Livre:Exposé et structure détaillée du livre d’Ésaïe/Première partie - Chapitres 1 à 35/Chapitres 1 à 12

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Nous trouvons là une histoire prophétique d’ensemble d’Israël, où la place prépondérante est donnée à l’attaque finale par l’Assyrien, terme des jugements nécessités par le péché du peuple, mais qui montre en même temps la formation d’un résidu, sa délivrance par le Messie promis, et l’introduction du règne de ce Messie.

Première série : chapitres 1 à 4

Ces quatre chapitres servent de préface à tout le livre. On y voit le péché d’Israël, son jugement annoncé, son relèvement et sa gloire sous Christ, « le germe de l’Éternel » (4, 2). Israël a oublié l’Éternel, s’est rebellé contre Lui, de là le jugement. Cependant l’Éternel y garde un faible résidu, futur noyau du peuple de Dieu sous le sceptre du Messie. La grâce triomphe : on remarquera en effet que, si la bénédiction est proposée à condition qu’il y ait repentance, de fait cette bénédiction est introduite par le jugement parce que la repentance du peuple, comme tel, n’a pas eu lieu.

Chapitre 1

v. 1. Il s’agit dans cette prophétie de Juda et Jérusalem. Elle est prononcée sous quatre rois, dont trois (Ozias, Ézéchias, Jotham) ont « fait ce qui est droit aux yeux de l’Éternel » (2 Chron. 26, 4 ; 27, 2 ; 29, 2) et un seul non (28, 1) ; mais, bons ou mauvais, l’état de Juda et de Jérusalem sous leurs règnes n’a pas changé, comme le montre tout ce premier chapitre, et même la suite du prophète. Ce qui est dit ici s’adresse non aux rois seuls mais au peuple.

v. 2-9. Le prophète proclame l’amour de Dieu pour Son peuple, et prend à témoins les cieux et la terre qu’Il a placé ce peuple dans la relation de fils avec Lui, dès sa naissance, jusqu’à sa pleine croissance. La seule réponse de leur part à cet amour a été la rébellion contre leur père et leur bienfaiteur (v. 2). Cependant ils sont encore appelés Son peuple (v. 3), le lien n’est pas encore rompu comme dans d’autres prophètes, Lo-Ammi n’est pas encore prononcé. Cela donne un caractère particulier à cette grande prophétie : le peuple est censé pouvoir revenir encore.

Suivent les caractères du peuple infidèle (v. 3-5) : 1° la méconnaissance ou l’ignorance de leur relation avec l’Éternel ; des animaux sans intelligence reconnaissent leur maître, ne serait-ce que par la crèche, la nourriture qu’il leur dispense, mais Israël ? Il ne connaît pas Dieu et Ses bienfaits ; 2° la corruption qui les marque, quoique fils, portant Son nom (v. 4, cf. Deut. 21, 18-21 ; 8, 5) ; 3° l’abandon de l’Éternel et le mépris du Dieu saint, ils ont quitté la position dans laquelle Dieu les avait placés ; 4° la révolte toujours plus accentuée à mesure que Dieu les frappe.

Leur déplorable état se trouve résumé en quelques traits au verset 6 : le mal moral est complet, il n’y a plus rien à attendre d’eux, plus d’amélioration possible, tout est pourriture et il n’y a plus de remède pour panser les plaies.

En conséquence, le pays est dévasté (v. 7), Dieu les a livrés entre les mains des étrangers. La fille de Sion, Jérusalem, reste seule à tenir tête aux ennemis (v. 8), et il ne subsiste qu’un « bien petit résidu ». C’est à quoi se réduit le témoignage que Dieu avait confié à Son peuple. Cela ne nous amène-t-il pas à nous demander : Et nous, sommes-nous encore un « bien petit résidu » ? Les croyants parmi eux sont de fait le peuple reconnu ; tout en s’identifiant avec la nation coupable et châtiée, ils confessent que Dieu a eu pitié de Son peuple en laissant au milieu de lui ce faible reste dont ils font partie (v. 9 ; cf. Rom. 9, 29).

