l’apôtre ne met aucunement en doute le fait qu’ils avaient reçu l’un et l’autre. Ils étaient justifiés, ils avaient la vie de Dieu, ils possédaient le Saint Esprit. Mais ils voulaient maintenant quitter le terrain de la foi et achever par la chair ce qu’ils avaient commencé par l’Esprit ! Ô Galates insensés, qui les avait ensorcelés ?

Il peut être utile à cette occasion d’attirer une fois de plus l’attention sur le fait que la réception de la vie et le sceau du Saint Esprit sont deux choses tout à fait différentes, bien qu’allant aujourd’hui de pair dans beaucoup de conversions, peut-être dans la plupart. Un homme reçoit la vie quand, par l’opération du Saint Esprit et le moyen de la Parole, il est né de nouveau ou, comme le Seigneur le dit à Nicodème, il est « né d’eau et de l’Esprit » [Jean chapitre 3 verset 5]. Une telle nouvelle naissance ne peut évidemment s’opérer sans la foi, mais cette foi peut être si faible, l’intelligence spirituelle du croyant si petite, que l’âme n’est pas assurée de son salut et n’a pas la liberté d’appeler Dieu son Père. Elle a peut-être un profond sentiment de son état de péché, mais c’est justement ce qui la retient de regarder à Dieu avec liberté. « L’Esprit d’adoption, par lequel nous crions : Abba, Père ! » n’a pas encore fait Sa demeure chez elle, ne l’a pas encore scellée (Romains chapitre 8 verset 15 ; Éphésiens chapitre 1 verset 13). La foi est là, mais ce n’est pas encore la foi qui saisit Christ seul, et se détourne de toute autre chose. Dieu ne laissera certainement pas Son œuvre dans une telle âme sans l’achever. Tôt ou tard Il la conduira à saisir par la foi la valeur du sacrifice de Jésus Christ, si bien qu’elle pourra alors rendre grâces de tout cœur et s’approcher du Père en toute liberté.

Remarquons encore à ce propos qu’il y a bien des âmes véritablement sauvées qui, par suite d’un défaut d’enseignement ou d’une crainte exagérée, n’osent pas dire qu’elles possèdent le Saint Esprit ; mais si on pouvait prêter l’oreille lorsque, dans le particulier, elles épanchent leur cœur devant Dieu, on les entendrait nommer en toute confiance Dieu leur Père, preuve évidente qu’elles possèdent l’Esprit d’adoption. Un seul passage cité à propos suffit très souvent dans de tels cas pour dissiper tout doute et toute question et remplir le cœur d’une pleine certitude et de la joie du salut.

C’est une grande chose lorsque l’œil est détourné du moi et même de l’état de l’œuvre de Dieu dans l’âme, pour n’être dirigé que sur Christ seul. C’est justement là que se trouvait la cause de l’égarement des Galates. C’est sur ce point qu’ils s’étaient laissés ensorceler. Le Saint Esprit avait dirigé leur regard exclusivement sur le Seigneur crucifié et maintenant ils voulaient achever « par la chair » ! Par cet Esprit qu’ils avaient reçu sur le principe de l’ouïe de la foi, des miracles avaient été même opérés parmi eux, soit par Paul, soit aussi par eux-mêmes (verset 5) ; et maintenant ils voulaient continuer par des œuvres de loi ! En vérité, ils n’auraient pu agir d’une manière plus déraisonnable. C’est ainsi que nous en jugeons justement ; et pourtant, combien de croyants au cours des siècles les ont suivis dans ce chemin et combien le font encore aujourd’hui, malgré l’avertissement que donne cet exemple !

« Avez-vous tant souffert en vain, si toutefois c’est en vain ? » (verset 4). La folie des Galates était d’autant plus inexplicable qu’ils avaient déjà enduré bien des souffrances pour l’évangile. Tout cela devait-il être en vain ? L’adjonction « si toutefois c’est en vain ? » a souvent rendu perplexes les commentateurs et donné lieu à des interprétations bien diverses. L’apôtre ne voudrait-il pas simplement dire : Les souffrances en elles-mêmes sont vaines, elles ne vous ont pas donné plus que ce que vous possédiez précédemment, elles n’étaient pas non plus quelque chose d’extraordinaire (les souffrances pour Christ étaient plus ou moins la part de tous), mais vous avez pourtant prouvé par votre grande patience que, malgré toutes les contradictions et les hostilités du dehors, vous vouliez persévérer dans le Seigneur en toute sincérité ? Tout cela devait-il être inutile ? Auriez-vous souffert toutes ces choses en vain ?

L’apôtre espère que l’ennemi ne réussira pas à remporter une telle victoire sur eux. En leur rappelant que le Saint Esprit leur avait été donné, non pas par une œuvre quelconque qu’ils auraient faite, mais seulement sur le principe de la foi, il dirige leurs regards sur Abraham, le père du peuple d’Israël. Lui aussi avait cru Dieu et cela lui avait été compté à justice (verset 6). Cette allusion était d’autant plus sérieuse et convaincante que c’était précisément Abraham qui avait reçu de Dieu la circoncision, à laquelle les Galates voulaient retourner. Ils auraient peut-être pu, pour cette raison, se réclamer de lui, le père de tous les croyants ; les faux docteurs l’avaient certainement déjà fait. Mais quand Abraham avait-il reçu la circoncision ? Avant d’avoir cru ? Non, seulement après. Le chapitre 15 de la Genèse nous apprend comment Abraham crut la promesse de Dieu et comment il fut en conséquence justifié — tandis que la circoncision ne fut introduite que des années plus tard, au chapitre 17.

« Sachez donc que ceux qui sont sur le principe de la foi, ceux-là sont fils d’Abraham » (verset 7). Abraham fut sauvé, non par la circoncision, mais par la foi ; ce n’est que sur la base de la foi qu’il fut béni. « Or l’écriture, prévoyant que Dieu justifierait les nations sur le principe de la foi, a d’avance annoncé la bonne nouvelle à Abraham : « En toi toutes les nations seront bénies ». De sorte que ceux qui sont sur le principe de la foi sont bénis avec le croyant Abraham » (versets 8 et 9). Si le père obtint la bénédiction par la foi, sa descendance ne peut la trouver sur une autre base. La conclusion est simple et convaincante. C’est pourquoi l’Écriture parle à l’avance très clairement de ces choses. Déjà, lorsque Dieu appela Abraham hors de son pays et de la maison de son père, Il lui donna la promesse qu’en lui seraient bénies toutes les nations de la terre, et cela non pas en ce qu’elles deviendraient juives, mais telles qu’elles étaient devant Dieu, comme familles de la terre, ou comme païens. Comme telles elles seraient bénies avec le croyant Abraham (comparez Genèse chapitre 12 verset 3).

À ce sujet nous lisons encore : « Par la foi, Abraham, étant appelé, obéit pour s’en aller au lieu qu’il devait recevoir pour héritage ; et il s’en alla, ne sachant où il allait » (Hébreux chapitre 11 verset 8). C’est ainsi qu’il reçut la promesse de Dieu, pour lui et pour d’autres. C’est ainsi aussi que les Galates l’avaient reçue, et avec la promesse, la bénédiction. « De sorte que ceux qui sont sur le principe de la foi sont bénis avec le croyant Abraham » (verset 9). Dans chaque cas, la bénédiction dépendait donc de la foi et non de l’observation d’une ordonnance quelconque. En revanche, celui qui se place sous la loi, tombe sous la malédiction. « Car », ajoute l’apôtre avec une gravité saisissante, « tous ceux qui sont sur le principe des œuvres de loi sont sous malédiction ; car il est écrit : Maudit est quiconque ne persévère pas dans toutes les choses qui sont écrites dans le livre de la loi pour les faire » (verset 10). Cela signifie : Quiconque tente seulement, de quelque manière que ce soit, de se placer devant Dieu sur un terrain légal, attire immanquablement la malédiction sur lui. Car maudit est quiconque ne persévère pas dans toutes les choses qui sont écrites dans la loi. Qu’ils considèrent bien cela, tous ceux qui attendent le salut, ou un bénéfice quelconque, de l’activité de la chair ! Ils quittent le terrain de la grâce et par là même, en principe, le terrain du christianisme. Ils placent sur le cou des disciples un joug que ni les pères (Israël) ni nous ne pouvons porter.

Ce n’est pas seulement l’expérience qui a prouvé que personne ne peut être justifié devant Dieu par des œuvres de loi. Dieu Lui-même en a toujours témoigné, et d’une façon non équivoque. C’est ce qu’Il dit par la bouche du prophète Habakuk : « Le juste vivra de foi » (c’est-à-dire sur le principe de la foi) (verset 11). Et que la loi ne soit pas sur le principe de la foi, cela ressort clairement encore de cet autre passage : « Celui qui aura fait ces choses vivra par elles » (verset 12).

Faire, agir, c’est le langage de la loi ; croire, ne pas agir, le langage de la grâce. Il est vrai que la loi promet la vie et la bénédiction sur la base de l’observation de ses commandements, mais, étant faible par la chair [Romains chapitre 8 verset 3], elle ne peut en réalité apporter que malédiction sur tous ceux qui lui sont assujettis. Cela fut déjà démontré à Israël avant qu’il entrât dans le pays. Selon les paroles de Moïse, lorsque le peuple aurait passé le Jourdain, six tribus devaient se tenir sur la montagne de Garizim pour bénir le peuple et six tribus, sur la montagne d’Ébal pour maudire. Mais quand il nous est rapporté ensuite ce que devaient dire les Lévites, comme représentants du peuple, nous n’entendons plus que les malédictions. Un « Maudit » accablant suit l’autre, et la terrible suite de malédictions se termine par ces paroles : « Et tout le peuple dira : Amen ! » (Deutéronome chapitre 27). Pourquoi cela ? Parce que précisément, tous ceux qui sont sur le principe des œuvres de loi sont sous la malédiction. À cela il n’y a aucune échappatoire, aucune dérobade possible.

Le résultat est effrayant. Mais alors vient la précieuse parole libératrice : « Christ nous a rachetés de la malédiction de la loi, étant devenu malédiction pour nous (car il est écrit : « Maudit est quiconque est pendu au bois ») » (verset 13). Que Dieu soit béni éternellement pour un témoignage si glorieux, et sans équivoque ! Il est là, devant nous, comme gravé sur des tables d’airain — chaque parole en particulier avec son sens profond et sa puissance de vie. Christ — le Christ de Dieu, pas moins que Lui — nous a rachetés, une fois pour toutes, de la malédiction de la loi, de sorte que cette malédiction ne peut plus nous atteindre à jamais. Et si nous demandons : Comment cela a-t-il eu lieu ? la réponse est : En ce qu’Il est devenu malédiction pour nous. Remarquons l’expression : « malédiction » ! Combien cela nous montre la complète identification de Christ avec la condition de ceux qui étaient sous la malédiction de la loi ! Il a pris leur position ; devant Dieu Il a pris leur place dans la pleine acception du terme. C’est ainsi seulement que la malédiction a pu être éloignée de nous en justice, et que la grâce a pu nous être donnée. « Maudit est quiconque est pendu au bois » ; c’est là que notre Seigneur et Sauveur a été pendu ! Béni soit-Il !

Nous pouvons bien chanter : « Amour impossible à comprendre » ! Il s’élève au-dessus de toute connaissance, dépasse toute compréhension. La grâce, passant de ceux qui à l’origine étaient sous la loi jusque vers nous, débordant d’Israël, rompant toutes les barrières, s’est tournée vers nous qui étions sans espérance et sans Dieu dans le monde, « afin que la bénédiction d’Abraham parvînt aux nations dans le Christ Jésus, afin que nous reçussions par la foi l’Esprit promis » (verset 14). La grande œuvre de la réconciliation pouvait avoir sa première application au peuple terrestre de Dieu, mais il était impossible qu’elle se restreignît à un cercle aussi étroit. Selon le conseil de Dieu, la bénédiction d’Abraham devait s’étendre bien au-delà de la descendance directe du patriarche. Elle devait venir jusqu’à nous « dans le Christ Jésus », la semence d’Abraham, afin que nous recevions par la foi l’Esprit qui avait été promis. Car, si même nous n’étions pas sous la loi, elle devait pourtant nous placer sous la malédiction, parce qu’elle est la règle juste et sainte de Dieu pour l’homme dans la chair, qu’il soit Juif ou d’entre les nations.

Résumons ici encore une fois les deux grands principes, la loi et la grâce, et leurs résultats. La loi réclame et condamne, la grâce donne et justifie. La loi apporte la mort et la perdition à qui l’enfreint — et où est l’homme qui n’a pas péché ? La grâce donne la vie et la justification à celui qui ne fait pas des œuvres, mais qui croit au Seigneur Jésus Christ. La loi place sous la malédiction quiconque ne persévère pas dans toutes les choses qui sont écrites dans son livre. La grâce rachète de cette malédiction et introduit, sur le principe de la foi, une bénédiction inconditionnelle ; elle donne le Saint Esprit par lequel la nouvelle position de bénédiction qu’elle accorde gratuitement peut être appréciée dans toute sa plénitude. À nouveau nous devons nous écrier : Qu’elle est incompréhensible, la folie de l’homme qui, après avoir discerné le merveilleux terrain de la grâce et se l’être approprié, retourne ensuite au misérable terrain de ses propres œuvres ! Choisir la malédiction, après avoir reçu par la grâce de Dieu la bénédiction la plus haute !

Chapitre 3 versets 15 à 29

Comme nous l’avons mentionné au début de notre chapitre, l’apôtre en vient maintenant à commenter les relations existant entre les promesses inconditionnelles faites à Abraham et la loi. « Frères, je parle selon l’homme : personne n’annule une alliance qui est confirmée, même celle d’un homme, ni n’y ajoute » (verset 15). « Je parle selon l’homme ». Il n’est vraiment pas besoin d’un discernement spirituel particulier pour reconnaître qu’une alliance conclue et ensuite encore confirmée ne peut être annulée ou modifiée par des adjonctions. Aucune personne sensée ne l’ignore. « Or c’est à Abraham que les promesses ont été faites, et à sa semence » (verset 16). Lorsque l’alliance fut conclue avec Abraham, il n’était pas question de la loi ou d’une clause restrictive quelconque. Les promesses lui furent données, ainsi qu’à sa semence, sans condition. Cela, les Galates ne pouvaient le contester. Mais, pouvaient-ils demander, pourquoi la loi a-t-elle donc été donnée ? Ne vient-elle pas de Dieu aussi bien que la promesse ? Ne devrions-nous pas, pour cette raison, accepter aussi la loi par la foi et nous soumettre à elle ? Pourquoi Dieu a-t-Il donné les deux choses ?

La réponse à cette question se trouve dans la dernière partie de notre chapitre. Tout d’abord, l’apôtre ajoute d’une manière significative : « Il ne dit pas : « et aux semences », comme parlant de plusieurs ; mais comme parlant d’un seul : — « et à ta semence », qui est Christ » (verset 16). Pour comprendre cette parole nous devons nous souvenir qu’Abraham a reçu par deux fois la promesse qu’en lui, ou en sa semence, toutes les nations seraient bénies. Nous en trouvons la première mention en Genèse chapitre 12 déjà. La seconde se trouve au chapitre 22, à l’occasion du sacrifice d’Isaac, le type bien connu de notre Seigneur et Sauveur dans Sa mort et Sa résurrection ; et là, expressément, la promesse n’est pas rattachée à Abraham, mais à sa « semence ».

Après que Dieu eut juré par Lui-même de bénir richement Abraham et sa semence (il s’agit ici d’Israël, la descendance naturelle du patriarche), de la multiplier abondamment comme les étoiles des cieux et comme le sable de la mer, et de lui donner la porte de ses ennemis, Il ajouta : « et toutes les nations de la terre se béniront (ou seront bénies) en ta semence » (Genèse chapitre 22 versets 16 à 18). Dans ce dernier cas cependant, il n’est plus question de bénédictions terrestres et de gloire temporelle ; il s’agit de la bénédiction spirituelle qui, en Christ, la vraie semence d’Abraham, devait venir sur toutes les nations. La promesse faite à Abraham est confirmée ici à sa semence. « Il ne dit pas : « et aux semences », comme parlant de plusieurs ; mais comme parlant d’un seul : — et à ta semence ». Cette semence, c’est Christ.

Or, ce n’est pas d’un Christ vivant ici-bas que la bénédiction pouvait se répandre sur tous les habitants de la terre. Le Messie n’était « envoyé qu’aux brebis perdues de la maison d’Israël » [Matthieu chapitre 15 verset 24], et lorsque les Grecs vinrent et désirèrent voir Jésus, Il attira l’attention de Ses disciples sur le fait que l’heure était venue pour que le Fils de l’homme (qui était là pour tous les hommes) fût glorifié, mais que le chemin de cette glorification passait par la mort (comparez Jean chapitre 12 versets 20 à 24). Ce n’est que dans un Christ mort et ressuscité que la bénédiction d’Abraham pouvait parvenir aux nations. Ce n’est qu’ainsi que le Seigneur pouvait envoyer Ses apôtres faire disciples toutes les nations (Matthieu chapitre 28 verset 19) ! La chose nouvelle qu’était le christianisme ne pouvait commencer qu’avec la mort et la résurrection de Jésus Christ. La loi ne donnait ni vie, ni justice, ni l’Esprit Saint, ni, comme nous le verrons tout à l’heure, un droit à l’héritage.

