Livre:Exposition de l’épître aux Romains/Exposition de l’épître

De mipe
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Nous pouvons nous occuper maintenant des détails de l’épître elle-même, et en premier lieu des versets qui lui servent d’introduction, chapitre 1, 1-17. N’oublions pas que l’apôtre n’avait jamais été à Rome et qu’il écrit en vertu de sa mission universelle auprès des Gentils, en sorte que l’épître, tout en renfermant des salutations personnelles très nombreuses, a cependant, en général, le caractère d’un véritable traité : l’évangile y est largement développé en même temps que l’état de l’homme, la place qu’occupait réellement la loi, et, comme nous l’avons déjà vu, la position dans laquelle les Juifs, qui avaient une place de proximité, étaient tombés. L’apôtre commence par sa mission. Il était mis à part pour l’évangile de Dieu. Il était apôtre par l’appel de Dieu.

D’abord, le Seigneur l’avait personnellement appelé et lui avait confié sa mission auprès des Gentils, le séparant de la race humaine tout entière — Juifs et Gentils — en le mettant en rapport avec Lui-même dans la gloire : « En te retirant du milieu du peuple et des nations vers lesquelles moi je t’envoie…  » (Act. 26, 17). Le Seigneur lui était apparu, afin qu’il devienne un témoin du Seigneur Jésus glorifié ; c’est pourquoi nous l’entendons parler de l’évangile de la gloire, et de Dieu qui a dit que, du sein des ténèbres, la lumière resplendît dans son cœur pour faire luire la connaissance de la gloire de Dieu dans la face de Christ (2 Cor. 4, 4-6) ; c’est pourquoi aussi il dit que s’il avait connu Christ selon la chair, c’est-à-dire dans Ses rapports avec le monde d’ici-bas, comme Messie vivant sur la terre et comme un Juif L’aurait attendu selon la parole qui L’avait promis, il ne Le connaissait plus ainsi (2 Cor. 5, 16). L’homme glorifié après avoir souffert la mort et accompli la rédemption — c’était là le Christ que Paul connaissait, un Christ commencement et chef de la nouvelle création, l’homme glorifié, le Seigneur qui sauvait Son peuple comme faisant partie de Lui-même. Toutefois, l’administration de la grâce reconnaissait la place que Dieu avait donnée aux Juifs : il n’y avait pas de différence, seulement l’évangile était pour le Juif premièrement, puis aussi pour le Grec.

Ainsi devenu apôtre par l’appel du Seigneur, Paul avait été mis à part effectivement, pour Son service actif dans l’évangile, à Antioche : « Mettez-moi maintenant à part Barnabas et Saul, pour l’œuvre à laquelle je les ai appelés » (Act. 13, 2). La séparation immédiate pour son œuvre actuelle était par le Saint Esprit : il était « mis à part pour l’évangile de Dieu ».

Cet évangile était touchant le Fils de Dieu ; mais il avait un double caractère : il était d’un côté, en rapport avec les voies de Dieu sur la terre, l’accomplissement de la promesse ; de l’autre, il était, touchant la personne du Fils de Dieu, déterminé tel, en puissance, selon l’Esprit de sainteté par la résurrection des morts, l’annulation de l’effet du péché, non pas du jugement de Dieu, je n’ai pas besoin de le dire, mais de ce par quoi le pouvoir de Satan dominait sur l’homme par le péché. Il faut bien remarquer que ce qui est spécialement mis en évidence ici, comme l’évangile pour lequel Paul avait été mis à part, c’est que cet évangile est touchant la personne du Fils de Dieu. Nous verrons la propitiation et la justice pleinement constatées ; mais, avant toute chose, l’évangile de Dieu est « touchant son Fils… Jésus Christ, notre Seigneur », « semence de David, selon la chair », et puis « Fils de Dieu, en puissance, selon l’Esprit de sainteté, par la résurrection des morts » (v. 2-5).

Cette puissance, la puissance divine, qui Le ressuscita des morts[1], et Le démontra Fils de Dieu, fut manifestée tout le long de Sa vie dans cette sainteté qui ne permit jamais à aucun moment, l’entrée du péché. Il a été vivifié par l’Esprit (1 Pier. 3, 18) ; mais Sa sainteté, Sa séparation à Dieu était aussi par l’Esprit. La résurrection était la démonstration publique qu’Il était le Fils de Dieu, en puissance, la victoire sur les gages tout entiers du péché, en tant que manifestés dans ce monde ; mais l’œil ouvert aurait discerné la même puissance dans l’exclusion même du péché, dans l’absolue et parfaite sainteté du Sauveur, tout le long de Sa vie.

Ainsi l’accomplissement de la promesse et la puissance divine sur la mort étaient là, et le Fils de Dieu comme homme en sainteté absolue, notre Seigneur Jésus Christ ; l’évangile était la bonne nouvelle de Dieu touchant Son Fils. De Son œuvre, sauf Son triomphe sur la mort, nous n’avons rien vu encore, jusqu’ici ; mais Dieu est entré en puissance et en grâce là où régnaient le péché et la mort. La sainteté a été manifestée dans l’homme, dans ce monde, et la mort sous laquelle l’homme gisait, a été vaincue.

Il est important de remarquer que dans la présentation de l’évangile de Dieu, c’est la personne du Fils qui est, avant tout, mise en évidence ; sans doute nous y trouvons l’intervention de Dieu en puissance pour délivrer[2], nous y voyons la promesse accomplie, mais par-dessus tout l’évangile est la bonne nouvelle touchant le Fils de Dieu. La grâce a fait de Lui un homme, et la résurrection L’a déterminé Fils de Dieu en puissance selon l’Esprit de sainteté. Il y a une personne qui nous est révélée en grâce parfaite, mais comme Celui qui, en grâce, a tout droit sur nos âmes.

Une autre remarque qui n’est pas sans importance, c’est que, comme nous le verrons plus loin, il s’agit dans tout ceci de ce que Christ est de la part de Dieu. Dieu a accompli Sa promesse, Dieu a introduit la victoire sur la mort : tout est dans la personne du Fils — un homme ; et il ne s’agit pas du tout de ce que l’homme est pour Dieu, si ce n’est dans la personne de Christ Lui-même. Nous verrons bientôt que, comme le Fils de Dieu est révélé dans l’homme, triomphant de la mort, la justice de Dieu est révélée aussi. Dieu découvre ensuite toute la misère de l’homme, et montre comment Lui répond et satisfait parfaitement à cette misère ; mais en premier lieu, Il nous occupe de ce qu’Il a Lui-même introduit, et introduit pour Lui-même, pour la grâce et la gloire, ce qui a plutôt le caractère de l’évangile éternel quant à la puissance qui s’y trouve — la personne du Fils dans l’homme Jésus, et la justice divine. C’est là l’aspect général ; la responsabilité de l’homme et la misère de l’homme viendront plus tard ; mais d’abord il faut que nous ayons la chose telle qu’elle est pour Dieu et devant Dieu, quoique toute en grâce envers nous.

Mais il est un autre point encore que je dois signaler ici parce qu’il se rapporte au caractère tout entier de l’épître qui nous occupe, et qui a plutôt pour objet de poser le fondement, que d’élever l’édifice qui est bâti dessus : le témoignage que Christ est Fils de Dieu, c’est la résurrection, non pas la gloire. L’ascension bien que reconnue, je n’ai pas besoin de le dire, comme l’est aussi l’Assemblée, n’est pas mentionnée autrement qu’occasionnellement, au chapitre 8, pour introduire l’intercession. L’ascension a amené le résultat relativement aux conseils de Dieu ; mais déjà, dans la résurrection, Dieu avait mis Son sceau sur la personne et sur l’œuvre de Christ. La rédemption était accomplie, le péché expié, la mort vaincue, celui qui avait le pouvoir de la mort rendu impuissant dans la forteresse de sa puissance ; — oui, tout ce qui faisait que la gloire était la justice, tout était accompli. La question tout entière entre l’homme et Dieu était ainsi vidée et établie sur une base nouvelle ; mais les gloires qui en découlent selon les conseils de Dieu ne sont pas abordées ; notre résurrection même avec Christ n’est pas mentionnée, comme nous le verrons, bien que notre mort avec Lui le soit, parce que cette mort était nécessaire pour mettre fin à l’ancien état de péché et pour nous introduire dans un état nouveau où nous sommes capables de vivre avec Dieu, pleinement délivrés. La résurrection de Christ et notre mort avec Lui sont nécessaires pour établir notre titre, mettre fin à notre ancien état de péché et introduire ce qui est essentiellement nouveau. Il reste encore à développer ensuite notre position nouvelle selon les conseils de Dieu[3].

La mission de l’apôtre avait pour but « l’obéissance de la foi » (v. 5) ; il était envoyé pour amener les âmes des hommes à se soumettre à la révélation du Fils de Dieu, l’homme ressuscité, le Seigneur Jésus Christ — à la vérité de Dieu révélée en Lui, et à la grâce qui accompagnait cette vérité, car il les faut toutes deux pour que nous puissions les croire ; l’une non plus ne peut être révélée pleinement sans l’autre, car la grâce est partie de la vérité, là où Dieu est pleinement révélé ; la grâce non plus ne pouvait venir sans la vérité, car dans ce cas, au sujet de quoi la grâce serait-elle la grâce et comment Dieu serait-Il révélé ? Mais Dieu est lumière et Dieu est amour ; et la lumière et l’amour, venant à nous, sont la grâce et la vérité.

Cette obéissance de la foi était « parmi toutes les nations » (v. 5), non pas de toutes les nations. Il fallait que la grâce et la vérité descendent vers l’homme comme telles ; Dieu ainsi révélé ne pouvait pas être seulement le Dieu des Juifs. Or le temps n’était pas encore venu pour assujettir toutes les nations par puissance, mais Dieu les visitait premièrement « pour en tirer un peuple pour son nom » (Act. 15, 14). Parmi ces nations, les croyants qui se trouvaient à Rome étaient « des appelés de Jésus Christ » (v. 6) ; et à ceux-là, « à tous les bien-aimés de Dieu qui sont à Rome », l’apôtre s’adressait. Ils étaient déjà là ; — Dieu n’a pas permis que le christianisme soit fondé à Rome par un apôtre. Ces croyants étaient les « bien-aimés de Dieu » et « saints appelés », c’est-à-dire saints par l’appel de Dieu.

L’apôtre exprime maintenant (v. 8 et suivants) ses propres sentiments et son intérêt pour ceux auxquels il s’adressait, et cela en rapport avec sa mission universelle auprès des Gentils, mission dans laquelle l’amour de Christ opérait pour faire de ces hommes, qu’il n’avait même pas vus, les objets de son cœur et les lui rendre précieux. Il désirait leur communiquer quelque don spirituel selon le pouvoir qu’il en avait comme apôtre ; et dans une grâce sincère, il voulait être consolé ainsi dans cette foi qui leur était commune, à lui et à eux. « Débiteur et envers les Grecs et envers les barbares » (car telle est la place de l’amour en puissance), il était tout prêt à annoncer la bonne nouvelle à ceux aussi qui étaient à Rome. Il n’avait pas honte de l’évangile, car l’évangile était « la puissance de Dieu en salut » (v. 16) — mots simples, mais qui renferment d’inexprimables richesses !

Ce n’est pas Dieu ici, venant exiger de l’homme quelque chose ; ce n’est pas l’homme agissant pour Dieu ou découvrant le moyen de se rencontrer avec Lui ; c’est Dieu agissant pour l’homme ; c’est la puissance à l’œuvre, en faveur de l’homme et cela non seulement pour aider ou pour intercéder, mais pour délivrer l’homme de l’état dans lequel il se trouvait, c’est-à-dire pour sauver l’homme.

Mais comment Dieu sauvait-Il ainsi ? L’évangile était la puissance de Dieu en salut à quiconque croyait, Juif ou Grec (v. 16) : l’homme quel qu’il soit, avait besoin d’être sauvé. La puissance de Dieu, qui était là pour sauver, prenait l’homme dans sa misère et son péché, non pas dans ses prérogatives ou dans ses droits, même s’ils étaient donnés de Dieu, et s’appliquait à un Gentil perdu et à un Juif perdu ; elle était pour « quiconque croit », elle était par la foi ou sur le principe de la foi. L’ordre qu’elle suivait reconnaissait les voies de Dieu : elle était « au Juif premièrement, et au Grec » ; mais cet ordre n’altérait pas le caractère de l’évangile : il était le salut, pour un Juif pécheur. Le Juif entrait comme un objet de miséricorde, exactement comme un Gentil, par la foi en ce qui était de la part de Dieu, en grâce envers lui, quoique dans l’ordre de l’administration, l’évangile fût adressé « au Juif premièrement ».

L’évangile aussi, est « la puissance de Dieu en salut », parce que « la justice de Dieu y est révélée sur le principe de la foi pour la foi » (v. 17). L’homme n’était pas appelé à faire quoi que ce soit, Dieu ne lui demandait rien. La justice de Dieu, parfaite et absolue — ce en vertu de quoi Dieu bénirait sans limite — était révélée pour l’homme. Dieu ne pouvait exiger davantage ; Il ne pouvait, quant à la justice, donner davantage ; et cette justice était là pour l’homme et révélée ; et elle était ainsi la puissance de Dieu pour le sauver. Les œuvres de l’homme pour Dieu n’y entraient absolument pour rien : j’insiste sur ce point parce que c’est le grand principe de la vérité, c’est l’œuvre de Dieu pour l’homme. L’homme y a part, sur le principe de la foi, afin que ce soit par la grâce ; l’homme croyait seulement par grâce ce qui était révélé. C’est pourquoi aussi le croyant possédait la justice, et il la possédait, qu’il soit Gentil ou qu’il soit Juif, n’importe. Mais ici il s’agit de la propre nature intrinsèque de cette justice : c’était la « justice de Dieu » ; elle était révélée « sur le principe de la foi » (des œuvres ne produisent pas la justice de Dieu, mais la justice de l’homme), et par conséquent « pour la foi », selon qu’il est écrit : « Or le juste vivra de foi ».

Ici finit l’introduction. La personne du Seigneur Jésus et la justice de Dieu sont le grand thème de l’évangile de Dieu : le Seigneur Jésus révélé comme le libérateur, le Fils de Dieu, réclamait l’obéissance de la foi ; la justice, toujours sur le principe de la foi, révélée comme le fondement sur lequel l’homme pouvait avoir part par la grâce à la bénédiction que Dieu voulait répandre.

L’apôtre en vient maintenant à ce qui rendait cette justice de Dieu nécessaire pour nous. « Car la colère de Dieu », dit-il, « est révélée du ciel contre toute impiété et toute iniquité des hommes qui possèdent la vérité tout en vivant dans l’iniquité » (v. 18). C’est là un principe de la plus haute importance. La colère n’est pas ici une colère gouvernementale comme celle qui amène l’Assyrien contre Israël ou qui envoie Israël captif à Babylone, une chose de ce monde, pendant que Dieu était encore caché derrière le voile ; — c’est une colère qui nous dit l’incompatibilité de la nature de Dieu avec le mal. La colère de Dieu était révélée contre tout ce qui est incompatible avec Sa nature, la colère du ciel contre toute impiété ; et, là où la vérité était connue et où les hommes pouvaient paraître plus près de Dieu, comme les Juifs, s’ils possédaient la vérité tout en vivant dans l’iniquité, la colère était contre eux aussi, qui retenaient ainsi la vérité. La colère contre toute iniquité était révélée du ciel ; le Gentil, le Juif, les hommes dans quelque condition qu’ils se trouvent, tombaient sous le jugement. Ce n’était pas un Dieu caché, intervenant dans un jugement terrestre, mais Dieu Lui-même, pleinement révélé selon Sa propre nature haïssant le mal, selon une juste et nécessaire colère contre tout mal où qu’il se trouve. La nature de Dieu ne pouvait admettre aucun mal. Il pouvait y avoir eu des voies dispensationnelles — des voies gouvernementales, la patience de Dieu ; mais maintenant la colère était révélée du ciel contre toute iniquité, où qu’elle se trouve.

L’apôtre montre ensuite sur quel fondement le jugement venait sur tous les hommes, sur les nations jusqu’à la fin du chapitre 1, sur les moralistes, dans la première partie du chapitre 2, et sur le Juif, depuis le verset 17 du chapitre 2 jusqu’au verset 20 du chapitre 3. Ce qui amenait la condamnation des nations, c’est le témoignage de la création, et puis le fait qu’elles n’ont pas su garder la connaissance de Dieu (litt. : Dieu en connaissance), car Noé avait cette connaissance. Le premier motif est établi dans les versets 19 et 20 ; le second au verset 21. « Ils ont changé la gloire du Dieu incorruptible en la ressemblance de l’image d’un homme corruptible et d’oiseaux et de quadrupèdes et de reptiles » ; et comme ils ont ainsi changé la gloire de Dieu en déshonneur, Dieu les a livrés à en faire de même de la gloire de l’homme, ils se sont dégradés eux-mêmes jusqu’à l’infamie comme ils avaient dégradé Dieu dans l’idolâtrie ; cependant ils avaient connu la juste sentence de Dieu.

C’est là ce qui rendait les moralistes, tels que Socrate et ses pareils, inexcusables : ils commettaient eux-mêmes les choses qu’ils jugeaient (chapitre 2, 1 et suivants). Mais le jugement de Dieu est selon la vérité contre ceux qui commettent de telles choses. Commettre ces choses et juger autrui, ce n’était pas le moyen d’échapper au jugement de Dieu. Ou bien, méprisaient-ils les richesses de la bonté de Dieu et de Sa longue patience qui les poussaient à la repentance, amassant la colère pour le jour du jugement, jour de la révélation du juste jugement de Dieu ? Dieu juge toujours le mal moralement ; mais il y a un jour auquel ce jugement sera révélé ; et ce jugement du mal a lieu d’une manière manifeste selon la nature de Dieu. Nous avons trouvé ce principe infiniment important au verset 17 du chapitre 1, où nous avons vu, non pas le gouvernement dispensationnel sur ceux qui étaient près ou sur ceux qui étaient loin, mais Dieu révélant Son jugement de l’iniquité dans l’homme, selon ce qu’Il est. C’est pourquoi la lumière du christianisme est jetée ici sur les motifs du jugement, quoique Dieu fasse entrer la lumière réellement possédée dans la mesure de la rétribution ; mais la nature, et en jugement, l’autorité de Dieu, rejettent le mal. Qu’on soit Juif ou Gentil, il n’y a pas de différence. Quand Dieu est révélé, l’iniquité est traitée comme iniquité. Les avantages spéciaux des uns peuvent entrer dans les motifs du jugement, et s’ils ont péché sous la loi, ils seront jugés par la loi ; mais le mal est le mal, et Dieu est Dieu, que le mal soit dans un Juif ou dans un Gentil ; et auprès de Dieu il n’y a pas d’acception de personnes (v. 6-11).

Mais la révélation de Dieu, qui introduit ainsi la connaissance du jugement selon la vérité, suppose nécessairement que la vérité est là ; et l’obéissance à la vérité devient partie de l’épreuve morale de l’homme, aussi bien que la loi et la conscience naturelle. C’est pourquoi nous trouvons dans les versets 7 et 8 ce que le christianisme a mis en lumière et dans les versets 9 et 10, la tribulation et l’angoisse sur toute âme d’homme qui fait le mal, et la gloire, l’honneur et la paix sur toute âme d’homme qui fait le bien, et du Juif premièrement, et du Grec.

Il est évident que le but de l’apôtre ici n’est pas de montrer comment un pécheur peut être justifié : il veut établir que, quoique Dieu puisse tenir compte, dans Son administration de la bénédiction, de ce qu’Il avait accordé au peuple juif, Dieu cependant, maintenant qu’Il était révélé Lui-même, avait à faire avec des réalités, et qu’un Gentil pieux Lui était plus agréable qu’un Juif impie, quels que soient d’ailleurs les privilèges de ce dernier. C’était celui qui accomplissait la loi qui serait justifié, qu’il soit Juif ou Gentil — non pas celui qui avait la loi et qui la violait ; il n’y avait pas auprès de Dieu acception de personnes, et la conscience pouvait prendre connaissance du bien et du mal là où il n’y avait pas de loi, et devenir ainsi une loi pour l’homme qui n’avait pas reçu de loi de la part de Dieu. Ainsi ceux qui avaient péché sans loi, périraient sans loi, et ceux qui avaient péché sous la loi, seraient jugés par la loi (v. 12). La discussion ici ne porte pas sur la puissance ou la grâce par laquelle un homme serait amené ou rendu capable de marcher consciencieusement ; mais l’apôtre fait ressortir que c’était la réalité de la marche, et non le privilège de la position, qui était ce que Dieu reconnaissait.