On peut se demander à quel règne correspond cette description. Il semble que ce soit celui d’Ézéchias. En effet ce ne peut être celui d’Ozias, qui est toujours victorieux (2 Chron. 26). On pourrait penser à Jotham, car il est dit que « le peuple se corrompait encore » (27, 2) mais on ne voit pas Juda dévasté sous ce règne. Il l’est sous Achaz (28), mais les versets 10-17 de notre chapitre peignent l’état du peuple sous le règne de quelque roi fidèle, en tout cas pas sous celui d’Achaz qui ferma le temple (28, 24), alors qu’ici le peuple allie l’iniquité et la fête solennelle.

v. 10-17. Il y avait les formes religieuses, mais sans vie ni sainteté, aussi l’Éternel déclare haïr les choses même qu’Il avait ordonnées, parce que le cœur du peuple s’est éloigné de Lui. Leurs offrandes sont rendues plus haïssables en ce qu’elles prétendent honorer l’Éternel tout en leur associant l’iniquité. Ce que la loi exigeait d’eux c’était de cesser de mal faire et d’apprendre à bien faire, et avant toute chose à marcher dans l’amour du prochain (10, 16, 17). Israël est appelé à se laver, se purifier en cessant de mal faire pour apprendre à bien faire. Il ne le peut ; alors l’Éternel le purifiera Lui-même par le jugement (v. 25).

v. 18-20. Dieu attend que Son peuple coupable plaide contre lui-même : il trouvera alors Dieu, son juge, plaidant pour lui, prenant sa cause en main, le lavant de toute iniquité ; mais c’est une chose terrible quand Dieu plaide contre les coupables (3, 13). En attendant la loi leur offre l’alternative ou d’écouter ou de refuser Celui qui leur parle, avec ses conséquences (19, 20).

v. 21-23. Ces versets considèrent l’état de Jérusalem qui s’est corrompue comme une prostituée, s’est tournée vers l’idolâtrie et vers l’injustice. La responsabilité des princes est mise en évidence, les rois ne sont pas exclus de ces accusations, quoique de fait un seul d’entre eux, Achaz, soit ici en cause. Ils font à l’égard de la veuve et de l’orphelin le contraire de ce que demande la loi.

v. 24-31. Aussi Jérusalem infidèle ne peut être rachetée que par le jugement. Le jugement sur la maison de Dieu est la première chose quand Dieu visite le mal. L’Éternel dit : « Je me vengerai de mes ennemis » en parlant d’Israël : quoi de plus terrible que le peuple de Dieu soit placé comme ennemi ! Cf. Hébreux 10, 27 ; 12.

Résumé du chapitre 1. — Annonce le jugement de Dieu sur Ses adversaires, et Ses adversaires et Ses ennemis sont Son peuple et la ville de Jérusalem. Sion sera rétablie, mais par le jugement. Mais au milieu des châtiments, l’Éternel laissera subsister un petit résidu, noyau du peuple futur restauré, selon la fidélité de Dieu. « Les siens qui reviennent » (v. 27) seront épargnés, quand, à la fin, le jugement tombera sur le peuple, ils seront rachetés par la justice, Sion par le jugement.

Chapitre 2

Le peuple futur restauré est le centre de la bénédiction pour les nations. Les versets 1 à 5 donnent, après le jugement prononcé à la fin du chapitre 1, une merveilleuse description de la Jérusalem milléniale et de la paix universelle. Au verset 5 on a un appel au résidu de 1, 9, auquel appartient cette bénédiction. « La loi sortira de Sion, et de Jérusalem la parole de l’Éternel. Et il jugera au milieu des nations ». Ce n’est pas là la conversion du monde et l’établissement du royaume par l’évangile, cela n’a jamais eu lieu et n’aura jamais lieu. Le jugement de Dieu accomplira cette œuvre, permettra la gloire future de Jérusalem, devenue centre de bénédiction pour les nations, la paix sera enfin établie, on n’apprendra plus la guerre.

v. 6-11. Jusque-là, le peuple sera abandonné de Dieu à cause de son luxe, de son idolâtrie et de son orgueil. Il s’est allié avec les nations en vue de la prospérité matérielle, et le résultat a été l’idolâtrie. Seul l’Éternel sera haut élevé quand, aux derniers jours, l’orgueil du peuple sera abaissé.

v. 12-21. Mais si Dieu juge Son peuple, ne jugera-t-Il pas le monde idolâtre ? Quand Il apparaîtra, l’Éternel anéantira non seulement l’orgueil de Son peuple et son idolâtrie (6-11), mais tout l’orgueil de l’homme et des nations idolâtres quelles qu’elles soient. D’où la répétition de cette phrase : « l’Éternel seul sera élevé en ce jour-là » (v. 11, 17).

v. 22. Nous sommes amenés à la sentence finale : « Finissez-en avec l’homme ». Si Dieu en finit ainsi avec l’homme, nous devons en finir aussi.