« Or je dis ceci : que la loi, qui est survenue quatre cent trente ans après, n’annule point une alliance antérieurement confirmée par Dieu, de manière à rendre la promesse sans effet » (verset 17). Depuis l’événement mémorable de la montagne de Morija, plus de quatre cents ans s’étaient écoulés lorsque la loi survint. Ce fait prouve déjà que la loi n’a rien à faire avec la promesse. Il est frappant de voir comment l’apôtre, conduit par l’Esprit Saint, accumule preuve sur preuve pour montrer aux Galates dans quel chemin ils s’étaient égarés. Si la loi avait été donnée peu après la promesse, on aurait pu penser à une relation existant entre elles, bien qu’il fût impossible que le Dieu fidèle pût abolir par quoi que ce soit, en quelque temps que ce soit, une promesse donnée sans condition. Mais en fait, quatre cent trente ans les séparaient l’une de l’autre ! Il va sans dire qu’inversement, la promesse n’annule pas la loi et ne lui enlève rien de sa portée ni de sa sainte solennité. Tout croyant bien instruit dans la Parole reconnaît la loi à sa place, sans restriction ; il sait qu’elle est sainte, juste et bonne [Romains chapitre 7 verset 12]. Mais la loi aurait-elle pu donner l’héritage à Abraham ? Non, la loi ne rétribue que selon le mérite. « Car si l’héritage est sur le principe de loi, il n’est plus sur le principe de promesse ; mais Dieu a fait le don à Abraham par promesse » (verset 18). Non pas donné comme chose due, mais dispensé comme don libre, immérité. La chose aurait été impossible d’une autre manière et elle l’est encore aujourd’hui. Mais s’il en est ainsi, si la loi ne peut rien donner et ne peut apporter que la mort et la malédiction sur l’homme, pourquoi Dieu l’a-t-Il donc instituée ? L’apôtre répond à cette question dans le verset suivant.

« Pourquoi donc la loi ? Elle a été ajoutée à cause des transgressions, jusqu’à ce que vînt la semence à laquelle la promesse est faite, ayant été ordonnée par des anges, par la main d’un médiateur » (verset 19). Nous nous sommes déjà occupés en détail de ce sujet en considérant l’épître aux Romains. Là, nous avons lu que « la loi est intervenue afin que la faute abondât », et un peu plus loin, afin que le péché « parût péché » et encore, afin qu’il « devînt par le commandement excessivement pécheur » (Romains chapitre 5 verset 20 et chapitre 7 verset 13). Jusqu’à la loi le péché était dans le monde, mais il ne pouvait être mis en compte comme transgression, parce que Dieu n’avait pas encore donné Ses saints commandements. Ce n’est que par la loi que le péché apparut dans toute sa laideur, comme révolte ouverte contre la volonté de Dieu clairement révélée. Dès lors l’homme n’était plus seulement un pécheur, mais un transgresseur qui, consciemment, dans sa volonté propre, outrepassait les limites fixées dans la loi de Dieu ; il laissait d’autant plus libre cours aux passions du péché régnant en lui, que Dieu les condamnait plus sévèrement. La faute ne connaissait plus de limite.

Le déluge avait prouvé que la terre était corrompue et pleine de violence ; toute chair avait corrompu sa voie sur la terre (Genèse chapitre 6 versets 11 et 12). Le péché avait prévalu et se trouvait devant les yeux de Dieu sous ses aspects les plus laids. Mais si méchant et inexcusable que fût l’homme, provoquant le jugement sévère de Dieu, le péché n’était pas compté comme transgression avant la loi, comme nous l’avons déjà vu (comparez Romains chapitre 5 verset 13). Ceci n’eut lieu que lorsque la loi « intervint » ou, comme il est dit ici, « fut ajoutée », et cela « jusqu’à ce que vînt la semence à laquelle la promesse est faite », c’est-à-dire jusqu’à ce qu’en Christ s’établît un tout nouvel ordre de choses, fondé sur une grâce inconditionnelle.

La loi a été « ordonnée par des anges, par la main d’un médiateur ». Elle ne s’approcha pas de l’homme d’une manière directe comme autrefois la promesse, mais lui fut donnée par un Dieu qui se cachait dans la nuée et le feu, par l’entremise de Ses serviteurs et d’un médiateur. Lors de la promesse, tout venait directement de Dieu ; un médiateur n’était pas nécessaire. Ce n’était pas une alliance conclue entre deux parties, un contrat engageant deux parties. Dieu promettait, et l’homme recevait sans aucune restriction ou condition. Mais lorsque la loi fut donnée, il fut nécessaire d’avoir un médiateur entre Dieu et les hommes. Moïse fut ce médiateur. Il se trouvait entre les deux parties et transmettait les exigences de Dieu à Israël et la réponse du peuple à Dieu. « Or un médiateur n’est pas médiateur d’un seul, mais Dieu est un seul » (verset 20).

Nous connaissons les résultats de cette convention. Autant tout était et restait en bon ordre quant à l’une des parties (Dieu), autant la ruine était complète quant à l’autre (l’homme). C’est à juste titre que la loi a été comparée à un pont qui, tout solide qu’il soit en lui-même, repose sur un fond entièrement mouvant. La loi était sainte et bonne, mais l’homme prouva, non seulement sa totale impuissance à répondre aux engagements qu’il avait solennellement pris, mais aussi qu’il était une créature foncièrement corrompue et rebelle, qui choisissait précisément ce que Dieu défendait.

« Mais Dieu est un seul ». Il était l’une des deux parties nommées et se tenait séparé du peuple. Est-ce là cependant tout le sens de cette expression ? L’apôtre ne veut-il pas plutôt indiquer que Dieu s’est révélé à Son peuple Israël comme le Dieu unique et que, s’Il donnait une promesse, Il le faisait comme Celui duquel seul dépend toute chose, qui aussi est fidèle à Sa Parole et ne peut jamais mentir ? C’est justement là le propre d’une promesse, qu’elle ne réclame rien de celui qui la reçoit ; son accomplissement dépend uniquement de la loyauté et du pouvoir de celui qui la fait. Or, Dieu est un, Dieu est fidèle, et Dieu est puissant. Pour le croyant qui reçoit la promesse, il ne reste donc que la part bienheureuse d’en prendre possession avec reconnaissance et d’en jouir en marchant d’une manière digne du Dieu qui l’a donnée.

Cependant la question pouvait encore être posée : La loi n’est-elle donc pas contre les promesses de Dieu ? « Qu’ainsi n’advienne ! » répond l’apôtre. « Car s’il avait été donné une loi qui eût le pouvoir de faire vivre, la justice serait en réalité sur le principe de la loi. Mais l’écriture a renfermé toutes choses sous le péché, afin que la promesse, sur le principe de la foi en Jésus Christ, fût donnée à ceux qui croient » (versets 21 et 22). Si la loi avait vraiment été à même de donner la vie, la justice aurait pu être obtenue sur la base d’œuvres de loi ; l’homme aurait été juste en conséquence d’une justice accomplie par lui-même. La loi aurait été en opposition avec la promesse, qui ne peut être la part des croyants que sur le principe de la foi. Au lieu de cela, qu’était-il arrivé ? Il ne s’est trouvé personne qui fasse le bien, il n’y avait point de juste, non pas même un seul [Romains chapitre 3 verset 10]. L’Écriture avait renfermé toutes choses sous le péché. Les nations s’étaient montrées esclaves de leurs convoitises et de leurs passions ; les Juifs, en contrevenant aux saints commandements de Dieu, avaient prouvé plus que quiconque la puissance de ces passions. Il avait été démontré d’une manière évidente que ce n’était que sur le terrain de la foi en Jésus Christ que la promesse pouvait s’accomplir envers ceux qui croyaient, qu’ils fussent Juifs ou d’entre les nations.

« Or avant que la foi vînt, nous étions gardés sous la loi, renfermés pour la foi qui devait être révélée ; de sorte que la loi a été notre conducteur jusqu’à Christ, afin que nous fussions justifiés sur le principe de la foi » (versets 23 et 24). « Avant que la foi vînt » — c’est-à-dire : avant qu’apparaisse la foi chrétienne qui, dans la personne et l’œuvre de Christ, établirait des relations toutes nouvelles entre l’homme et Dieu — les Juifs étaient renfermés sous la loi, comme gardés sous un conducteur ou tuteur, jusqu’à ce qu’en Christ vînt cette nouvelle relation. L’apôtre ne parle que d’Israël dans ces versets. Les Galates n’avaient jamais été sous la loi, ils avaient été convertis directement du paganisme à Christ. Quant aux Juifs, Dieu s’était servi de la loi comme moyen d’éducation pour leur montrer leur état désespéré de corruption et les préparer à la venue de Celui qui leur apporterait la délivrance de l’esclavage. Elle avait été leur conducteur jusqu’à Christ, pour qu’ils Le reçoivent par la foi et que par Sa mort et Sa résurrection, ils deviennent participants de la justification de vie. La foi étant venue, ils n’étaient plus sous ce conducteur (verset 25). Ils « étaient à un autre, à celui qui est ressuscité d’entre les morts », et se trouvaient maintenant sur un terrain où la loi ne pouvait plus avoir aucune prétention sur eux.

« Car vous êtes tous fils de Dieu par la foi dans le Christ Jésus » (verset 26). Précieuse parole ! Quel changement soudain et absolu ! Des fils de Dieu, des fils libres, à la place d’hommes qui jusque-là étaient assujettis à la domination d’une loi inflexible. Remarquons aussi le changement de personnes. Si, dans les derniers versets, l’apôtre a toujours dit « nous », il utilise tout à coup le mot « vous » — vous, les Galates ! Ne veut-il parler que d’eux ? Certainement pas. Cependant la joie profonde de ce que Dieu a accompli envers lui et ses compatriotes fait déborder son cœur envers les Galates. Les résultats de l’œuvre merveilleuse de Dieu n’étaient pas seulement pour les croyants d’entre les Juifs, mais aussi pour les Galates et, dans la conscience de ce fait, l’apôtre laisse échapper de son cœur cette exclamation pleine d’allégresse : « Car vous êtes tous fils de Dieu par la foi dans le Christ Jésus ». Ils l’étaient devenus directement, sans l’intervention de la loi, mais exactement comme les premiers. Tous deux, Juifs et Grecs, étaient devenus participants de la même grâce et amenés dans la même relation avec Dieu, le Père de gloire. La foi les avait tous placés comme fils dans la présence immédiate de Dieu.

« Car vous tous qui avez été baptisés pour Christ, vous avez revêtu Christ » (verset 27). Eux tous, en figure par le baptême, avaient été identifiés avec le Seigneur mort et ressuscité. La mort de Christ avait délivré « ceux qui étaient près » de toutes les prétentions de la loi, elle avait approché « ceux qui étaient loin » [Éphésiens chapitre 2 verset 17] et avait conduit les uns et les autres, dans une heureuse liberté, sur le terrain de la résurrection. Tous avaient maintenant « revêtu » Christ, étaient devenus des « hommes en Christ ». Sur ce terrain il n’y a ni Juif, ni Grec ; ni esclave, ni homme libre ; ni mâle, ni femelle : « car vous tous, vous êtes un dans le Christ Jésus » (verset 28). Sortis les uns et les autres de leurs positions naturelles précédentes, ils étaient maintenant tous devant Dieu selon leur nouvelle position en Christ. Là il n’y avait plus aucune différence ; en Christ, le modèle et la mesure de leur nouvelle relation avec le Père, ils étaient tous devenus un, une seule et même chose : des fils de Dieu par la foi dans le Christ Jésus.

C’était vraiment un résultat digne de l’œuvre accomplie à Golgotha. Ici aussi, il pouvait être dit avec raison : « Les choses vieilles sont passées ; voici, toutes choses sont faites nouvelles » [2 Corinthiens chapitre 5 verset 17], et tout cela en Christ, la semence et l’héritier d’Abraham. Or si les Galates étaient de Christ, ils étaient donc aussi « la semence d’Abraham, héritiers selon la promesse » (verset 29). Ce qu’Israël n’avait jamais obtenu sur la base de la loi, ce que personne ne peut jamais obtenir en dépit des efforts les plus sincères, était devenu en Christ la part des Galates, et cela gratuitement. Avec Lui, la vraie semence d’Abraham, toutes les promesses étaient devenues leur part. Ils étaient héritiers selon la promesse qui avait été donnée autrefois sur la montagne de Morija.

Comme tout cela était simple et conséquent ! Que pouvaient répliquer les Galates ? Il ne leur restait qu’à baisser les yeux, confus, et à reconnaître leur folie d’avoir pu, après un enseignement si fidèle de l’apôtre, chercher encore satisfaction et honneur dans leurs propres efforts en rapport avec la loi, au lieu de trouver tout en Christ et de Lui donner la gloire qui ne revient qu’à Lui seul. Et que ferons-nous nous-mêmes ? Nous continuerons à remercier Dieu de n’être pas seulement venu, en son temps, au secours des assemblées de Galatie par cette épître, mais de nous l’avoir donnée, dans Son amour prévoyant, pour nous avertir sérieusement du danger qui, sous la forme du légalisme, menace ceux qui se nomment chrétiens. Et nous continuerons aussi à nous étonner en constatant comment Dieu, dans Sa souveraineté et Sa bonté, tourne le mal en bien et fait concourir les folies et les manquements de Ses enfants à leur profit et à leur bénédiction permanente.

Chapitre 4

Dans le chapitre 4, tout en résumant encore une fois ce qui a été dit jusque-là, l’apôtre en vient à un examen de la position des croyants sous l’ancienne alliance, en rapport avec la pensée exprimée précédemment, concernant l’héritage en Abraham. Si la loi et la promesse, sans toutefois se contredire, étaient si différentes dans leur nature, qu’en était-il des héritiers de la promesse, tandis qu’ils se trouvaient sous la loi ?

Il ne faisait aucun doute que les croyants en Israël avaient, comme semence d’Abraham, un droit à l’héritage ; les bénédictions promises par Dieu devaient être leur part. Mais en ont-ils vraiment eu la jouissance ? L’apôtre répond à cette question par ces paroles : « Or je dis qu’aussi longtemps que l’héritier est en bas âge, il ne diffère en rien d’un esclave, quoiqu’il soit seigneur de tout ; mais il est sous des tuteurs et des curateurs jusqu’à l’époque fixée par le père » (versets 1 et 2). Cette image d’un enfant en bas âge nous montre clairement l’état des choses. Un Juif croyant était, comme tout croyant de l’Ancien Testament, un enfant et par conséquent un héritier, mais il ressemblait à un enfant qui est encore mineur, qui a donc des droits à l’héritage paternel, mais dans la possession et la jouissance effective duquel il n’est pas encore entré.

Un tel enfant en bas âge ne se distingue en rien d’un serviteur ou d’un esclave, tant que dure le délai fixé par le père, ou établi d’une autre manière, bien qu’il soit héritier et par là maître de tout. Il ne peut se présenter ou agir d’une manière indépendante, ni disposer de l’héritage attendu. C’est l’affaire des tuteurs et des curateurs auxquels l’enfant est soumis jusqu’à sa majorité. Dès qu’elle intervient tout change. L’enfant n’est plus soumis aux dispositions du tuteur, mais reçoit les droits de fils et le libre usage de l’héritage paternel.

« En bas âge » : comme cette expression décrit bien la position des croyants de l’Ancien Testament, surtout celle des croyants juifs, jusqu’à la venue du Seigneur ! Bien qu’ils fussent destinés, comme enfants et héritiers, à partager avec Christ toute la gloire du royaume à venir, à s’asseoir à table dans le royaume de Dieu avec Abraham, Isaac et Jacob, ils étaient pourtant semblables à des esclaves, qui reçoivent bien des communications et des instructions du maître de la maison, mais ne sont pas introduits dans ses pensées et ses conseils. C’est pourquoi l’apôtre continue : « Ainsi aussi nous, lorsque nous étions en bas âge, nous étions asservis sous les éléments du monde » (verset 3).

« Asservis » — remarquons ce mot — et asservis « sous les éléments du monde » ! Nous rencontrons cette dernière expression en Colossiens chapitre 2 verset 8, mais là plutôt en rapport avec la philosophie et les traditions des hommes, et avant tout avec les superstitions païennes. Ici c’est le système de la loi qui est appelé « les éléments du monde » car, bien qu’ordonné de Dieu, il était adapté à ce monde, à l’homme dans son état de déchéance et de corruption. Sous ce rapport le tabernacle même est appelé, en Hébreux chapitre 9 verset 1, « un sanctuaire terrestre » (littéralement : « de ce monde »). Or c’est sous ces éléments du monde que les Juifs croyants étaient « asservis ». Bien que certains d’entre eux aient pu jouir parfois de manifestations de grâce particulières, alors qu’il leur était donné personnellement plus de lumière pour rafraîchir leur cœur et les diriger vers les choses éternelles et célestes, le système comme tel restait toujours le même. L’alliance du mont Sina ne pouvait enfanter que pour la servitude (verset 24). La loi veut et doit être ressentie comme « commandement charnel » qui ne peut apporter que mort et condamnation sur tous ceux qui sont sous elle. La bienheureuse liberté d’un enfant de Dieu est définitivement inconnue sur un terrain légal.

« Mais, quand l’accomplissement du temps est venu, Dieu a envoyé son Fils, né de femme, né sous la loi, afin qu’il rachetât ceux qui étaient sous la loi, afin que nous reçussions l’adoption » (versets 4 et 5). Dieu a envoyé Son Fils ! Paroles merveilleuses ! Qu’elles sont simples, et pourtant quelle puissance victorieuse et quelle signification elles ont ! Dieu a envoyé. C’est Lui qui a agi. Il voulait mettre en lumière la vérité, toute la vérité ; Il voulait se révéler à l’homme perdu, dans l’excellente grandeur de Sa gloire comme Dieu Sauveur. Ce ne sont pas des anges qui entrent maintenant en action, comme jadis au mont Sina ; non, après que l’état de perdition désespéré de l’homme, tant sans loi que sous la loi, eut été pleinement démontré, en « l’accomplissement du temps », le Fils de Dieu parut dans ce monde, envoyé du Père, vrai homme, né de femme, né sous la loi. Par la femme le péché était entré dans le monde, d’une femme est né Celui qui seul était capable d’abolir le péché. Seul un homme, seul le Fils de Dieu qui « a participé au sang et à la chair » [Hébreux chapitre 2 verset 14], pouvait répondre aux besoins des enfants d’Adam, de toute la race humaine déchue. Il y a plus : ce n’est que si cet homme engendré de Dieu était placé sous la loi, que les justes exigences de celle-ci pouvaient être accomplies et sa malédiction ôtée.