Il est bon de remarquer qu’il n’y a pas de loi[4] écrite dans le cœur du Gentil, la loi écrite dans le cœur, c’est la nouvelle alliance[5] ; mais l’œuvre que la loi exige est reconnue par la conscience comme bonne ou mauvaise. La conscience sait que c’est mal de tuer ou de voler, alors qu’aucune loi n’est donnée. L’homme a acquis la connaissance du bien et du mal par la chute ; et il est de la plus grande importance de reconnaître la différence qu’il y a entre cela et la loi. Une loi impose une règle par autorité, ici l’autorité de Dieu ; la conscience au contraire prend connaissance du bien et du mal en lui-même, comme Dieu le fait. « L’homme est devenu comme l’un de nous, pour connaître le bien et le mal » (Gen. 3, 22), ce qui veut dire que la conscience prend connaissance du bien et du mal en soi-même, comme bien ou comme mal, sans aucune loi qui le prescrive ou le défende ; et dans cette mesure, un homme est loi à lui-même, la chose ne lui étant pas prescrite ou défendue comme par une loi.

Il est bon aussi de remarquer que les versets 13, 14 et 15 forment une parenthèse, et qu’il faut lier le « seront jugés par la loi » de la fin du verset 12, avec le « au jour où Dieu jugera » du commencement du verset 16.

Remarquez encore que, du côté de l’homme, comme auparavant du côté de Dieu, le jugement dont il est question ici, n’est pas un jugement gouvernemental, qu’il ne s’agit pas de voies de Dieu envers les hommes sur la terre, visitant il est vrai les péchés, chez un peuple ou dans une race, en usant de longue patience, mais que l’apôtre parle du jugement des secrets des cœurs des hommes, tout étant mis en lumière, strictement et justement jugé selon les exigences nécessaires de la nature de Dieu et selon les avantages dont les hommes ont pu jouir. Ce n’est pas Dieu gouvernant en patience, mais Dieu jugeant en justice selon ce qui est bien et ce qui est mal, comme personne ne peut le contester, et là où personne ne peut échapper. L’apôtre déclare que les secrets des cœurs des hommes seraient jugés et que les hommes apparaîtraient tels qu’ils étaient réellement, quelque cachés qu’ils puissent être d’ailleurs aux yeux des hommes.

Le verset 17 du chapitre 2 introduit positivement le Juif, en insistant sur la même vérité ; mais à l’inverse de ce qu’il avait dit du Gentil, l’apôtre déclare qu’un Juif qui se glorifiait de la loi et qui la violait, était aussi mauvais que celui qui n’avait point de loi ; le nom de Dieu était blasphémé parmi les nations à cause d’eux. Celui-là seulement est Juif qui l’est au-dedans, celui dont le cœur est circoncis, en esprit non pas dans la lettre, celui dont la louange ne vient pas des hommes, mais de Dieu.

Nous arrivons ici à un principe d’une grande importance, c’est-à-dire aux voies de Dieu, à la possession des privilèges, là où il n’y avait aucun renouvellement de cœur pour en tirer profit, et à la question de savoir si cette possession de privilèges rendait ceux qui y avaient part meilleurs et plus agréables à Dieu, car telle était la prétention du Juif (chap. 3). L’argument de l’apôtre semblait placer tous les hommes sur le même niveau : il le faisait moralement devant Dieu, sauf que les privilèges, là où ils existaient, ajoutaient à la responsabilité ; mais il admettait pleinement l’existence de très grands privilèges et de grands avantages, là où Dieu les avait placés. Si les circoncis étaient réellement incirconcision s’ils ne gardaient pas la loi, quel était l’avantage du Juif ? Grand de toute manière (chap. 3, 1, 2). L’apôtre, je le répète, reconnaît tous les privilèges des Juifs, spécialement celui d’être les dépositaires des Écritures, « des oracles de Dieu », et si quelques-uns ne croyaient pas, leur incrédulité ne rendrait pas vaine la foi, c’est-à-dire n’annulerait pas la fidélité de Dieu. Dieu serait vrai, si tout homme était menteur ; Il accomplirait Sa parole. Mais si cet accomplissement de Sa parole en dépit de l’infidélité de l’homme, ne faisait que démontrer davantage Sa fidélité en sorte qu’Il est d’autant plus glorifié par l’infidélité de l’homme, ce fait n’empêchait pas que Dieu juge le mal. Autrement, Dieu ne pourrait juger le monde en aucune manière. Si l’injustice de l’homme rendait plus manifeste la justice de Dieu, pourquoi Dieu le jugerait-Il encore à cause de cette injustice ? — C’est ici un principe général, mais qui a une application particulière aux Juifs, car plus les Gentils s’opposaient à eux, et étaient jaloux d’eux et les foulaient sous leurs pieds, plus la fidélité de Dieu apparaissait, et Dieu ne pouvait pas plus juger les Gentils, le monde, que les Juifs. Mais c’est un principe général que, si l’injustice de l’homme constate ou démontre la justice de Dieu, ce fait ne rend pas Dieu injuste s’Il juge.

L’apôtre revient ensuite à la forme dans laquelle ce principe s’applique aux Juifs : si le mensonge du Juif rendait plus glorieuse la fidélité de Dieu à Ses promesses, pourquoi Dieu le jugerait-Il encore comme pécheur ? Ou plutôt faisons du mal, afin qu’il en arrive du bien (l’apôtre revenant dans cette dernière partie au principe général), comme en effet quelques-uns accusaient les chrétiens de dire. En face d’un pareil principe, l’apôtre ne condescend pas à raisonner ; il dit simplement : « desquels le jugement est juste ». Non, tout notre péché constate cette patiente fidélité de Dieu à Ses promesses et à Sa bonté. L’homme rejetterait bien vite ceux qui agiraient envers lui comme lui le fait envers Dieu. Mais cela n’empêche pas la responsabilité, et le péché, et le jugement.

Le Juif avait donc des avantages. Était-il donc plus excellent que les Gentils ? Nullement ; l’apôtre avait déjà « accusé et Juifs et Grecs d’être tous sous le péché » (v. 9). Il cite ensuite d’abord d’après les Psaumes, et puis d’après Ésaïe, le témoignage des Écritures qui déclaraient entièrement pécheurs tous ceux auxquels elles étaient adressées.

Le Juif se glorifiait de ce que ces Écritures étaient pour lui, et pour lui seul : Eh bien, dit l’apôtre, nous savons que tout ce que la loi dit, elle le dit à ceux qui sont sous la loi ; prêtons donc l’oreille à sa voix, et écoutons ce qu’elle leur dit. Le voici : « Il n’y a point de juste, non pas même un seul » (v. 10). Les Gentils étaient notoirement tombés dans toute sorte de vices, de dépravation et d’idolâtrie ; les Juifs étaient la race privilégiée, et leur privilège particulier était celui-ci, que les oracles de Dieu leur avaient été confiés. Or l’apôtre reconnaît expressément que la loi parlait à ceux qui étaient sous la loi ; mais la loi déclarait qu’il n’y avait « point de juste ». Le Juif était donc condamné par ce dont il se glorifiait lui-même. Et lisez maintenant le témoignage que ces Écritures rendent de l’état de l’homme, de l’homme le plus avantagé, possédant ce que Dieu a à donner, comme le frère aîné dans l’histoire du prodigue. Il n’y a point de juste ; personne qui comprenne, qui ait de l’intelligence dans le sens spirituel ; personne qui recherche Dieu ; en volonté, tous se sont détournés du droit chemin ; il n’y en a aucun qui exerce la bonté ; pas même un seul ; partout le mal, sans exception, si on était mis à l’épreuve ! L’apôtre entre ensuite dans les détails des formes complètes du mal dans lesquelles cet état se développe. Des caractères aimables, on peut en rencontrer chez quelques-uns, comme on peut en trouver aussi chez les animaux ; mais de cœur qui recherche ou qui craigne Dieu, on n’en trouve point ! Toute bouche est fermée, et tout le monde est coupable devant Dieu : les Gentils, notoirement sans frein, et réprouvés dans leur entendement, pratiquant avidement toute impureté ; le Juif condamné par sa propre bouche en ce dont il se vantait. Ainsi bien loin que quelqu’un soit justifié par les œuvres de la loi, la loi apportait avec elle « la connaissance du péché ». Le péché était partout ; la loi en donnait la conviction positive (v. 19, 20).

L’apôtre clôt la démonstration de cet état qui donnait occasion à la colère de Dieu d’être révélée du ciel, la démonstration s’étendant dans son ensemble depuis le verset 19 du chapitre 1, à la fin du verset 20 du chapitre 3.

Ensuite l’apôtre revient à son véritable sujet, tel qu’il l’avait formulé au verset 17 du chapitre 1, la justice de Dieu. L’homme, cela était évident, n’avait point de justice. Juifs et Gentils étaient tous sous le péché ; mais maintenant la justice de Dieu, entièrement sans loi, était manifestée. La loi et les prophètes lui rendaient témoignage (chap. 3, 21). C’est ici le point capital : la justice de Dieu était manifestée. Cette justice est « par la foi en Jésus Christ » ; c’est là le « comment » de sa manifestation et de sa réception ; elle est envers tous. Si elle avait été la justice de l’homme, elle aurait dû être par la loi, et elle aurait été par conséquent pour les Juifs seuls, car eux seuls avaient cette loi ; mais c’est la justice de Dieu, et elle est « par la foi », et ainsi elle est pour tous, et réellement, puisqu’elle était par la foi en Jésus Christ, sur tous ceux qui croyaient ; car il n’y a pas de différence, car tous ont péché, tous sont également sous le péché ; mais la justice de Dieu est par la foi, sur tous ceux qui croient. La justification est gratuite par la grâce de Dieu, par la rédemption qui est dans le Christ Jésus (v. 22-24).

Ce passage nous fournit le thème de la doctrine de la justice comme un tout, complet en lui-même. Le verset 17 du chapitre 1 nous dit que la justice de Dieu est révélée dans l’évangile. Maintenant, en contraste avec la loi (sans loi, entièrement à part de la loi), nous savons le « comment » de cette justice dans son application : elle est par la foi en Jésus Christ envers tous, applicable et présentée sur le principe de la foi à tous et sur tous ceux qui croient. Tous également étaient sous le péché et démontrés tels, la justification de tous également est gratuite par la grâce de Dieu, par la rédemption — cette rédemption qui est dans le Christ Jésus.

Nous trouvons ensuite des détails additionnels et la manière de l’application de cette justification aux saints de l’Ancien Testament et à ceux qui ont vécu après la mort de Christ. Dieu, nous dit l’apôtre, a présenté Christ pour « propitiatoire », pour lieu d’accès sur le fondement de la rédemption et du sang présenté à Dieu comme expiation ou propitiation pour les péchés. Or, pour ce qui concerne les saints de l’Ancien Testament, ceci, maintenant, montre la justice de Dieu en présence du support dont Dieu avait usé envers eux alors qu’ils péchaient. Le support de Dieu avait été montré au temps où ces hommes vivaient ; mais où était la justice si Dieu passait ainsi par-dessus les péchés des Abraham, des Samuel, des David, et de leurs pareils ? Cette justice était démontrée maintenant. Dieu avait pu user de support en vue de la propitiation que Christ devait opérer, propitiation toujours présente à Dieu, et sur le fondement de laquelle Il agissait, comme si elle était déjà accomplie, pour autant qu’il s’agissait du pardon des péchés.

Ensuite, pour ce qui regarde les saints qui ont vécu après l’accomplissement de l’œuvre de la rédemption, la pleine justice de Dieu était présentement mise en évidence : cette justice était montrée dans le temps présent, savoir ce par quoi Il pouvait être juste en justifiant ceux qui croyaient en Jésus Christ. C’était là une vérité d’une immense importance. Dieu avait montré Son support dans les temps précédents, où ce qui autorisait l’exercice de ce support selon Sa justice n’était pas révélé. Maintenant la justice de Dieu est révélée, d’abord relativement à ce long support et à la rémission des péchés précédents ; puis la même justice de Dieu est encore pleinement révélée, c’est-à-dire le fondement qui a été posé pour la justification de ceux qui croiraient en Jésus. La justice de Dieu en faisant ainsi était aussi clairement manifestée que le fondement sur lequel elle s’exerçait était parfaitement établi. La justice de Dieu était pleinement démontrée dans l’élévation de Christ à la droite de Dieu, comme nous lisons au verset 10 du chapitre 16 de Jean : Christ a pris place à la droite de la majesté dans les hauts lieux, en vertu de ce qu’Il a glorifié Dieu parfaitement à la croix et de ce qu’Il a ainsi révélé et déclaré la justice de Dieu. Dans la partie de l’épître aux Romains qui nous occupe en ce moment, nous trouvons simplement le fait que la justice de Dieu est maintenant manifestée quant à la rémission des péchés précédents et justifiant ceux qui croient maintenant, Christ étant présenté pour propitiatoire par la foi en son sang. La valeur du sang de Christ apporte le témoignage de justice dans la rémission des péchés précédents ; mais elle apporte une justification présente et connue de ceux qui croient, en maintenant pleinement la justice de Dieu. Dieu est juste et justifiant, non pas condamnant, ceux qui croient.

Toute vanterie de la part de l’homme est donc exclue, car c’est par l’œuvre de Dieu et par la grâce de Dieu que l’homme est justifié, non pas par la loi des œuvres évidemment, car dans ce cas l’homme pourrait trouver de quoi se glorifier, mais par la loi de la foi, qui recevait simplement par grâce l’effet de l’œuvre d’un autre. Nous voyons ici ce que nous retrouverons plus loin encore, savoir que l’expression de loi est employée pour désigner un principe agissant dans un certain sens, la loi de la foi, la loi des œuvres. C’est pourquoi, comme nous ne pouvons pas mêler les deux principes, dont l’un fait gagner une chose par des œuvres et l’autre fait recevoir la chose par la foi (et à vrai dire une autre chose : la justice de Dieu, non pas celle de l’homme), l’un de ces principes exclut l’autre ; et nous concluons, non seulement qu’un homme est justifié par la foi, par le sang de Christ, par grâce, mais encore qu’il est justifié ainsi, entièrement à part et à l’exclusion de toutes œuvres de loi. Dieu justifie les pécheurs en intervenant pour eux, et ce n’est pas l’homme qui est juste par une loi qu’il a gardée, car tous sont sous le péché.

Et Dieu est-Il seulement le Dieu d’un peuple, même de Son peuple ? N’est-Il pas le Dieu de toutes les nations ? Oui certes, aussi des nations ; et maintenant, en grâce, exactement comme Il l’est pour le Juif qui avait besoin de la grâce tout autant que le Gentil ; car c’est un seul et même Dieu qui justifie la circoncision (laquelle cherchait sa propre justice par la loi) sur le principe de la foi, gratuitement par grâce, et, si un Gentil avait cette foi, justifie ce Gentil par la foi qu’il avait. Tel est le sens des mots rendus par « sur le principe de » et « par », ou par le moyen de, quand quelqu’un possédait la foi. Le Juif cherchait la justice sur un faux principe ; l’évangile révélait le vrai principe, qui était la foi. Si le Gentil avait la foi, il avait la justification qui était donnée sur ce principe.

Si donc cette justification était par la foi à l’exclusion de la loi, anéantissait-elle la loi ? Nullement. La loi apportait la conviction de péché ; elle faisait plus, elle apportait la malédiction, de laquelle celui qui était sous elle avait à être délivré ; et la justification d’un tel homme, la délivrance d’un tel homme de la malédiction, par le moyen de Christ portant la malédiction, donnait à la loi la plus haute sanction possible. Le fait que Christ a dû porter la malédiction de la loi, établissait l’autorité de la loi, comme aucun autre moyen ne le faisait. L’apôtre venait de se servir de l’autorité de la loi pour convaincre pleinement le Juif de péché, en sorte que le sang de Christ, et la grâce et la rédemption devenaient nécessaires pour lui ; et leur introduction, nécessaire pour le Juif qui était sous la loi, si elle mettait de côté toute justice par la loi, reconnaissait pleinement l’autorité de la loi, comme plaçant les Juifs sous la transgression de laquelle ils avaient besoin d’être justifiés. Le paiement d’une dette reconnaît la dette, et l’obligation qui en faisait une dette, quoique (et dans ce par quoi il y met fin) ce paiement y mette fin. Il y a plus que cela dans la loi sans doute ; je me sers seulement de la figure pour montrer que, mettre fin à une chose peut démontrer positivement l’obligation de cette chose.

La justice par la foi était un principe incompatible avec la loi. Sur le principe de la foi, l’œuvre de Dieu en grâce justifiait gratuitement ; selon la loi, l’œuvre de l’homme en justice rendait la paix, la rédemption et l’œuvre de Dieu inutiles. L’obéissance, non plus, sous la loi ne produisait pas ce que la grâce faisait après tout ; elle n’était pas, si même elle était accomplie, la justice de Dieu, mais la justice de l’homme. Mais la rédemption, la grâce, et le sang de Christ, efficaces par la foi, reconnaissaient l’autorité de la loi et lui donnaient sa sanction, en satisfaisant d’une autre manière à ce qu’exigeaient les péchés commis et la condamnation encourue sous elle. La chose avait lieu sur un principe différent, absolument incompatible avec la loi comme moyen de justice ; mais elle reconnaissait les exigences de la justice faites par la loi comme faites par Dieu et, quand l’homme avait failli, satisfaisait à ces exigences en grâce. La loi et la foi ne pouvaient pas opérer ensemble, car elles se contredisaient l’une l’autre en tous points : l’une se reposait sur la grâce, l’autre sur les œuvres ; l’une sur l’œuvre de Dieu, l’autre sur l’œuvre de l’homme. L’une, par conséquent, si elle avait été accomplie, ce qu’elle n’était pas, aurait produit la justice de l’homme ; l’autre donnait la justice de Dieu par une œuvre achevée. Mais la grâce qui est incompatible avec la loi, reconnaissait les exigences de la loi et y satisfaisait, afin de justifier gratuitement celui qui avait failli sous la loi.

Mais il y avait, dans l’histoire d’Israël, plus que la loi. Il y avait (chap. 4) les Abraham et les David, des promesses, et la fidélité de Dieu qui reconnaissait les promesses. Sur quelle base la position de ces hommes reposait-elle ? Qu’est-ce qu’Abraham a trouvé ? A-t-il été justifié sur le principe des œuvres ? S’il a été justifié sur le principe des œuvres, il a de quoi se glorifier, mais non pas relativement à Dieu. Des preuves devant les hommes, pour rendre manifeste devant eux la réalité de la foi, il peut y en avoir eu, et il y en a eu ; mais devant Dieu Abraham a été tenu pour juste, par la foi. « Abraham crut Dieu, et cela lui fut compté à justice. Or à celui qui fait des œuvres, le salaire n’est pas compté à titre de grâce, mais à titre de chose due ; mais à celui qui ne fait pas des œuvres, mais qui croit en celui qui justifie l’impie, sa foi lui est comptée à justice » (v. 3-5). Ce principe établi sur l’exemple d’Abraham est appuyé par le témoignage de David : « Bienheureux ceux dont les iniquités ont été pardonnées et dont les péchés ont été couverts ; bienheureux l’homme à qui le Seigneur ne compte point le péché » (v. 7, 8). Remarquez que, jusqu’ici, l’imputation de la justice ne va pas plus loin que le pardon des péchés ; nous trouverons davantage ensuite, mais ici c’est tout : un homme est justifié de ce dont il est coupable, de ses péchés ; et par rapport à cela il est tenu pour juste ; car tel est le sens de l’expression « compter la justice ». Sa foi lui est comptée à justice. Ce n’est pas tant mis à son compte[6] : Abraham crut Dieu et fut tenu pour juste à cause de sa foi. Ce n’était pas que sa foi avait telle valeur en elle-même, qui lui a été mise en compte, comme autant de justice ; mais il a été estimé ou compté juste à cause de sa foi. Dieu le considérait comme un homme juste à cause de sa foi. C’est ainsi que David parle d’un homme tenu pour juste sans œuvres. Aucun péché ne lui était imputé ; il était tenu pour entièrement quitte ou justifié du péché devant Dieu, quand le péché était pardonné ou couvert. Dieu a satisfait à la responsabilité de l’homme, et l’homme est envisagé comme justifié du péché.