Résumé du chapitre 2. — Dieu exaltera la maison de Jacob et Jérusalem, centre de la bénédiction aux derniers jours, mais en comparant Jérusalem avec ce qu’elle était et avec ce qu’elle sera, cette promesse ne peut s’accomplir que par le jugement. Et si le jugement de Dieu commence par Son peuple, c’est la preuve qu’il s’exécutera sur les nations. Rien d’eux tous ne pourra subsister.

Chapitre 3 ; 4, 1

Continue la description, en détail, des jugements qui tomberont sur Juda et Jérusalem coupables (v. 1 ; cf. 2, 1).

v. 1-9. Avant toute autre chose, le soutien et l’appui leur manqueront : d’un côté, la disette dans ce qui soutient extérieurement la vie, d’autre part défaillance complète de tout appui moral. Ni force matérielle, ni sagesse, ni secours spirituels. Ceux qui domineront sur eux ne seront pas en âge de les conduire et de plus seront pleins d’outrecuidance envers ceux que leur âge qualifierait comme conseillers. L’état moral sera tel que même les moins considérés auxquels la dignité sera offerte la refuseront tant elle sera avilie. Ils ne sont pas les jouets d’événements dont ils ne seraient pas responsables, « ils ont fait venir le mal sur eux-mêmes ».

v. 10-12. Dieu sait faire néanmoins la distinction entre le juste et le méchant. Le premier verra le bien, le mal qu’a fait le second lui sera rétribué. On voit ici que les liens de l’Éternel avec Son peuple ne sont pas entièrement rompus ; l’Éternel le reconnaît encore et l’avertit à l’égard de ses conducteurs qui le fourvoient (tel Achaz). Aussi :

v. 13-15. les princes qui les conduisent seront jugés et

v. 16-24. les femmes qui les gouvernent (cf. 12) auront un sort commun avec les filles de Sion. Leur futilité, leur amour de la parure et du luxe dans le vêtement feront place à l’abjection, à la flétrissure et au deuil.

v. 25, 26. Les hommes forts tombés par l’épée, Sion, représentée par ses femmes, sera dans le deuil et la désolation.

4, 1. L’abjection des femmes est telle qu’elles sont prêtes à payer quelque prix que ce soit pour que soit ôté leur opprobre (non mariées ou stériles).

Résumé de 3 ; 4, 1. — Détail des jugements annoncés au chapitre 2 sur le royaume de Juda, ses hommes et ses princes. Le juste (v. 10) — et combien les justes semblent peu nombreux dans la masse du peuple — seul verra du bien.

Chapitre 4, 2-6

Tous ces chapitres aboutissent à Christ. Enfin le Germe paraît. Jusqu’ici nous ne pouvions voir Christ que comme l’Éternel juge. Maintenant Il paraît comme homme, comme fruit de la terre, mais c’est en faveur non du peuple comme ensemble, mais des réchappés, du résidu dont il est parlé en 1, 9, et après le jugement exercé sur les infidèles, hommes et femmes, à Jérusalem. Chaque demeure en Sion sera alors un petit tabernacle, de même chaque assemblée du peuple, et comme au désert la nuée sera là pour les protéger, les éclairer et les conduire. Il y aura la protection de l’Éternel, une « couverture », sur toute la gloire qu’Il donnera à Jérusalem (v. 5). Les conséquences du mal ne seront pas encore ôtées (v. 6) mais là où Dieu habite on sera mis à l’abri d’elles. Tel sera l’effet de l’habitation du Messie avec Son peuple.

Résumé de 4, 2-6. — Enfin le Germe de l’Éternel paraît dans la personne de Christ. Il met tout en ordre et introduit la bénédiction finale.

Deuxième série : chapitres 5 et 6

Ici commence le sujet propre du prophète, dont la préface n’est qu’un aperçu. Ces deux chapitres décrivent l’iniquité de l’ensemble du peuple comme vigne de l’Éternel, et les jugements qui fondront sur lui ; la vigne sera dévastée, mais un petit résidu, dont Ésaïe est le type, sera sauvé, à travers la repentance et le jugement de soi.

Chapitre 5

v. 1-7. L’Éternel juge Sa vigne, c’est-à-dire Israël, sur le principe de ce qu’Il a fait pour elle et du fruit qu’elle devrait rapporter après tant de soins. Rien n’avait manqué à Ses soins, ils avaient été parfaits et complets, aussi sera-t-elle complètement détruite.

Six malheurs sont prononcés contre les différents caractères de l’iniquité :

Premier malheur : versets 8-10. Sur la convoitise et l’ardeur à acquérir et tout garder pour soi. Ce malheur est la diminution de la population et la disette.

