Messager Évangélique:Fragment (mars 1862)/textev
Quand après avoir lu le récit qui nous est fait de la chute de l’homme, du jugement qui en fut pour lui la conséquence, de la condition nouvelle dans laquelle la création tout entière fut désormais placée, et qu’on arrive au verset transcrit ci-dessus, on éprouve vraiment quelque chose de solennel. En effet, deux choses font ressortir l’importance du fait, que l’on commença alors d’invoquer le nom de l’Éternel : 1° On avait à craindre le mal et l’oppression des hommes, car le sang d’Abel avait déjà été répandu ; il n’y avait donc, de ce côté, aucune garantie pour la vie du juste ; 2° Si dans les relations des hommes entre eux, il n’y avait aucun lieu à la confiance, sur qui pouvait-on compter ? Qui pouvait être pour l’homme un protecteur puissant et sûr ? Ici est la réponse de la foi : c’est Dieu ! Auparavant, un besoin pareil n’était nullement senti ; mais l’attentat de Caïn montra le péché et ses progrès dans le cœur de l’homme. Dès lors, il n’y avait de sûreté que sous l’aile de Dieu, et, disons-le, dans son jugement de l’état moral des hommes, la foi ne se trompe pas, car longtemps après que se fut élevée la première voix pour réclamer le secours et l’intervention de Dieu, nous lisons : « … que la terre était remplie d’extorsion » [Genèse chapitre 6 versets 11 et 13] ou de violence.
Dans le fait de Caïn, Dieu avait montré qu’Il était juste et vengeur ; c’en était assez pour que l’homme eût pleine confiance en Lui. Aussi la foi en l’intervention de Dieu donnait-elle un caractère spécial à quiconque L’invoquait. Dieu était le Dieu du jugement, Il intervenait contre l’injustice des hommes en faveur de ceux qui Lui remettaient leurs causes, « car il fait justice et droit à tous ceux à qui l’on fait tort » [Psaume 103 verset 6]. L’âme oppressée trouvait ainsi un refuge auprès de Dieu, c’était tout son avoir, et à cette époque reculée de l’histoire humaine, cela suffisait pour les circonstances de chaque jour. Si quelque âme éprouvait de la crainte, avait de l’appréhension, la réponse était toujours : Dieu est là, et Il est fidèle ! D’un autre côté, il était manifeste qu’il existait une relation vraie, quoique d’un nouveau genre, entre Dieu et ceux qui se confiaient en Lui ; or cette relation était fondée sur le principe de la foi, « car il faut que celui qui s’approche de Dieu, croie que Dieu est » [Hébreux chapitre 11 verset 6]. Seth et son fils Énosh étaient de ceux-là ; aussi nous sont-ils présentés en Luc, comme faisant partie de la branche d’où est descendu, comme homme, le Seigneur.
En suivant le cours des âges, nous avons, nous croyants, la douce joie de la certitude que nous aussi appartenons comme membres effectifs à la famille de la foi, laquelle est bénie de Dieu. Je n’envisage ici la position des fidèles que sous le rapport extérieur des circonstances ordinaires de la vie ; comme dit Paul aux Corinthiens : « Aucune tentation ne vous est survenue qui n’ait été une tentation humaine » [1 Corinthiens chapitre 10 verset 13]. Or si dans ces moindres choses, Dieu est pour nous ; que sera-ce en ce qui est plus excellent ? Que dans les moindres choses donc, chers frères, nous invoquions aussi le nom du Seigneur ; car « notre secours dans les détresses est fort aisé à trouver » (Psaume 46 verset 1).