Cette béatitude venait-elle sur la circoncision seulement, ou aussi sur l’incirconcision ? Car nous avons établi que la foi fut comptée à Abraham (v. 9). Quand lui fut-elle comptée ? Lorsqu’il était circoncis, ou incirconcis ? Incirconcis ; — en sorte que, dans un exemple pas moindre que celui d’Abraham, nous trouvons un homme incirconcis justifié par la foi. La circoncision n’était que le sceau de la justice qu’il avait alors qu’il était incirconcis. Et ainsi il était le père de tous ceux qui croient, même s’ils sont incirconcis comme les Gentils croyants, afin qu’ils soient tenus pour justes aussi par la foi ; et de plus le père d’une vraie séparation pour Dieu (car c’est ainsi que j’entends le passage, quoique sa forme soit un peu étrange), non seulement pour Israël circoncis, mais pour tous ceux qui marchaient dans la foi d’Abraham — la circoncision, non dans la lettre, mais en esprit.

L’apôtre développe ensuite les principes du cas d’Abraham. La promesse d’être héritier du monde n’a pas été faite à Abraham par la loi, mais par la justice de la foi ; car si ceux qui sont du principe de la loi sont héritiers, la foi est rendue vaine (v. 13, 14). Faire d’Israël sous la loi exclusivement l’héritier, c’était détruire le principe sur lequel Abraham possédait l’héritage : Abraham avait été fait héritier par la foi, et non par une loi quelconque. Promesse n’est pas loi ; et vouloir établir l’héritage sur la loi et le donner à Israël à cause de la loi, c’était rendre vaine la promesse. La promesse et la foi en la promesse vont ensemble. La loi c’est l’œuvre de l’homme, et, du côté de Dieu, ce qu’Il exigeait de l’homme, non une promesse à l’homme. Et certes la loi produit la colère au lieu de donner un héritage ; car là où il n’y a pas de loi, il n’y a pas non plus de transgression, car il n’y a rien à transgresser : produire la colère et amener des transgressions n’est assurément pas une promesse. Mais l’héritage est sur le principe de la foi, non pas de la loi, afin qu’il soit par la grâce ; car la foi précisément croit à la grâce montrée, et ainsi la promesse est assurée à toute la semence, car la grâce peut la donner à un Gentil, et la foi, dans un Gentil, peut la recevoir ; elle peut non pas simplement la donner à la semence sous la loi, quoique par la foi elle aussi pouvait la recevoir, mais la donner à quiconque avait la foi d’Abraham qui est le père non seulement des Juifs, mais de nous tous (selon qu’il est écrit : « Je t’ai établi père de plusieurs nations ») devant Dieu, le Dieu qu’Abraham avait cru.

Ceci introduit un autre principe (v. 17 et suivants). Quand Abraham reçut la promesse, il était comme mort. Le Dieu qu’il crut, est un Dieu qui est au-dessus de la misère et de la faiblesse de l’homme, et Il appelle les choses qui ne sont pas comme si elles étaient. Abraham crut Dieu, en dépit de son état de mort et de celui de Sara : il y eut là comme une résurrection. Mais ceci introduit encore un autre grand et important principe. Nous avons vu la grâce de la part de Dieu et la foi de la part de l’homme, en relation avec la promesse, d’un côté, et avec la rédemption qui est en Christ, de l’autre côté. Maintenant la puissance intervient, la puissance de Dieu : ce n’est pas Dieu s’occupant de l’homme et entrant en rapport avec lui en vertu de quelque chose de bon ou de quelque capacité qui serait dans l’homme, mais c’est Dieu qui ressuscite les morts, et qui, selon cette puissance, appelle les choses qui ne sont pas comme si elles étaient : Il peut les amener à l’existence quand Il les appelle. Ceci s’applique au cas d’Abraham et, dans sa nature, à la résurrection de Christ.

La loi exige de la puissance dans l’homme pour l’accomplir, Dieu ressuscitant les morts n’exige évidemment aucune puissance dans ceux qui sont ressuscités, et les choses qui ne sont pas n’ont aucune capacité pour devenir des choses qui sont. Abraham crut Dieu ; il n’eut égard à aucune circonstance qui, quant à la faiblesse de l’homme, rendait impossible l’accomplissement de la promesse, parce que celui qui parlait en vérité, pouvait faire toutes choses en puissance. Abraham fut pleinement persuadé de cela : c’est pourquoi si Dieu parlait, la chose qu’Il avait dite était certaine, aucun défaut de puissance ne pouvait la faire manquer ; et cette reconnaissance de ce que Dieu était, cette foi (qui par la grâce justifiait Dieu dans Sa parole — Lui donnait son vrai caractère) était comptée à Abraham à justice. Quand l’homme justifie Dieu dans Ses œuvres, Ses paroles et Ses voies, quand il ne se justifie pas lui-même, Dieu le justifie. Ces voies sont en Christ. Mais notre foi, quoique en principe la même, a cependant, en un point très important, un caractère différent de celle d’Abraham. Abraham crut que Dieu était puissant pour accomplir ce qu’Il avait promis ; nous, nous croyons qu’Il a ressuscité Christ d’entre les morts : Son œuvre est une œuvre accomplie ; Christ a été livré pour nos fautes et a été ressuscité pour notre justification (v. 23-25).

Mais, remarquez-le, la foi dont il est question ici, est la foi « en Celui qui a ressuscité d’entre les morts Jésus notre Seigneur ». La justice nous est comptée, à nous qui croyons en Celui qui a ressuscité Christ d’entre les morts ; en sorte que nous ne reconnaissons pas seulement l’œuvre de Christ, mais Son acceptation par Dieu, avec la puissance de Dieu de ressusciter les morts, comme disait Jean-Baptiste : « Dieu peut, de ces pierres, susciter des enfants à Abraham ». Dieu est intervenu en puissance, comme étant pleinement satisfait, pour ressusciter Christ (qui, par grâce, avait pris nos péchés sur Lui) de l’état où nos péchés L’avaient amené. Sans parler de Sa personne, Dieu ne pouvait pas laisser Christ dans le tombeau, car Dieu était satisfait à l’égard des péchés et a justement ressuscité Christ d’entre les morts en témoignage public de cette satisfaction.

Voyez maintenant combien est complète la déclaration que nous avons trouvée relativement à nos péchés : nous sommes justifiés gratuitement par la grâce de Dieu ; nous avons la rédemption dans le Christ Jésus ; nous avons Son sang pour propitiatoire par la foi en Lui ; nous avons la justice de Dieu en rémission des péchés ; Dieu est juste et justifiant celui qui croit, Christ ayant été livré pour nos fautes et ressuscité pour notre justification, Dieu Lui-même L’ayant ressuscité d’entre les morts. Ainsi toute la question quant aux péchés, à la culpabilité, à tout ce pour quoi nous avions à répondre au jour du jugement, a été pleinement vidée, et le pardon, la justification, la rédemption ont été mis en évidence en justice, et cela par la grâce parfaite. Toute l’œuvre de Christ, relativement à ce pour quoi nous avions à répondre, est complète, Dieu ayant mis Son sceau sur elle dans la résurrection ; la grâce est complète (car elle a aussi beaucoup à donner) ; et, nous qui croyons, nous sommes justifiés par la foi devant Dieu. Nous verrons qu’une autre question surgit ; mais pour ce qui concerne nos péchés, pour tout ce que nous avons fait, tout ce pour quoi nous aurions eu à répondre au jour du jugement, la question est complètement vidée. Dieu a accompli Sa propre œuvre en grâce ; Christ, qui a été livré pour nos fautes, est ressuscité d’entre les morts. Dieu a mis Son sceau sur l’achèvement et l’efficacité de Son œuvre. C’est dans le Dieu qui a fait cela que nous croyons ; Sa grâce nous a justifiés en justice.

Dans toute cette partie de l’épître il n’est pas question d’expérience : c’est un point qu’il vaut la peine de noter. Sans doute nous sommes heureux, en ayant, comme résultat, le pardon de nos péchés ; mais le bonheur dont nous jouissons ainsi n’est pas la conséquence d’un travail intérieur, aboutissant à la délivrance dans la puissance de la grâce divine, mais une œuvre complète, accomplie, par laquelle la justice de Dieu est manifestée — l’œuvre de Dieu satisfaisant à tout ce qu’exigeaient nos péchés, à cause desquels Il nous avait déclarés coupables, car « il n’y a point de juste, non pas même un seul », et nous avait démontrés tels. Dieu a accusé tous, Juifs et Grecs, d’être sous le péché ; et il n’y a pas de différence, car tous ont péché, étant justifiés gratuitement par Sa grâce. Il s’agit d’un état de culpabilité, de culpabilité démontrée, non pas d’expérience, et puis de complète justification par le sacrifice de Christ, livré pour nos offenses, non pas de ce qui se passe dans nos cœurs. L’expérience de ce qui est en nous, et la délivrance, viendront plus tard dans les chapitres 7 et 8.

Ce que nous venons de dire montre combien est complète cette partie de notre épître, pour ce qui est du sujet particulier qu’elle traite, et combien l’évangile se rapporte en premier lieu à la culpabilité et à la délivrance — à notre justification de cette culpabilité, non à notre état ou à notre nature, quoique les fruits du vieil homme constituent cette culpabilité. Nous voyons en même temps comment on peut prêcher l’évangile de la pleine et libre grâce de Dieu sans toucher par là à notre nature et à notre état, bien qu’un état d’âme stable et bien établi ne puisse exister sans l’expérience et la délivrance que nous fait connaître la partie subséquente de l’épître. L’homme naturel peut comprendre le pardon, le paiement d’une dette ; un enfant, sur le point d’être puni, sait ce que c’est que d’être pardonné ; mais une âme qui passe par les exercices intérieurs que produit l’Esprit de Dieu peut seule comprendre ce qu’est le péché dans la chair et ce qu’est la délivrance de son pouvoir. Il est parfaitement vrai que pour qu’il y ait une œuvre réelle, même quant au pardon, il faut que nous ayons été amenés à la conviction que nous sommes coupables dans nos péchés : il faut que la conscience soit atteinte, il faut que la culpabilité soit reconnue, il faut que la déclaration de l’épître, relativement à cette culpabilité, savoir que nous sommes sous le péché, trouve son application personnelle et son écho dans la conscience ; il faut que notre juste condamnation soit signée et ratifiée par notre propre conscience, en sorte que nous soyons convaincus que nous — que moi — nous avons à être justifiés gratuitement. Mais nous voyons cependant qu’avec le simple sentiment que nous avons péché, alors même qu’il n’y a chez nous aucun sentiment réel de l’existence du vieil homme et de notre éloignement de Dieu par elle, nous pouvons comprendre le pardon ; nous pouvons même le supposer, sans le posséder véritablement, et sans qu’aucune réconciliation soit effectuée, non pas qu’il y ait manque de sincérité, mais on se trompe soi-même. On voit ainsi, je le répète, comment l’évangile de la repentance quant aux péchés dont nous sommes coupables, et de la rémission de ces péchés, peut être prêché sans que l’expérience de ce que nous sommes par nous-mêmes ait été produite dans les âmes. Je n’ai pas besoin de le dire : il faut qu’il y ait une franche reconnaissance de notre culpabilité, dans la conscience, pour qu’il y ait chez nous quelque réalité de repentance ou de pardon ; mais il n’est pas nécessaire pour cela d’une connaissance expérimentale quelconque de nous-mêmes. Cette connaissance de nous-mêmes peut précéder la connaissance du pardon, et sera dans ce cas accompagnée généralement d’une grande détresse d’âme, et nous trouverons à la fois le pardon et un repos de conscience permanent. Mais les deux choses sont clairement distinguées dans cette épître, l’expérience de ce que nous sommes venant la dernière. Le témoignage — le témoignage, la démonstration et le jugement de Dieu quant à la culpabilité universelle, au pardon, et à la justification avec ses bienheureux résultats par l’œuvre de Christ livré pour nos fautes et ressuscité pour notre justification — est déjà complet à la fin du verset 11 du chapitre 5. Quand nous en viendrons aux chapitres suivants, nous aurons l’occasion de parler de l’expérience elle-même, et de notre état dans la chair par la chute d’Adam. Tout ce que je fais pour le moment, c’est de montrer la différence qui existe entre les deux choses.

Avant de poursuivre toutefois le cours de l’enseignement de l’épître, je ferai ressortir un autre point. Nous trouvons au troisième chapitre une allusion au propitiatoire, et à la fin du quatrième, l’histoire du bouc « azazel » ou tout au moins ce qui répond à ces deux choses (comparer Lév. 16). C’est pourquoi il faut traduire, au verset 25 du chapitre 3, « lequel Dieu a présenté pour propitiatoire, par la foi en son sang » ; c’est pourquoi aussi l’Esprit fait mention des « péchés précédents », et ensuite, non pas encore de ce côté de l’œuvre où Christ nous est présenté comme portant les péchés, mais de cet autre aspect de l’œuvre qui est la glorification du caractère de Dieu révélé comme étant juste et justifiant ceux qui croient en Jésus. C’est ce dernier côté qui est le témoignage adressé au monde : Christ est présenté comme un propitiatoire par la foi en Son sang. Ce premier bouc était le lot de l’Éternel. Tout ce que Dieu est — Sa majesté, Sa vérité, Sa justice contre le péché, Son amour, tout a été glorifié parfaitement dans la mort de Christ (Jean 13, 31, 34 ; 17, 4), sans qu’il soit dit encore qui ou combien de personnes seront sauvées. C’est pourquoi le message de la grâce et la supplication peuvent être adressés à tout le monde : Dieu est satisfait, glorifié dans le sang qu’Il a sous les yeux, et Il dit : « Venez ! ». Ici, le sang sert au pardon, et afin que Dieu soit juste en justifiant. À la fin du chapitre 4, l’Esprit introduit le mot : « nos » ; nous y lisons que Christ a été livré pour nos fautes, les fautes de ceux qui peuvent parler par la foi, et dire « nos ». La Parole parle ici par conséquent de fautes positives pour lesquelles Christ a été livré, comme le souverain sacrificateur confessait les péchés du peuple sur la tête du bouc azazel ; car porter les péchés, « nos péchés en son corps sur le bois », est une chose différente que de glorifier Dieu dans Son caractère, en mourant là où le péché était entré. Les deux aspects du sacrifice ont leur place et leur importance particulières, l’un pour la gloire de Dieu, et afin que la grâce puisse se répandre librement en justice, l’autre pour ôter nos péchés, comme cela était nécessaire.

Je reprends maintenant le sujet général renfermé dans les onze premiers versets du chapitre 5, qui nous donnent l’exposé complet de l’effet de l’œuvre de cette grâce de la rédemption par Christ livré pour nos fautes selon l’infinie grâce de Dieu.

L’épître aux Romains nous fournit deux exposés distincts de la position des croyants : l’un qui est celui qui nous occupe dans ce moment, et qui est renfermé dans les onze premiers versets du chapitre 5, et l’autre que nous trouvons au chapitre 8 ; le premier nous montrant ce que Dieu Lui-même est en grâce pour nous, avec les bienheureuses conséquences qui en découlent, le second nous faisant connaître la position du croyant en Christ devant Dieu, et ce que Dieu est pour lui dans cette position. Le chapitre 8 nous présente le croyant plus pleinement et plus complètement devant Dieu, sa mauvaise nature ayant été mise à découvert par la loi, et sa délivrance à cet égard ayant été exposée ; mais la première moitié du chapitre 5 nous apprend davantage ce que Dieu est en Lui-même en grâce. L’un des passages nous dit ce que Dieu est pour le pécheur, et nous présente par conséquent davantage ce que Dieu est en Lui-même avec les conséquences qui en découlent, en grâce ; l’autre nous montre le croyant en Christ devant Dieu, nous faisant faire un pas en avant quant au saint, et ayant un prix particulier en ce qu’il nous montre ce que Dieu est pour lui, mais non pas aussi complètement ce que Dieu est en Lui-même par Christ envers les hommes. Ce dernier sujet est par conséquent plus amplement exposé au chapitre 5, 1-11, où nous trouvons toute la glorieuse bénédiction qui découle de Christ, depuis la paix avec Dieu, jusqu’à la joie en Lui ; mais c’est l’amour constaté envers nous lorsque nous étions pécheurs (et pour cette raison davantage ce que l’amour est en Dieu Lui-même), non pas la position d’un homme en Christ devant Dieu ; sujet sur lequel nous aurons l’occasion de revenir plus amplement quand nous arriverons au chapitre 8.

Nous ferons seulement remarquer ici que jusqu’à la fin du verset 11 du chapitre 5, l’enseignement du Saint Esprit se rapporte aux péchés, et depuis le verset 12 de ce chapitre jusqu’à la fin du chapitre 8, à la délivrance du péché. La première de ces deux portions de l’épître, parle de Christ livré pour nos fautes ; la seconde, du fait que nous avons été crucifiés avec Lui, et qu’ainsi nous sommes morts au péché. Mais pour le moment le sujet qui nous occupe, c’est que Christ a été livré pour nos fautes, et qu’Il a été ressuscité pour notre justification. Nous avons aussi appris que cette glorieuse vérité est reçue par la foi comme une chose accomplie : Dieu a accepté le sacrifice comme une propitiation satisfaisante, démontrée en ce qu’Il a ramené Christ d’entre les morts, Christ qui, par conséquent, a été ressuscité pour notre justification, selon la justice de Dieu. Nous avons trouvé la propitiation par la foi au sang de Christ, au chapitre 3 — la justice de Dieu manifestée, Dieu étant juste et justifiant celui qui croit ; et maintenant, au chapitre 4, nous avons la résurrection de Christ pour notre justification quand Il avait été livré pour nos fautes. Cette œuvre faite tout entière en dehors de nous, à laquelle nous n’avons d’autre part que nos péchés (et béni soit Dieu de ce que, nous qui croyons, nous pouvons dire que Christ les porta là), et la haine qui Le crucifia et Le mit à mort par des mains iniques ; cette œuvre, qui est le fruit de la souveraine et libre grâce de Dieu et de la croix de Christ livré pour nos fautes, a le sceau de Dieu sur elle dans la résurrection, comme étant complète et suffisante, et bien plus que cela, quoique nous n’allions pas plus loin ici, comme étant le fruit de la libre grâce et de l’amour de Dieu envers nous.

Non seulement donc, la justice de Dieu est déclarée, Dieu étant « juste et justifiant celui qui est de la foi de Jésus » ; mais, « ayant… été justifiés sur le principe de la foi, nous avons la paix avec Dieu » (chap. 5, 1). Tout ce qui s’élevait entre Dieu et nous par nos péchés, a été ôté ; la résurrection de Christ en est le témoignage de la part de Dieu pour nous qui, le sachant par la foi, avons ainsi « la paix avec Dieu ». La paix avec Dieu ! C’est ici une expression d’une très grande portée ; c’est la paix avec Dieu tel qu’Il est. S’il y avait quoi que ce soit qui trouble moralement Sa sainte nature, ou si nous avions quelque chose sur notre conscience, nous n’aurions pas la paix avec Dieu ; mais il n’y a rien. Notre justification est exclusivement l’œuvre de Dieu Lui-même, connue par la foi, en sorte qu’il ne reste ni tache, ni nuage. Nous avons la paix avec Dieu par notre Seigneur Jésus Christ : c’est Lui qui l’a faite, et elle est parfaite. Mais par Lui aussi, nous avons accès, par la foi, à cette grâce ou à cette faveur dans laquelle nous sommes — ce qui est notre condition présente — une faveur meilleure que la vie, la faveur divine ! Si j’élève mes yeux vers Dieu, je ne trouve rien comme relation présente avec Lui que la faveur divine reposant sur moi. Aucun nuage ne voile la lumière de Sa face ; Il m’aime de l’amour dont Il aime Jésus, et je trouve là mon repos. L’espérance qui est devant moi, car telle est la valeur du sacrifice de Christ, est la gloire de Dieu. Je me glorifie dans cette espérance. Il m’introduira dans cette gloire, dont l’espérance éclaire déjà d’une lumière céleste le sentier dans lequel je marche.