Deuxième malheur : versets 11-17. Sur l’ivresse et les plaisirs du monde. Le malheur consiste en la captivité, la famine et la soif, enfin le sépulcre et le juste jugement.

Troisième malheur : versets 18, 19. Sur ceux qui font le mal sciemment au mépris de Dieu et de son jugement.

Quatrième malheur : verset 20. Sur ceux qui confondent le mal et le bien, la lumière et les ténèbres, la douceur et l’amertume.

Cinquième malheur : verset 21. Sur ceux qui ont une haute opinion d’eux-mêmes et de leur intelligence.

Sixième malheur : versets 22, 23. Sur ceux qui emploient leur énergie pour s’enivrer des choses du monde, qui se font les défenseurs du mal qui leur profite et qui noircissent ceux qui font le bien.

La colère de l’Éternel s’est embrasée contre eux et le jugement de Dieu les consumera ainsi que toute leur gloire (24).

Les « Malheurs » des versets 18 à 23 (troisième à sixième) consistent dans la colère de Dieu, le feu consumant du jugement tombant sur ces hommes et sur toute leur gloire (v. 24, 25). « La colère de l’Éternel s’est embrasée contre eux », et « pour tout cela » cette colère « ne s’est pas détournée et sa main est encore étendue » (voyez 9, 12, 17, 21).

v. 26-30. Cette colère se donne cours dans l’invasion de l’Assyrien (cf. 10, 5), « verge de ma colère ».

Chapitre 6

Ce chapitre se relie au précédent par la mention d’un septième malheur. Mais il s’agit d’un autre principe de jugement. Les malheurs précédents sont prononcés sur ce qu’Israël a fait, étant déchu de la bénédiction première ; ici, le dernier malheur est prononcé sur ce que l’homme, et le meilleur, est devant le Dieu saint. C’est le malheur sur le moi[1]. Au chapitre 5 ce sont les suites de la rébellion contre l’Éternel ; ici, qu’allait devenir l’homme, fût-il le moins coupable, fût-il un prophète, quand il rencontrerait Dieu ? Pourrait-il dire autre chose que : « Malheur à moi, car je suis perdu » ? De fait, c’est là la première en date des prophéties d’Ésaïe[2], et cela aussi a son importance capitale. Dès le début, l’homme est absolument condamné. Le résidu même, dont Ésaïe est un type, ne mérite pas autre chose que la condamnation.

Ce chapitre est en même temps le début d’une parenthèse qui se termine au chapitre 9, 7. Au verset 12 de ce chapitre 9, le prophète reprendra, comme nous le soulignons plus haut, la parole de 5, 25 (« Pour tout cela… sa main est encore étendue » et la répète aux versets 17, 21 et 10, 4). Outre sa transposition dans le but que nous avons indiqué, cette parenthèse nous présente le Messie, Sa réjection par les Juifs, et la bénédiction sous Son règne futur.

Après ces remarques générales, reprenons en détail cet intéressant chapitre.

v. 1-7. La vision est de la gloire du royaume de Christ sur la terre. Le trône n’est pas dans le ciel mais au-dessus de la terre. Seule la manifestation de cette gloire est dans le temple (le lieu saint, non le lieu très saint), sur la terre. Les séraphins sont dans le ciel au-dessus de lui. C’est Christ homme, exalté comme roi, chef de l’armée des cieux, adoré par les séraphins. Les créatures les plus élevées proclament la sainteté de Christ roi, le Dieu d’éternité, le Créateur. Les séraphins (litt. les brûlants qui volent) se couvrent la face. Et un homme serait appelé à voir Sa gloire, à face découverte ? Oui, mais il faut auparavant le « Malheur à moi » et le « je suis perdu ». Aussitôt toute impureté disparaît, même des lèvres du croyant, par le jugement dont le feu a consumé l’holocauste et ne peut plus avoir qu’à consumer toute iniquité chez le croyant. Il fallait qu’il eût conscience du feu du jugement sans en être atteint, car tout ce qu’il était avait été déjà consumé dans la victime sur l’autel.

v. 8-13. Maintenant le prophète est capable de dire, comme son Maître : « Me voici, envoie-moi », quand le Seigneur demande : « Qui enverrai-je ? ». Le message au peuple est que son endurcissement est un jugement de Dieu (Jean 12, 37-41). Mais la foi peut dire : « Jusques à quand ? » (c’est le mot du résidu dans les Psaumes), certaine que le Seigneur ne peut demeurer sur le jugement.