Dieu a envoyé. Jadis, Il avait communiqué Ses commandements, Ses saintes exigences, à l’homme qui prétendait faire tout ce que Dieu lui dirait. Le résultat en fut la malédiction et la mort. L’homme s’est montré exactement le contraire de ce qu’il aurait dû être. Alors Dieu a envoyé, Dieu a donné, et Il l’a fait sans que l’homme le Lui demande, dans l’amour incompréhensible de Son cœur. « Dieu a tant aimé le monde, qu’il a donné son Fils unique » [Jean chapitre 3 verset 16]. Mais il ne suffisait pas que le Saint et le Juste, qui faisait toujours ce qui plaisait à Dieu, apparût sur la scène du péché, qu’Il passât « de lieu en lieu, faisant du bien, et guérissant tous ceux que le diable avait asservis à sa puissance » [Actes chapitre 10 verset 38]. Il ne suffisait pas que des hommes pussent voir et entendre ce que beaucoup de prophètes et de justes avaient désiré en vain de voir et d’entendre. Au contraire, la présence corporelle du Seigneur mettait d’autant plus en évidence l’état désespéré de l’homme, et l’abîme infranchissable séparant le pécheur impur du Dieu saint. Si l’envoi du Fils devait conduire au but voulu de Dieu, il fallait qu’Il mourût, il fallait qu’Il accomplît l’œuvre de la rédemption, qu’Il remplaçât l’homme et prît sur Lui toute la responsabilité qui se rattachait à son état. Ceux qui étaient sous la loi devaient être rachetés. Ce n’est qu’ainsi que nous pouvions recevoir l’adoption.

Avant la mort et la résurrection de notre Seigneur Jésus Christ, aucun homme ne pouvait dire à Dieu « Abba, Père ! » ; ce n’est que lorsque la gloire du Père L’eut ressuscité d’entre les morts que le Seigneur put envoyer Marie de Magdala vers Ses « frères » avec le message bien connu de nous tous (Jean chapitre 20 verset 17). Le privilège des disciples était grand, extrêmement grand, de voir le Messie, de L’accompagner dans Ses allées et venues à travers le pays et d’écouter Ses enseignements ; mais, jusqu’à ce premier jour de la semaine si important, ils se trouvaient encore sur le terrain des croyants de l’Ancien Testament. Ils étaient encore « en bas âge » ; le temps fixé par le père n’était pas encore passé. Bien que le cœur aimant du Seigneur désirât ardemment les introduire dans la possession et la jouissance de la nouvelle position fondée sur Sa mort et Sa résurrection, la chose était impossible. Jusqu’à ce que le baptême dont Il devait être baptisé fût accompli, Il était « à l’étroit » (Luc chapitre 12 verset 50). Il aurait eu tant de choses à dire aux siens, mais ils ne pouvaient pas encore les « supporter », ni les comprendre (Jean chapitre 16 verset 12).

Par la résurrection tout était soudainement changé. Il pouvait maintenant révéler le précieux nom du Père à Ses disciples, avec une signification qu’il n’avait jamais eue auparavant. Ils avaient maintenant reçu « l’adoption ». Libérés de la servitude de la loi, ils étaient devenus « fils ». « Et, parce que vous êtes fils, Dieu a envoyé l’Esprit de son Fils dans nos cœurs, criant : Abba, Père » (verset 6). Ici encore, le changement de personne est remarquable. La phrase précédente se termine avec un « nous » : « afin que nous reçussions l’adoption » ; celle que nous avons devant les yeux commence avec un « vous » : « parce que vous êtes fils ». La grâce de Dieu ne s’était pas arrêtée aux limites d’Israël, elle s’était répandue sur les nations. « Vous êtes fils », vous les Galates, qui dans le passé ne connaissiez pas Dieu mais viviez dans les horreurs du paganisme. L’apôtre pense à cela avec une joie profonde. Dans la suite de cette phrase, il revient au « nous » du verset précédent en disant : « Dieu a envoyé l’Esprit de son Fils dans nos cœurs, criant : Abba, Père ».

En comparant ce passage avec celui de Romains chapitre 8 versets 14 à 17, qui par ailleurs lui ressemble beaucoup, nous remarquerons une petite différence. Tandis que là, ce sont les croyants qui sont désignés comme étant ceux qui crient : « Abba, Père », ici c’est l’Esprit du Fils qui crie. De plus, si là le fait que nous sommes conduits par l’Esprit est présenté comme preuve de notre adoption, et si l’Esprit qui habite en nous rend témoignage avec notre esprit que nous sommes enfants de Dieu, ici Dieu envoie Son Esprit dans nos cœurs parce que nous sommes fils. Par cet envoi Il scelle Son œuvre en nous, que nous soyons des croyants d’Israël ou d’entre les nations. Les uns et les autres, Juifs ou Gentils, étaient maintenant des fils, fils de Dieu par la foi en Christ, les uns autrefois étrangers, sans Dieu et sans espérance dans le monde, les autres apparemment près de Dieu, mais asservis à la loi. Les uns et les autres étaient maintenant en rapport direct avec le Père, dans une relation dont l’Esprit Saint était tout à la fois le sceau et la puissance.

On pourrait s’imaginer que le salut était plus facile pour un Juif que pour un païen, comme on pourrait penser aujourd’hui qu’un homme respectable, religieux, est plus près du salut que celui qui vit dans le péché et la honte manifestes. Mais il n’en est rien. Tout était péché chez le païen, mais c’est précisément pour cela que, lorsqu’il venait dans la lumière de Dieu, il était plus facilement convaincu de son état désespéré, qu’un Juif religieux et fidèle à la loi. Il n’avait qu’à apprendre, rien à désapprendre, qu’à accepter, rien à abandonner, comme aujourd’hui un homme qui n’a que ses péchés à présenter. Le Juif ne devait pas être délivré seulement de la malédiction de la loi, mais aussi de sa prétendue justice par la loi, en fait de la loi elle-même ; ainsi en est-il aujourd’hui de celui qui porte le nom de chrétien et qui doit être délivré de tant de piété apparente et de formes religieuses. Mais pour les uns et les autres, le résultat est le même dès que la foi devient leur part. L’efficacité de l’œuvre de la rédemption est la même dans chaque cas.

C’est pourquoi l’apôtre peut ajouter, devenant encore plus personnel : « de sorte que tu n’es plus esclave, mais fils ; et, si fils, héritier aussi par Dieu » (verset 7). Quel qu’ait pu être le croyant dans le passé, idolâtre ou transgresseur de la loi, il est maintenant fils, non plus esclave, et si fils, alors également héritier, et tout cela par Dieu. Dieu Lui-même nous a tirés de notre esclavage précédent et nous a introduits dans la position merveilleuse et dans la plénitude de bénédictions qu’Il a déterminées et préparées pour nous en Son Fils. Nous lisons de même en 2 Corinthiens chapitre 5 verset 5 : « Celui qui nous a formés à cela même, c’est Dieu ». Quelle merveille de la grâce ! Les Galates, jadis idolâtres, impurs, esclaves du péché, éloignés de Dieu, pouvaient maintenant, après avoir été chacun personnellement amenés à Dieu, dire de plein droit : « Abba, Père » ! Ils pouvaient se glorifier dans l’espérance de la gloire de Dieu, et en Dieu Lui-même [Romains chapitre 5 versets 2 et 11] ! Tout ce que le Père a donné au Fils et ce qu’Il veut posséder en Lui devait un jour être leur part pour en jouir éternellement.

Nous nous demandons involontairement comment il était possible que ces croyants, après avoir connu une telle grâce et en avoir fait l’expérience pour eux-mêmes, retournent aux misérables éléments avec lesquels ils avaient été en rapport autrefois ! Mais il en était malheureusement ainsi. C’est pourquoi l’apôtre continue en les avertissant sérieusement : « Mais alors, ne connaissant pas Dieu, vous étiez asservis à ceux qui, par leur nature, ne sont pas dieux ; mais maintenant, ayant connu Dieu, mais plutôt ayant été connus de Dieu, comment retournez-vous de nouveau aux faibles et misérables éléments auxquels vous voulez encore derechef être asservis ? » (versets 8 et 9).

Autrefois, lorsqu’ils ne connaissaient pas Dieu, ils étaient asservis à ceux qui ne sont pas Dieu, ils s’étaient prosternés devant des images qui ont des yeux et ne voient pas, des oreilles et n’entendent pas, des pieds et ne marchent pas, des mains et ne touchent pas [Psaume 115 versets 5 à 7]. Le seul souvenir de ces choses ne devait-il pas les faire rougir de honte ? Hélas ! après avoir connu le vrai Dieu, après avoir été connus de Lui et avoir été amenés dans la relation la plus intime avec Lui, ils voulaient retourner de nouveau aux faibles et misérables éléments qu’ils avaient reconnus tels et qu’ils avaient abandonnés, et leur être asservis derechef.

Remarquons bien les expressions : retourner « de nouveau » et « être asservis derechef ». Les Galates avaient-ils vraiment l’intention de reprendre leur ancienne idolâtrie ? Nullement. Ils voulaient, comme nous le savons, introduire la circoncision et avec elle l’observation « des jours, et des mois, et des temps, et des années » (verset 10). Mais par là, que faisaient-ils ? Ils retournaient en principe au terrain sur lequel ils s’étaient tenus jadis, terrain d’une religion humaine et des œuvres légales. Voilà le fait sur lequel l’apôtre attire leur attention avec tant de sérieux, et qui reste si important pour tous les temps. Car toute religion humaine, qu’elle se nomme païenne, juive ou chrétienne, repose en définitive sur le même fondement, sur l’œuvre de l’homme et sur ses efforts pour obtenir, d’une manière ou d’une autre, la faveur de la divinité, quelque différente que puisse être la manière de se la représenter. C’est ainsi que les Galates, avant leur conversion, avaient servi les idoles ; la grâce de Dieu les en avait délivrés, mais maintenant ils voulaient retourner de nouveau à l’idolâtrie et la pratiquer derechef !

Mais, objectera-t-on, l’apôtre ne peut pas vouloir dire cela ! Comment pourrait-il appeler idolâtrie les précieux types de l’Ancien Testament, donnés par Dieu Lui-même, ces « ombres des biens à venir » (Colossiens chapitre 2 verset 17) ? Aussi n’est-ce pas ce qu’il fait. Il dit bien plutôt : si, après que l’accomplissement de tous ces types et la réalité de ces ombres sont intervenus en Christ mort et ressuscité d’entre les morts, et après que vous avez cru en ce Christ, vous retournez de nouveau à ces ombres, ce n’est rien d’autre aux yeux de Dieu qu’un retour à l’idolâtrie, si même c’est sous une autre forme que dans le passé. Ils mettaient ces ordonnances légales à la place qui n’appartient qu’au Seigneur glorifié ! Ils avaient connu Dieu en Christ et, malgré cela, voulaient servir à nouveau les faibles et misérables éléments auxquels ils avaient tourné le dos !

Combien sérieux et saisissant est le reproche de l’apôtre ! Mais il apparaît encore beaucoup plus sérieux si nous l’appliquons à la chrétienté professante de nos jours. Hélas ! où en est-elle arrivée ? Non seulement on observe des jours, des mois, des temps et des années, non seulement on a introduit des cérémonies et des usages juifs dans ce que l’on nomme culte, mais on vénère des lieux, des images de Christ, des images des saints, des reliques, etc. Croyant servir Dieu, on pratique en réalité ce qu’Il considère comme une fornication spirituelle et de l’idolâtrie. Au lieu de mettre les âmes en relation avec Christ par une foi simple, on s’efforce d’éveiller dans les cœurs une certaine crainte, des sentiments religieux, et de couvrir la pauvreté intérieure et le manque de puissance par une apparence de piété. Que sera la fin de tout cela ? Qu’adviendra-t-il au jour où Dieu demandera compte aux conducteurs et à ceux qu’ils auront séduits ?

À ce propos nous ne voulons pas passer sous silence le fait bien sérieux que le penchant à retourner aux formes religieuses extérieures, à l’observation de jours, de mois et d’années et à d’autres choses de ce genre, n’est pas non plus étranger à de vrais croyants. Oui, et de plus, on provoque souvent chez eux de l’étonnement, on les choque presque, lorsqu’on refuse de célébrer des jours comme le vendredi saint, Pâques, Pentecôte, Noël, etc. Paul, le grand apôtre et fidèle ouvrier du Seigneur, juge de ces choses autrement. « Je crains, quant à vous », écrit-il aux Galates, « que peut-être je n’aie travaillé en vain pour vous » (verset 11, comparez versets 19 et 20).

Dans les épîtres aux Corinthiens, dont l’état moral était si déplorable, nous chercherions en vain d’aussi fortes expressions d’inquiétude. Malgré tout le sérieux de son langage, Paul a tout de même confiance en eux et compte sur la fidélité de Dieu, par laquelle ils avaient été appelés à la communion de Son Fils [1 Corinthiens chapitre 1 verset 9]. Non point qu’il n’ait pas jugé sévèrement le mal moral parmi eux, il l’a fait, mais son œil apercevait dans le penchant légal des Galates un danger encore plus pressant et un mal plus funeste que dans ces choses beaucoup plus répréhensibles selon l’appréciation humaine. Le légalisme est une chose extrêmement trompeuse, et ce qui le rend si dangereux, c’est qu’il a une très belle apparence aux yeux des hommes. En réalité, il éloigne le cœur de Christ et donne de la nourriture au pauvre « moi ». De plus, ne pensons pas qu’une vraie sainteté puisse se développer sur un terrain légal. Ce n’est que là où la grâce selon la pensée de Dieu est comprise et réalisée, qu’il y aura un joyeux accroissement de l’homme intérieur, une transformation en l’image de Celui que nous pouvons contempler à face découverte [2 Corinthiens chapitre 3 verset 18] à la droite de Dieu.

Il est vrai qu’il est possible d’abuser de la grâce, et même de la tourner en dissolution [Jude verset 4] — l’apôtre parlera plus tard de ce danger. Hélas ! de quoi l’homme n’est-il pas capable ? Mais s’il y a de la droiture dans l’âme, la grâce opérera toujours une séparation du mal beaucoup plus réelle et complète que ne saurait le faire un esprit légal.

L’anxiété de l’apôtre, la pensée qu’il pourrait finalement avoir travaillé en vain, ressort encore des versets suivants. « Soyez comme moi, car moi aussi je suis comme vous, frères ; je vous en prie. Vous ne m’avez fait aucun tort » (verset 12). Seul un père en Christ pouvait écrire ainsi, seul un amour plein de sollicitude trouver de telles paroles, employer un ton semblable. Il en était en réalité ainsi : l’amour de Christ étreignait cet homme (2 Corinthiens chapitre 5 verset 14) ; tout ce qu’il faisait, il le faisait par amour pour l’évangile, pour être coparticipant avec lui (1 Corinthiens chapitre 9 versets 20 à 23).

Comme ailleurs, les mauvais ouvriers avaient fait leur travail destructif parmi les Galates avec ruse et de propos délibéré. Ils leur avaient probablement dit aussi que Paul avait été infidèle à ses convictions précédentes pour des avantages extérieurs, qu’il avait renoncé à l’observation de la loi et donc à toute sa position juive pour des motifs douteux. L’apôtre n’écarte pas ici ce reproche, comme en Romains chapitre 9, en leur parlant de son amour ardent et inchangé pour ses « parents selon la chair », mais il convient sans réserve : Oui, il en est ainsi ; ces gens ont raison, je ne suis plus sur le terrain juif, je ne suis plus sous la loi. La sagesse avec laquelle il agit de manière si différente suivant les circonstances est bien digne d’admiration : tantôt ferme et décidé, à l’occasion presque dur, et tantôt conciliant, revenant avec bonté, mais ne cédant pas un pouce de terrain de la vérité de l’évangile (chapitre 2 verset 5).

« Frères, je vous en prie ! ». Celui qui aurait pu parler sur un ton de commandement prie, prie cordialement, tendrement. « Soyez comme moi, car moi aussi je suis comme vous », c’est-à-dire libre de la loi. Christ m’a racheté, moi qui étais jadis sous la loi, de ses exigences et de sa malédiction ; vous, vous n’avez jamais été sous la loi, vous n’avez jamais eu affaire avec elle. Qu’en est-il donc, que vous vouliez maintenant vous mettre sous son joug insupportable ? « Soyez comme moi » ! Vous ne m’avez fait aucun tort en prêtant l’oreille à ces séducteurs et en pensant ou parlant ainsi de moi. Suivez seulement mon exemple et laissez la loi à la place qui lui appartient. Moi qui, comme Israélite, me trouvais sur le terrain de la loi, je rends grâce à Dieu de ce qu’en Christ je suis mort à la loi, et de ce que j’ai été mis en relation avec des choses beaucoup plus élevées et plus glorieuses — moi, autrefois un homme dans la chair, maintenant un homme en Christ, autrefois sous la loi, maintenant sous la grâce.

Et combien ils avaient eu l’occasion d’admirer cette grâce en lui ! Il n’était pas venu à eux comme un messager dont l’aspect et l’attitude répondaient aux désirs des hommes et aux prétentions d’une religion charnelle. Non, c’est « dans l’infirmité de la chair » qu’il les avait évangélisés « au commencement », mais il ajoute : « vous n’avez point méprisé, ni rejeté avec dégoût ma tentation qui était en ma chair ; mais vous m’avez reçu comme un ange de Dieu, comme le Christ Jésus » (versets 13 et 14). Il nous est donné plus de détails quant à cette « tentation » de l’apôtre au chapitre 12 de la seconde épître aux Corinthiens. À vrai dire nous ne savons pas en quoi elle consistait. En soi ce n’est pas important. Mais comme la question est sans cesse posée, quelques paroles à ce sujet peuvent être à propos.

De tout ce qui nous est dit de « l’écharde pour la chair », nous devons conclure qu’elle consistait en une infirmité qui défigurait l’apôtre, le rendant méprisable aux yeux des hommes. C’est probablement la raison pour laquelle il supplia si instamment le Seigneur pour qu’Il le délivrât de cet « ange de Satan » qui le souffletait. Ce fidèle et dévoué messager de l’évangile ne devait-il pas être des plus sensibles au fait que sa personne et son apparence impressionnaient d’emblée ses auditeurs de façon à le rendre méprisable ? On pourrait donc penser qu’il s’agissait d’une infirmité dans son visage ou dans sa parole (2 Corinthiens chapitre 10 verset 10). Mais quand nous lisons ici que les Galates, si cela eût été possible, arrachant leurs propres yeux, les lui eussent donnés (verset 15), et si nous nous représentons que l’apôtre n’a écrit aucune de ses épîtres de sa propre main, à part celle, relativement courte, aux Galates, et celle-ci même avec probablement beaucoup de peine (chapitre 6 verset 11), nous inclinons à conclure qu’il a dû s’agir d’une maladie des yeux particulièrement pénible qui défigurait l’apôtre.