Telle est dans ses traits essentiels la bénédiction que je reçois comme résultat de l’œuvre bénie de Christ, et de la grâce qui Le donna, et qui me donna à moi une part dans cette œuvre, par la foi ; mais ce n’est pas tout. Deux fois le Saint Esprit ajoute : « Et non seulement cela ». Moi qui crois, j’ai en effet, dans ces trois choses, savoir la paix avec Dieu quant à tout ce qui pouvait me constituer coupable et ôter la paix, la faveur présente de Dieu, et l’espérance de Sa gloire, l’exposé complet de ce qui m’est donné jusqu’à ce que vienne la gloire elle-même. Le passé, le présent et l’avenir, un avenir éternel, tout est parfaitement réglé et établi en grâce.

Mais il y a le chemin qui mène à la gloire, et plus que cela, le donateur, aussi bien que le don. Tout ce qui me concerne, quant à ce que la grâce me donne, est complet ; mais j’ai beaucoup à apprendre ; il y a bien des choses en moi qui ont besoin d’être corrigées, bien des choses peut-être à mater, bien des choses qui tendent à voiler chez moi la vue de la gloire, et à m’empêcher de fixer mon cœur sur elle. Je trouve des tribulations sur ma route, et je me réjouis et je me glorifie en elles aussi. Elles produisent la patience, une soumission de la volonté, et la tranquillité d’esprit qui en est le fruit. Je suis amené ainsi à une connaissance plus complète de moi-même, à une plus grande séparation de cœur du monde que je traverse, à un sentiment plus net — ma part étant en un autre — de ce que Dieu est pour moi le long du chemin, comme les Israélites apprirent dans le désert ce qu’ils étaient, et quelle était la patiente bonté de Dieu pour eux, tout le long de la route. Israël fut humilié et éprouvé, pour qu’il connaisse ce qu’il y avait dans son cœur ; mais la manne ne fit jamais défaut, même s’ils s’en lassèrent ; leurs vêtements ne vieillirent pas, et leurs pieds ne s’enflèrent pas pendant ces quarante ans. Si, dans leur incrédulité, ils tournèrent le dos à la montagne des Amoréens, et durent errer dans le désert quelque trente-huit ans de plus, le Dieu de grâce qui les avait tirés d’Égypte, ne les laissa pas, et alla avec eux dans le désert. Je dis ceci par analogie, car ici l’apôtre ne parle pas de chute, mais de tribulations et du profit de celles-ci, de ce en quoi il se réjouissait et se glorifiait : s’il s’était agi de chutes, il n’aurait pu faire ainsi. Il y a un exercice d’âme qui nous rend à la fois plus capables de discerner spirituellement ce que nous espérons, et qui, en même temps, nous sèvre du monde qui tend à nous en ôter la vue. Par cet exercice, notre espérance devient plus claire, et nous, nous devenons plus mûrs dans la conscience que notre espérance tout entière et notre chez-nous sont là où le nouvel homme trouve sa portion.

Il y a, dans ce que l’apôtre nous dit ici, un autre élément très important, outre le fruit subjectif dans l’état de l’âme. Je possède à la fois le secret de toutes ces tribulations par lesquelles je passe, et la puissance qui me rend capable de les supporter et d’en comprendre le sens, afin de les lier à un bonheur qui nous élève au-dessus d’elles toutes, et tourne notre âme vers la grâce, qui se sert d’elles pour nous donner une plus profonde et éternelle bénédiction, la grâce de Celui qui ne retire pas Ses yeux de dessus les justes, qui daigne veiller sur nous dans tous les détails pour prendre connaissance de nos caractères et de notre état, et pour faire travailler toutes choses ensemble à notre bien. L’amour de Dieu est versé dans nos cœurs (v. 5). Ce qui est en Dieu, ce que Dieu est dans Sa nature, est versé, non pas seulement connu, dans nos cœurs, et les remplit de Sa puissance. C’est l’amour de Dieu, mais l’amour de Dieu dans nos cœurs, et cela par Sa propre présence, mentionnée ici pour la première fois : le Saint Esprit qui nous a été donné. Le pardon et la justification étant complets et absolus, tout obstacle est ainsi ôté, et le Saint Esprit peut venir faire Sa demeure en nous, et apporter dans nos cœurs ce que Dieu est. Le fait que Dieu a ôté nos péchés a ouvert le chemin pour cela, et maintenant la présence de Dieu, tel qu’Il est, et Il est amour, remplit le cœur.

L’introduction du Saint Esprit ici est une vérité de la plus haute importance. Baptiser du Saint Esprit était l’un des deux grands actes attribués au Seigneur au premier chapitre de l’évangile de Jean (voyez les versets 29-34). Ce que nous trouvons ici en est l’application pratique, comme conséquence de la valeur et de l’efficacité de ce sang, par lequel les péchés de ceux qui croient ont été ôtés. Ainsi, de même que dans l’Ancien Testament, le lépreux était lavé d’eau, ensuite aspergé de sang, et puis oint d’huile, nous, nous sommes lavés par la Parole, aspergés du sang de Christ, et puis oints du Saint Esprit. Cette onction est autre chose que la nouvelle naissance : celle-ci se rapporte à l’œuvre du Saint Esprit dans ceux qui ne croient pas ; mais nous sommes scellés après que nous avons cru. De plus, ce sceau de l’Esprit est toujours, je le pense, associé avec le pardon : « Repentez-vous, et que chacun de vous soit baptisé au nom de Jésus Christ », dit Pierre, « en rémission des péchés ; et vous recevrez le don du Saint Esprit ». Au chapitre 10 des Actes encore, c’est lorsque Pierre annonce la rémission des péchés, que le Saint Esprit tombe sur Corneille et sur tous ceux qui avaient reçu la Parole (v. 43, 44) ; et de même ici dans l’épître aux Romains, l’apôtre introduit le Saint Esprit, lorsque le pardon et la justification ont été révélés, comme ils le sont au chapitre 4, et réellement déjà au chapitre 3, et avant qu’il soit question de l’expérience de ce que nous sommes et de notre position en Christ.

Le point que je relève ici a son importance pratique pour les âmes. Le fondement de notre acceptation est clairement établi ; la plénitude de la grâce de Dieu envers nous en Christ, et l’espérance de la gloire qui s’y rattache, nous sont assurés par la mort de Christ. Nous sommes pardonnés et scellés. La grâce qui nous est présentée ici n’est pas une affaire de ce qu’on appelle communément expérience, mais c’est l’amour parfait de Dieu envers nous, alors que nous étions encore pécheurs, et que nous n’avions en tout cas aucune expérience quelconque de ce qui est bon : elle dépend de l’œuvre de Christ pour nous, œuvre dont la valeur est sur nous devant Dieu. Étant ainsi acceptés de Dieu, nous sommes scellés. Il est important de bien discerner combien tout ceci est complet quant au salut, quant à la joie dans le salut, et quant à la confiance en Dieu. L’expérience a sa place, et une place importante ; mais l’amour de Dieu dans le salut, et le jugement que Dieu porte sur l’œuvre de Christ, sont de première importance. On trouve des chrétiens qui voudraient obliger les âmes à avoir l’expérience du chapitre 7, pour que le salut du chapitre 5 soit vrai. Cette expérience peut précéder, quand cela a lieu et que l’âme discerne en simplicité son acceptation en Christ. Toute la vie subséquente du chrétien est une vie de grâce assurée, sauf des cas de discipline spéciale ; mais l’acceptation du chapitre 5 peut être connue en elle-même premièrement (dans ce cas, la justification est le pardon ; elle s’applique à ce que nous avons fait ; et elle ne consiste pas en ce que nous sommes devenus la justice de Dieu en Christ) ; mais alors, nous avons à apprendre plus tard à connaître ce que nous sommes par nous-mêmes, et quelle est notre place en Christ.

Remarquez de plus, comment, tandis que nous jouissons de l’amour par le Saint Esprit qui demeure en nous, la connaissance et la preuve de cet amour se trouvent dans une œuvre accomplie en dehors de nous et entièrement indépendante de nous, mais accomplie pour nous quand nous étions dans un état de péché et de complète incapacité ; « car Christ », poursuit l’apôtre, « alors que nous étions encore sans force, au temps convenable, est mort pour des impies » (v. 6). Impies et sans force ! tels nous étions, lorsque l’œuvre glorieuse de l’amour de Dieu a été accomplie pour nous. Mais ce fait nous donne la certitude que la pureté et la perfection de l’œuvre et de la nature de Dieu Lui-même étaient dans l’œuvre ainsi opérée. L’œuvre répond à nos besoins ; elle ne trouve pour elle aucun motif en nous, sauf notre état de ruine : l’amour libre et souverain de Dieu Lui-même, l’amour qui Lui est propre, en est seul la source et la cause efficiente. Peut-être, pour un juste, quelqu’un mourrait-il ; — pour quelque homme de bien quelqu’un se résoudrait même à mourir ; mais Dieu constate Son amour à Lui (l’amour qui est propre et particulier à Lui), en ce que, lorsque nous étions encore pécheurs, Christ est mort pour nous (v. 7, 8). Ici, nous rencontrons un principe de grâce plein de bénédiction pour nous : le Saint Esprit qui révèle la vérité, ne raisonne pas en prenant pour point de départ ce que nous sommes, pour en conclure ce que Dieu sera. Telle est toujours la manière de raisonner de l’âme que Dieu a réveillée ; et cela est naturel, parce que pour la conscience et le jugement, il faut qu’il en soit ainsi ; seulement, il y a dans cette âme un sentiment insuffisant du péché et une pensée vague de la miséricorde, qui affaiblit l’effet du sentiment du péché, à quelque degré qu’il existe. Mais, l’âme repentante même, raisonne ainsi jusqu’à ce qu’elle se soit réellement rencontrée avec Dieu et ait connu Sa grâce, comme nous voyons le fils prodigue parler d’être reçu comme un mercenaire, quand il n’avait pas encore rencontré son père. Le Saint Esprit nous fait voir clairement que nous sommes perdus, s’il s’agit de jugement ; mais Il raisonne en tirant des conclusions de ce que Dieu est et a fait, pour en déduire les conséquences pour nous. Il raisonne selon la grâce qu’Il révèle. Ainsi, ici, Il dit : « Beaucoup plutôt donc, ayant été maintenant justifiés par son sang, serons-nous sauvés de la colère par lui » ; et : « si, étant ennemis, nous avons été réconciliés avec Dieu par la mort de son Fils, beaucoup plutôt, ayant été réconciliés, serons-nous sauvés par sa vie » (v. 9, 10). L’Esprit déduit ainsi, de ce que Dieu est en grâce, les conséquences qui en découlent, et Il ne prend pas son point de départ dans notre état pour conclure ce qui en sera la conséquence vis-à-vis de Dieu. L’âme dont les raisonnements suivent ce dernier courant est encore dans un état légal ; il y a chez elle ou de l’insouciance, ou des illusions sur elle-même, ou bien un mélange de loi et de grâce. Dans l’enseignement du Saint Esprit, il n’y a point de mélange : une condamnation évidente sur le terrain de la responsabilité, et le salut et la bénédiction en vertu de la grâce par la justice.

Ici finit la première addition de l’apôtre à l’exposé complet du salut qu’il nous a donné dans les versets 1 et 2 de ce chapitre 5 : l’espérance ne nous rend pas honteux, parce que l’amour de Dieu est versé dans nos cœurs par le Saint Esprit qui nous a été donné, et nos raisonnements ont la grâce de Dieu pour base et pour point de départ et en tirent les conséquences. Mais il y a plus encore : « Et non seulement cela » ; — mais connaissant Dieu ainsi, nous nous glorifions en Dieu Lui-même par notre Seigneur Jésus Christ, par lequel nous avons maintenant reçu la réconciliation (v. 11). Nous nous réjouissons non seulement dans le salut que nous avons obtenu, mais dans le Dieu qui nous est révélé dans ce salut : selon que Lui nous a été révélé dans l’œuvre de notre Seigneur Jésus Christ, nous nous réjouissons en Dieu. Précieuse vérité ! Il est naturel que nous nous réjouissions dans le salut qui nous est donné, dans l’espérance de la gloire ; mais c’est plus encore d’avoir appris à nous réjouir en Dieu Lui-même, et à le connaître ainsi de manière à nous réjouir en Lui.

L’apôtre clôt ainsi la première partie de l’épître : justifiés dans la faveur de Dieu comme position présente, et ayant la gloire pour espérance, nous possédons l’amour de Dieu qui est une clé désormais pour tout ce que nous rencontrons sur notre chemin, et nous nous réjouissons en Celui que nous avons appris à connaître par ce grand salut.

Mais, dans ce grand salut, le simple judaïsme disparaît, et l’apôtre par conséquent s’élève, dans sa pensée, à un horizon plus vaste : il contemple l’état tout entier de l’homme, tel que l’a fait le péché de celui qui le premier se trouva placé comme homme devant Dieu, et entraîna sa race dans les conséquences de son abandon de Dieu. Chaque homme a ajouté à sa misère ses propres péchés, et cela constitue la responsabilité personnelle ; mais il y a l’état universel de tous. Adam entraîna toute sa race dans le péché et la mort, et dans l’aliénation de Dieu et l’exclusion de Sa présence, mais chacun ajouta sa propre part de péché ; et ainsi (le raisonnement passant du verset 12 au verset 18), par une seule faute, quoique, en raison de la grâce, tous ne soient pas condamnés, cependant la portée et la tendance de l’acte s’étendent à la race tout entière ; de même aussi, par une seule justice accomplie, les conséquences de cette justice furent envers tous les hommes en justification de vie (v. 18). Tous ne sont pas justifiés, pas plus que tous ne sont condamnés, mais la portée de l’acte en lui-même, dans chacun des deux cas, est universelle et s’étend dans son application à toute la race sur laquelle portent ses conséquences. L’application efficace de l’acte ne vient pas sur tous, mais la portée et la direction de l’acte, dans chacun des cas sont, si je puis dire ainsi, à l’adresse de tous. Les conséquences de l’acte sont « envers » tous : c’est le même mot qui est employé au verset 22 du chapitre 3, en contraste avec « sur tous ceux qui croient ». L’acte d’Adam est dans son effet à l’adresse de tous, et ainsi pareillement l’acte de Christ.

La parenthèse qui embrasse les versets 13 à 17 inclusivement, nous montre la place que la loi occupe en rapport avec ce que nous venons de dire, outre les actes des deux grands « chefs » de misère et de bénédiction. Le péché était dans le monde depuis Adam jusqu’à Moïse, quand il n’y avait pas encore de loi ; mais des actes spécifiques ne pouvaient pas être portés en compte là où il n’y avait pas de loi qui les défende. Le mot grec rendu au verset 13 par « mis en compte » est un mot différent de celui que l’Écriture emploie généralement quand elle parle de « compter la justice », et il signifie mettre une chose spéciale sur le compte de quelqu’un, ce que l’autre mot ne signifie pas : on le retrouve, je l’ai déjà dit, dans l’épître à Philémon, verset 18. Là où aucune loi ne défendait un acte, on ne pouvait le mettre en compte à quelqu’un comme une transgression ; cependant la mort régna — l’effet et le témoignage du péché étant là — sur ceux qui n’avaient pas péché selon la ressemblance de la transgression d’Adam, c’est-à-dire, qui n’avaient pas, comme Adam, violé un commandement positif et connu. Le passage cité par l’apôtre, est tiré d’Osée, chapitre 6, 7, où le même principe est établi à l’égard d’Adam et de Moïse : « Eux (c’est-à-dire Israël), comme Adam, ont transgressé l’alliance ». Adam avait un commandement formel ; une loi formelle fut donnée sous Moïse ; — mais dans l’intervalle, là où il n’y avait point de loi formelle, le péché et la mort ont régné. La ruine était universelle : la grâce et la portée de l’acte de Christ, ne le seraient-elles pas aussi ? C’est là le sens du verset 15, mais quel fut à cet égard l’effet de la loi ? Le verset 16 nous le dit : lorsque la grâce vint, elle eut à faire à une multitude de fautes, aussi bien qu’au péché et à l’éloignement de Dieu en général. Ensuite, la supériorité de la grâce est démontrée encore au verset 17, en ce que — si par la faute d’un seul, la mort régna par un seul — non pas la vie régnera, mais ceux-là qui reçoivent l’abondance de la grâce et du don de la justice, régneront en vie par un seul, Jésus Christ.

Ainsi, à tous égards, on pouvait dire de la grâce beaucoup plus que du péché. La grâce pouvait avoir à faire à une multitude de fautes ; mais il faut qu’elle soit aussi étendue que le péché de l’homme, et dans sa portée, et quant à ceux auxquels elle était adressée. Elle était aussi par un seul homme, dont le premier n’avait été que la figure ; le premier homme étant l’homme responsable, le second homme étant l’homme des conseils de Dieu avant que le monde soit. De plus, si la grâce était appliquée, elle ne répondait pas seulement aux besoins qu’elle trouvait et la vie ne régnait pas seulement là où avaient régné le péché et la mort, mais ceux qui recevaient l’abondance de la grâce et du don de la justice régneraient eux-mêmes en vie par un seul Jésus Christ. Tel est le sens de la parenthèse des versets 13 à 17.

Au verset 18, nous trouvons l’universalité de la portée de l’acte d’Adam et de l’acte du Seigneur Jésus, au verset 19 l’efficacité effective ou l’effet réel de chacun de ces actes sur ceux qui étaient réellement associés avec ces deux grands chefs ; le mot « plusieurs » (ou proprement « les plusieurs ») désignant l’ensemble des personnes réellement associées avec chacun de ces chefs. Le péché d’Adam n’était pas limité, dans ses effets, à Adam lui-même ; mais par la désobéissance d’un seul, les « plusieurs » associés à lui ont été constitués pécheurs ; et aussi, par l’obéissance de Christ, les « plusieurs » associés à Christ sont constitués justes. Il n’est pas question ici de responsabilité et d’imputation (car lorsqu’il s’agit d’elles, chacun est traité selon ses propres œuvres, auxquelles s’appliquent le jugement et la propitiation), mais l’apôtre parle d’un état dans lequel les « plusieurs » sont amenés par « le chef » auquel ils appartiennent, en contraste avec la responsabilité personnelle. Un acte, la désobéissance d’Adam, amenait ceux qui étaient associés à lui dans la condition d’être des pécheurs ; un acte aussi, l’obéissance d’un seul — de Christ — constituait justes ceux qui étaient associés à Lui, les plaçait dans cet état et cette condition devant Dieu : tout cela, en contraste avec la responsabilité individuelle, quoique chaque personne associée au « chef » soit placée dans l’état qui est la conséquence de ce qui caractérise la conduite de celui-ci. Les « plusieurs », dans leur condition, étaient tels devant Dieu, en conséquence de la conduite qui caractérisait le chef. L’apôtre ne parle pas ici, je le répète, de la conduite réelle de tout homme individuellement, mais d’un état des personnes, qui était le résultat de l’action caractéristique de celui qui était le représentant et le chef de sa race devant Dieu ; il parle d’un état dépendant de la conduite du chef. C’est là le grand point. Le Seigneur et Adam respectivement par leur acte et leur conduite placent ceux qui sont associés à eux dans une certaine condition.

La loi intervient (v. 20), en contraste avec un état dans lequel les chefs respectifs amenaient ceux qui étaient rattachés à eux. Ce qu’il est de la plus grande importance de bien saisir dans ce passage, c’est, on ne peut trop le redire, que l’état était la conséquence de la conduite du chef et non la conduite des membres trouvant sa réponse dans celle du chef. Le jugement se rapporte à des œuvres ; ici, il s’agit d’un état qui est le résultat de la désobéissance d’Adam, ou de l’obéissance de Christ. La loi est intervenue, entre les deux actes, dans un but spécial, « afin que la faute abondât » : or la faute n’est pas là l’état constitué par l’acte d’un autre, mais l’acte de la personne sous la loi qui défendait ses actes, en contraste avec ce qui affectait tout l’ensemble de la race par la désobéissance d’un seul homme, et tous les croyants en Christ par l’obéissance de Christ. La loi intervint à une certaine époque entre les deux « chefs » d’états opposés, l’homme désobéissant et l’homme obéissant, et elle intervint dans le but de faire abonder la faute positive, non le péché. Dieu ne peut rien faire pour que le péché abonde ; mais, là où le péché est déjà, Dieu peut envoyer un commandement spécial qui le défend — une loi qui le manifeste sous un caractère plus complet, et qui montre qu’il n’est pas seulement une chose mauvaise, mais un mépris de l’autorité de Dieu, une faute positive et une transgression — une loi, dont la volonté perverse de l’homme use comme d’une provocation à offenser Dieu. Telle était la loi.