Alors trois choses sont révélées au prophète : 1° la désolation et la solitude actuelles, comme jugement de Dieu ; — 2° un « dixième » rentrant après la captivité, mais pour être brouté de nouveau ; — 3° enfin un tronc qui reste, une « semence sainte », le résidu croyant, formant le noyau d’un peuple nouveau.

Ainsi la foi compte sur la fidélité de Dieu, et Dieu répond : Il y aura un résidu. (J.N.D.)

Troisième série : chapitres 7 à 9, 7

Le chapitre 6 venait à point pour compléter le chapitre 5, mais il appartient tout autant à une troisième partie qu’il introduit, et dont la date n’est plus la mort d’Ozias, mais saute par-dessus le règne de Jotham pour arriver aux jours du méchant Achaz.

Chapitre 7

Le chapitre 7 donne, en Achaz, un exemple de l’endurcissement qui doit atteindre le peuple comme jugement de Dieu (6, 9, 10).

v. 1-9. La prophétie précédente se terminait sur la promesse d’une semence sainte, le vrai résidu (basé sur le tronc d’Isaï), qui sera « le tronc » du peuple du Messie ; un événement prêt à se produire devient le motif d’une nouvelle prophétie. « Un résidu reviendra » (Shear-Jashub), ce grand fait est comme enfanté par le prophète et l’accompagne partout. Il est à la base de tout ce qui va arriver. La Syrie et Israël veulent détruire la semence de David. Achaz ne mérite que cela, mais Dieu a en vue le Messie, Emmanuel, et annonce la destruction de ces deux ennemis de Juda au bout de soixante-cinq ans (v. 8).

v. 10-17. Dieu veut en donner confirmation à Achaz par le signe que celui-ci demandera. Mais Achaz a mis sa confiance en l’Assyrie, et il refuse sous prétexte de ne pas tenter l’Éternel, comme si l’Éternel, quand Il fait une promesse, pouvait en revenir ou la voir annuler. Cette incrédulité lasse enfin la patience de Dieu, mais ne L’empêche nullement, Lui, de donner un signe dans la personne d’Emmanuel, le fils de la vierge, donné comme un petit enfant dont Lui suit la croissance parmi les autres, nourri comme eux, jusqu’à l’âge de « savoir rejeter le mal et choisir le bien ». À Lui se rattache le retour du résidu (Shear-Jashub) dans un temps futur[3]. Mais Ésaïe va avoir un nouveau fils dont le nom signifie hâte du butin, promptitude du pillage. Avant que celui-là sache rejeter le mal et choisir le bien, Israël et la Syrie, Samarie et Damas, seront détruits. Mais celui auquel Achaz s’est confié pour amener ce résultat, et qui l’amènera en effet, selon les voies de Dieu, l’Assyrien, sera contre Juda la verge de la colère de Dieu.

Ainsi, nous avons jusqu’ici : l’assurance prophétique du retour d’un résidu, la promesse de la venue du Messie, Dieu avec nous, mais une tribulation sans précédent tombant sur Juda. Cette tribulation trouve son expression dans l’Assyrien de la fin.

v. 18-25. Ici nous est dépeint ce temps de désolation amené par le conflit entre l’Égypte et l’Assyrie, le roi du Midi et le roi du Nord. Ce conflit ne laissera rien subsister de Juda, tout le pays ne sera que ronces et épines. Par l’Assyrien Juda sera réduit à l’état du petit enfant qui vient de naître (22), mais c’est dans cette condition qu’il pourra rencontrer Emmanuel.

Chapitre 8, 1-20

v. 1-4. Ces versets mettent en scène l’enfant prophétique annoncé en 7, 16, dont le nom, Maher-Shalal-Hash-Baz, butin et pillage, signifie la dévastation des deux ennemis de Juda — Israël et la Syrie — par l’Assyrie appelée par Achaz. Celui-ci semble avoir réussi dans son dessein incrédule, mais l’avenir, comme nous l’avons vu au chapitre 7, montrera la vanité des plans du roi. (Ne semble-t-il pas que tout ce qui se passe sous nos yeux annonce les mêmes jugements ?)

v. 5-8. En réalité c’est l’Éternel, et non Achaz, qui suscite immédiatement l’Assyrien contre les dix tribus jointes à la Syrie. Mais l’Assyrien, verge de l’Éternel contre Israël, le sera aussi contre Juda. Pour l’instant il passera outre, mais il remplira plus tard le pays d’Emmanuel annoncé en 8, 14 comme le libérateur futur d’Israël. Cela reporte la prophétie jusqu’au temps de la fin.