Pourtant, comme nous l’avons dit, la réponse à cette question n’est pas de grande importance. D’une signification, et pour nous d’une instruction beaucoup plus grandes, sont les circonstances et surtout les résultats de cette action éducative de Dieu envers Son serviteur. Paul pouvait rendre témoignage aux Galates qu’ils n’avaient pas méprisé la tentation qui était en sa chair, mais qu’ils l’avaient reçu comme un ange de Dieu, comme le Christ Jésus Lui-même. Leur bonheur, quant à la parole de la croix que Paul leur avait apportée, avait été si grand que tout le reste était devenu sans valeur et sans importance pour eux. Dans leur reconnaissance ils auraient été prêts aux plus grands sacrifices, si par cela les souffrances de l’apôtre qu’ils aimaient avaient pu être enlevées, ou au moins adoucies.

Et maintenant ? Était-il soudain devenu leur ennemi parce qu’il leur disait la vérité (verset 16) ? Cela, les faux docteurs ne le faisaient certes pas. « Ils ne sont pas zélés à votre égard comme il faut, mais ils veulent vous exclure, afin que vous soyez zélés à leur égard » (verset 17). Le zèle de ces gens n’était pas bon, ils étaient zélés pour leur propre honneur, ils voulaient « avoir une belle apparence dans la chair » (chapitre 6 verset 12), ils voulaient « attirer les disciples après eux » [Actes chapitre 20 verset 30]. L’apôtre avait-il agi de cette manière ? Avait-il jamais fait la moindre chose pour mettre sa personne au premier plan, ou même pour engager les Galates à être zélés à son égard ? Et c’est de cet homme fidèle que ces gens voulaient séparer les Galates qui avaient cru, ils voulaient les exclure de lui en élevant une cloison entre lui et eux ! Tout pour eux tournait autour de leur personne, de la considération et de l’estime des hommes. C’était en effet un zèle mauvais et méchant.

« Mais il est bon d’être toujours zélé pour le bien, et de ne pas l’être seulement quand je suis présent avec vous » (verset 18). Ils avaient persévéré dans le bien tant que Paul séjournait au milieu d’eux ; pourquoi n’en était-il plus ainsi ? L’apôtre fit une meilleure expérience chez les Philippiens. Plus tard il put leur rendre ce témoignage, qu’ils n’avaient pas seulement obéi en sa présence, mais beaucoup plus en son absence (Philippiens chapitre 2 verset 12). Il en est toujours ainsi lorsque la grâce peut agir sans entrave. Elle unit les cœurs à un objet et cet objet, c’est Christ. Un esprit légal agit toujours en divisant, il élève le moi, détourne le regard de Christ et étouffe l’amour.

En prêtant l’oreille aux insinuations de ces mauvais ouvriers, les Galates succombaient aux influences mortelles de cet esprit, ou étaient en grand danger d’y succomber. Cette constatation réveillait chez l’apôtre les sentiments qu’il avait eus au commencement alors qu’il leur annonçait Jésus Christ. Les paroles par lesquelles il exprime ces sentiments sont bien touchantes ; elles nous permettent à nouveau de jeter un regard dans ce cœur plein d’amour. Moïse, le fidèle serviteur de Dieu au temps de la loi, aimait aussi son peuple par-dessus tout. Mais ses paroles en Nombres chapitre 11 verset 12 : « Est-ce moi qui ai conçu tout ce peuple ? Est-ce moi qui l’ai enfanté, pour que tu me dises : Porte-le dans ton sein, comme le nourricier porte l’enfant qui tette ? » ne s’élèvent pas à la hauteur de celles de l’apôtre, qui connaissait la grâce de Dieu entièrement révélée en Christ.

« Mes enfants, pour l’enfantement desquels je travaille de nouveau jusqu’à ce que Christ ait été formé en vous » (verset 19). L’apôtre revivait en pensée les douleurs et les combats qu’il avait traversés en luttant pour les âmes des Galates. Hélas ! ce mauvais esprit avait amené une telle confusion dans leurs cœurs quant à la vérité, qu’il était nécessaire de leur enseigner à nouveau les rudiments du christianisme et de les ramener à la croix. De bonnes choses pouvaient se trouver encore chez eux extérieurement, mais ils s’étaient éloignés de Christ intérieurement, ils avaient abandonné le terrain du christianisme, ils étaient déchus de la grâce.

« Je voudrais être maintenant auprès de vous et changer de langage, car je suis en perplexité à votre sujet » (verset 20). Je suis en perplexité à votre sujet ! Il n’en était pas ainsi quant aux « frères bien-aimés et ardemment désirés » [Philippiens chapitre 4 verset 1] à Philippes. Ils étaient la joie et la couronne de l’apôtre, ils demeuraient fermes dans le Seigneur et pouvaient entendre ces paroles d’encouragement : « Réjouissez-vous toujours dans le Seigneur ! » [chapitre 4 verset 4]. Ici, l’apôtre désire être une fois encore auprès des Galates pour renouveler en eux l’œuvre menacée. Il voudrait changer de langage et les servir de nouveau personnellement, selon que l’exigerait leur état. Ce n’était pas de gaieté de cœur qu’il userait de sévérité ou emploierait la verge, mais si leur bien spirituel le rendait nécessaire, il serait aussi prêt à cela. Il aurait préféré venir en hâte vers eux avec amour et dans un esprit de douceur ; et sans doute espérait-il que sa lettre si sérieuse ne manquerait pas son but.

Il revient maintenant encore une fois à l’opposition inconciliable entre la loi et la grâce. « Dites-moi, vous qui voulez être sous la loi, n’écoutez-vous pas la loi ? » (verset 21). Pour la compréhension de ce passage, précisons tout d’abord que le mot « loi » est employé ici dans un sens double. Alors que le début du passage : « vous qui voulez être sous la loi » nous rappelle comme toujours la loi du Sinaï, la seconde partie : « n’écoutez-vous pas la loi ? » parle de la loi dans le sens où l’entend le Seigneur dans Luc chapitre 16 verset 16 et d’autres passages : « la loi et les prophètes jusqu’à Jean ». L’Ancien Testament se compose de la loi, des prophètes et des psaumes. Dans bien des passages, comme par exemple au psaume 19 verset 7 : « La loi de l’Éternel est parfaite, restaurant l’âme », la loi désigne aussi la Parole de Dieu en général. L’apôtre veut donc dire : N’écoutez-vous pas ce que dit la Parole dans sa partie appelée « la loi » ?

« Car il est écrit qu’Abraham a eu deux fils, l’un de la servante, et l’autre de la femme libre. Mais celui qui naquit de la servante naquit selon la chair, et celui qui naquit de la femme libre naquit par la promesse » (versets 22 et 23). Le fait qu’Abraham avait deux fils, un d’Agar, un de Sara, était bien connu des Galates, et aussi qu’Isaac était le fils de la promesse, alors qu’Ismaël était né selon la chair. Mais ils n’avaient probablement jamais saisi jusque-là le sens profond, symbolique, de cette différence et nous non plus nous ne l’aurions probablement jamais découvert s’il n’avait plu au Saint Esprit d’attirer notre attention sur lui par le moyen de l’apôtre Paul. Il en est de même de bien des faits de l’Ancien Testament : sans les enseignements de l’Esprit nous ne les reconnaîtrions guère comme applicables aux vérités du Nouveau Testament. Dans le cas qui nous occupe, la chair et la loi d’une part, la promesse et la grâce de l’autre, ont leurs types dans les deux fils d’Abraham, celui qui naquit selon la chair et celui qui naquit selon l’Esprit. C’est là ce que Dieu avait en vue, et l’incrédulité de Sara devait contribuer à compléter cette intéressante image. Que notre Dieu est merveilleux dans tout ce qu’Il dirige ou laisse faire !

Ainsi ces deux femmes, Agar et Sara, sont, comme l’apôtre l’enseigne, « deux alliances, l’une du mont Sina, enfantant pour la servitude, et c’est Agar » (verset 24). Pour cette raison nous la trouvons, et son fils avec elle, en antagonisme avec Sara et Isaac. Comment la loi et la grâce, la chair et l’Esprit, pourraient-ils jamais être en harmonie ensemble ? Agar, qui se trouve en servitude, enfante pour la servitude, exactement comme la loi du Sinaï. « Car Agar est le mont Sina, en Arabie, et correspond à la Jérusalem de maintenant, car elle est dans la servitude avec ses enfants » (verset 25). La Jérusalem du temps de l’apôtre, citadelle du système légal, présentait le triste tableau de la servitude intérieure et extérieure. Ses habitants étaient asservis sous deux rapports : esclaves du péché et esclaves de Rome. Sion, jadis choisie de Dieu pour Sa demeure, était devenue une ville de meurtriers et se trouvait sous la puissance des païens. Et c’est vers elle que les Galates voulaient maintenant se tourner ? C’est pour la loi qu’ils voulaient lutter et devenir ainsi enfants de la servante ?

Non, continue l’apôtre, « la Jérusalem d’en haut est la femme libre », et cette Jérusalem est « notre mère ». Rétrograderions-nous de la position de libre grâce à l’état de servitude légale ? Qu’ainsi n’advienne ! Toutes les relations avec la Jérusalem ancienne et terrestre, pour autant qu’elles aient pu exister, sont rompues ; il n’existe pas de nouvelles obligations envers elle, en Christ nous sommes entrés en relation avec la cité céleste. La Jérusalem d’en haut, là où est le Christ, est notre mère ; cette Jérusalem est libre et ses enfants le sont avec elle.

« Car il est écrit : Réjouis-toi, stérile qui n’enfantes point ; éclate de joie et pousse des cris, toi qui n’es point en travail d’enfant ; car les enfants de la délaissée sont plus nombreux que les enfants de celle qui a un mari » (verset 27). Au premier abord nous sommes étonnés de trouver ce passage cité ici. Il est tiré du chapitre 54 du prophète Ésaïe, qui traite des merveilleux résultats de l’œuvre de Christ pour Israël décrite dans le chapitre précédent. Jérusalem, la stérile, qui n’a point été en travail d’enfant, est invitée à se réjouir et à éclater de joie car les enfants qui lui sont nés dans son isolement (le temps de sa séparation de Dieu) sont plus nombreux que ceux qu’elle a eus du temps où elle avait un mari. Regardant en arrière sur son chemin long et solitaire, avec tant de tribulations et d’orages, pareille encore pour le présent à une femme misérable et abandonnée, elle peut entendre des paroles de grâce merveilleuse ; elle doit oublier la honte de sa jeunesse et ne plus se souvenir de l’opprobre de son veuvage. Non seulement il lui naîtra, d’Israël même, de si nombreux enfants que l’espace sera trop étroit pour eux dans le pays pour y habiter, et elle dira en son cœur : « Qui m’a enfanté ceux-ci ? Et moi, j’étais privée d’enfants et abandonnée, captive et chassée ; et ceux-ci, qui les a élevés ? » (Ésaïe chapitre 49 versets 20 et 21) — mais Dieu veut aussi compter pour sa descendance ceux qui, de tous les peuples de la terre, sont entrés en relation avec Lui sur le terrain de la grâce. Le Seigneur Jésus Lui-même dit à la femme au puits de Jacob : « Le salut vient des Juifs » [Jean chapitre 4 verset 22], et si nous pensons, en rapport avec cette parole, à la promesse faite jadis par Dieu à l’ancêtre d’Israël qu’en sa semence seraient bénies toutes les nations [Genèse chapitre 22 verset 18], nous comprenons mieux la pensée de l’apôtre. Il pense moins ici aux deux femmes d’Abraham qu’à ce qu’elles représentent.

Souvenons-nous en même temps que le point de départ de l’apôtre dans l’épître aux Galates est tout autre que dans l’épître aux Éphésiens, par exemple, de sorte qu’il arrive à des résultats tout différents. Si dans celle-ci il parle du conseil de Dieu, dont l’objet est l’Assemblée, le corps de Christ, conseil que Dieu a arrêté avant la fondation du monde, il base son enseignement dans celle-là sur les promesses que Dieu a faites autrefois à Abraham, le patriarche juif et le père de tous les croyants, et qui concernent tous ceux qui portent le titre d’enfants d’Abraham. Il n’est question qu’une seule fois de « l’assemblée de Dieu » [chapitre 1 verset 13] dans l’épître aux Galates et encore seulement pour nous dire que Paul l’avait persécutée outre mesure. Elle était un mystère qui avait été caché en Dieu dès les siècles et les générations ; les promesses n’en avaient jamais parlé et notre épître ne s’élève pas à ces hauteurs. Là, les croyants sont des enfants, des fils et des héritiers de Dieu ; ils ne sont plus en bas âge ou serviteurs, mais nous chercherions en vain les privilèges et les bénédictions qui sont liés au Fils de l’homme glorifié à la droite de Dieu.

Tout cela, comme il a été dit, nous fera mieux comprendre pourquoi l’Esprit de Dieu embrasse ici tous les croyants qui naissent pendant le temps où Israël est sans mari, qu’ils soient d’Israël ou des nations, et pourquoi Il les appelle enfants de Jérusalem, mais à vrai dire de la Jérusalem comme elle sera vue un jour, lorsqu’une grâce inconditionnelle sera sa part et qu’elle aura cessé d’être une « Agar ». Les innombrables multitudes des saints célestes qui alors auront déjà pris leur place là-haut (voyez les vingt-quatre anciens d’Apocalypse chapitres 4 et 5, etc.) sont aussi comptés ici comme enfants de Jérusalem.

D’une manière semblable, en Romains chapitre 9 versets 24 à 26, l’apôtre applique à tous les vases de miséricorde, d’entre les Juifs et d’entre les nations, une déclaration du prophète Osée qui, en premier lieu, n’est relative qu’à Israël, disant à leur propos : « lesquels aussi il a appelés, savoir nous, non seulement d’entre les Juifs, mais aussi d’entre les nations : comme aussi il dit en Osée : … « et il arrivera que dans le lieu où il leur a été dit : Vous n’êtes pas mon peuple », là ils seront appelés fils du Dieu vivant » (Osée chapitre 1 verset 10). Ainsi, nous aussi, nous sommes tous enfants de la Jérusalem d’en haut ; elle est notre mère. Il n’y a qu’un terrain commun sur lequel tous les croyants se tiennent devant Dieu, c’est le terrain de Sa grâce libre et inconditionnelle. C’est pourquoi l’apôtre peut, appliquant cette précieuse vérité aux Galates, conclure sa démonstration par ces mots :

« Or vous, frères, comme Isaac, vous êtes enfants de promesse » (verset 28). Non pas des enfants de la servante, nés selon la chair et par là voués à la servitude de la loi, mais enfants de la femme libre, nés selon l’Esprit, enfants de promesse et par là participants de la grâce révélée en Christ, la semence d’Abraham, et de tous les privilèges qui s’y rattachent.

Mais, comme jadis celui qui était né selon la chair (Ismaël) persécutait celui qui était né selon l’Esprit (Isaac), il en était de même maintenant : les Juifs étaient les ennemis irréconciliables des chrétiens, ils étaient même opposés à tous les hommes, empêchant les apôtres de parler aux nations afin qu’elles soient sauvées. C’est pourquoi la colère de Dieu était venue sur eux (1 Thessaloniciens chapitre 2 versets 15 et 16). Sous ce rapport aussi il en était de même qu’autrefois ; car « que dit l’Écriture ? Chasse la servante et son fils, car le fils de la servante n’héritera point avec le fils de la femme libre » (verset 30 ; comparez Genèse chapitre 21 versets 9 et 10).

C’est ainsi que parle l’Écriture qui ne peut être anéantie [Jean chapitre 10 verset 35]. Elle prononce un jugement implacable sur tous ceux qui pensent qu’un enfant de Dieu a quoi que ce soit à faire avec la loi comme fondement ou règle de ses rapports avec Dieu ! Aussi convenable et rigoureuse que soit la loi comme arme envers les iniques et les insubordonnés, envers les impies et les pécheurs, aussi peu est-elle pour le juste (1 Timothée chapitre 1 versets 8 et 9). Celui qui cherche donc à remettre le croyant sous la loi, de quelque manière que ce soit, le ramène de la bienheureuse liberté de l’enfant de Dieu à la funeste servitude du Juif.

« Le fils de la servante n’héritera point avec le fils de la femme libre ». L’Écriture ne pourrait pas parler d’une manière plus claire, et elle a déjà parlé ainsi longtemps avant que la loi ne vînt. Dans l’histoire typique de ces deux fils, elle a dépeint la position du croyant en contraste avec celle d’un homme légal, la différence entre la chair et l’Esprit, d’une manière si claire que quiconque veut voir, peut voir. C’est en tressaillant de joie, nous dirions volontiers en triomphant, que l’apôtre clôt son enseignement par ces paroles : « Ainsi, frères, nous ne sommes pas enfants de la servante, mais de la femme libre ». À nous l’affranchissement de tout esclavage légal, à nous la promesse, à nous l’héritage !

Chapitre 5 versets 1 à 12

« Christ nous a placés dans la liberté en nous affranchissant ; tenez-vous donc fermes, et ne soyez pas de nouveau retenus sous un joug de servitude » (verset 1). Les paroles d’introduction de notre chapitre résonnent comme un cri de joie. « Christ nous a placés dans la liberté en nous affranchissant ». Ce n’est pas : Il veut nous affranchir, ni : Il peut nous affranchir, mais : Il nous a affranchis. Oui, il en est ainsi, Dieu soit béni ! Et tous ceux qui sont au Seigneur ont le droit de répéter avec reconnaissance les paroles de l’apôtre. Tous sont affranchis, et non pas partiellement ou pour un temps, mais entièrement et pour toujours. Ils peuvent se rappeler sans cesse que Christ, alors qu’Il subissait le jugement pour eux sur la croix, a mis fin pour toujours à l’état misérable dans lequel ils se trouvaient jadis.