L’apôtre change maintenant d’expression pour en revenir à son principal sujet ; disant, non pas : « Là où la faute », mais « là où le péché abondait », c’est-à-dire partout où se trouvait un fils d’Adam — avec la loi, ou sans loi — partout où était le péché, la grâce (Dieu entrant sur la scène en grâce souveraine) a surabondé (v. 20). Le péché avait régné par la mort qui en était la preuve présente dans tous les hommes. Si la justice, le corrélatif naturel du péché, avait régné, elle aurait apporté la condamnation ; mais Dieu est amour, Il est riche en miséricorde, et ainsi la grâce régnait — le titre souverain de Dieu en bonté. Mais il faut qu’il y ait de la justice, et il en est ainsi : la grâce règne par la justice. Elle règne par la justice, non par celle de l’homme certainement, car dans ce cas elle ne serait plus la grâce ; mais, par l’obéissance d’un seul, plusieurs sont constitués justes, et la grâce règne par la justice (c’est la déclaration abstraite de la nature de ce qui est opposé au fait que le péché règne) en vie éternelle, comme le péché pour la mort — par Jésus Christ notre Seigneur. C’est ici un exposé clair et complet du fondement et du moyen de notre salut. Il est remarquable de voir comment l’Écriture, en peu de mots, présente toute la vérité. Dans ces quelques paroles, toute la source et le moyen et le but de notre salut sont présentés de façon complète et claire.

Au chapitre 6, l’apôtre aborde la conséquence pratique de la doctrine qu’il vient d’exposer ; il passe en revue au point de vue expérimental l’état et la condition du croyant (maintenant qu’il y a délivrance du péché) et nous montre la portée de la loi sur la question ; et ainsi l’expérience est introduite. La doctrine quant à la manière dont nous sommes délivrés de la puissance du péché, est exposée en détail dans le sixième chapitre. Avant de l’aborder nous ferons remarquer ici, que dans la première division de l’épître, qui s’étend du chapitre 1, verset 18, au chapitre 5, verset 11, nous n’avons pas de conduite pratique comme fruit de la grâce. Nous trouvons des exhortations détaillées au chapitre 12 et dans les chapitres suivants, comme résultat de la vérité, et spécialement du chapitre 6 ; mais dans la première partie, l’apôtre nous donne le résultat de notre conduite, en jugement, sans aucune liaison de la conduite avec la grâce dont il parle. Nous avons la pleine, complète justification du pécheur coupable, tous ayant été démontrés être sous le péché et coupables devant Dieu, mais sans que la Parole tire aucune conséquence relativement à la conduite. La justice de Dieu est manifestée dans la délivrance de la culpabilité et dans le pardon, dans la justification de l’impie, avec comme conséquence la paix avec Dieu, Sa faveur et l’espérance de la gloire ; on jouit de Dieu Lui-même, mais il n’est pas question de la marche. Dieu justifiait l’impie justement ; et étant justifié par la foi, celui qui croyait avait la paix avec Lui. Le salut est présenté en lui-même, pour autant qu’il nous est donné ici-bas par la grâce. Mais ici lorsqu’il est question de l’état au chapitre 6, l’apôtre fait un pas en avant dans l’exposition de son sujet, et il parle de la vie divine, non pas en nous donnant les détails de la conduite pratique sous forme d’exhortation, mais le principe de la vie divine en puissance, qui nous délivre du péché et nous place dans la liberté divine dans notre marche, une liberté qui vient de Dieu, et dans laquelle nous nous livrons nous-mêmes à Dieu, comme d’entre les morts étant faits vivants.

Le point établi à la fin du chapitre 5, c’est que par l’obéissance d’un seul homme, les « plusieurs » qui sont associés à lui sont constitués justes. Or le monde et la chair voudraient bien tirer de là la conclusion que s’il en est ainsi, nous n’avons qu’à demeurer dans le péché. À cela l’apôtre répond dans ce qui suit. L’obéissance de Christ a été l’obéissance jusqu’à la mort, et c’est en ayant part à la mort de Christ, que nous avons part à cette justice : mais avoir part à la mort, c’est-à-dire mourir, n’est pas une chose qui nous fait demeurer dans ce à quoi nous sommes morts. « Nous qui sommes morts au péché, comment vivrons-nous encore dans le péché ? » (chap. 6, 2). Notre profession même du christianisme par le baptême, c’était la profession que nous étions baptisés pour la mort de Christ, que nous avions une part à cette mort, que nous étions identifiés avec Lui dans Sa mort.

L’apôtre ne parle pas ici de notre résurrection avec Christ : celle-ci implique l’union avec Lui ; — mais nous avons été ensevelis avec Lui par le baptême, pour la mort ; le vieil homme est une chose jugée et crucifiée par notre profession même du christianisme, afin que, comme Christ a été ressuscité d’entre les morts par la gloire du Père, ainsi nous aussi nous marchions en nouveauté de vie. Ce n’était plus seulement une vie sainte et bienheureuse dans tout ce qui était bon, bien que cela ait été vrai dans la propre vie de Christ ici-bas ; mais la puissance divine intervint quand pour nous Christ était mort, et elle introduisit Christ dans une place nouvelle comme homme selon toute la gloire du Père engagée, si l’on peut dire ainsi, dans Sa résurrection, de sorte que notre vie sera une vie nouvelle dans la conformité de Sa résurrection. Et s’il est vrai que nous avons été identifiés avec Lui dans la ressemblance de Sa mort, cette vie nouvelle suivra, aussi certainement que pour Lui, la vie en résurrection par la gloire du Père suivit la mort. Dans son plein résultat, cette conséquence est vraie même quant à nos corps : elle n’est pas maintenant encore accomplie ; mais comme chrétiens nous avons ouvertement et par notre profession, pris part à Sa mort, de sorte que la mort au péché est notre portion ici-bas sur la terre.

Nous tirons la conclusion quant à la vie, moralement maintenant, et en pleine puissance plus tard. Mais nous avons ouvertement pris notre part dans la mort au péché, « sachant ceci, que notre vieil homme a été crucifié avec lui, afin que le corps du péché soit annulé, pour que nous ne servions plus le péché ». Le « corps du péché » c’est je pense, le péché envisagé comme un tout. Le mot traduit par « annulé » signifie rendre impuissant. Ce corps qui, s’il est vivant comme vieil homme, est le siège de la convoitise et l’auteur du péché, est crucifié de manière à être dans ce caractère mis de côté et annulé : il a pris fin. « Celui qui est mort est justifié du péché » (v. 7). Il ne s’agit pas ici de péchés, ou de culpabilité : un homme qui est mort peut avoir à répondre de péchés, mais on ne peut pas l’accuser de péché ; il n’a ni mauvaises convoitises, ni volonté perverse ; et c’est de notre condition et de notre état qu’il s’agit maintenant.

La puissance de la mort a été détruite par la résurrection de Christ. Christ est ressuscité, Il ne meurt plus, la mort ne domine plus sur Lui, car Sa mort n’était pas une simple conséquence naturelle, si je puis m’exprimer ainsi, de Son état. Il vint pour le péché, pour prendre notre place de pécheurs et Il est mort au péché. C’est dans un but de grâce envers nous, et pour le péché qu’Il est mort, et qu’Il est mort une fois, lorsque pour nous il fallait qu’Il le fasse ; mais Il l’a fait une fois pour toutes. C’était une œuvre qu’Il avait à accomplir à l’égard du péché, et Il l’a accomplie. Il n’a plus affaire au péché. Il jugera les pécheurs sans doute, mais Il en a fini avec le péché, comme étant occupé de lui, une fois et une fois pour toutes. Jusqu’à la croix, Lui, le juste, a eu à faire avec le péché ; à la croix, c’était du péché qu’il s’agissait, quoique ce soit pour la gloire de Dieu qu’Il a été fait péché ; — mais maintenant Il en a fini avec le péché, une fois pour toutes et pour toujours : Il vit, sans avoir plus désormais rien à faire avec le péché. Une seule chose, même si nous l’envisagions comme homme, constitue Sa vie, une chose qui remplit l’activité de celle-ci et vers quoi elle est tournée, c’est Dieu. « En ce qu’il vit, il vit à Dieu » (v. 10).

Dans Sa vie d’ici-bas, Il a servi Dieu parfaitement, et vivait par le Père ; et chacun de Ses pas était parfait, car Il avait Dieu Son Père toujours présent devant Son esprit ; mais tout autour de Lui, Il trouvait le péché, et Il avait à faire avec le péché ; Il était pressé par lui et affligé, un homme de douleur à cause du péché ; Il a dû être fait péché pour nous — parfait toujours en amour, manifestant Dieu, parfait en obéissance comme homme venu pour faire Sa volonté. Toutefois Il est venu au sujet du péché et a nécessairement été assailli de toutes parts par lui et finalement, comme je l’ai dit, Il a dû être fait péché pour nous, quand Il a été parfaitement démontré sans péché Lui-même, Lui « qui n’a pas connu le péché ». Mais maintenant, Il en a fini avec le péché pour toujours. Il est mort au péché ici-bas ; en accomplissant parfaitement Son œuvre, Il a passé par la mort (hors de la scène tout entière dans laquelle Il a eu à faire avec lui), dans la résurrection, dans un nouvel état comme homme, où en pensée, en objet et en vie, Il a à faire, quant à Son état de vie, avec Dieu seul : « En ce qu’il vit, il vit à Dieu ». Il n’y a rien, là où Il est, qui ne soit rempli par Dieu, et tellement rempli, que rien d’autre ne peut y avoir place pour ce qui sert Sa gloire. Ce n’est pas seulement de la perfection de Son propos qu’il s’agit (ce propos a toujours été aussi parfait que Sa marche ; — dans ce sens Il a vécu toujours à Dieu), mais de ce en quoi et à quoi Il vit, là où pour Son âme il n’y a rien d’autre. C’est une bienheureuse pensée de la vie de l’homme. Sa mort a été un acte unique, dans lequel Il est mort au péché ; Sa vie, un présent perpétuel, dans lequel Dieu remplit tout, depuis Son âme jusqu’à Son objet.

De même, nous aussi, nous devons nous tenir nous-mêmes pour morts, notre vieil homme étant crucifié avec Christ — pour morts au péché, et vivants à Dieu par Lui. Cette vie dont nous vivons est une vie nouvelle et libre, car le croyant est en droit de se tenir lui-même pour mort au péché : c’est sa condition et sa place comme croyant de faire ainsi. Si nous sommes vivants, nous sommes vivants à Dieu, non par Adam en aucune manière, mais par Jésus Christ notre Seigneur. La vie dont nous vivons est ainsi entièrement nouvelle, et, nous tenant pour morts au péché, nous sommes entièrement libres. Ce n’est pas que le péché dans la chair n’ait pas ses convoitises ; mais le croyant comme tel, ne le laisse pas régner dans son corps pour obéir aux convoitises de celui-ci, voyant qu’il est libre dans la puissance d’une vie nouvelle ; car ainsi le croyant est tenu pour libre de marcher dans la puissance et selon les choses qui appartiennent à cette vie nouvelle. Il tient les rênes, et ne permet pas au péché de se servir de son corps pour la satisfaction de ses convoitises, les convoitises du péché. Cet homme libre ne livre pas non plus ses membres comme instruments d’iniquité au péché, ce mal dont il était jadis l’esclave : il se livre lui-même à Dieu, comme d’entre les morts étant fait vivant, car, quant à sa vie née d’Adam, il est mort au péché, mais vit maintenant, et se livre lui-même et ses membres à Dieu, comme instruments de justice.

Car le péché ne dominera pas sur nous, parce que nous ne sommes pas sous la loi, mais sous la grâce (v. 14). C’est ici une déclaration grave et importante. Être sous la loi me laisse sous la domination du péché. Ce dont nous avons besoin, c’est d’une vie libre, libre de la servitude du péché, car « quiconque pratique le péché », dit le Seigneur, « est esclave du péché » (Jean 8, 34). La loi ne donne ni vie, ni liberté, ni force, ni même un objet qui puisse tourner nos cœurs d’un autre côté ; elle défend justement et nécessairement les péchés, mais elle ne donne ni vie, ni pouvoir pour le bien. Mais sous la grâce, nous avons de la puissance : la grâce nous donne la vie, elle nous donne la force, et elle nous donne un objet, toutes choses que la loi, comme nous venons de le voir, ne donne pas. Ainsi, sous la grâce, le péché ne domine pas sur moi ; sous la loi, il domine. Il est beau de voir comment, alors que tout est grâce, nous sommes cependant appelés à nous livrer nous-mêmes à Dieu, ce qui est la vraie liberté, dans laquelle le péché ne domine pas sur nous, et comment, tandis que la puissance vient d’en haut, nous sommes réellement affranchis et libres de nous donner de libre et franche volonté à Dieu.

L’apôtre traite donc ici ce sujet de la liberté, et le discute — cette liberté n’est pas dans le vieil Adam pécheur ; mais parce que je suis vivant à Dieu par Jésus Christ, je suis libre. La loi défend le péché et la convoitise, mais elle ne délivre pas. Je ne suis pas sous la loi ; je suis affranchi de la domination du péché parce que je ne suis pas placé sous la loi, mais sous la grâce. Pécherai-je donc parce que je ne suis pas sous une loi qui défend le péché, et qui me maudit si je le commets ? Qu’ainsi n’advienne !

Maintenant l’apôtre en revient au grand principe de la condition des Gentils. Si je me livre moi-même au péché comme esclave pour lui obéir, je suis l’esclave du péché ; et le péché a régné pour la mort, sans qu’il y ait de loi : la mort était les gages naturels et ordonnés du péché, et cela comme jugement de Dieu. « Ne savez-vous pas qu’à quiconque vous vous livrez vous-mêmes comme esclaves pour obéir, vous êtes esclaves de celui à qui vous obéissez, soit du péché pour la mort, soit de l’obéissance pour la justice ». Nous ne pourrions pas dire « obéissance pour la vie » ; car si nous obéissons, nous sommes vivants à Dieu par Jésus Christ notre Seigneur, et nous avons notre fruit dans la justice pratique. Remarquez ici le caractère de ce qui est mis en opposition avec le péché : ce n’est pas la justice en elle-même — faire le bien tel qu’il est connu par la conscience ou par la loi — mais l’obéissance : nous sommes vivants à Dieu, et cela est, et doit être toujours l’obéissance. Nous ne pouvons pas vivre à Dieu autrement que dans l’obéissance. C’est ainsi que Christ vécut : Il fut l’homme obéissant ; Il vint pour faire la volonté de Dieu ; la volonté de Son Père était le motif de tout ce qu’Il faisait ; Il vivait de toute parole qui sortait de la bouche de Dieu ; Son sentier par conséquent était la justice pratique, et le modèle ou la parfaite expression de cette justice. Ainsi l’apôtre rend grâces à Dieu de ce que, alors qu’ils avaient été esclaves du péché, ils avaient obéi de cœur à la forme de doctrine dans laquelle ils avaient été instruits.

Nous apprenons ici la source et le caractère de cette obéissance : elle est « l’obéissance de la foi », la réception de la Parole de Dieu dans le cœur. La Parole ainsi reçue forme le lien d’obéissance entre l’âme et Dieu. La même réception de la Parole communique la vie : « De sa propre volonté, il nous a engendrés par la parole de la vérité, pour que nous soyons une sorte de prémices de ses créatures » (Jacq. 1, 18). C’est la vie et une vie obéissante — en réalité, la vie de Christ en nous ; et Christ est l’homme obéissant. Ainsi : « affranchis du péché », car c’est le grand point que l’apôtre fait ressortir ici, ceux qui croyaient, se livrant eux-mêmes pour obéir, étaient devenus asservis à la justice (l’apôtre parle d’asservissement à un point de vue figuré dont il s’excuse pour ainsi dire, parce que cet « asservissement » est la vraie liberté ; mais il parle ainsi, afin de rendre sa pensée claire pour la faiblesse de l’intelligence de la chair) ; car ainsi qu’ils avaient livré jadis leurs membres comme esclaves à l’impureté et à l’iniquité, seulement pour être libres de tout frein, pour donner libre carrière à une volonté mauvaise qui ne portait pas de fruit, ainsi maintenant il les exhorte à livrer leurs membres — car ils étaient libres — comme esclaves à la justice. Mais ici il y avait un bienheureux résultat — la sainteté, une séparation de cœur à Dieu, dans la vraie connaissance de Lui-même, l’âme étant renouvelée à Son image, comme nous lisons, Colossiens 3, 10, et Éphésiens 4, 23, 24, là, davantage dans Sa nature, ici, plus en renouvellement pratique, mais toujours la même vérité générale.

L’apôtre poursuit la figure qu’il a employée et il fait appel au sentiment qu’ils avaient de ce qui s’était passé : ils avaient été esclaves du péché, mais libres à l’égard de la justice (v. 20) : quel fruit donc avaient-ils alors des choses dont maintenant ils avaient honte ? Ils n’avaient fait qu’user inutilement de leurs membres dans l’indépendance ; — et la fin de ces choses était la mort. Mais maintenant, ayant été affranchis du péché (c’est là comme nous l’avons vu le grand sujet qui occupe l’apôtre), c’est-à-dire affranchis de la servitude du péché, n’étant plus ses esclaves (les paroles de l’apôtre n’ont pas d’autre sens ici) et ayant été asservis à Dieu, entièrement livrés à Lui comme esclaves pour Le servir, ils ont leur fruit dans la sainteté ; ils avaient non seulement pour fin la vie éternelle, mais, en marchant vers cette fin ils croissaient dans la connaissance de Dieu, dans Sa ressemblance et dans la séparation du cœur d’avec tout mal pour Lui, selon ce qu’Il est. En marchant ainsi dans le chemin de l’obéissance à Dieu, et avec Dieu, l’âme est en cela délivrée de la puissance du mal, qui gît dans la volonté et la convoitise, qui ne sont ni l’une ni l’autre Son obéissance.

Cette croissance dans la connaissance de Dieu, et dans l’intimité avec Lui, est un immense privilège. Notre volonté ne peut jamais nous amener là : mais une fois que nous sommes placés dans notre vraie position devant Dieu, nous croissons dans Sa connaissance, nous vivons davantage dans les choses qui sont auprès de Lui et qui font Son plaisir ; et c’est là la sainteté. L’obéissance n’est pas la sainteté, un cœur livré à Dieu pour Lui obéir ; mais elle est le sentier dans lequel de saintes affections, qui ont leur source en Dieu et qui sont libres devant Lui, sont trouvées. La « fin », c’est la vie éternelle, reçue dans son plein résultat en gloire, telle qu’elle est dans le dessein de Dieu. Mais cette vie est le don de Dieu. Le chemin qui y mène est le chemin de l’obéissance et de la sainteté ; mais elle-même, elle est le don de Dieu. La mort, nous l’avons amenée sur nous ; — elle est les gages du péché ; — mais le don de Dieu c’est la vie éternelle dans le Christ Jésus notre Seigneur (v. 23). Ce n’est pas seulement que la vie éternelle est le don de Dieu ; mais le don de Dieu n’est rien moins que la vie éternelle. La mort est intentionnellement envisagée dans son simple caractère de mort. Sans doute elle est le jugement du péché ici-bas dans ce monde, et elle implique, à moins que la rédemption n’intervienne, le jugement qui vient après ; elle est l’effet présent du jugement contre le péché, et l’agent divin et le témoin du péché, pour nous conduire au jugement selon la colère révélée du ciel ; — mais ici elle est la fin de la vie, que le péché sans fruit opérait ; elle mène au jugement, au jugement des œuvres accomplies pendant que nous vivions. Mais Dieu donne la vie éternelle.