v. 9-17. Maintenant Emmanuel annoncé devient la confiance du résidu. Toutes les associations des peuples, et d’Israël incrédule avec eux, se termineront par le brisement des nations (9) et celui des maisons d’Israël et de Juda (14). C’est Emmanuel, le Dieu du résidu, Dieu avec lui, qui mettra fin à tous les conseils de l’homme (10). Le résidu (11), dans la personne du prophète, est préservé par la présence d’Emmanuel de marcher dans le chemin d’Achaz, de craindre les conjurations de Samarie et de Damas (12) et d’en former de nouvelles en faisant appel à l’Assyrie pour aider Juda contre celles-là. Ce qui produit ces vaines alliances, c’est le manque complet de confiance en l’Éternel. Lui seul doit être la crainte d’Israël et le salut du résidu. Mais Lui, Emmanuel, sera auparavant « pour sanctuaire » au résidu croyant, et « pour pierre d’achoppement et rocher de trébuchement aux deux maisons d’Israël » (Juda et Israël), « pour piège et pour lacet aux habitants de Jérusalem » (14). C’est ce qui est arrivé à la première venue de Christ ; beaucoup ont été enlacés. Les disciples ont été et seront gardés par la parole de Christ et ceux qui s’attendent à Lui pendant les jours de la colère de Dieu contre Son peuple seront sauvés (Rom. 9, 33). C’est le résidu de Juda.

v. 18-20. Ésaïe, type de Christ, parle. Les enfants du prophète sont là comme témoins, annonçant la préservation d’un résidu de Juda, et le jugement de la masse du peuple. Les événements qu’ils préfigurent auront lieu. Mais en même temps le prophète touche aux événements actuels. Déjà cette prophétie a eu entièrement lieu pour l’Église ; le Seigneur se présente devant Dieu avec les enfants que Dieu Lui a donnés, comme Il les place dans la même position de confiance que Lui-même (Héb. 2, 13, citant à la fois le verset 17 et le verset 18 de notre chapitre). Israël aussi, mais d’une tout autre manière, est un prodige devant Dieu pendant ce temps de son rejet. Il se montrera adonné, comme Saül réprouvé, aux évocateurs d’esprits, il ira aux morts pour les vivants. Le résidu, lui, s’enquerra du Messie, il tiendra ferme la parole : la loi et le témoignage, auxquels ce résidu de la fin reviendra, seront sa seule sauvegarde ; il ne peut y avoir d’aurore milléniale que par ce moyen.

Ainsi les deux enfants prophétiques sont le témoignage d’un côté du jugement, de l’autre de la restauration.

Chapitre 8, 21 à 9, 7

Ces versets, qui constituent un appendice à cette troisième série, nous montrent d’abord (21, 22) l’état de ceux qui n’appartiennent pas au résidu croyant de la fin : l’affliction, la tribulation, les malédictions, sont la part de l’incrédulité contre Christ. Rien sur la terre que détresse, ténèbres, angoisse (voyez 5, 30). Ils maudiront leur roi, sans doute l’Antichrist. Mais aux versets 1 à 7 du chapitre 9, un autre état est décrit. Il est question d’une obscurité qui ne sera pas, d’abord, équivalente à la détresse future qui sera sur la terre. Au commencement le Seigneur pesa légèrement sur Zabulon et Nephthali, et ce n’est que plus tard qu’Il s’appesantit sur tout le pays. Vers la mer, au-delà du Jourdain, en Galilée, il y a eu un chemin, et au lieu d’obscurité une grande lumière a resplendi sur le peuple qui habitait dans les ténèbres et dans l’ombre de la mort, au lieu d’être laissé, comme cela arrivera plus tard, sans espoir dans leurs ténèbres, ce que dépeint 8, 21, 22. La Galilée des nations a été le théâtre sur lequel se déploya cette grande lumière, lors de la première venue de Christ.

Emmanuel a maintenant paru, cette nation est arrivée à la lumière, c’est la joie de la moisson, c’est la victoire sur l’ennemi, c’est le jugement des nations qui asservissaient les fidèles. La victoire est remportée, ou plutôt elle le sera puisqu’« un enfant nous est né », le Fils est donné à ce résidu, la nation n’en ayant pas voulu. « On appellera son nom : Merveilleux », etc. L’accroissement de Son royaume sera sans fin, ce sera le règne de justice, le triomphe de l’Éternel.