Le Seigneur Jésus Lui-même avait déjà dit aux Juifs : « Si donc le Fils vous affranchit, vous serez réellement libres » (Jean chapitre 8 verset 36), et maintenant les Galates avaient sous les yeux, clair et distinct, le chemin par lequel cet affranchissement avait eu lieu, et par lequel seul il avait pu s’opérer. La mort du Seigneur avait fait d’esclaves sans ressource, liés par les chaînes du péché, des fils libres qui étaient maintenant rendus capables de servir « Dieu d’une manière qui lui soit agréable, avec révérence et avec crainte » [Hébreux chapitre 12 verset 28] ; elle les avait libérés du joug de la loi qui, destinée à l’homme dans la chair, ne pouvait le placer, à cause de la faiblesse de la chair, que sous la malédiction et la condamnation. « Liberté » — parole merveilleuse pour celui qui jadis était un prisonnier sans espoir ! Pourrait-on imaginer qu’un homme ayant goûté la douceur d’un tel affranchissement puisse jamais retourner à la position qui lui a causé autrefois tant de douleur et de combat ?

Et pourtant, nous devons nous le redire constamment, c’est exactement cela que les Galates voulaient. Oh ! s’écrie l’apôtre, « tenez-vous donc fermes, et ne soyez pas de nouveau retenus sous un joug de servitude ! ». Remarquons qu’ils ne voulaient pas à proprement parler se mettre sous la loi morale des dix commandements, mais pensaient devoir introduire dans le christianisme l’une ou l’autre des cérémonies juives, telle ou telle coutume légale. Nous ne trouvons pas l’ordonnance de la circoncision parmi les dix commandements, pas plus qu’une allusion à l’observance de jours (à part le sabbat), de mois, de temps et d’années. Eh bien ! on aurait pu demander : Quel mal peut-il y avoir à reprendre des ordonnances qui, d’une part, n’étaient que des signes extérieurs accompagnant l’ancienne alliance et dans lesquelles, d’autre part, on peut discerner des ombres et des types si beaux et si caractéristiques de Christ ? De plus, Dieu n’avait-Il pas déjà donné la circoncision à Abraham ? Elle était donc beaucoup plus ancienne que la loi, et c’est pourquoi le Seigneur, en parlant d’elle, dit que Moïse l’avait bien donnée au peuple, mais qu’elle n’était pas de lui, mais des pères (Jean chapitre 7 verset 22).

D’une manière brève et définitive, l’apôtre met fin à toutes ces questions par ces paroles : « Voici, moi Paul, je vous dis que si vous êtes circoncis, Christ ne vous profitera de rien » (verset 2). Si même les deux tables de la loi ne parlent pas de la circoncision, si Dieu l’a déjà ordonnée des siècles auparavant, elle ne peut cependant pas être séparée de la loi. Elle constituait un élément inséparable de tout le système, elle était une condition essentielle non seulement pour le Juif, mais aussi pour chaque étranger qui voulait se joindre à Israël. Tout l’édifice tenait debout ou s’écroulait pour ainsi dire avec elle. C’est pourquoi celui qui retournait à la circoncision s’engageait sur le terrain de la loi, sur lequel Christ ne pouvait lui profiter de rien. L’apôtre ne veut naturellement pas dire que si un croyant se laissait influencer par un docteur judaïsant à adopter la circoncision, il n’y aurait pour lui personnellement plus de retour possible, plus de pardon, que la grâce ne serait plus là pour lui. Il parle seulement d’un principe : si les Galates en venaient à déclarer la loi nécessaire à leur justification, l’œuvre de Christ deviendrait pour eux sans effet, elle ne pourrait plus leur servir de rien.

Mais il y a plus encore : « Je proteste de nouveau à tout homme circoncis, qu’il est tenu d’accomplir toute la loi » (verset 3). Celui qui, par la circoncision, entrait sur le terrain juif s’engageait par cela à garder toute la loi. Il est impossible d’avoir un pied sur le terrain de la loi et l’autre sur celui de la grâce. Sous ce rapport la Parole nous place toujours devant une alternative inflexible : ou ceci ou cela. Qu’il s’agisse de la justification ou de la marche du croyant, il n’est pas sous la loi, mais sous la grâce. Le fondement et la source de toutes ses bénédictions et de ses relations avec Dieu est la grâce, et la grâce seule, telle que Dieu l’a révélée en Christ. Celui donc qui veut être justifié par la loi est séparé de Christ, il est déchu de la grâce (verset 4). D’ailleurs, cela ne veut pas dire qu’un tel homme se sépare de Christ pour servir dorénavant le monde et le péché. Au contraire, il espère pouvoir mieux Le servir dans ce nouveau chemin et se rapprocher davantage que par le passé de la sanctification pratique. Mais il oublie qu’en mêlant la loi avec Christ et ses propres œuvres avec la grâce, il abandonne le seul fondement sur lequel Dieu peut le justifier, et en même temps la seule chose qui rend possible la croissance intérieure.

« Car nous, par l’Esprit, sur le principe de la foi, nous attendons l’espérance de la justice » (verset 5). Par cela même, le moi, la chair avec toutes ses bonnes intentions, sont mis entièrement de côté, toute sainteté par le moyen des œuvres est rendue impossible. Nous attendons l’espérance de la justice, par l’Esprit, et non pas sur la base de quoi que ce soit qui vienne de nous ou qui se trouve en nous. Vivifiés par la puissance opérante de l’Esprit Saint, scellés par Lui, qui détourne nos regards des choses visibles et passagères, nous attendons par la foiQuoi donc ? L’espérance d’être une fois justifiés ? Certes pas, car nous possédons déjà la justice en Christ, et la foi se repose en elle — « là où (comme le dit un cantique allemand) Dieu se repose avec délice, j’ai aussi trouvé le repos ». Nous pouvons dire en pleine assurance de foi : « Ayant donc été justifiés sur le principe de la foi, nous avons la paix avec Dieu ». Christ, notre Seigneur bien-aimé, « nous a été fait sagesse de la part de Dieu, et justice, et sainteté, et rédemption » (1 Corinthiens chapitre 1 verset 30).

Qu’attendons-nous donc ? « L’espérance de la justice », c’est-à-dire la rétribution que cette justice est en droit d’attendre, ce qui lui revient de droit, ce qu’elle peut donc espérer avec confiance. Et quelle est cette espérance ? La gloire là-haut, la gloire dans laquelle Christ est déjà entré en raison de Son œuvre achevée, celle dont Il jouit déjà comme récompense de Son travail, de Sa mort en sacrifice, en un mot comme récompense de la justice. Nous, nous n’y sommes pas encore, mais l’Esprit nous Le montre, Lui, à la droite de la majesté dans les hauts lieux [Hébreux chapitre 1 verset 3], en possession de la gloire qui est encore pour nous un objet de foi et d’espérance : « Nous nous glorifions dans l’espérance de la gloire de Dieu » (Romains chapitre 5 verset 2).

Tout est donc certain et bien fondé. Nous possédons déjà la justice, qui est « par la foi », et nous attendons avec assurance, également par la foi, la gloire due à la justice qui est notre part en Christ. Nous savons ainsi par l’Esprit que nous avons la justice de Dieu, que nous sommes même Sa justice en Christ, et nous connaissons, par le même Esprit, la gloire dans laquelle notre Seigneur bien-aimé est déjà entré. Encore très peu de temps et nous y entrerons nous-mêmes. Après la justification, la glorification.

La foi joue également un rôle important sur le chemin de cette gloire. De même qu’elle assure le croyant de sa justification et qu’elle dirige ses regards en haut vers la gloire, elle opère en lui pendant son pèlerinage ici-bas et elle le fait par l’amour. Ce ne sont pas des commandements ou des obligations légales qui règlent ses actions. Non, l’amour est la source et le ressort de toutes ses manifestations, cet amour dont le croyant a vu la révélation en Christ, et qui est maintenant versé dans son cœur par l’Esprit Saint qui lui a été donné. Il est sans importance qu’il ait été jadis juif ou des nations, circoncis ou incirconcis. « Car, dans le Christ Jésus, ni circoncision, ni incirconcision, n’ont de valeur, mais la foi opérante par l’amour » (verset 6).

Pour l’homme naturel, l’homme dans la chair, le fait d’être juif ou d’entre les nations peut avoir de l’importance ; « en Christ », ni la circoncision, ni l’incirconcision, n’ont de valeur quelconque — il s’agit ici de réalité intérieure et non pas de différence charnelle extérieure. Dans le Christ Jésus, en qui il n’y a ni Juif, ni Grec, le croyant est devenu une nouvelle création et, alors que précédemment les passions du péché opéraient en lui, maintenant la foi qui opère par l’amour est entrée dans son cœur. Quel contraste, et quelle délivrance ! Les Galates l’avaient jadis connue et confessée ; obéissant à la vérité, ils avaient bien commencé. Mais les choses avaient malheureusement changé. L’apôtre éploré doit s’écrier : « Vous couriez bien, qui est-ce qui vous a arrêtés pour que vous n’obéissiez pas à la vérité ? » (verset 7). Hélas ! ils avaient détourné leurs oreilles de la vérité et s’étaient tournés vers les faux docteurs ; ils s’étaient laissés persuader par eux (verset 8).

Mais « un peu de levain fait lever la pâte tout entière » (verset 9). L’apôtre rappelle aux Corinthiens cette sérieuse vérité par les mêmes paroles : « Ne savez-vous pas qu’un peu de levain fait lever la pâte tout entière ? » (1 Corinthiens chapitre 5 verset 6). Qu’est-ce que cela veut dire ? Que la pénétration de l’esprit légal au milieu des croyants ne doit pas être mise sur un autre pied qu’un manquement moral grave, qu’un péché tel qu’il n’existait pas même parmi les nations. L’un est du « levain » comme l’autre, l’un pénètre et fait lever toute la pâte de la même manière que l’autre. Nous avons peine à accepter cela ; mais après quelque réflexion nous reconnaîtrons que la fausse doctrine est, au fond, encore plus à craindre que l’immoralité manifeste, car celle-ci est déjà réprouvée par la conscience naturelle de l’homme, tandis que celle-là sait se parer du vêtement trompeur de l’innocence.

Il est à supposer que le lecteur sait que le levain, à cause de sa propriété de tout pénétrer, est toujours employé dans l’Écriture comme figure du mal, plus précisément du mal qui se répand. Que le lecteur compare des passages tels que les suivants : Exode chapitre 12 versets 15 et 19 ; chapitre 13 verset 7 ; chapitre 34 verset 25 ; Lévitique chapitre 2 verset 11 ; chapitre 10 verset 12 ; Matthieu chapitre 13 verset 33 ; chapitre 16 versets 6 et 12. Bien des commentateurs ont pensé que Matthieu chapitre 13 verset 33 est une exception à la règle générale, et que le levain représente là une chose bonne, l’évangile, qui peu à peu se répand dans tout le monde grâce à sa propriété de tout pénétrer ! Il est étonnant que cette interprétation ait pu se répandre si largement ; il semble qu’il n’est point besoin de beaucoup de sens spirituel pour la reconnaître comme absolument insoutenable.

Les Galates n’avaient pas connaissance de la première épître aux Corinthiens, si même elle avait déjà été écrite, ce qui n’est guère probable. Mais nous la connaissons, et le fait dont nous venons de parler, savoir que les mauvaises doctrines ont les mêmes effets destructifs et dévastateurs que le mal moral, lorsqu’elles sont tolérées au milieu des croyants, devrait nous donner à réfléchir et nous mettre sérieusement sur nos gardes quant à tout ce qui porte atteinte à la vérité divine, tout ce qui veut mélanger du levain à la fine fleur de farine. Bien que l’homme puisse en juger autrement que Dieu et déclarer l’immoralité le plus grand mal, Dieu aura raison à la fin. Les conséquences montreront toujours combien c’est un mal funeste que de prêter l’oreille au mensonge.

Et pourtant l’apôtre pouvait exprimer sa confiance à l’égard des Galates, « par le Seigneur ». S’il regardait à eux, il était, il est vrai, en perplexité, et craignait d’avoir travaillé pour eux en vain ; mais s’il dirigeait leurs yeux en haut et élevait son cœur vers le Seigneur, il reprenait confiance qu’ils n’auraient point d’autre pensée que ce qu’il leur avait écrit et enseigné (verset 10). Nous avons déjà plusieurs fois attiré l’attention sur l’intérêt qu’il y a à rechercher les sentiments intimes de l’apôtre et à discerner son profond souci de l’honneur de son Seigneur et du bien des croyants. La pensée que toute la gloire de l’œuvre de Christ en rédemption était mise en question par les faux docteurs lui fait dire ces paroles si sérieuses : « Celui qui vous trouble, quel qu’il soit, en portera le jugement ». Le Seigneur Lui-même leur en demandera compte.

« Mais moi, frères, si je prêche encore la circoncision, pourquoi suis-je encore persécuté ? — alors le scandale de la croix est anéanti » (verset 11). Il en sera toujours ainsi. Celui qui ajoute à l’évangile de Christ quoi que ce soit qui accorde une place à la chair, à l’activité de l’homme, sera considéré et sa prédication écoutée. L’inimitié des Juifs n’aurait certainement pas été si mortelle, leur haine et leurs persécutions si cruelles, si Paul avait ajouté à la prédication de la croix un petit quelque chose qui donne une place à l’homme et à sa religiosité. Mais être entièrement corrompu, n’être bon à rien, être mort dans ses fautes et dans ses péchés [Éphésiens chapitre 2 verset 1], être tombé sans espoir sous le jugement — et c’est là ce que proclame la croix de Christ — cela l’homme ne le veut pas ; cette prédication lui sera toujours en scandale. À l’inverse, il sera tout disposé à joindre une certaine mesure de grâce à son activité propre, à sa justice et à sa piété. Mais n’avoir rien pour se glorifier, devoir tout à la grâce de Dieu et rien qu’à la grâce, cela il le refuse. Il a en horreur le jugement de la croix qui l’anéantit.

L’inflexibilité de l’apôtre à cet égard, sa fidèle et inébranlable fermeté à garder « la vérité de l’évangile » (chapitre 2 verset 5), étaient donc la raison des souffrances et des persécutions auxquelles il était sans cesse exposé. S’il était entré dans les pensées des hommes, s’il avait eu quelque égard pour leurs désirs religieux, le scandale de la croix aurait été ôté ; mais cette concession, petite en apparence, aurait falsifié la vérité, et entièrement ébranlé les bases de la paix et de la croissance spirituelle des croyants. De là la sainte indignation de l’apôtre, l’extrême rigueur de l’exclamation par laquelle il termine le paragraphe qui nous occupe : « Je voudrais que ceux qui vous bouleversent se retranchassent même » (verset 12). Ces personnes, en prêchant la circoncision, provoquaient en réalité la « concision » (comparez Philippiens chapitre 3 verset 2). Ah ! si seulement ils voulaient se retrancher ou se mutiler eux-mêmes, ceux qui troublaient l’esprit des Galates et les poussaient à s’insurger contre l’apôtre et la vérité qu’il proclamait ! Il s’agissait en fait d’une œuvre manifeste de l’ennemi qui songe toujours à opposer une religion charnelle et une religion spirituelle, et qui peut toujours compter sur le succès, parce que cette dernière prononce sans égard l’arrêt de mort sur la chair.

Disons-le encore une fois : vouloir ajouter quelque chose à Christ et à Son œuvre signifie mettre l’homme et son activité à la place de Christ et de la croix, allier le vieil homme et le nouvel homme ; cela signifie, en d’autres termes, reconnaître à la chair le droit de rendre culte à Dieu et détruire l’évangile. La parole de la croix, l’unique mais parfaite rédemption par grâce, et seulement par grâce, restera toujours une pierre d’achoppement pour l’homme religieux, car elle le met de côté, lui et toute son activité, et détruit à la base la considération qu’il a de lui-même. Mais cette parole, occasion de chute pour l’homme légal, folie pour le sage, est et demeure « la puissance de Dieu et la sagesse de Dieu » pour ceux qui sont appelés. L’apôtre ne jugeait pas bon de savoir quoi que ce soit parmi les Corinthiens « sinon Jésus Christ, et Jésus Christ crucifié » [1 Corinthiens chapitre 2 verset 2].

Que Dieu accorde également aux croyants de nos jours de demeurer sans équivoque fidèles à cette parole, et de ne rien vouloir d’autre que Christ et Christ seul ! — Jésus Christ, « le même, hier, et aujourd’hui, et éternellement » [Hébreux chapitre 13 verset 8].

Chapitre 5 versets 13 à 26

Si la première moitié du chapitre nous a fait connaître la précieuse position dans laquelle nous avons été amenés par Christ, la seconde nous parle de l’application de cette vérité à notre marche pratique. « Car vous, frères, vous avez été appelés à la liberté ; seulement n’usez pas de la liberté comme d’une occasion pour la chair, mais, par amour, servez-vous l’un l’autre » (verset 13). La première déclaration : « Christ nous a placés dans la liberté en nous affranchissant » (verset 1), est générale et englobe tous les croyants. Tout aussi générale est cette seconde : « Frères, vous avez été appelés à la liberté ». De même qu’il n’y a plus de condamnation pour ceux qui sont dans le Christ Jésus, ainsi il n’y a plus de nécessité pour eux de marcher selon la chair. « Ceux qui sont selon l’Esprit » ont leurs pensées « aux choses de l’Esprit » (Romains chapitre 8 versets 1 à 5).

Remarquons qu’il ne s’agit pas ici de choses difficiles à saisir, pour la compréhension desquelles la maturité d’un « père en Christ » serait nécessaire, mais bien plutôt des premiers éléments du christianisme, de choses qui précisément avaient été enseignées par l’apôtre aux jeunes croyants de Galatie, encore peu expérimentés, et qu’il leur rappelait maintenant comme des vérités connues depuis longtemps. C’est eux que Christ avait affranchis, c’est à eux qu’il déclare : « vous avez été appelés à la liberté ». Affranchi de la loi du péché et de la mort, le croyant est appelé à ne plus se servir lui-même et ses penchants naturels, mais à servir les autres.