Avant d’aller plus loin, récapitulons cet important chapitre. Nous avons vu, en premier lieu, en réponse à la question : « Demeurerions-nous dans le péché ? », que nous avons part à la mort, la mort de Christ, pour être justifiés ; ce n’est pas là continuer la vie de péché, mais tout le contraire. Christ est mort, et nous nous tenons nous-mêmes pour morts (comparer 1 Pierre 2, 24 ; 4, 1), le chrétien étant ainsi vivant à Dieu, dans la puissance d’une nouvelle vie. Le premier principe donc (dans lequel le jugement, que la chair porte sur l’effet de l’obéissance d’un seul qui nous constitue justes, est réfuté) est celui-ci : que nous avons part à la justice en ayant part à la mort, en étant associés avec Christ dans Sa mort — dans Sa mort au péché, ce qui évidemment n’est pas continuer à vivre dans le péché. Nous avons à nous tenir nous-mêmes pour morts, et pour vivants à Dieu par Jésus Christ. Mais ici se présente une difficulté. Nous ne sommes pas réellement morts, quoique nous soyons appelés à nous tenir pour tels : comment donc pouvons-nous être affranchis de la puissance du péché ? Ceci amène le contraste avec la loi. La loi ne donnait pas la puissance sur le péché dans la chair ; elle défendait son activité et ses fruits comme elle devait le faire, mais elle n’en délivrait nullement, ni ne donnait aucune puissance contre lui. Mais le péché ne dominera pas sur nous, qui croyons, parce que nous ne sommes pas sous la loi, mais sous la grâce ; et la grâce donne de la puissance et délivre : je ne dois pas laisser le péché régner ; — et cela m’affranchit de sa domination. Je suis affranchi du péché, c’est-à-dire délivré de l’esclavage du péché ; et étant libre, je dois me livrer moi-même à Dieu et à la justice, et mes membres, jadis les instruments de mes convoitises, à Lui comme instruments de justice. C’est la liberté de la grâce, et la vie divine en puissance.

La doctrine générale est donc celle-ci : Christ étant mort, nous aussi nous nous tenons nous-mêmes pour morts, comme si nous étions réellement morts. Celui qui est devenu notre vie, le vrai « moi », est mort : moi, je suis mort, j’ai été crucifié, avec Lui, et comme chrétien je ne reconnais plus du tout la chair comme étant en vie. Je parle de tout ce qui est arrivé à Christ, comme si cela m’était arrivé à moi, parce qu’Il est devenu ma vie et je vis par Lui. Je parle comme un fils dont le père n’aurait pas seulement payé les dettes, mais qu’il aurait fait son associé, et qui dit : « notre capital, nos relations », parce qu’il est associé, quoiqu’il n’ait rien apporté, et que tout ait été fait et acquis avant qu’il devienne associé : moi je parle ainsi d’une manière bien plus vraie, à cause de mon association vivante avec le Seigneur ; seulement, comme je l’ai fait remarquer, il n’est question ici ni d’ascension, ni d’union avec Christ, ni de résurrection avec Lui qui implique celle-ci, mais l’apôtre nous présente la mort du vieil homme et la vie en Christ ; et ainsi l’affranchissement du péché — la réponse à l’allégation que, d’avoir la justice en Lui, autorise le péché. Il est important de bien remarquer ici que la vraie question est une question de puissance. Une règle de ce qui est juste et bien n’est pas de la puissance sur une mauvaise nature. Plus loin nous apprendrons davantage sur ce point ; mais ici déjà nous découvrons que le règne du péché dans nos corps mortels, la domination du péché sur nous, est la vraie question qui occupe l’apôtre. De fait nous ne sommes pas sous la loi ; mais dire cela et le reconnaître, c’est substituer la puissance en vie — la grâce qui la donne — à la simple quoique juste exigence de la justice imposée à une créature pécheresse.

La première réponse à l’allégation qu’être constitué juste par l’obéissance de Christ autorise le péché, c’est que nous avons été identifiés avec Christ dans la ressemblance de Sa mort — que nous avons été crucifiés avec Lui. Ceci s’applique au péché dans la nature. Mais l’apôtre en outre, nous a montré la grâce, en contraste avec la loi, affranchissant de la domination du péché et de l’esclavage dans lequel celui-ci nous tenait — ce que la loi ne faisait pas. Nous sommes libres de vivre à Dieu.

L’apôtre discute maintenant (chap. 7) toute la question de la loi. Nous sommes délivrés de la loi, en vertu du même grand principe fondamental, que nous avons été crucifiés avec Christ ; car la loi a autorité sur l’homme aussi longtemps qu’il vit. Cette vérité est mise en évidence dans le cas du mariage, par la loi ou le lien qui lie le mari et la femme, qui dure évidemment aussi longtemps que l’un et l’autre vivent, et ne peut pas durer davantage. Le survivant est libre d’être à un autre quand son conjoint est mort. Il est très important pour l’intelligence de ce chapitre de bien comprendre que le seul sujet qui occupe ici l’apôtre, c’est la portée de la loi, la relation de l’âme avec elle : il nous donne d’abord la doctrine sur ce sujet, et la différence qu’il y a entre une âme qui est sous la loi, et une âme qui est liée en vie à un Christ ressuscité — et puis l’expérience d’une âme vivifiée et renouvelée dans ses désirs et dans les objets de ses plaisirs, mais qui ne connaît pas la délivrance par la connaissance du grand fait qu’elle est morte avec Christ et qu’elle est maintenant liée à un autre, à Christ ressuscité d’entre les morts. La description de la délivrance vient ensuite, et puis la condition de l’âme délivrée au chapitre 8.

La loi a autorité sur l’homme aussi longtemps qu’il vit ; elle ne peut l’avoir au-delà, car la personne à laquelle la loi s’applique, n’existe pas plus longtemps. Si quelqu’un qui doit être puni pour un crime meurt, la loi ne peut plus l’atteindre. Nous avons vu au chapitre 6, que le fait de n’être pas sous la loi n’a pas pour conséquence de faire vivre dans le péché, mais que, si quelqu’un est sous la loi, il n’a aucune puissance pour résister au péché. La loi exige ; seulement elle n’affranchit pas de la domination du péché : mais nous avons été mis à mort à la loi par le corps du Christ (v. 4). Si la loi nous avait atteint, elle aurait été pour nous la mort, et de plus la condamnation ; mais nous en sommes délivrés étant mis à mort à la loi « par le corps du Christ ». L’apôtre change quelque peu ici la figure qu’il emploie : la mort met fin au lien ; or c’est nous qui mourons, non pas nous réellement, mais Christ meurt pour nous efficacement, et nous sommes maintenant unis à Lui, qui est ressuscité d’entre les morts, afin que par la puissance de la vie, à laquelle nous avons part, nous ne soyons pas seulement morts au péché, mais que nous portions du fruit pour Dieu.

Ayant été ainsi mis à mort comme enfants d’Adam, en ce que Christ est mort, nous ne sommes plus dans la chair, dans cette nature, dans cette place ou position devant Dieu : nous ne sommes pas du tout devant Dieu comme enfants d’Adam ; nous sommes morts comme tels. C’est pourquoi nous disons : « Quand nous étions dans la chair » (v. 5), ce que nous ne pourrions pas dire si nous y étions encore ; mais « quand nous étions dans la chair, les passions des péchés, lesquelles sont par la loi, agissaient dans nos membres pour porter du fruit pour la mort ». Quelque juste que soit la défense d’une volonté ou d’une convoitise, elle ne fait que provoquer ces choses, en vous faisant y penser, et n’ôte pas la convoitise ni ne change la nature pécheresse. Si je dis à un homme qui aime l’argent : N’aimez pas l’argent — je ne fais qu’exciter sa convoitise. Si je résiste à un enfant volontaire, l’enfant ne fera que plus d’efforts pour renverser l’obstacle que je lui oppose. Les passions des péchés sont par la loi — un pauvre chemin de sainteté et de justice ! Elles agissaient en nous pour produire du péché effectif pour la mort. Mais maintenant nous avons été déliés de la loi, étant morts dans ce en quoi nous étions tenus (v. 6). La vie dans laquelle nous étions en relation avec la loi a pris fin ; le lien qui se rattachait à cette vie n’existe plus ; il a pris fin avec la vie dans laquelle il subsistait. La loi s’adressait à l’enfant d’Adam et exigeait de lui ce qui était selon la volonté de Dieu. L’homme était dans le péché, non assujetti à la loi de Dieu ; sa chair de péché non plus ne pouvait pas être assujettie à cette loi, autrement elle n’aurait pas été la chair de péché. La loi ne faisait qu’exciter cette chair dans sa volonté et dans sa convoitise ; mais maintenant en Christ nous sommes morts : le lien avec la loi est brisé dans notre mort avec Christ, et nous sommes liés à Christ ressuscité, servant en nouveauté d’Esprit et non pas en vieillesse de lettre, liés à un mari — non pas à la loi, mais à Christ ; car nous ne pouvions être aux deux à la fois.

C’est ici le point important. Le chapitre 6 posait le fondement de la doctrine et de la vérité, montrant que notre vieil homme est crucifié avec Christ : pour la foi, nous sommes morts. Le chapitre 7 fait ressortir la portée de ceci sur la relation de l’enfant d’Adam avec la loi. La mort a détruit le lien[7], et nous sommes à un autre, à Christ ressuscité, afin que nous portions maintenant du fruit pour Dieu, car nous sommes maintenant vivants à Dieu en Jésus Christ. Le grand point, que le passage veut nous faire comprendre, c’est que nous ne pouvons pas avoir à la fois la loi et Christ, les deux maris en même temps : la chose est impossible. Mais notre délivrance de la loi vient de ce que nous sommes morts au péché : Christ ressuscité est maintenant notre vie et notre mari, et dans cette position nouvelle il y a de la puissance pour porter du fruit pour Dieu, fruit que la chair de péché ne pouvait jamais produire. Le contraste entre le christianisme et la loi n’existe pas seulement pour la justification, mais aussi pour la vie, pour l’obéissance et pour porter du fruit : sous la loi, nous sommes non seulement coupables de péchés, mais le péché domine sur nous : en Christ nous sommes déliés, affranchis et capables de porter du fruit pour Dieu.

Ce n’est pas tout. La loi a son utilité, en ce qu’elle nous amène à sentir ce que nous sommes, quel est notre état. Pouvait-on imputer à la loi cette domination du péché, quand nous étions sous elle (v. 7 et suivants) ? Non, c’était la faute du péché et de la convoitise que la loi condamnait. « Mais », dit l’apôtre, « je n’eusse pas connu le péché, si ce n’eût été par la loi ; car je n’eusse pas eu conscience de la convoitise, si la loi n’eût dit : Tu ne convoiteras point ». Si un homme avait commis un meurtre, il aurait connaissance du fait ; sa conscience naturelle en aurait été occupée ; mais comme nous l’avons observé plus haut, l’apôtre ne traite pas ici des péchés, mais du péché ; et celui-ci je ne l’aurais pas connu, si la loi n’avait eu affaire avec ses premiers mouvements comme péché. Beaucoup de gens n’ont pas commis des crimes ; ils n’ont ni tué, ni volé, ni commis adultère ; mais qui n’a jamais convoité ? Avoir cette prétention, ce serait dire qu’on n’est pas un enfant d’Adam, et rappelons-le-nous bien, nous ne parlons pas ici de culpabilité résultant d’actes, mais d’un état, non de jugement, ni de pardon, mais de délivrance, d’affranchissement. Remarquez de plus ici combien grande est l’erreur de ceux qui estiment que la convoitise n’est pas péché quand l’âme n’y cède pas. L’apôtre veut ici mettre en évidence la nature mauvaise par son premier mouvement, la convoitise ; il n’est pas occupé de ce que nous avons fait, mais de ce que nous sommes ; et la méchanceté de la chair se trahit par ce premier mouvement, qui est la convoitise — la volonté dans le mal : par sa méchanceté, il démontre de quelle source pécheresse en moi il procède. Je sais qu’en moi, en ma chair, il n’habite point de bien. C’est là une importante, quoique humiliante découverte ; — la découverte non de ce que j’ai fait, je le répète, mais de ce que je suis. Combien cela est important en effet ! Quelle folie que la pensée d’améliorer l’enfant d’Adam, à moins qu’il ne naisse de nouveau !

Dieu, selon Ses voies, n’améliore pas le sauvageon, mais le coupe et le greffe ; quand Christ a été greffé en nous, le fruit de cette vie doit se produire. La loi ne condamne pas la nature : elle suppose qu’il faut encore la mettre à l’épreuve et qu’on peut en attendre quelque chose de bon ; mais elle défend ce qui est son seul premier mouvement, la convoitise ; et ainsi elle donne la connaissance de ce qu’est cette nature. Il s’agit du péché, souvenons-nous en bien, non des péchés (v. 7) ; car il n’aurait pas — ce que les hommes naturels ne font pas — jugé et connu la convoitise en lui-même, comme mal et comme péché, si la loi n’avait dit : « Tu ne convoiteras point ». La loi était ainsi un moyen, non de justice, mais de connaissance du péché. Par elle, de plus, le péché nous séduisait et nous tuait ; il trouvait une occasion, un moyen d’attaque dans la loi. C’est ainsi que Satan vint, quand Adam était innocent. Maintenant le péché trouve une occasion dans la défense pour provoquer la volonté et suggérer la convoitise ; car jusqu’à ce que la loi intervienne et défende la convoitise, la conscience ne prenait pas connaissance de cette dernière.

Je rappelle encore que l’apôtre ne traite pas des péchés, mais du péché. Le péché était provoqué et excité par le commandement ; sans celui-ci, le péché était mort ; mais quand le commandement vint, le péché reprit vie et il apporta dans ma conscience le sentiment de la culpabilité et la mort. Autrement il n’y avait pas de sentence de mort dans la conscience par le péché. Les péchés seront jugés au jour du jugement et apporteront la condamnation, mais une nature pécheresse comme telle ne donne pas une mauvaise conscience : nous demeurons vivants, non éprouvés, non réveillés. J’étais un enfant vivant d’Adam, inconscient de péché, comme nous voyons tant de gens ; mais quand la loi de Dieu défendit la convoitise, la conscience fut atteinte, et moi je mourus sous son jugement. Ce qui avait été dit : « Fais cela et tu vivras », ce qui avait ainsi été ordonné pour la vie fut trouvé par moi, expérimentalement, être pour la mort (v. 10). J’avais saisi la loi, pensant que par elle j’aurais la force d’être bon et juste : le péché en profite pour me tromper ainsi et amener la mort sur moi par le commandement. Cela toutefois était pour mon profit : le péché devint par le commandement excessivement pécheur. Il était là présent, et moi inconscient de lui comme d’un mal fatal dans ma chair (nous ne parlons pas de péchés commis) ; mais il parut péché, quand la loi vint, et devint excessivement pécheur : il parut dans sa vraie nature de péché, et prit de plus le caractère d’opposition contre la sainte, juste et bonne volonté de Dieu, et de transgression de cette volonté.

Un autre élément se présente ici, savoir le jugement spirituel, qui peut ainsi juger toutes ces choses, disant : « Nous savons ». Ce nous savons est l’expression technique, par laquelle la Parole de Dieu désigne la connaissance qui est la part du chrétien comme tel (voyez 1 Cor. 8, 4 ; 1 Jean 3, 2 ; 5, 13, etc.). Nous savons que la loi est spirituelle (v. 14) : — Nous ne l’appliquons pas seulement à des actes mauvais, à des fautes, mais à l’homme intérieur : « Moi je suis charnel ». Si je regarde à moi, comme enfant d’Adam, je vois que je suis mené captif par le péché, « vendu au péché ». Je dis : comme enfant d’Adam ; car l’apôtre dit : « Je sais qu’en moi, c’est-à-dire en ma chair, il n’habite point de bien ». Il envisage l’homme placé sur ce terrain, avec la connaissance chrétienne relativement à ce qu’il est ; mais comme lié au premier mari, c’est-à-dire à la loi : « Quand nous étions dans la chair ». C’est l’intelligence chrétienne appliquée au jugement de l’état, non pas d’un homme non renouvelé en pensée et en désir, mais d’un homme sous la loi. C’est pourquoi il n’est fait mention que de la loi et pas de Christ ou de l’Esprit, jusqu’à ce que vienne le cri de détresse pour être délivré de cet état. Il ne s’agit pas ici de savoir si la chair est en nous, mais il est dit : « quand nous étions dans la chair » — avec les mouvements du péché en elle, et nous dans cet état en face des exigences de la loi dans notre conscience ; car nous ne sommes pas considérés ici comme rachetés et morts avec Christ, comme délivrés, ayant la puissance de la vie en Lui, et en ayant conscience.

On apprend sous l’enseignement divin, dans la lutte liée à ce premier état, trois choses d’une immense importance. D’abord : « En moi, c’est-à-dire en ma chair, il n’habite point de bien » : ce n’est pas la culpabilité d’avoir péché, mais la connaissance de ce que nous sommes, c’est-à-dire en tant que chair. En deuxième lieu, j’apprends que ce n’est pas « moi » (v. 17) ; car étant renouvelé, ce que je fais je le hais, je ne voudrais jamais commettre le péché ; le vrai « moi » le hait. C’est donc le péché en moi, non pas « moi » : importante leçon à apprendre ! En troisième lieu, si ce n’est pas « moi », le péché est trop fort pour moi : le vouloir est avec moi, mais accomplir le bien, cela je ne le puis (v. 18).

Mais il ne sera pas inutile d’entrer un peu plus dans les détails. Il ne s’agit ici réellement d’aucune personne particulière, mais du jugement d’une nature, et d’une nature, qui (jusqu’à ce que je connaisse la rédemption et que je suis mort au péché en Christ et que je suis en Lui) constitue mon « moi », pour ma conscience. Il est à remarquer que ce passage suppose que la volonté veut toujours le bien, et que le bien ne peut jamais être accompli : ce n’est pas là l’état chrétien, car nous pouvons toutes choses en Celui qui nous fortifie.

De plus, l’homme que l’apôtre nous présente ici, est un esclave ; au chapitre 8, 2, au contraire il est affranchi. Au verset 5 du chapitre 7, nous sommes considérés comme étant dans la chair, au verset 9 du chapitre 8 nous ne sommes pas dans la chair, si du moins l’Esprit de Dieu habite en nous. Si un homme n’est pas mort avec Christ, il est absolument dans la chair : s’il ne le sait pas, sa conscience et ses pensées néanmoins sont sur ce terrain-là vis-à-vis de Dieu ; ce qu’il est, non pas ce que Christ est, est le principe d’après lequel il juge de son état devant Dieu. Il est — quant à sa position, telle qu’il en a conscience — dans la chair ; et l’apôtre décrit ici le travail intérieur et le procédé qui délivrent de cette condition par la complète humiliation que donne la connaissance de soi-même. Il nous présente l’opération de la loi, la grâce agissant sans doute dans l’homme, mais lui, quant à son âme et quant à sa conscience, étant sous la loi, et pas encore délivré : « Par la loi est la connaissance du péché ». La grâce lui a donné de discerner que la loi est spirituelle. La conscience a par la grâce reconnu que la loi est bonne ; l’esprit l’approuve, et plus que cela, l’homme y prend plaisir, selon l’homme intérieur : il est un homme renouvelé.

Nous avons donc en premier lieu l’état de l’homme. Dieu a fait entrer la lumière : l’homme a discerné que la loi est spirituelle ; mais lui est charnel, esclave du péché, vendu au (litt. : sous le) péché, car il se voit dans la chair encore vivant, de la vie d’un fils d’Adam, dans laquelle la loi revendique ses droits. « Moi je suis charnel » (j’en ai conscience individuellement), « vendu au péché » : — l’homme regarde à lui-même, comme étant dans la chair, et il sait que la loi est spirituelle ; il le discerne, étant enseigné par Dieu.

Nous avons de plus — ce que nous venons de dire étant la description de l’état d’âme de la personne en question — deux points en rapport avec la loi ; mais rien, remarquez-le, au sujet de Christ et de l’Esprit, car l’homme n’en est pas là encore ; il est seulement sur le chemin, et acquiert, étant ainsi enseigné de Dieu, la connaissance du péché (c’est-à-dire de lui-même, sous la loi). En premier lieu, l’homme fait le mal qu’il ne veut pas ; il fait ce qu’il hait ; il fait le mal, quand il voudrait ne pas le faire. Il approuve la loi, reconnaissant qu’elle est bonne : sa conscience et son esprit, reconnaissant la loi bonne, s’accordent avec elle ; mais lui, fait le contraire de ce que la loi demande. Or étant ainsi sous la grâce par cette parole même, il apprend que ce n’est pas lui qui fait cela, mais le péché qui habite en lui (v. 17 et 20) ; il a un nouvel homme, une nouvelle vie, dans laquelle, étant ainsi enseigné, il peut traiter le péché comme un étranger, comme n’étant pas lui, quoique le péché demeure en lui. Il a appris maintenant expérimentalement, non pas une simple doctrine, le « nous savons » de quelqu’un qui est enseigné de Dieu relativement à une chose qui est en dehors de lui-même, mais il a appris quelque chose au sujet de lui-même et c’est là une grande leçon : « Je sais qu’en moi, c’est-à-dire en ma chair, il n’habite point de bien ». La chair est pour lui désormais une nature jugée ; et c’est un immense progrès. — Et maintenant le second point dont j’ai parlé est mis en évidence dans l’homme renouvelé, savoir la volonté positive de faire le bien : il prend plaisir à la loi de Dieu selon l’homme intérieur ; il n’approuve pas seulement la loi, reconnaissant qu’elle est bonne et lui donnant sa propre approbation comme règle dans sa conscience, mais il voudrait pratiquer le bien, et le mal est avec lui ; — accomplir le bien, cela il ne le trouve pas. Il manque absolument de force. La loi n’en donne aucune. Il voit dans ses membres une loi, une puissance du mal, constamment opérante, et qui le rend captif, quoique ce soit maintenant contrairement à sa volonté.