Résumé de la troisième série. — Le jugement de l’Assyrien est annoncé quand Juda aura cru trouver en lui une aide contre l’alliance d’Israël avec la Syrie. Mais l’Assyrien lui-même sera détruit, et l’apparition d’Emmanuel en est le gage certain. C’est Lui qui délivrera le résidu, qui le présentera devant Dieu comme les enfants que Dieu Lui a donnés. Toutes les confédérations humaines et des nations seront brisées par Lui. L’ombre de la mort dans laquelle se trouve le peuple a été dissipée par Sa venue, mais la pleine délivrance du peuple ne sera opérée que lorsqu’Il aura acquis tous Ses titres et institué un royaume de justice et de paix.

Le prophète annonce que l’Assyrien viendra et détruira Israël et la Syrie, puis Juda ; mais il annonce la présence de Christ, Emmanuel, preuve positive de la restauration du peuple, quand l’Assyrien futur envahira le pays. On a Sa première venue en 8, 11-17 et 9, 1, 2. Il dit : Me voici, moi, etc., tandis que l’Éternel cache Sa face à la maison de Jacob. Le résidu L’aura à la fin dans Sa gloire, rétablissant le peuple dans toute la jouissance des promesses.

Quatrième série : chapitres 9, 8 à 12

Après la parenthèse de 6 à 9, 7, le prophète reprend le cours des événements qui, de jugements en jugements dans lesquels « la colère de l’Éternel n’est pas encore détournée » et « sa main est encore étendue » (5, 25, se reliant à 9, 12, 17, 21 ; 10, 4), aboutissent au jugement final introduisant le règne.

Chapitres 9, 8 à 10, 4

Il s’agit d’Israël châtié.

9 v. 8-12. Les dix tribus (Éphraïm, ou Samarie) sont jugées par la main de l’Assyrien, après l’avoir été par le moyen de la Syrie et des Philistins.

v. 13-17. Cela ne suffit pas. Il y aura jugement de leurs conducteurs, leurs princes et leurs faux prophètes, ceux sous lesquels on s’abrite et ceux sur lesquels on s’appuie. Le même jugement sera prononcé en 19, 15 sur l’Égypte (cf. Apoc. 9, 19).

v. 18-21. Mais encore cela ne suffit pas. Éphraïm, les tribus au-delà du Jourdain, et Juda, seront en proie aux dissensions intestines et se consumeront les uns les autres, « ils mangent chacun la chair de son bras ». (Comment ne pas songer ici aux avertissements donnés aux « frères » en Galates 5, 13-15 ?)

10 v. 1-4. Cela même ne suffit pas encore. Les juges ont opprimé les pauvres, il n’y a aucun recours pour ces oppresseurs coupables, au jour de la visitation. Et cependant la colère et les jugements de l’Éternel ne sont pas encore arrêtés.

Chapitre 10, 5-34

Il arrivera pourtant un moment où « le Seigneur aura achevé son œuvre contre la montagne de Sion et contre Jérusalem » (v. 12) et où Il visitera l’instrument même de ce jugement.

v. 5-11. En effet, à son tour, l’Assyrien, verge de la colère de l’Éternel contre Son peuple, éprouvera cette colère. Son orgueil hautain en est la cause : il assimile les idoles des nations avec celles de Samarie et de Jérusalem, comme si ce n’était pas précisément à cause de leurs idoles que l’une et l’autre se trouvent sous la main de l’Éternel étendue en jugement.

v. 12-23. Cette œuvre envers Israël achevée, l’Éternel remet en mémoire cet orgueil de l’Assyrien qui se vante de sa puissance et de sa sagesse et de son intelligence parce qu’il a subjugué les autres peuples. C’est la cognée se glorifiant contre celui qui s’en sert. C’est pourquoi l’Assyrien sera consumé quand l’Éternel, lumière d’Israël, paraîtra. En ce jour-là le résidu d’Israël et les réchappés de Juda ne s’appuieront plus, comme l’a fait la masse infidèle, « sur celui qui les a frappés » (l’Assyrien), mais « sur l’Éternel, le Saint d’Israël, en vérité ». « Le résidu reviendra » (allusion à Shear-Jashub), lors de la « consomption décrétée » c’est-à-dire lors des derniers jugements, funestes au peuple apostat, qui précéderont le règne du Messie.

v. 24-34. C’est à ce résidu en Sion que l’Éternel s’adresse pour le rassurer. « L’indignation et la colère » vont enfin être « accomplies », dans le jugement de l’Assyrien. Il est décrit ici tel qu’il a eu lieu sous Sankhérib, alors qu’il paraissait triompher, mais c’est en même temps l’image anticipée du jugement futur de l’Assyrien, à la fin des temps.

Chapitres 11 et 12

Cette dernière subdivision nous présente le bonheur d’Israël sous le règne de Christ, après l’exécution de tous les jugements prédits au chap. 10.