De jeunes croyants peuvent être profondément troublés en découvrant qu’après leur conversion le péché est encore en eux tout autant que par le passé, et être effrayés de ce que dans leur chair, après comme avant, il n’habite aucun bien. Persuadés que leur vie devrait dorénavant être consacrée à Christ, et désireux qu’il en soit ainsi, ils sont sérieusement affligés de Le servir, hélas ! encore si peu ; ils peuvent en arriver même à douter de la réalité de leur conversion. Mais tout cela montre seulement qu’ils n’ont pas encore appris les vérités qu’ils devraient connaître depuis longtemps, qu’ils ne savent pas même ce que signifie le baptême ; car par leur baptême pour la mort de Christ, ils ont manifesté qu’ils ont été identifiés avec leur Seigneur mort, enseveli et ressuscité, qu’ils ont été délivrés d’un corps de mort (Romains chapitre 7 verset 24) et qu’ils se tiennent maintenant devant Dieu comme des hommes nouveaux, comme des hommes « en Christ ».

« Appelés à la liberté » — parole apparemment facile à comprendre ; et pourtant elle cause, comme nous l’avons vu, de grandes difficultés à beaucoup de croyants. Bien qu’ils aient compris que tout est en ordre au sujet de leur justification, que Dieu les voit devant Lui comme des hommes justifiés et affranchis, ils ne connaissent encore que peu cet affranchissement quant à leur marche, dans leur vie journalière. Deux dangers résultent de ce manque d’intelligence : ou bien de tels croyants — et c’est habituellement le cas lorsque la conscience est éveillée — tendent à se placer sous des exigences légales et des restrictions de toutes sortes ; ou bien — si la conscience est peu exercée — ils se laissent aller à une certaine latitude : puisqu’ils sont sauvés, ils se considèrent comme libres de céder occasionnellement aux penchants naturels qui existent en eux, de faire des yeux doux au monde, et ils reculent constamment les limites de ce qu’ils estiment permis. Dans les deux cas, si opposés qu’ils puissent paraître, le résultat est le même : la vraie sanctification pratique en souffre.

Que le cœur humain est méchant et pervers ! Lorsque Dieu veut faire don aux hommes de la justice par grâce, l’homme voudrait l’acquérir par sa propre force, voudrait mettre sa justice à la place, ou tout au moins à côté, de celle de Dieu. Et d’autre part, quand Dieu appelle le croyant à la liberté, l’homme veut l’employer « comme occasion pour la chair », s’en servir pour lâcher la bride à la chair et même, comme Pierre l’exprime, l’avoir « pour voile de la méchanceté » (1 Pierre chapitre 2 verset 16).

L’apôtre a traité le premier de ces dangers dans la première partie de notre chapitre ; il met maintenant très solennellement en garde contre le second : « N’usez pas de la liberté comme d’une occasion pour la chair, mais, par amour, servez-vous l’un l’autre ». Car en quoi consiste cette liberté ? Faire ce que bon nous semble, ce qui plaît à la chair ? Ce ne serait certainement pas la liberté, mais une grossière licence. « Quoi donc ! » demande l’apôtre en Romains chapitre 6 verset 15, « pécherions-nous, parce que nous ne sommes pas sous la loi, mais sous la grâce ? — Qu’ainsi n’advienne ! ». Que dans Sa grâce Dieu nous garde d’une si terrible conclusion ! Comme aussi de celle-ci qui lui ressemble : « Demeurerions-nous dans le péché afin que la grâce abonde ? ». Les deux questions nous montrent de nouveau de quoi sont capables nos pauvres cœurs. Non, la liberté du croyant consiste à ne plus être obligé de faire ce qui plaît à la chair, ce à quoi Satan, le péché et le monde veulent nous inciter, mais à pouvoir faire ce qui caractérise le nouvel homme, ce qui est de Christ, et ce par quoi Dieu est glorifié. C’est à cette liberté que nous sommes appelés.

En vérité cet appel ne conduit pas à l’insouciance et à la légèreté, mais à la justice et à la sainteté pratiques ; non pas à l’égoïsme et à l’insensibilité, mais à l’amour désintéressé par lequel la foi opère, comme nous l’avons vu au verset 6. Hélas ! quels résultats tout différents s’étaient montrés chez les Galates ! Au lieu de se servir l’un l’autre par amour et d’accomplir ainsi toute la loi (versets 13 et 14), ils s’étaient mordus et dévorés l’un l’autre (verset 15) ! Les uns qui voulaient se placer sous des ordonnances légales, avaient attaqué les autres ; ces derniers à leur tour, pour s’opposer à ce penchant, laissant peut-être même parler une liberté charnelle, les avaient sévèrement condamnés. C’est ainsi que « de la jalousie et un esprit de querelle » s’étaient élevés au milieu d’eux et ils devaient prendre garde que cela n’aboutisse pas à un complet « désordre » (Jacques chapitre 3 verset 16). « Prenez garde que vous ne soyez consumés l’un par l’autre » s’écrie l’apôtre avec douleur.

Sa parole d’avertissement était bien à l’intention des deux parties, mais sans doute surtout à ceux d’entre eux qui étaient légaux. Car si vraiment une tendance charnelle s’était manifestée parmi eux, un service franc dans l’amour fraternel aurait peut-être obvié au mal et ramené les égarés. Mais cet amour, qui ne cherche pas son propre intérêt, qui ne se laisse pas irriter [1 Corinthiens chapitre 13 verset 5], qui édifie, mais ne détruit jamais, avait manqué des deux côtés. Ce n’est pas l’Esprit qui les avait conduits, mais la chair.

« Mais je dis : Marchez par l’Esprit, et vous n’accomplirez point la convoitise de la chair » (verset 16). C’est le Saint Esprit qui les avait tous tirés un jour de leur triste état d’éloignement de Dieu et qui avait opéré en eux une vie nouvelle, une nouvelle nature. Ce même Esprit s’efforçait maintenant de produire en eux les manifestations bénies de cette nouvelle nature, la justice pratique et la sainteté. La force d’accomplir une course qui honore Dieu ne se trouvait ni en eux, ni dans la loi, si bonne et juste qu’elle fût en elle-même. Les convoitises de la chair sont une puissance contre laquelle les plus saints commandements et les meilleures résolutions luttent en vain. Une « marche par l’Esprit » — une marche sous la direction et dans la puissance de l’Esprit — est la seule possibilité de renier ces convoitises, de les tenir pratiquement dans la mort.

« Car la chair convoite contre l’Esprit, et l’Esprit contre la chair ; et ces choses sont opposées l’une à l’autre, afin que vous ne pratiquiez pas les choses que vous voudriez » (verset 17). Par ces paroles l’apôtre montre aux Galates, et à nous en même temps, le chemin dans lequel le croyant peut marcher à la gloire de Dieu, libre de la loi (chapitre 3), libre du péché (chapitre 5), libre du monde (chapitre 6), en un mot comme libre (1 Pierre chapitre 2 verset 16). C’est là que réside la force pour une marche digne de Christ, en pureté et en sainteté. Habitant personnellement dans le croyant, l’Esprit est et agit maintenant en opposition directe et permanente avec la chair. Aussi longtemps que le croyant est encore dans ce corps, la chair et l’Esprit sont en lui comme deux puissances hostiles qui sont en lutte continuelle l’une avec l’autre, convoitant l’une contre l’autre, comme l’apôtre l’exprime ; ce que veut l’une, l’autre le hait, et ce que l’une rejette, l’autre le pratique. Si l’une aime le péché et l’impureté, et suit la convoitise de la nature humaine déchue, l’autre aspire à la pureté et à la sainteté, et manifeste les caractères de la nature de Dieu. Il s’agit maintenant de savoir laquelle de ces deux puissances nous suivons, et si c’est à la chair ou à l’Esprit que nous permettons d’agir. Ces deux puissances luttent pour dominer en nous, pour que nous ne pratiquions pas les choses que nous voudrions ; car si l’Esprit nous conduit à pratiquer ce qui est de l’Esprit, la chair fait valoir ses objections, et si nous laissons place à la chair, l’Esprit nous exhorte et nous avertit. Les deux ne peuvent jamais aller la main dans la main.

Que devaient donc faire les Galates ? Que leur disait leur propre conscience, que leur disait l’Esprit qui habitait en eux ? Devaient-ils suivre la chair ? Certainement pas ! Ils devaient marcher par l’Esprit. S’ils le faisaient, ils n’accompliraient jamais la convoitise de la chair. Car, ajoute l’apôtre, « si vous êtes conduits par l’Esprit, vous n’êtes pas sous la loi » (verset 18). Si le croyant était de nouveau placé sous une loi, sous des commandements qui du dehors lui imposeraient des exigences, son cas serait désespéré ; mais l’Esprit lui est donné, une personne divine dont la force opère au-dedans de lui. Elle s’unit aux désirs et aux penchants du nouvel homme, elle éveille l’amour dans le cœur, fortifie le désir de tout ce qui est bien, et donne la force nécessaire pour résister à tout ce qui vient de la chair. Ainsi donc, au lieu d’employer la liberté à laquelle il est appelé comme une occasion pour la chair de vivre et de se plaire à elle-même, le croyant l’utilisera bien plutôt à servir les autres dans un amour désintéressé, et ainsi il accomplira « la juste exigence de la loi » (Romains chapitre 8 verset 4).

Jacques parle dans son épître d’une loi de la liberté et l’appelle la loi « parfaite ». Il déclare bienheureux dans son faire « celui qui aura regardé de près… et qui aura persévéré » dans cette loi, n’étant pas seulement un auditeur de la Parole mais un faiseur d’œuvre (Jacques chapitre 1 verset 25). Pour un tel croyant les commandements du Seigneur ne sont pas un fardeau ni un joug pesant, ils sont au contraire en plein accord avec les désirs de son cœur. Il les aime, son plaisir est de marcher en eux. Ceux qui sont conduits par l’Esprit ne sont pas sous la loi (verset 18). Comme l’apôtre le dit plus loin, c’est justement en eux que « la loi du Christ » est accomplie, et sur tous « ceux qui marcheront selon cette règle » il appelle la paix et la miséricorde (chapitre 6 versets 2 et 16).

Merveilleuses paroles de grâce et de vérité ! Nous avons tous appris par de pénibles expériences que, si même nous désirons marcher par l’Esprit, nous sommes toujours en dessous de la mesure et, comme le dit Jacques, « nous faillissons tous à plusieurs égards » (chapitre 3 verset 2). Nous savons aussi que celui qui dit qu’il n’a pas de péché se séduit lui-même — la vérité n’est pas en lui (1 Jean chapitre 1 verset 8). C’est que la perfection n’est pas encore venue. De même que notre connaissance et notre discernement sont limités, nous ne pratiquons et ne réalisons les choses qu’en partie, aussi longtemps que nous sommes dans ce corps. Mais la miséricorde et la grâce sont avec nous tout aussi longtemps. L’Esprit de Dieu ne manquera pas de nous avertir lorsque l’orgueil, la vanité, l’amour-propre, la négligence ou d’autres choses semblables voudront se faire valoir. Notre Père dans le ciel s’occupe de nous, Ses bien-aimés enfants qui s’égarent, sympathise avec nous dans notre lutte contre le mal, nous discipline et nous enseigne, pour nous instruire et nous faire participer à Sa sainteté [Hébreux chapitre 12 verset 10]. Notre grand souverain sacrificateur intercède constamment pour nous, prie pour nous afin que notre foi ne défaille pas [Luc chapitre 22 verset 32], et nous lave les pieds [Jean chapitre 13 verset 5] lorsque nous les avons souillés. La grâce et la miséricorde nous entourent, la bonté et la gratuité nous suivent tous les jours de notre vie [Psaume 23 verset 6]. Il se peut que nous ayons à être conduits parfois par de profonds exercices, comme Jacob et Job, deux croyants de l’Ancien Testament, bien différents l’un de l’autre, afin de découvrir les mauvaises racines cachées en nous, mais « la fin du Seigneur » [Jacques chapitre 5 verset 11] envers nous sera toujours glorieuse.

Il est évident que les œuvres manifestes de la chair — et l’apôtre en énumère quatre fois quatre dans les versets qui suivent — ne peuvent s’allier à cette marche par l’Esprit, bien qu’elle reste toujours imparfaite. Ceux qui vivent dans les choses aussi grossières que la fornication, l’impureté, l’impudicité, l’idolâtrie, la magie, les meurtres, les ivrogneries et les choses semblables, certainement « n’hériteront pas du royaume de Dieu » (verset 21). L’apôtre le leur avait déjà dit précédemment en les avertissant, et il le leur répète encore une fois ici. Si même ces personnes font profession de christianisme, elles prouvent clairement qu’elles sont encore dans la chair (Romains chapitre 8 verset 8). Leurs péchés « sont manifestes d’avance et vont devant pour le jugement » (1 Timothée chapitre 5 verset 24).

Il était vraiment sérieux pour les Galates que l’apôtre mentionnât parmi les œuvres de la chair des choses qui s’étaient manifestées parmi eux, bien qu’il ne se fût pas agi des formes les plus grossières du mal. Les querelles, les jalousies, les colères, les intrigues, les divisions, les sectes et les envies ne pouvaient pas être inconnues à des gens qui se mordaient et se dévoraient l’un l’autre. Mais dans l’assurance confiante que l’exhortation toucherait leurs cœurs et leurs consciences, et leur montrerait où leur infidélité les avait déjà conduits, Paul énumère maintenant trois fois trois fruits précieux de l’Esprit qui, comme il l’espère, se montreraient aussi parmi eux.

« Le fruit de l’Esprit » — remarquons déjà le contraste frappant entre les deux expressions : « les œuvres de la chair » et « le fruit de l’Esprit » — « est l’amour, la joie, la paix, la longanimité, la bienveillance, la bonté, la fidélité, la douceur, la tempérance : contre de telles choses, il n’y a pas de loi » (versets 22 et 23). En vérité, la loi non seulement n’a rien à ajouter à de telles choses, mais encore elle est elle-même incapable de les produire. En regard de ces choses elle ne peut être, si je puis m’exprimer ainsi, que honteuse et réduite au silence. En premier lieu nous trouvons ici « l’amour », qui ailleurs est appelé « la somme de la loi » parce qu’il ne fait point de mal au prochain, accomplissant ainsi la loi (Romains chapitre 13 verset 10). À l’amour font suite la joie, la paix, la longanimité, la bienveillance, la bonté, la fidélité — toutes qualités aimables de la nouvelle nature, fruits délicieux de l’Esprit Saint qui opère en elle. Cette belle série se termine par « la douceur et la tempérance », c’est-à-dire par les deux qualités qui, d’une part, nous rendent aptes à nos relations avec notre entourage et, d’autre part, nous mettent en état de brider notre volonté par une sérieuse discipline de nous-mêmes, et d’être ainsi comme « une lettre de Christ » connue et lue de tous les hommes [2 Corinthiens chapitre 3 verset 2].

« Or ceux qui sont du Christ ont crucifié la chair avec les passions et les convoitises » (verset 24). L’apôtre craint-il que la déclaration : « contre de telles choses, il n’y a pas de loi » (verset 23) puisse donner lieu à un malentendu et que la chair l’exploite à son avantage ? Nous savons bien de quelles fausses conclusions et déductions la chair est capable. Ou bien veut-il seulement rappeler aux Galates, comme à la fin du chapitre 3, que tous ceux qui sont du Christ ont rompu pour toujours avec ce qui est ancien et se trouvent maintenant à tous égards sur un nouveau terrain ?

« Or ceux qui sont du Christ » — c’est-à-dire tous ceux qui ont cru en Christ et sont maintenant unis à Lui par l’Esprit, tous, sans exception et sans différence — « ont crucifié la chair » (verset 24). Plus d’un pensera en entendant de telles paroles : Combien cela est grand et magnifique ! mais ajoutera en soupirant : Si seulement je pouvais le dire de moi ! Et pourtant il ne s’agit pas là d’une vérité qui se trouve à la fin du chemin d’un croyant, de quelque chose qu’il atteindra peut-être après bien des années en croissant et en mûrissant peu à peu, ou bien qu’il n’atteindra peut-être jamais, mais il s’agit d’un fait par lequel commence son chemin de chrétien. Lorsque par la foi il a accepté Christ, le crucifié, il a crucifié la chair avec les passions et les convoitises, c’est-à-dire qu’il a prononcé l’arrêt de mort sur ces choses.

C’est dans la mort de Christ que cette crucifixion a eu lieu, et le croyant l’a reconnue comme inévitablement nécessaire et juste. Le « petit enfant en Christ » l’a fait, non pas, il est vrai, en comprenant toute la portée de ce qui a eu lieu, mais cependant en réalité. Quiconque est du Christ a crucifié la chair avec ses passions et ses convoitises. L’un ou l’autre de nos lecteurs dira peut-être : « J’ai cru jusqu’ici que je devais crucifier la chair chaque jour ». Non, vous dit la Parole, et à elle seule appartient la décision dans cette question comme dans toute autre, vous l’avez fait ; ce qui vous reste à faire maintenant c’est de vous rappeler constamment ce fait par la foi et de marcher dans sa réalisation pratique. Pourrait-il en somme y avoir quelque chose de plus précieux et de plus consolant que la conscience de ce fait : la chair est crucifiée, l’arrêt de mort a été exécuté sur elle ? Nous sommes « dans l’Esprit », et non plus « dans la chair » (Romains chapitre 8 verset 9).

C’est pourquoi au verset suivant l’apôtre en vient à la conclusion naturelle et logique : « Si nous vivons par l’Esprit, marchons aussi par l’Esprit ». Il ne dit pas : « N’accomplissons plus les convoitises de la chair ». Plus élevée, infiniment plus élevée est la mesure du croyant, la règle de sa vie. Elle s’énonce ainsi : « Marchons par l’Esprit » ! Il va sans dire que nous ne suivrons plus les convoitises de la chair et que nous ne servirons plus ses passions et ses désirs, car l’Esprit convoite contre la chair et lui est opposé ; mais notre passage va beaucoup plus loin. Une marche par l’Esprit de Dieu n’a pas seulement un résultat négatif, en ce sens que toutes les anciennes et mauvaises manifestations ne se trouveront plus en elles, mais elle a aussi un résultat positif, c’est-à-dire que dorénavant tout s’accomplira sous la direction et dans la puissance de ce bon Esprit. À l’avenir Sa pensée caractérisera toute la vie, soit dans les paroles soit dans la marche.