Pauvre, misérable homme ! Mais, immense avantage, il le sait, il se connaît lui-même ! Ses désirs et ses efforts pour faire le bien ont abouti à ceci : la connaissance de lui-même et de son véritable état : « En moi… en ma chair, il n’habite point de bien ». Or, ce vieux « moi » n’est pas lui du tout, maintenant qu’il a été vivifié par Dieu ; mais ce fait si important ne constitue aucune justice pour lui, aucune délivrance de la puissance du péché ; il est toujours sous le péché, étant sous la loi. C’est une grande leçon à apprendre, que nous n’avons point de puissance ! Il en était ainsi du pauvre infirme couché au réservoir de Béthesda : la maladie même dont il avait besoin d’être guéri, lui avait ôté, même s’il avait voulu être guéri, la force par laquelle il aurait pu l’être. Ainsi enseigné, l’homme cesse de chercher à devenir meilleur, ou à faire mieux ; il a appris ce qu’il est et il cherche un libérateur. Dès que Dieu l’a amené à ce point, tout devient clair ; il rend « grâces à Dieu par Jésus Christ notre Seigneur ».

Mais, quoique le sujet dont l’apôtre traite ici soit l’expérience de l’âme sous la loi, alors que la spiritualité de celle-ci est connue par la grâce, la chose apprise n’est pas ce qu’est la loi, mais ce qu’est le péché — ce que nous sommes : car « par la loi est la connaissance du péché ». De là vient que, quoique le travail s’effectue sous la loi, par laquelle cette connaissance est acquise au moyen de l’opération secrète de la grâce, ce que nous avons appris à connaître reste toujours vrai, savoir ce qu’est le péché dans la chair.

C’est pourquoi aussi, comme nous l’avons fait remarquer, le passage qui nous occupe est la description d’une âme sous la loi, mais présentée de manière que la leçon demeure vraie pour le chrétien, en tout temps, non pas que le chrétien soit jamais sous la loi ou dans la chair, car il est mort en tant qu’associé à ce premier mari, et pour la foi la chair est morte et il est délivré ; mais la leçon qu’il a apprise demeure toujours vraie : en lui, savoir en sa chair, il n’habite point de bien, et il en a expérimentalement la connaissance. La chair peut le séduire s’il est insouciant, et s’il oublie de porter toujours partout dans son corps la mort du Seigneur Jésus ; mais elle ne peut plus le tromper relativement à ce qu’elle est elle-même ; il peut avoir laissé dans sa maison une porte ouverte à un serviteur infidèle, mais désormais il ne le regarde pas comme un serviteur digne de confiance et dont il ne faut pas se défier. La différence est immense : la puissance de la chair est brisée, et de plus l’homme n’a aucune idée d’être dans la chair devant Dieu. L’épître aux Galates nous montre la position d’un tel homme : « la chair convoite contre l’Esprit, et l’Esprit contre la chair… afin que vous ne pratiquiez pas les choses que vous voudriez. Mais si vous êtes conduits par l’Esprit, vous n’êtes pas sous la loi » (Gal. 5, 17, 18), c’est-à-dire vous n’êtes pas dans le chapitre 7 de l’épître aux Romains, quoique la chair de péché soit là présente. Vous êtes dans la liberté, dans laquelle Christ vous a placés en vous affranchissant. Ne soyez pas de nouveau retenus par un joug de servitude. C’est pourquoi aussi, après que la délivrance a été mentionnée ici (v. 25), l’apôtre affirme le fait permanent des deux natures, quoique n’allant pas plus loin que la loi, sujet qu’il traite ici : « Ainsi donc moi-même, de l’entendement je sers la loi de Dieu ; mais de la chair, la loi du péché ».

En résumé donc l’état décrit dans le passage qui vient de nous occuper est celui d’une âme sous la loi ; mais le péché vient à être connu, et la lutte avec lui demeure : la chair demeure la chair. Mais c’est une chose bien différente d’avoir affaire à elle, quand nous n’avons point de force, quand nous sommes vendus au péché, et qu’elle nous tient courbés dans le combat sous la loi du péché — ou bien d’être capables de dire, comme nous lisons un peu plus loin : « La loi de l’Esprit de vie dans le Christ Jésus, m’a affranchi de la loi du péché et de la mort ». Les natures sont les mêmes ; mais les ayant, c’est une chose d’être sous la loi, qui est la puissance du péché, et une autre chose bien différente d’avoir, étant mort avec Christ, la vie et l’Esprit de Christ, qui est la puissance de la piété : c’est une chose d’être mené captif par le pouvoir ou la loi du péché tout en haïssant le péché, et une autre chose de se réjouir dans la liberté dans laquelle Christ nous a placés en nous affranchissant ; liberté que l’apôtre développe dans le chapitre 8, ainsi que l’état du croyant en elle. Les deux points, qui sont placés ainsi devant nous, sont donc, je le répète, la délivrance, et puis la permanence de la loi du péché dans la chair ; seulement, celui-ci n’est pas « moi ». Le « moi », c’est cet entendement, qui sert la loi de Dieu. Il s’agit de choses expérimentées et apprises.

Mais il y a deux choses que l’apôtre affirme maintenant relativement au chrétien. Qu’est-ce qui le constitue chrétien ? C’est qu’il est en Christ, et que l’Esprit de Dieu demeure en lui. Ce qui lui appartient comme chrétien est une autre chose. Être chrétien c’est donc ces deux choses. Mais nous devons faire remarquer que la mesure de la marche et l’effet pratique sont limités, comme tout l’est ici, à la responsabilité humaine. Un seul passage nous met en rapport avec les conseils de Dieu, et alors seulement comme une grande vérité générale ; mais le résultat, en pratique, revêt la mesure de la responsabilité humaine, quelle que soit d’ailleurs la délivrance nécessaire pour nous rendre capables d’y satisfaire.

Donc pour l’homme « en Christ » il ne peut y avoir « aucune condamnation » ; telle est la première déclaration de ce chapitre. Le lecteur se souviendra que nous avons dit plus haut que l’épître aux Romains nous offrait deux passages descriptifs de la bénédiction du chrétien : les versets 1-11 du chapitre 5, et le chapitre 8. Nous avons déjà traité ce qui concerne le premier de ces passages ; le second va nous occuper maintenant : le premier nous a présenté la bénédiction qui découle de ce que Dieu est envers nous en grâce, celui-ci nous présente l’état du chrétien devant Dieu. C’est pourquoi nous lisons ici : « Il n’y a donc maintenant aucune condamnation pour ceux qui sont dans le Christ Jésus » — non pas pour ceux pour les péchés desquels Christ est mort. Ces péchés sont pardonnés, l’homme est justifié, pleinement béni ; mais ce pardon et la bénédiction qui nous est présentée au commencement du chapitre 5, ne sont pas la position nouvelle d’un homme qui est mort, comme étant dans la chair, et qui est vivant à Dieu en Jésus Christ ; — qui est marié à Celui qui est ressuscité d’entre les morts. Comment pourrait-il y avoir une condamnation pour ceux qui sont en Christ ? Ce serait, si je puis m’exprimer ainsi, comme si l’on condamnait Christ.

Mais la raison de cette non-condamnation est donnée en rapport avec ce qui précède ; et cela au point de vue du bien, dans la puissance de vie en Christ, d’un côté, et relativement au péché, à la condamnation du péché dans la chair, de l’autre côté. La position en Christ est le grand et sûr fondement ; l’apôtre en donne les conditions et la raison pour celui qui en jouit.

La loi du péché et de la mort a perdu sa puissance. J’ai un autre principe de vie en puissance en moi, qui a sa propre nature et sa force constante, car tel est le sens de l’expression : « la loi » que nous trouvons ici, « la loi de l’Esprit de vie dans le Christ Jésus ». Cette expression fait allusion à la respiration ou à l’esprit de vie que Dieu souffla en Adam ; maintenant c’était la vie spirituelle ou divine, dans la puissance de l’Esprit de Christ en nous ; et cet Esprit de vie avait Sa loi et Son caractère constant, c’était une puissance qui avait affranchi le chrétien de la loi du péché et de la mort, principe mortel qui le gouvernait auparavant comme homme vivant dans la chair. Le principe est là encore, sans doute, mais le chrétien en est affranchi ; il n’est plus dominé par lui : il y a une autre vie et une autre puissance active, qui a ses caractères propres et invariables, et qui opère en puissance ; en sorte que je ne suis pas sous la domination du péché. C’est ici le côté de Dieu — ce que je suis devant Dieu en vie.

Ensuite vient la mauvaise nature, et pourquoi je ne suis pas condamné à cause d’elle. La loi ne pouvait pas produire le bien, ni la justice en moi, à cause de cette mauvaise nature ; elle ne pouvait pas vider la question de la chair devant Dieu ; elle ne pouvait ni me justifier, ni me délivrer ; elle ne pouvait pas me délivrer du péché qui est dans la chair devant Dieu. Là, en moi, il y avait le péché dans la chair : la loi ne pouvait pas empêcher son activité ni me justifier tandis qu’il était là ; elle ne pouvait pas opérer le bien qu’elle exigeait. Elle exigeait seulement le bien et provoquait le péché. Mais « Dieu, ayant envoyé Son propre Fils », sans péché assurément, mais en la ressemblance d’un de ces pécheurs dans la chair, « en ressemblance de chair de péché, et pour le péché », c’est-à-dire pour être un sacrifice pour le péché, « a condamné le péché dans la chair ». Cette chose mauvaise, si haïssable, condamnable pour Dieu et pour le nouvel homme, a été condamnée, quand Christ est devenu un sacrifice pour le péché. La mort et la condamnation du péché dans la chair sont allées ensemble, et moi je suis mort au péché, et sa condamnation est passée et vidée quand Christ a été un sacrifice pour le péché. Il n’y a aucune indulgence pour le péché ; le nouvel homme même ne pourrait le tolérer. On ne pardonne pas une nature. Mais sa condamnation s’est trouvée effectuée dans ce qui m’a délivré de toute condamnation et qui en même temps était la mort au péché.

Ainsi il ne peut y avoir aucune condamnation pour quelqu’un qui est en Christ : non seulement les péchés sont effacés, mais la nature qui les produisait a été condamnée, c’est-à-dire le péché dans la chair ; et quant à mon état présent, la loi de l’Esprit de vie dans le Christ Jésus m’a affranchi de la loi du péché qui existe dans mes membres. Ainsi le vieil homme est condamné et est mort, et le nouvel homme vit et marche ; de sorte que la juste exigence de la loi (sa justice, la somme de ce qu’elle exige) est accomplie en nous ; parce que nous ne sommes pas sous la loi, mais sous la grâce. La loi de l’Esprit de vie dans le Christ Jésus m’a affranchi ; et je ne marche pas selon la chair — ce que la loi défend — mais selon l’Esprit, contre les fruits duquel il n’y a point de loi. Oui, par la puissance de l’Esprit de Dieu, je marche selon ce en quoi Il m’introduit — la vie de Christ ici-bas ; et cette marche selon l’Esprit est le vrai caractère de la marche du chrétien dans ce monde.

Je l’ai dit plus haut : comme Christ est mis en contraste avec la loi pour la justice, l’Esprit de Dieu en nous (c’est-à-dire Christ comme vie dans la puissance de l’Esprit de Dieu) est mis en contraste pour notre marche et notre conduite avec la loi juste, mais impuissante : la mort au péché, et la vie dans la puissance de l’Esprit de Dieu. L’apôtre expose ici en détail ce point : à partir du verset 1 : « aucune condamnation » jusqu’à la fin du verset 11, il développe la réponse à la question : « Qui me délivrera ? ». À ces mots : Qui ne marchent « pas selon la chair, mais selon l’Esprit », il rattache une description complète et de la vie chrétienne comme découlant du Saint Esprit — et de la chair. L’une et l’autre ont leurs propres objets selon leur nature : il y a des choses de la chair, et des choses de l’Esprit — non seulement le bien et le mal, mais des objets qui appartiennent à l’un et à l’autre.

Ainsi nous avons deux natures avec leurs objets respectifs, et avec la nouvelle, la puissance de l’Esprit de Dieu, au lieu d’une seule nature et d’une loi qui vainement lui défendait ses désirs aussi bien que ses actes. Ceux qui sont selon la chair sont gouvernés d’après les principes de la chair ; les pensées, la volonté ont leurs objets dans les choses que cette nature désire. Ceux qui suivent les directions de l’Esprit sont sous la puissance de l’Esprit dans les choses que l’Esprit nous communique, et sur lesquelles Il fixe nos pensées. Or la pensée de la chair est la mort, mais la pensée de l’Esprit, vie et paix (v. 6), ce qui veut dire que l’une et l’autre sont respectivement caractérisées par ces choses comme découlant d’elles d’une manière immédiate et nécessaire, ou les accompagnant. Car la pensée de la chair est inimitié contre Dieu : elle résiste à l’autorité de Dieu ; elle rejette Sa volonté ; elle s’élève contre Lui et contre Son autorité, n’aime pas qu’elle existe et, en conséquence, elle hait Dieu. Elle ne se soumet donc pas à la loi, et aussi elle ne le peut pas : ses convoitises ne veulent pas de ce que la loi exige, et sa volonté propre ne veut pas fléchir devant l’exigence elle-même. Dieu intervient par la loi, affirme Son autorité et défend la convoitise ; mais la chair ne connaît pas l’obéissance, elle aime sa volonté et sa convoitise, et elle hait Dieu. La volonté propre ne peut pas aimer la soumission, parce qu’elle est la volonté propre ; et la convoitise ne peut pas non plus aimer ce qui défend la convoitise. Mais il faut que Dieu intervienne ainsi par la loi pour la chair. Ce qui est essentiel à la chair, il est essentiel à Dieu de le contredire ; et la chair est inimitié contre Lui. Ceux qui sont dans la chair ne peuvent pas plaire à Dieu ; ceux dont la vie est dans le premier Adam ne peuvent pas plaire à Dieu : la chair, chez eux, conduit et gouverne ; leur place et leur position sont dans la vie d’Adam. Mais il n’en est pas ainsi, si l’Esprit de Dieu habite en nous ; car l’Esprit caractérise, dirige, forme la vie de celui en qui Il habite : l’Esprit de Dieu, en puissance vivante, forme et caractérise l’état de l’âme.

Voici donc ce qui caractérise le chrétien et le distingue : l’Esprit de Dieu habite en lui. Un homme comme celui-là n’est pas « dans la chair » (ce n’est pas là sa position), mais il est « dans l’Esprit » ; or être « dans l’Esprit » est clairement et dans les termes mêmes le contraire de l’état exprimé par : « Quand nous étions dans la chair », c’est-à-dire le contraire des expériences du chapitre 7 : alors les passions des péchés, qui sont par la loi, agissaient dans nos membres pour porter du fruit pour la mort (v. 5). Remarquez que ce n’est pas ici la nouvelle naissance, mais l’Esprit de Dieu demeurant en nous. Sans doute, si nous sommes nés de nouveau, nous avons de nouveaux désirs ; nous sentons la méchanceté de la chair, mais il n’y a là ni liberté, ni puissance ; — mais là où est l’Esprit de Dieu, là est la liberté, la liberté avec Dieu, et la liberté relativement au péché. Cette liberté est le fruit de la rédemption accomplie par Christ — du ministère de la justice et de l’Esprit. Christ nous a rachetés, nous a justifiés et nous a purifiés. Le sang d’aspersion nous ayant parfaitement purifiés[8] devant Dieu, le Saint Esprit vient habiter en nous, sceau de la valeur de ce sang ; et venant ainsi pour demeurer en nous, Il nous donne la conscience que nous sommes dans une nouvelle position devant Dieu, non pas dans la chair, ni dans notre état naturel adamique, mais dans la condition dans laquelle l’Esprit de Dieu nous place en la présence de Dieu. Cette position n’appartient qu’à ceux qui ont l’Esprit, l’Esprit de Christ. Si un homme n’a pas cet Esprit-là, il n’a pas la vraie position chrétienne, il n’est pas « de Christ », il ne Lui appartient pas selon la puissance de la rédemption qui nous amène devant Dieu selon sa propre efficace — efficace dont la présence de l’Esprit et Sa demeure en nous sont le sceau caractéristique et la puissance vivante, et ce par quoi sont distingués ceux qui sont amenés à cette position.

La nouvelle naissance ne nous donne pas ce privilège. Elle peut nous amener, et par elle-même elle nous amène, à nous écrier : « Qui me délivrera ? ». Mais elle ne nous dit pas que nous sommes rachetés. Elle forme en nous des désirs et des espérances ; mais elle peut aussi augmenter nos craintes, parce qu’elle augmente en nous le sentiment de notre responsabilité, nous donnant une intelligence spirituelle de la mesure de celle-ci, mais elle ne donne aucune puissance pour la délivrance du péché dont elle nous rend conscients. Mais la rédemption qui est en Christ délivre : il n’y a aucune condamnation pour ceux qui sont en Lui, Lui est en nous — la puissance aussi bien que la source d’une nouvelle vie : Il est Lui-même cette vie. — C’est là être chrétien : un homme qui est tel, est effectivement « de Christ »[9]. Un homme né de Dieu peut être sous la loi quant à son état d’esprit, occupé de sa propre responsabilité comme vivant dans la chair, de ce côté-ci de la rédemption — lié au premier mari dont la mort ne l’a pas affranchi quant à son état. Il n’est pas, dans sa foi, uni au second mari, à Celui qui est ressuscité d’entre les morts ; il n’est pas transporté dans une nouvelle sphère (qui est le fruit de la rédemption pour nous), où il ne peut y avoir aucune condamnation ; car nous sommes acceptés de Dieu en Christ, et la présence du Saint Esprit caractérise notre position.

Le verset 10 nous dit la puissance qui produit l’effet, doctrinalement établi au chapitre 6 comme étant notre position. « Si Christ est en vous, le corps est bien mort à cause du péché ». Le péché est son seul fruit, s’il vit ; mais si Christ est en quelqu’un, la puissance de la vie, le corps, pour ce qui est de la volonté tout entière, a sa place dans la mort. Qu’est donc la vie pratiquement ? L’Esprit, c’est-à-dire pour produire la justice. — C’est ici la réponse à l’allégation que, parce que nous ne sommes pas sous la loi, nous avons la liberté de pécher ou nous serons conduits à pécher.

Mais cette délivrance va plus loin. « Si l’Esprit de Celui qui a ressuscité Jésus d’entre les morts habite en vous, celui qui a ressuscité le Christ d’entre les morts vivifiera vos corps mortels aussi, à cause de son Esprit qui habite en vous » (v. 11). C’est ici la délivrance complète et finale, même quant au corps.

Nous pouvons remarquer que l’apôtre parle ici de l’Esprit de trois manières différentes. Il parle de l’Esprit de Dieu, en contraste avec la chair, avec l’homme tel qu’il est ; de l’Esprit de Christ, ou de Christ en nous, comme principe formateur de notre état pratique ; et en troisième lieu de l’Esprit de Celui qui a ressuscité Jésus et de l’assurance que nos corps mortels seront vivifiés, et que nous posséderons ainsi la pleine liberté dans le sens le plus complet et le plus élevé ; car il ne s’agit pas dans tout ceci de la recherche du pardon, ni de la justification, mais de la délivrance d’un état dans lequel nous étions comme nous sommes amenés à le sentir.