11 v. 1-10. L’apparition de Christ est annoncée, rejeton du tronc d’Isaï pour Israël, branche de ses racines pour les nations. Nouveau Salomon en sagesse et en intelligence, Il ne faillira pas comme le premier : l’Esprit, dans Sa plénitude, reposera sur Lui. Il gouvernera Son peuple en justice et en droiture, et ne laissera pas subsister le méchant sous Son règne. Ce sera le règne de la justice et de la paix universelle, pendant le millénium. Il en sera ainsi non seulement pour Israël mais pour les nations, sur lesquelles Sa domination s’étendra. Il les rassemblera et elles Le chercheront (v. 10 ; Rom. 15, 12). Ce sera le repos de la gloire, comme Sophonie 3, 17 est le repos de l’amour.

v. 11-16. C’est « en ce jour-là » et en vue de lui, que le Seigneur rassemblera Juda et les dix tribus d’entre toutes les nations. Il « mettra sa main encore une fois pour acquérir le résidu de son peuple » ; la première fois était l’Exode. Les deux maisons seront réconciliées et s’uniront pour dominer sur ceux qui les avaient asservies. Aux v. 15 et 16 nous trouvons les circonstances extérieures du retour des dix tribus. C’est ainsi qu’il sera mis fin au joug de l’Assyrien.

12. Nous avons ici le cantique de la dernière journée des tabernacles, préfiguré en Jean 7, 37. Ce sont aussi les accents du cantique d’Apocalypse 15, 3, 4. Ce n’est pas seulement le cantique de Sion, mais celui de « toute la terre ».


Résumé de la quatrième série. — La colère continue sur Israël. L’instrument de cette colère est l’Assyrien, mais l’Assyrien lui-même sera jugé, à cause de son orgueil. Un résidu d’Israël reviendra, mais après les jugements. La destruction future de l’Assyrien, préfigurée par sa défaite sous Sankhérib, entraîne la libération du peuple. Christ, issu du tronc d’Isaï, est annoncé comme exécutant le jugement, mais afin d’établir la bénédiction millénaire, après le retour des dix tribus. Enfin est entonné l’alléluia. C’est sur cette louange que se termine toute la première division de la première partie d’Ésaïe.

N.B. — Remarquer quel immense rôle joue le résidu dans tous ces chapitres. Il est directement question de lui en 1, 9 (cf. Rom. 9, 29) ; 4, 3 ; 6, 13 ; 7, 3 ; 10, 20-23 (cf. Rom. 9, 27, 28).

Tout cela en rapport avec le Messie : 4, 2 ; 5, 1 ; 7, 14 (cf. Matt. 1, 23) ; 8, 8, 14 (cf. 28, 16 ; Rom. 9, 33 ; 1 Pier. 2, 8), 17 et 18 (Héb. 2, 13) ; 9, 2 (cf. Matt. 4, 15, 16) ; 6, 7 ; 11, 1, 10 (cf. Rom. 15, 12). <noinclude


  1. Disons en passant que nous trouverons aux chapitres 28 à 33 six autres « malheurs » précédés, mais non suivis comme ici, d’un même septième, malheur à moi (24, 16). En Matthieu 23 le Seigneur profère sept malheurs sur les conducteurs du peuple, mais suivis du « Béni soit… » du v. 39 prononcé par ce même peuple acclamant la grâce dans la personne du Sauveur, alors que ces conducteurs maudits le conduisaient à sa perte. Ces sept malheurs remplaçaient les neuf bénédictions de Matthieu 5 (neuf, trois fois la plénitude divine), dont les chefs n’avaient pas voulu.
  2. Dates des prophéties dans Ésaïe : 6, 1 ; 7, 8 ; 14, 28 ; 20, 1 ; 36, 1.
  3. Il sera alors délivré non plus de Damas et Samarie, mais de l’Assyrien des derniers jours. Emmanuel est de tout temps l’espérance de ce résidu, la base de l’accomplissement des promesses en sa faveur. C’est en vue de cet accomplissement que se déroulent tous les événements prophétiques, à commencer, peu après cette prophétie d’Ésaïe, par la défaite de la Syrie et d’Israël, avant qu’un enfant en bas âge fût élevé. Cf. lettre de J.N.D., Messager Évangélique, 1891, p. 69, 70, qui rapporte le verset 16 à Shear-Jashub lui-même, le premier fils prophétique, alors que l’auteur y voit le second, celui de 8, 1-4. Il est clair que le sens général reste le même (Éd.).