Ah ! si tous nous saisissions et réalisions mieux, par la foi, où la croix de Christ nous a placés, où Sa mort nous a conduits ! Une marche par l’Esprit est une marche « en nouveauté de vie » [Romains chapitre 6 verset 4], qui nécessairement ne met plus en évidence l’image horrible d’hommes naturels « désireux de vaine gloire », se « provoquant les uns les autres » et se « portant envie les uns aux autres » (verset 26), mais façonne en nous l’image de Celui qui est « débonnaire et humble de cœur » [Matthieu chapitre 11 verset 29]. L’Esprit s’efforce constamment de placer Christ devant nos yeux et, si nous Le laissons agir librement, si nous vivons pratiquement par Lui, nous ne chercherons pas à nous plaire à nous-mêmes, mais nos efforts tendront au privilège de glorifier Christ dans une vie d’obéissance et de dépendance de Dieu.

Répétons-le : « Si nous vivons par l’Esprit, marchons aussi par l’Esprit ! ». Si la première chose est vraie de nous, et elle l’est, Dieu soit loué, la seconde devrait aussi, et toujours plus, devenir une réalité pour nous.

Chapitre 6 versets 1 à 10

De même qu’à la fin de l’épître aux Romains (chapitre 15 versets 1 à 3), l’apôtre exhorte « les forts » à porter les infirmités des faibles, et à ne pas se plaire à eux-mêmes, il s’adresse ici au cœur et à la conscience de ceux qui sont « spirituels » pour leur rappeler leur devoir d’amour envers leurs frères. L’exhortation s’adresse à tous : « vous qui êtes spirituels ». Méritaient-ils tous cette qualification ? Chacun pouvait répondre pour lui-même. On est continuellement amené à ressentir combien la Parole est sérieuse et combien elle sonde ! En vérité « les paroles de l’Éternel sont… un argent affiné dans le creuset de terre, coulé sept fois » (Psaume 12 verset 6) ! C’est ce que le début de notre chapitre montre une fois de plus.

« Frères, quand même un homme s’est laissé surprendre par quelque faute, vous qui êtes spirituels, redressez un tel homme dans un esprit de douceur, prenant garde à toi-même, de peur que toi aussi tu ne sois tenté » (verset 1). « Quand même un homme s’est laissé surprendre » ! Il n’est donc pas supposé que le croyant pèche ; mais si cela devait arriver, si une fois le cas devait se produire, qu’un homme — remarquons l’expression : un homme, une faible créature encline à manquer — s’oublie et se laisse surprendre par quelque faute, « redressez un tel homme ». C’est comme en 1 Jean chapitre 2 verset 1. Là comme ici, il n’est pas supposé que le croyant doive pécher ou commettre des faux pas. Au contraire, Jean écrit à ses enfants afin qu’ils ne pèchent pas, et Paul dit à ses frères : « Marchez par l’Esprit, et vous n’accomplirez point (en aucune manière) la convoitise de la chair ».

Mais qui sont ceux qui sont appelés « spirituels » ? Tous ceux qui sont nés de Dieu portent ce caractère, s’il s’agit de leur position et de leur appel. Mais se montrent-ils tous pratiquement des hommes « spirituels » dans leur marche et leurs paroles, marchent-ils tous « par l’Esprit » ? — c’est une autre question. Ils le devraient tous, ils devraient tous être « spirituels » et cela d’autant plus s’ils sont depuis plus de temps dans le chemin chrétien. Mais nous savons trop bien que la réalité ne correspond pas toujours à ce qui est supposé être, ni à ce qu’on pourrait attendre. Être « spirituel » ne dépend pas tant de la mesure de connaissance spirituelle, tout importante et appréciable qu’elle soit, que de l’état intérieur du cœur, de la mesure dans laquelle nous sommes dirigés, dans toutes nos pensées et nos activités, par la puissance de l’Esprit qui nous instruit et nous sanctifie.

L’apôtre s’adresse ainsi à tous ; mais, alors comme aujourd’hui, seuls ceux qui sont vraiment spirituels sont à même de suivre son exhortation et encore ne sont-ils aptes à le faire que dans la mesure de croissance intérieure atteinte sous ce rapport. Nous ne voulons pas l’oublier. Si sacré que soit le devoir et si grand que soit le privilège de redresser un frère ou une sœur qui ont manqué, il faut pour cela une grâce particulière. Il semblerait naturel que les croyants les plus âgés soient les plus appelés à ce service ; mais si importants que soient l’âge et l’expérience dans ce cas comme dans bien d’autres, ils ne suffisent pas à eux seuls.

Ce qui caractérise sans équivoque un chrétien vraiment spirituel, c’est une « marche avec Dieu », c’est-à-dire une vie dans la lumière, dans la condamnation habituelle du mal en lui-même, dans le jugement sans ménagement du moi et, ce qui est nécessairement lié à cela, dans la conscience qu’il a besoin de la grâce à chaque pas, et qu’il ne peut vivre que par la grâce. On pourrait penser qu’un tel chrétien sera un juge sans aucun égard, toujours prêt à condamner le mal qu’il constatera chez un autre. Mais l’expérience montre le contraire, et il ne pourrait en être autrement. C’est précisément le jugement continuel de soi-même qui rend le croyant capable de juger avec indulgence les manquements d’autrui ; n’userait-il pas de grâce, lui qui chaque jour et à chaque heure réalise qu’il est l’objet de tant de grâce ? Non pas qu’il minimise ou excuse le mal chez son frère ; au contraire, il lui est très douloureux de le constater là, car il sait combien le Seigneur est ainsi déshonoré et que, d’autre part, l’heureuse communion d’une telle âme avec Dieu est rendue impossible. Mais ses propres expériences le rendent apte à rencontrer son prochain dans « un esprit de douceur » et à lui être utile. Ayant appris à connaître la corruption de son propre « moi », il sait combien il a besoin de prendre garde à lui-même de peur que lui aussi ne soit tenté et ne tombe.

Après avoir tellement entendu parler de loi dans les chapitres précédents et avoir été exhortés à ne pas nous laisser placer sous un joug légal, quelle qu’en soit la forme, nous pourrions être étonnés qu’il soit néanmoins question, dans le deuxième verset de ce chapitre, d’une loi que nous avons à accomplir : « Portez les charges les uns des autres, et ainsi accomplissez la loi du Christ ». L’apôtre dit en quelque sorte : Vous parlez tellement de loi ; si donc vous voulez absolument une loi, en voici une : « accomplissez la loi du Christ ». Une loi est une règle, une ligne de conduite. Eh bien, la règle de toute la vie de Christ, ce qui Le dirigeait ici-bas, c’était de servir les autres. Il trouvait Sa joie à prendre leurs fardeaux sur Lui. Faisons de même ! Outre bien des tentations à pécher, la vie comporte des difficultés, des épreuves et des peines de toutes sortes ; autant de choses qui pèsent comme de lourdes charges sur le cœur et l’esprit, surtout de ceux qui sont faibles dans la foi. Il y a là d’abondantes occasions de prouver notre amour et notre empressement à servir. Mais si nous voulons le faire, nous devons nous courber et ne pas épargner nos épaules. La loi du Sinaï n’avait pas une telle exigence, car elle était donnée à l’homme dans la chair ; mais c’est de cette manière que « l’homme spirituel » accomplit la « loi du Christ ». Quel vaste champ s’ouvre là à notre activité !

Comme nous l’avons déjà fait remarquer, il faut, pour accomplir cette loi, un esprit humble, un cœur soumis et rempli des sentiments qui animaient Christ. « Car si, n’étant rien, quelqu’un pense être quelque chose, il se séduit lui-même » (verset 3). L’homme religieux se donne volontiers de la peine pour servir les autres, mais porter humblement les charges d’un autre, dans l’amour de Christ, cela il ne le peut pas. L’amour et les sentiments de Christ lui sont étrangers et, au lieu de prendre les charges des autres sur lui, il préfère en mettre sur eux. Il en était ainsi, au temps du Seigneur, des pharisiens et des scribes zélés pour la loi ; il en est de même aujourd’hui de toute religion légale ou, ce qui revient au même, de toute religion humaine. Sur un tel terrain on se plaît à donner des aumônes, à faire des bonnes œuvres, à mettre son nom en tête des listes de collectes pour les pauvres et les malades, pour les missions dans le pays ou à l’étranger. Suivant les circonstances, on sera même disposé à d’importants sacrifices pour les diverses formes d’activité en faveur du prochain ; mais, en faisant cela en vue d’avoir l’approbation des hommes, en pensant être quelque chose, on se trompe sur soi-même. Devant Dieu on n’est rien, et ce prétendu service religieux est vain. Remarquons cependant que l’apôtre n’écrit pas à de simples professants, mais à de vrais croyants ; eux aussi sont donc exposés au danger de se croire quelque chose, de se rechercher eux-mêmes. Mais combien cela est laid, et combien méprisable ! Les paroles de l’apôtre sont simples, mais d’autant plus significatives et incisives : Celui qui, « n’étant rienpense être quelque chose ». Puissent-elles se graver profondément dans nos cœurs !

« Mais que chacun éprouve sa propre œuvre, et alors il aura de quoi se glorifier, relativement à lui-même seulement et non relativement à autrui » (verset 4). Encore un principe important ! Si j’éprouve ma propre œuvre à la lumière de Dieu, le danger ne sera pas grand de me glorifier de moi-même, ou de mes actes. D’une part je verrai constamment mon insuffisance, et d’autre part il y aura pour moi assez de gloire qu’il m’ait été permis de faire quelque chose pour le Seigneur. Mais que faisaient ces docteurs de la loi en Galatie ? Il ne leur suffisait pas de se complaire dans leur qualité de Juifs, ils se glorifiaient aussi de ceux qui, suivant leurs enseignements, se laissaient de nouveau assujettir au joug de la loi. Au lieu de porter les charges des autres, ils plaçaient des charges sur eux ! Quel triste travail ! Ils s’étaient introduits dans le champ d’un autre ouvrier et cherchaient à détruire les fruits de son œuvre. En réalité, ils ne travaillaient pas pour le Seigneur et Son honneur, mais pour eux-mêmes et leur propre gloire.

Combien différent avait été le travail de l’apôtre, et avec quel beau résultat ! Avoir conduit des âmes à Christ, telle était sa gloire. Aussi pouvait-il regarder tranquillement vers l’avenir et penser à la fin de toutes choses. « Chacun portera son propre fardeau » (verset 5). Nous avons tous affaire avec Dieu. Chacun de nous devra une fois rendre compte pour lui-même à Dieu (Romains chapitre 14 verset 12). Ce n’est pas que le croyant puisse jamais être jugé pour ses péchés ; Christ a été à cet effet sous le jugement de Golgotha, une fois pour toutes ; mais nous comparaîtrons tous devant le tribunal de Dieu, un jour nous serons tous manifestés, pour voir toute notre vie de croyants à la lumière de ce tribunal. Alors « chacun recevra sa propre récompense selon son propre travail » — « chacun recevra sa louange de la part de Dieu » (1 Corinthiens chapitre 3 verset 8 et chapitre 4 verset 5). Alors il sera vu comment chacun de nous aura répondu à sa responsabilité de croyant, de serviteur de Christ, mais aussi comment tout ce que nous aurons pu faire ici-bas pour notre Seigneur a été exclusivement un effet de Sa grâce. Combien cette pensée devrait nous stimuler à être vigilants, abondant toujours dans l’œuvre du Seigneur [1 Corinthiens chapitre 15 verset 58] ! Combien nous devrions nous efforcer de Lui être agréables à Sa venue !

Dans le verset suivant, Paul rappelle à ces croyants galates un devoir dont il parle à plusieurs reprises dans d’autres épîtres, et dans l’accomplissement duquel ils étaient peut-être devenus négligents : « Que celui qui est enseigné dans la parole fasse participer à tous les biens temporels celui qui enseigne ». Tout ouvrier du Seigneur, où qu’il travaille, est digne de son salaire, et c’est le privilège des croyants de soutenir, dans leur travail et de toute manière, tous ceux que le Seigneur envoie, que ce soit au près ou au loin, selon qu’ils en ont besoin et dans la mesure du possible. Le regard plein d’amour du Seigneur repose sur tous Ses serviteurs et aucun service d’amour envers eux n’échappe à ce regard. Aucun ne restera sans récompense. Paul lui-même appelle un don qu’il avait reçu des Philippiens « un parfum de bonne odeur, un sacrifice acceptable, agréable à Dieu » (Philippiens chapitre 4 verset 18).

« Ne soyez pas séduits ; on ne se moque pas de Dieu ; car ce qu’un homme sème, cela aussi il le moissonnera » (verset 7). Ce n’est pas impunément que l’on professe le christianisme, que l’on parle de grâce, tout en marchant selon la chair. Le Dieu que nous invoquons comme Père est le Dieu trois fois saint, « Celui qui, sans acception de personnes, juge selon l’œuvre de chacun » (1 Pierre chapitre 1 verset 17). Qui osera se moquer de Lui en professant être un enfant de Dieu, posséder le Saint Esprit, tout en suivant sa propre volonté et en servant la chair ? Les sérieuses conséquences ne peuvent tarder à venir. Telle la semence, telle la moisson. Ce qu’un homme sème, il faut qu’il le moissonne. « Car celui qui sème pour sa propre chair moissonnera de la chair la corruption ; mais celui qui sème pour l’Esprit moissonnera de l’Esprit la vie éternelle » (verset 8). Les principes sacrés du gouvernement de Dieu sont irrévocables.

Nous rencontrons une parole semblable en Romains chapitre 8 verset 13. « Si vous vivez selon la chair, vous mourrez ». Elle est adressée à des croyants, exactement comme celle qui est devant nous. De la chair, il ne peut être récolté que mort et corruption. Si un homme qui professe croire en Christ s’engage dans les chemins de la chair, sème pour la chair, la Parole l’avertit : la fin de ton chemin c’est la mort, c’est la perdition ! Celui qui ne demeure pas fondé et ferme dans la foi, qui se laisse détourner de l’espérance de l’évangile (Colossiens chapitre 1 verset 23), qui, en d’autres termes, ne persévère pas dans le chemin, mais retourne à ce qu’il avait professé avoir abandonné, n’atteindra pas le but, ne recevra pas la fin de la foi, le salut de l’âme (1 Pierre chapitre 1 verset 9).

Peut-être que l’un ou l’autre de nos lecteurs demandera en secouant la tête : Comment dois-je comprendre cela ? Mon salut éternel dépend-il donc en définitive de moi, de ma conduite ? La vie éternelle n’est-elle plus le don libre et immérité de Dieu, qu’aucune puissance du monde ou de l’enfer ne peut me ravir ?

On dit avec raison, quant aux choses temporelles : Chaque médaille a son revers. Il en est de même quant aux choses éternelles ou spirituelles, elles ont leur côté divin et leur côté humain. Lorsqu’il s’agit du côté de Dieu, tout est parfait, assuré pour l’éternité. Qui ou quoi pourrait ravir une âme sauvée de la main de Dieu, ou remettre en question l’œuvre de Christ, ou encore rendre son sacrifice inefficace ? Quelle puissance, hauteur ou profondeur pourrait « nous séparer de l’amour de Dieu, qui est dans le Christ Jésus, notre Seigneur » (Romains chapitre 8 verset 39) ? Là, il n’y a pas de « si », pas de doute, pas de condition. Dieu achèvera Son œuvre, accomplira Son conseil, malgré toute notre faiblesse et notre imperfection.

Mais voyons maintenant le côté de l’homme. Que dit la Parole à l’âme sauvée ? Lui dit-elle : Puisque tu es sauvée pour toujours, tu peux demeurer les bras croisés ; ne t’inquiète surtout pas, si même le péché est encore en toi et si le monde autour de toi est plein de dangers et de tentations : tout s’arrangera ? Non, elle dit au contraire, pour ne citer que quelques exemples : Veille et prie pour que tu n’entres pas en tentation [Matthieu chapitre 26 verset 41], conduis-toi avec crainte pendant le temps de ton séjour ici-bas [1 Pierre chapitre 1 verset 17], travaille à ton propre salut avec crainte et tremblement [Philippiens chapitre 2 verset 12], celui qui vaincra héritera de ces choses [Apocalypse chapitre 21 verset 7], celui qui persévérera jusqu’à la fin sera sauvé [Matthieu chapitre 24 verset 13]. Beaucoup d’autres déclarations semblables pourraient encore être citées, mais celles-ci suffisent à démontrer que, bien que nous soyons sauvés, nous ne trouverons l’entière béatitude, l’entier salut du corps, de l’âme et de l’esprit qu’à la fin du chemin de la foi ; bien que nous possédions déjà actuellement la vie éternelle dans le sens dont Jean en parle toujours, nous sommes en même temps en chemin vers la vie éternelle, et tous ceux qui sèment pour l’Esprit moissonneront de l’Esprit la vie éternelle. Accomplissant ici-bas avec simplicité et fidélité la volonté de Dieu, et étant gardés par la puissance de Dieu par la foi [1 Pierre chapitre 1 verset 5], ils trouveront là-haut cette vie éternelle.

Nous le répétons : là se retrouvera ce que nous aurons pu accomplir pendant notre pèlerinage, conduits par l’Esprit, à la gloire de notre Seigneur et pour le bien de ceux avec lesquels nous marchons. Rien ne sera oublié, rien ne restera sans récompense. Ainsi donc « ne nous lassons pas en faisant le bien, car, au temps propre, nous moissonnerons, si nous ne défaillons pas » (verset 9). De nouveau un « si », une condition, et notre volonté renouvelée, notre homme intérieur, y répond par : oui et amen. Le croyant fidèle désire ne pas défaillir, mais saisit avec joie chaque occasion de faire le bien, même s’il devait rencontrer plus d’une déception, plus d’une ingratitude. Il ne se laisse ni arrêter, ni irriter. Il va sans dire que son amour s’exerce et doit s’exercer surtout en faveur de « ceux de la maison de la foi », avec lesquels il est spécialement lié ; mais, dépassant le cercle des croyants, il cherche à faire du bien à tous les hommes, quelle que soit l’occasion et où qu’elle se présente.

Chapitre 6 versets 11 à 18

Paul termine sa lettre par un appel touchant aux sentiments des Galates : « Vous voyez quelle longue lettre je vous ai écrite de ma propre main » (verset 11). En considérant le chapitre 4, nous avons déjà rappelé que l’apôtre n’avait pas l’habitude d’écrire ses lettres lui-même ; nous disions aussi que la cause en était probablement une déficience de sa vue. Indépendamment de cela, il est important de remarquer que Paul n’a envoyé aucune de ses lettres inspirées sans l’avoir confirmée comme venant de lui, par des salutations écrites de sa propre main, ou par sa signature. Ce n’étaient pas des lettres ordinaires, comme les hommes en envoient à d’autres hommes, et comme il a pu en écrire lui-même ici et là ou en faire écrire par d’autres, mais c’étaient des manifestations de Dieu, des communications de Son Esprit, qu’Il adressait à des individus ou à des assemblées entières. En un mot, il s’agissait de révélations de Dieu à Ses enfants et à Son peuple — de « saintes lettres » inspirées de Dieu (2 Timothée chapitre 3 versets 15 et 16). L’importance de cette attestation saute aux yeux ; mais l’apôtre la relève encore d’une manière toute particulière à la fin de la seconde épître aux Thessaloniciens lorsqu’il dit : « La salutation, de la propre main de moi, Paul ; ce qui est le signe dans chaque lettre : ainsi j’écris » [2 Thessaloniciens chapitre 3 verset 17] (voir aussi 1 Corinthiens chapitre 16 verset 21). Remarquons en passant que, dans l’épître aux Romains, l’écrivain employé par Paul donne son nom : « Moi, Tertius, qui ai écrit la lettre » (chapitre 16 verset 22).

L’épître aux Galates est donc la seule que Paul ait écrite de sa propre main ; en même temps il rend les destinataires attentifs à la longue lettre qu’il leur avait écrite — ou, comme cela peut aussi être traduit, « avec quelles grandes lettres » il leur a écrit. Pourtant, comparée à plusieurs autres, cette épître devrait être appelée plutôt courte que longue. De quelque manière que l’on traduise ce passage, il indique en tout cas que l’apôtre a éprouvé des difficultés particulières à écrire cette épître. Mais son inquiétude quant aux assemblées de Galatie était si grande, il voyait si menaçant le danger que les fondements de la vérité soient renversés, qu’il ne s’épargnait aucune peine pour avertir les Galates de la manière la plus énergique possible. Il fallait qu’il leur écrive cette longue lettre et il fallait qu’il le fasse lui-même. Combien ce fait était propre « à réveiller leur pure intelligence » et, s’il y avait encore quelques sentiments d’amour dans leur cœur — et il s’en trouvait certainement encore — à stimuler ces sentiments, et à secouer tout leur être intérieur !

Quel contraste entre cet amour et cette fidélité et les sentiments des faux docteurs ! « Tous ceux qui veulent avoir une belle apparence dans la chair, ceux-là vous contraignent à être circoncis, seulement afin qu’ils ne soient pas persécutés à cause de la croix de Christ » (verset 12). Hélas ! le danger de vouloir une belle apparence dans la chair, de rechercher l’approbation des hommes, a été grand de tout temps. Combien vite la corruption a envahi l’église de Christ par cette voie-là, et combien terribles en ont été les conséquences ! Nous les voyons à leur comble effrayant dans la grande prostituée, l’église apostate, « Babylone », caricature satanique de la vraie Église, l’Épouse de l’Agneau (Apocalypse chapitre 17). Christ, notre Seigneur, a eu Sa place « hors du camp », et à ceux qui Le suivent fidèlement s’adresse l’exhortation : « Sortez du milieu d’elle (Babylone) ! » ou encore : « Sortons vers lui… portant son opprobre ! » (Apocalypse chapitre 18 verset 4 ; Hébreux chapitre 13 verset 13).

Mais ces docteurs juifs craignaient l’opprobre, ils ne voulaient pas être considérés comme les balayures du monde pour le nom de Christ. C’était la raison profonde pour laquelle ils contraignaient les Galates à être circoncis. Il n’était sans doute jamais venu à l’idée de ces derniers de discerner, dans ces hommes apparemment si zélés, les partisans d’une religion qui fût reconnue et estimée du monde, des hommes craignant la persécution ; ils n’avaient pas pensé à une telle chose. Il en était pourtant ainsi. Être Juif, être en relation avec Jérusalem, le grand centre d’une religion distinguée et vénérée pour son ancienneté, avec un temple somptueux, orné d’offrandes de toutes sortes (les disciples eux-mêmes avaient attiré l’attention du Seigneur sur ses bâtiments magnifiques : Marc chapitre 13 verset 1 ; Luc chapitre 21 verset 5) — il n’y avait pas de honte à cela et cela n’attirait pas de persécution de la part des hommes. Mais devenir les disciples d’un homme qui avait terminé Sa vie sur une croix, auquel Ses semblables avaient donné une place entre deux brigands, prêcher que dans ce crucifié seul se trouvait le salut et la délivrance — voilà ce qui provoquait l’opposition et le mépris de tout le monde respectable. En regard de cela, le judaïsme, une religion qui laissait place à l’homme et à son activité, en un mot à la chair, était vraiment sagesse !

La croix est le solennel point de séparation entre l’ancienne et la nouvelle création, entre la chair et l’Esprit. Elle prononce la sentence de mort sur l’homme dans la chair, qu’il soit religieux ou sans religion, honorable ou malhonnête ; elle donne le coup de grâce à sa prétendue piété et lui montre son entière incapacité et sa nudité devant Dieu. Pour cette raison, il ne pouvait y avoir de plus grande folie pour le Gentil et de plus grand scandale pour le Juif, que la croix. Si d’une part elle couvrait de honte la sagesse du monde, elle enlevait d’autre part tout avantage au Juif, si fier de la loi, des pères et de ses relations extérieures avec Dieu ; elle l’offensait encore beaucoup plus que le Gentil.

La croix met aussi en évidence dans toute sa netteté la ligne de démarcation qui existe entre le monde sous toutes ses formes, et les hommes qui appartiennent à la nouvelle création. Par elle le prince de ce monde a été entièrement défait, par elle un jugement sans ménagement a été prononcé sur le monde lui-même. Elle condamne non seulement le péché dans l’homme, mais aussi tout ce en quoi celui-ci se complaît et en quoi il cherche sa gloire. Nous l’avons déjà laissé entendre, l’homme religieux fera volontiers des sacrifices, même des sacrifices qui lui coûteront ; suivant les circonstances, il sera même prêt à laisser sa vie pour ses convictions, si seulement c’est lui qui le fait. Il n’y a rien de plus douloureux pour lui que de reconnaître qu’il n’est bon à rien, qu’il ne peut être sauvé et vivre que par grâce. Et c’est précisément la signification de la croix. Ce qui est précieux par-dessus tout pour le croyant, c’est-à-dire que le vieil homme a été jugé entièrement et a trouvé sa fin pour toujours dans la mort de Christ, cela, l’homme ne peut pas et ne veut pas l’accepter. Il hait un service religieux qui ne lui donne aucune gloire, mais lui apporte plutôt des souffrances et de l’opprobre.

Comme nous l’avons dit, ces séducteurs ne voulaient pas être persécutés à cause de la croix de Christ. C’est pourquoi ils contraignaient les Galates à joindre la circoncision à la croix. Et même, leurs motifs étaient encore plus vils. « Car ceux-là qui sont circoncis, eux-mêmes ne gardent pas la loi ; mais ils veulent que vous soyez circoncis, afin de se glorifier dans votre chair » (verset 13). Ceci nous rappelle une parole que le Seigneur adressa en son temps aux docteurs de la loi et aux pharisiens de Jérusalem : « Malheur à vous, scribes et pharisiens hypocrites ! car vous parcourez la mer et la terre pour faire un prosélyte » (Matthieu chapitre 23 verset 15). Il en était de même de ces gens. Ils voulaient se glorifier dans la chair des Galates, ils voulaient pouvoir dire qu’ils avaient fait tant et tant de prosélytes, qu’ils avaient converti tant et tant d’hommes à leur conviction ou leur religion ; et en même temps ils ne se souciaient nullement de garder toute la loi. L’observation de la circoncision ne devait servir qu’à détourner d’eux l’opprobre de la croix. Quelle absurdité ! Mais ne se passe-t-il pas aussi aujourd’hui assez souvent des choses semblables, bien que sous d’autres formes ?

Qu’en était-il de l’apôtre ? « Qu’il ne m’arrive pas à moi », dit-il, « de me glorifier, sinon en la croix de notre Seigneur Jésus Christ, par laquelle le monde m’est crucifié, et moi au monde » (verset 14). Si ces séducteurs cherchaient un chemin dans lequel ils pourraient se soustraire aux souffrances et finalement introduire le monde dans l’Église de Christ, lui se glorifiait en ce qui le séparait pour toujours du monde et qui séparait le monde de lui. Si précédemment il avait parlé de la croix comme libérant le croyant du joug de la loi et de la puissance du péché, il la considère ici comme la cloison inamovible entre lui et le monde. La croix a montré que dans le monde, même dans le monde honorable et religieux, malgré sa belle apparence, il n’y a que vanité et péché, culpabilité et révolte contre Dieu ; mais elle a aussi montré d’autre part ce qu’est Dieu dans Sa justice à l’égard du péché, et dans Son amour envers le pécheur. En même temps c’est là que l’œil de la foi considère Jésus, l’homme selon Dieu, dans Son humilité et Sa grâce, dans Son obéissance envers Dieu, et dans Sa parfaite consécration à Dieu et à l’œuvre qui Lui avait été donnée à faire. Et ce Jésus que le monde avait cloué sur la croix, Paul L’avait vu sur le chemin de Damas comme le Seigneur de gloire ! Est-il étonnant que dès lors il ne vît plus le monde qu’à la lumière de la croix ? Celui qui avait été pendu là était « son Seigneur Jésus Christ ». Il était tout pour lui, le monde ne lui était rien, moins que rien. Le monde lui était crucifié, il lui était mort et lui était mort au monde. Il est vrai qu’il vivait encore dans le monde, mais seulement pour le parcourir comme un étranger céleste, et pour se glorifier de la croix qui l’avait séparé de lui et placé dans le sentier dans lequel son Seigneur et Sauveur l’avait précédé. Avoir les sentiments qui furent les siens, marcher comme Lui avait marché, porter Son opprobre hors du camp, L’attendre, et loin de toute communion avec le monde, témoigner à celui-ci que Dieu, malgré son inimitié mortelle, l’avait tant aimé qu’Il avait donné Son Fils unique afin que quiconque croirait en Lui ait la vie éternelle [Jean chapitre 3 verset 16] — voilà ce qui remplissait le cœur et les pensées de cet homme, c’était là sa vie.

Crucifié avec Christ, il ne vivait plus, lui, mais Christ vivait en lui ; et ce qu’il vivait encore dans la chair, il le vivait dans la foi au Fils de Dieu qui l’avait aimé et s’était livré Lui-même pour lui (chapitre 2 verset 20). Quel homme heureux et digne d’envie ! Heureux aussi chacun de ceux qui suivent son exemple aujourd’hui, dans un temps où la tendance est grande de faire toujours plus de concessions au monde, que ce soit dans le domaine religieux, social ou politique !

« Car ni la circoncision, ni l’incirconcision ne sont rien, mais une nouvelle création » (verset 15). Une fois encore l’apôtre revient sur le fait qu’il a souvent souligné, que devant Dieu la circoncision et l’incirconcision sont absolument sans valeur ; elles ont en effet perdu toute signification dans la nouvelle création où nous avons été transportés. Là, tout est considéré d’un point de vue essentiellement différent, et évalué selon des normes entièrement nouvelles.

« Et à l’égard de tous ceux qui marcheront selon cette règle, paix et miséricorde sur eux et sur l’Israël de Dieu ! » (verset 16). La règle dont parle l’apôtre est la règle de la nouvelle création où l’homme précisément n’est rien, mais où Christ est tout. À tous ceux qui marchent selon cette règle, qu’ils soient circoncis ou incirconcis, il souhaite la paix et la miséricorde ; la paix du cœur et la miséricorde de la part de Dieu. Toutes deux ne manqueront pas sur le chemin de ceux qui marchent selon le Christ Jésus. En eux règne la paix, et Dieu abaisse Son regard sur eux avec une compassion paternelle.

L’adjonction « et sur l’Israël de Dieu » nécessite encore une courte explication. Au terme d’une telle épître, elle est particulièrement significative. À la fin du deuxième chapitre de l’épître aux Romains, Paul déclare que seul est Juif, selon les pensées de Dieu, celui qui l’est au-dedans et que la vraie circoncision est celle du cœur, en esprit, non pas dans la lettre. Dieu veut la réalité, tout ce qui est extérieur est sans valeur devant Lui. Celui donc, parmi les enfants d’Israël, qui avait reçu cette circoncision du cœur et qui, avec l’apôtre, se glorifiait en la croix de Christ, celui-ci appartenait à l’Israël de Dieu, le véritable Israël, qui ne se composait que de ceux qui par la foi étaient entrés dans une vraie relation vitale avec Christ. Toutefois, dans un sens plus large, tous les autres croyants faisaient aussi partie de cet Israël de Dieu, pour autant que leur marche selon la règle de la nouvelle création prouvât l’authenticité de leur foi.

À ce souhait de bénédiction sur eux, l’apôtre lie l’injonction : « Désormais que personne ne vienne me troubler, car moi je porte en mon corps les marques du Seigneur Jésus » (verset 17). Comme nous l’avons déjà remarqué dans l’introduction de notre épître, les faux docteurs avaient attaqué la personne et le ministère de l’apôtre et, au lieu de les repousser avec indignation, les Galates leur avaient prêté l’oreille. Il en était résulté beaucoup de peine pour cet homme fidèle. Et pourtant, il portait, aux yeux de tous, les marques du Seigneur Jésus en son corps. On sait que, dans ces temps anciens, on marquait au fer rouge sur les esclaves les initiales de leur maître ou un autre signe rappelant leur propriétaire. C’est ainsi que lui aussi portait partout, sur son corps, les initiales du nom de son maître. Oui, que de fois, au service de Jésus, il avait été emprisonné, flagellé, couvert de meurtrissures sanglantes, et même lapidé ; quelles peines et quels maux immenses il avait endurés, et qui avaient laissé leurs traces sur son corps ! Si quelqu’un s’était montré un fidèle serviteur de Christ, c’était bien lui. C’est pourquoi désormais personne ne devait mettre en doute son droit de se nommer ainsi.

Quelle condamnation sur les Galates et particulièrement sur ces gens qui cherchaient leur propre gloire et qui évitaient soigneusement tout chemin de souffrance ! Et, d’autre part, quel plaidoyer provenant d’un cœur aimant et profondément blessé ! Que de motifs cet homme avait donné aux Galates de lui être reconnaissants, « de se glorifier en lui » ! Et qu’avaient-ils fait à la place ?

On comprend que les paroles qui terminent cette épître, tout aimables qu’elles soient, n’aient pas la chaleur que nous trouvons dans d’autres épîtres. « Que la grâce de notre Seigneur Jésus Christ soit avec votre esprit, frères ! Amen ». Rien de plus. Les Galates étaient sauvés et pour cette raison, chers au Seigneur, quelque faible que fût leur état pratique. Aussi l’amour ne pouvait-il s’empêcher de les recommander à la grâce de ce Seigneur. Nous n’entendons aucune parole sévère, aucune menace, mais pas davantage de manifestation de chaleur, ou de sentiments jaillissant du fond du cœur. Nous chercherions aussi en vain des salutations affectueuses adressées individuellement à des frères ou à des sœurs. L’écrivain se trouve manifestement à l’étroit dans ses entrailles. Quelle intimité aurait-il pu avoir avec ceux qui annulaient la croix de Christ, ou en tout cas la laissaient annuler, avec ceux qui avaient abandonné le fondement de la grâce ? Il les aimait et accomplissait ici un devoir d’amour, mais rien de plus. C’est par la faute des Galates qu’il en était ainsi, et il était nécessaire qu’ils le ressentent. Quels dégâts le levain avait déjà faits au milieu d’eux ! Le comprendraient-ils ? L’apôtre l’espère, selon l’amour qui supporte tout, qui croit tout [1 Corinthiens chapitre 13 verset 7], et c’est ainsi qu’il les recommande à la grâce du Seigneur qui seule pouvait amener un changement. Il avait encore confiance « dans le Seigneur » à leur égard, mais seulement en Lui.

Que ce Seigneur réchauffe aussi dans Sa grâce nos cœurs à tous, et nous rende davantage les imitateurs de Son fidèle serviteur !

Arrivés à la fin de notre étude, rappelons encore une fois brièvement le caractère de l’épître aux Galates. Elle ne nous fait pas connaître la position propre du chrétien : lui en Christ (épître aux Éphésiens) et Christ en lui (épître aux Colossiens), mais elle place devant nos yeux Christ, le crucifié, et les conséquences de Sa mort, c’est-à-dire Christ vivant actuellement en nous, en contraste avec la chair, ou avec le « moi » vivant encore dans la chair. De plus, elle nous montre le seul état pratique qui convienne au croyant : puisqu’il est crucifié avec Christ, il ne vit plus, lui, mais Christ vit en lui. La loi qui était survenue entre la promesse faite jadis à Abraham et à sa semence, et son accomplissement par la venue de Christ, la loi qui était destinée à l’homme dans la chair, n’avait apporté à celui-ci que mort et condamnation. Tout retour à la loi était donc un abandon non seulement de la promesse, mais aussi de l’œuvre accomplie par Christ, et un retour à la chair, comme s’il pouvait y avoir encore en elle un point de contact avec Dieu. Par conséquent, ce n’était dans le fond rien d’autre que du paganisme. L’homme dans la chair a perdu toute relation avec Dieu, et aucune ne peut être renouée si ce n’est sur la base d’une création entièrement nouvelle.

Il est à peine besoin de dire que tout cela donne à cette épître une importance particulière, et lui confère une valeur exceptionnelle pour nous.