Une autre remarque, qui nous initie à l’intelligence de la structure du chapitre 8 tout entier doit trouver place ici. Dans les versets qui viennent de nous occuper, l’apôtre, tout en parlant de l’Esprit comme habitant en nous, nous présente l’Esprit comme la source et la puissance de vie, qui caractérise l’homme : « l’Esprit est vie à cause de la justice ». Ensuite il parle de l’Esprit comme d’une personne distincte agissant sur nous et en nous, « avec notre esprit », c’est la seconde partie de notre chapitre. Dans la troisième et dernière partie, il s’agit non seulement de ce que Dieu est en nous par Son Esprit, mais de ce que Dieu est pour nous, Lui qui nous a établis dans la bénédiction qu’Il s’est proposé de donner.

Occupons-nous maintenant de la seconde partie du chapitre. Elle est introduite par deux versets qui ont une grande importance pratique, les versets 12 et 13. « Nous sommes débiteurs, non pas à la chair ». La chair n’a ni droit ni autorité sur nous. Elle nous a fait tout le mal qu’elle pouvait, et rien que du mal ; et elle a été condamnée à la croix de Christ ; et nous sommes morts au péché ayant été crucifiés avec Christ. Vivre selon la chair nous conduit à la mort ; mais si nous faisons mourir les actions du corps (les choses qui découlent de sa volonté quand on lui permet d’agir), nous vivrons.

Au verset 14, nous faisons un pas en avant et nous apprenons quelle est la relation (et non plus seulement comme jusqu’ici l’état) dans laquelle l’Esprit nous amène de manière à nous en donner la conscience. « Tous ceux qui sont conduits par l’Esprit de Dieu… sont fils de Dieu ». Ceci découle directement de la position tout entière dans laquelle nous avons été placés, en contraste avec celle dans laquelle nous nous trouvions sous la loi — une position dans laquelle Dieu nous a introduits par Sa grâce, par la rédemption — non pas la servitude et la crainte, dans lesquelles nous étions à son égard sous la loi ; le fruit de la grâce divine en Christ — non pas l’effet du péché sous la responsabilité en présence du droit de la loi de Dieu sur nous. Nous sommes fils de Dieu, et nous disons : « Abba, Père ! » ayant le sentiment que nous sommes fils parce que nous avons l’Esprit, qui est en nous un Esprit d’adoption.

Il n’est pas inutile de remarquer que le « car » que nous rencontrons si fréquemment dans ce chapitre, n’exprime pas, dans un grand nombre de cas, une conclusion directe tirée par l’apôtre, mais introduit quelque déclaration qui vient confirmer le principe général dont son esprit est plein. Ainsi en est-il dans les versets 13 et 14 quoique la liaison soit plus immédiate dans le verset 13. Le verset 14 poursuit le sujet pour donner la condition tout entière de celui qui a l’Esprit, sujet suggéré par la mention de l’action de l’Esprit, exercée en puissance morale sur la marche, au verset 13. Une pareille mortification des actions du corps est naturelle chez les chrétiens, car tel est leur état réel et leur vrai caractère, comme ayant l’Esprit. Mais il ne faudrait nullement lier : « Vous vivrez, car tous ceux, etc. ». L’apôtre a dans tout ce chapitre l’homme en Christ devant les yeux ; il montre quel est son caractère et quels sont les qualités et les privilèges qui lui appartiennent comme tel.

Nous avons à considérer maintenant ce que l’apôtre nous dit touchant l’Esprit, comme habitant en nous. Nous sommes fils, et par l’Esprit nous crions : « Abba, Père ! » ayant le sentiment que nous sommes des fils. « L’Esprit lui-même », présenté ici clairement comme personne distincte, « rend témoignage avec notre esprit, que nous sommes enfants de Dieu ». C’est un témoignage clair et positif de l’Esprit qui habite en nous, que nous sommes tels — non pas une démonstration par la Parole à la suite d’un examen de nous-mêmes, manière de procéder fausse, mauvaise et antiscripturaire ; mais le témoignage du Saint Esprit Lui-même habitant en nous, le témoignage que l’Esprit nous rend comme demeurant ainsi en nous. Nous avons le sentiment et l’état de la pensée de l’Esprit en nous ; mais l’Esprit Lui-même, comme demeurant en nous, nous rend aussi à nous le témoignage que nous sommes enfants. Nous avons conscience de la relation dans laquelle nous sommes placés, mais Celui qui est en nous donne la confiance qui produit le témoignage.

Mais si nous sommes enfants, nous sommes aussi héritiers. « Nous sommes… héritiers de Dieu » naturellement comme Ses enfants, et, comme Christ est « l’héritier » et le « premier-né » par excellence, nous sommes cohéritiers de Christ. S’il en est ainsi, le sentier et le caractère tout entiers de Christ comme homme nous caractérisent. Sa vie et Son Esprit étant en nous, la source de ce que nous sommes, notre pensée doit être, en caractère et en nature, la sienne. Mais Il a souffert ici-bas et est maintenant glorifié comme homme, prêt à hériter toutes choses ; nous aussi donc, nous devons souffrir avec Lui, non pas précisément pour Lui, ce qui est un privilège spécial, mais avec Lui. Marchant ici-bas, en saint amour et en grâce, saint dans toutes Ses voies, et céleste, Christ ne pouvait que souffrir au milieu d’un monde de pécheurs, qui rejetaient Son amour. Son Esprit a dû être continuellement attristé par le péché et par la misère qui L’entouraient de toutes parts. Il en est de même pour le saint, dans la mesure selon laquelle il marche dans la puissance de l’Esprit, comme nous lisons dans la seconde épître à Timothée : Si nous souffrons avec Lui, « nous régnerons aussi avec lui ». C’est un Christ complet : la même vie a ses conséquences naturelles ici-bas et dans le ciel, dans la position de fils — un homme céleste dans ce monde — et dans le ciel de Dieu en sainte gloire. Nous sommes, si je puis m’exprimer ainsi, « co-glorifiés, et co-souffrants ». Toutefois « les souffrances du temps présent ne sont pas dignes d’être comparées avec la gloire à venir qui doit nous (ou plutôt en nous, ou pour nous, à notre égard) être révélée ». Je pense que le « nous » embrasse notre état tout entier aussi bien que nos personnes.

Nous trouvons ensuite une liaison de toute beauté entre les souffrances et la gloire, par l’habitation de l’Esprit en nous. L’Esprit nous donne le sentiment que nous sommes fils, et est à la fois les arrhes et un révélateur de la gloire, pendant que nous sommes dans ce monde de misère. La création est dans l’état qui résulte de la chute ; mais la grâce fait que, d’un autre côté, elle attend que nous soyons introduits dans la gloire, pour sa délivrance. Il faut qu’il en soit ainsi : la création inintelligente ne peut pas être amenée dans le repos de la gloire de Dieu, quand les héritiers pour lesquels cette gloire est préparée n’y sont pas encore. Elle attend la révélation des fils. Dans la liberté de la grâce, elle ne peut pas entrer ; car cette liberté est intelligente et spirituelle, un « salut d’âmes », mais la liberté de la gloire sera sa délivrance à elle aussi. Elle a été assujettie à la vanité — non de sa volonté, mais à cause d’un autre, c’est-à-dire d’Adam — mais jamais pour demeurer dans cet état. Elle aussi trouvera sa délivrance dans la liberté de la gloire ; car cette expression de « liberté de la gloire » embrasse l’état des choses tout entier, non seulement la relation des âmes avec Dieu.

Tel est l’exposé général de l’apôtre. Et ici nous trouvons la première et la plus directe allusion aux conseils de Dieu que renferme l’épître aux Romains. Nous trouverons quelque chose au sujet de ces conseils, relativement aux Juifs, dans le chapitre 11 ; mais ici l’apôtre nous présente le résultat général dans la sphère de la gloire du Fils de l’homme, quoique ne touchant que brièvement le sujet en rapport avec la délivrance qui ici embrasse la création tout entière. Mais l’apôtre constate d’une manière générale cette vérité.

Ce qui suit est notre relation personnelle avec la création comme chrétiens. Nous savons (nous chrétiens qui avons l’Esprit de Christ) que le monde, tandis que la chair essaie de l’améliorer comme lieu de sa demeure, soupire et est en travail par la chute, tandis que la grâce, la délivrance et la réconciliation sont reçues par nous. Or ce que je dis ici n’est pas vrai simplement de la création qui nous entoure ; notre corps aussi fait partie de cette création. Étant des créatures nous attendons la rédemption, l’adoption effective et la délivrance de notre corps. La « rédemption du corps » et la « possession acquise » vont dans un sens général ensemble. Nous avons la rédemption par Son sang, la rémission des péchés, mais l’Esprit que nous avons reçu en conséquence de cette rédemption n’est que les arrhes de l’autre rédemption, la rédemption du corps. C’est dans ce sens que nous sommes sauvés « en espérance » (v. 24 et 25). Les choses qu’il était selon le dessein de Dieu de nous donner dans le salut, nous ne les avons pas encore, c’est-à-dire dans la gloire avec Christ ; mais l’œuvre qui nous sauve est accomplie, et nous possédons ces choses par le Saint Esprit. Ayant reçu le Saint Esprit, nous sommes placés entre l’œuvre accomplie qui nous sauve et qui nous donne droit à l’héritage (et nous savons qu’elle est accomplie ayant été en outre scellés pour le jour de la rédemption), et l’exercice de la puissance qui introduira la pleine délivrance quand Jésus reviendra. Par l’Esprit, nous regardons en arrière vers l’accomplissement de l’œuvre, et nous comprenons sa valeur, et par le même Esprit nous regardons en avant vers la seconde venue de Christ, qui va revenir pour tout accomplir et pour introduire la gloire. En attendant, nous avons des « vases de terre », nos corps non rachetés pour ce qui est de la puissance et de la délivrance, car le corps aussi est au Seigneur, acheté à prix ; et bien que nous ayons les prémices de l’Esprit (l’apôtre dit « prémices », parce que l’Esprit sera de nouveau répandu comme la pluie de la dernière saison, pour la bénédiction millénaire), nous souffrons avec Lui qui a souffert ici-bas, rattachés à l’héritage glorieux par l’Esprit et à la création en chute dans le premier Adam par le corps ; et sauvés en espérance, nous soupirons, attendant avec patience l’adoption, la rédemption du corps, et l’héritage (ce que nous ne voyons pas encore).

Nous avons vu que l’Esprit rend témoignage avec notre esprit que nous sommes enfants de Dieu, et si enfants, héritiers de Dieu et cohéritiers de Christ ; — or l’héritage, nous l’attendons. Mais l’Esprit prend part aussi aux infirmités dans lesquelles nous nous trouvons par notre corps en liaison avec l’héritage en chute. Toutefois la part que nous prenons par le corps aux souffrances de la création en chute, n’est pas le sentiment égoïste d’un être souffrant, mais nous devenons, par le Saint Esprit, la voix de toute cette souffrance, selon Dieu. Il y a des cas, sans doute, où nous savons quelle est la volonté de Dieu, et où, priant par le Saint Esprit, nous pouvons attendre une réponse selon notre demande à Dieu ; mais il y a une quantité de souffrances, que nous ressentons selon Dieu par le Saint Esprit, pour lesquelles nous ne savons pas ce qu’il faut demander comme il convient ; mais le sentiment du mal qui pèse sur nous et qui est autour de nous, est produit dans le cœur par le Saint Esprit ; et, dans notre faiblesse en vertu de ce pauvre corps, la pensée de l’Esprit est là à la suite de l’opération de l’Esprit (v. 26).

Ainsi Celui qui sonde les cœurs et qui scrute ce qui s’y trouve, rencontre, non pas nos pauvres sentiments ou nos plaintes égoïstes, mais la pensée de l’Esprit, ce que le Saint Esprit a produit dans nos cœurs ; car le Saint Esprit intercède par des soupirs inexprimables. Il intercède pour les saints selon Dieu. Quel merveilleux privilège dans nos souffrances et nos douleurs, que lorsque Dieu sonde les cœurs Il trouve la pensée qui y est formée par l’Esprit — l’Esprit Lui-même, qui demeure en nous, intercédant pour nous selon Dieu ! C’est un privilège de souffrir ainsi, Dieu par Son Esprit prenant part à nos souffrances. Comme Christ sentit personnellement toute la souffrance par laquelle Il passa, ainsi nous aussi, par grâce, par l’Esprit, nous prenons part à la souffrance, non selon l’égoïsme, mais selon Dieu, avec un sentiment profond de notre infirmité et de notre faiblesse, de notre dépendance et de notre relation avec une création en chute, à laquelle nous ne pouvons pas nous soustraire ici-bas. Nous le sentons d’autant plus que nous voyons la gloire, mais il nous est donné par la puissance de l’Esprit de prendre part selon Dieu à toute cette souffrance pour en être la voix, si j’ose dire ainsi, en grâce sentie par nous-mêmes quoique y ayant part. C’est la pensée de l’Esprit au milieu de cette misère que Dieu trouve en nous quand Il sonde les cœurs ; et le Saint Esprit Lui-même est là, intercédant pour les saints selon Dieu. Merveilleuse grâce : le cœur de l’homme est sondé ; la pensée de l’Esprit est là, parce que l’Esprit Lui-même est en nous, intercédant, mais, quoique ce soit Lui-même qui intercède — intercédant en soupirs qui s’élèvent dans nos cœurs !

Mais quoique nous ne sachions pas « ce qu’il faut demander comme il convient » « nous savons que toutes choses travaillent ensemble pour le bien de ceux qui aiment Dieu ». Dieu agit de par Lui-même en notre faveur et fait travailler toutes choses ensemble pour notre bien (v. 28). Nous ne savons pas ce qu’il faut demander ; il n’y a peut-être dans l’état présent des choses aucun remède, aucun moyen direct d’ôter ce qui nous fait soupirer ou d’y porter remède ; mais ce qui est certain, c’est que Dieu fait travailler toutes choses ensemble pour le bien de ceux qui L’aiment. La souffrance ne peut pas être ôtée peut-être, mais la souffrance est bénie ; celui qui y passe est appelé selon le propos de Dieu, et Dieu arrange tout pour son bien.

Ce point introduit Dieu agissant pour nous (sans nous — non pas en nous), et c’est là ce qui forme la troisième partie du chapitre qui nous occupe. Nous avons vu l’œuvre en nous — en vie par l’Esprit ; nous avons vu aussi la présence de l’Esprit nous donnant la conscience que nous sommes fils, héritiers de Dieu et cohéritiers de Christ, et nous assistant, prenant part à cette scène d’infirmité et de souffrance — étant descendu du ciel pour habiter en nous, pendant que nous nous trouvons au milieu d’une création en chute, et quant à nos corps, rattachés à cette création assujettie à la corruption par le premier Adam. La volonté est renouvelée, nous aimons le bien ; la puissance est là aussi par l’Esprit pour l’homme intérieur et l’espérance de la gloire à venir ; et ainsi nous sentons les infirmités et la misère, mais nous les sentons par le Saint Esprit selon Dieu. C’est là une position bénie, et qui montre combien est véritable et complète la délivrance de la puissance et de l’iniquité de la chair ; car dans ce en quoi nous sommes, par le corps, en rapport avec la création en chute, la volonté n’entre pas, car l’apôtre dit : « non de sa volonté » quoique nous soyons toujours soumis à l’effet comme souffrance. Comme volonté de la chair, le corps est mort et condamné ; mais Celui qui sonde les cœurs trouve la pensée de l’Esprit, un sentiment divin du mal, et la souffrance par lui, le Saint Esprit intercédant pour nous dans ce qui dépasse la mesure de la pensée de l’homme, mais Dieu, dans nos cœurs, entrant dans la souffrance. C’est une merveilleuse délivrance dans la souffrance quoique pas encore de la souffrance.

Le conseil et la faveur de Dieu, Son propre dessein, nous sont maintenant présentés. Si par la grâce quelques-uns ont aimé Dieu, c’est qu’ils étaient appelés selon Son propos, et ce propos n’est ni ici, ni nulle part, simplement la souveraineté dans l’élection ; il embrasse ce à quoi ils sont appelés. Ils étaient préconnus ; mais ceux qu’Il a préconnus, Il les a prédestinés à une gloire qui était dans Sa pensée et dans Ses conseils avant que le monde commence, savoir d’être « conformes à l’image de son Fils, pour qu’il soit premier-né entre plusieurs frères ». Ici, nous pouvons le remarquer, l’épître sort complètement de son sujet et va bien au-delà des limites de celui-ci qui est la responsabilité de l’homme et sa chute, et le moyen qui est trouvé par la mort de Christ. Mais le bon plaisir de la sagesse divine était dans les fils des hommes avant que le monde soit : c’est pourquoi le Fils est devenu homme, afin que Ses rachetés soient rendus conformes à Lui en gloire. En attendant, le premier Adam a été placé sur le terrain de la responsabilité et celle-ci devait recevoir satisfaction et a reçu satisfaction à la croix. Mais, dans la croix, Dieu posait aussi une base juste pour l’accomplissement de Ses conseils qui, en conséquence, furent alors révélés (voyez Tite 1, 2, 3 ; 2 Tim. 1, 9 ; Rom. 16, 25, 26 ; comparer Éph. 3 et Col. 1). Dans l’épître aux Romains l’instruction ne dépasse pas ce qui est individuel, même là où elle parle du propos de Dieu ; nous sommes prédestinés à être conformes à l’image de Son Fils, pour qu’Il soit premier-né entre plusieurs frères. C’est ici assurément la grâce souveraine : placer de pauvres vers de terre qui s’en allaient mourir, dans la même gloire que le Fils du Père, n’a rien à faire avec la responsabilité ou la satisfaction qu’elle exige, quoique l’acte par lequel Dieu a satisfait à ce qu’exigeait notre état de chute, ait posé la base pour l’accomplissement de ce dessein, en ce que l’homme a glorifié Dieu complètement ; et ainsi l’homme est placé dans la gloire de Dieu. À la croix Dieu a donné, comme nous l’avons vu, pleine satisfaction à ce qu’exigeaient nos péchés et notre péché ; mais en outre Dieu y a été glorifié ; et l’homme élevé à Sa droite est entré dans la gloire comme notre précurseur ; car, outre Son droit personnel et éternel, c’est à cause de ce qu’Il a fait pour nous que Christ est entré dans la gloire. L’épître sort donc ici de la sphère de la responsabilité et touche au propos de Dieu ; elle ne dépasse pas cependant, je le répète, la position individuelle : « Ceux qu’il a préconnus, il les a aussi prédestinés à être conformes à l’image de son Fils » ; et l’Écriture rend partout ce même témoignage. « Comme nous avons porté l’image de celui qui est poussière, nous porterons aussi l’image du céleste » (1 Cor. 15, 49) ; « Quand il sera manifesté, nous lui serons semblables » (1 Jean 3, 2) ; « Qui transformera le corps de notre abaissement en la conformité du corps de sa gloire » (Phil. 3, 21). Tel est, sur ce point, le merveilleux conseil de Dieu ; car comment pourrions-nous concevoir, quant à notre état, quelque chose de plus glorieux et de plus heureux que d’être rendus conformes à l’image du Fils de Dieu, de Le voir comme Il est, et de Lui être semblables ?

L’Esprit nous montre ensuite quelle est la sûreté de ceux que Dieu a prédestinés à être ainsi conformes à l’image de Son Fils, nous disant les étapes par lesquelles ils sont amenés à ce grand résultat, mais omettant tout à fait l’œuvre en nous, qu’Il avait pleinement exposée précédemment, parce qu’Il parle de ce que Dieu est pour nous dans Son propre dessein, et qu’Il assure ce dessein en grâce jusqu’à son accomplissement, et ne parle pas de la responsabilité de l’homme et des exigences nécessaires de la nature et de la justice de Dieu. Celles-ci ont été traitées dans les parties précédentes de l’épître, soit quant à la culpabilité et à la justice, soit quant à la nature et à l’état, de manière à rendre possible d’avoir à faire au Dieu saint. La grâce a fait cela ; mais elle a fait ce qui était nécessaire, afin que nous soyons réconciliés avec Dieu ; et ici, je le répète, et ici seulement, l’épître aux Romains touche au sujet du propos et des conseils de Dieu. Il en est de même en Éphésiens 1, 4 ; l’apôtre, dans ce passage, parle de ce qui est selon le bon plaisir de la volonté de Dieu : il faut que les hommes soient « saints » et « en amour » pour être devant Lui ; mais que nous devenions des fils est selon le propos et le bon plaisir de Sa volonté. Il aurait pu, en effet, nous placer un peu plus bas ; mais Il ne le pouvait pas réellement si nous pensons à Lui : c’était une partie de Sa perfection d’avoir une telle pensée et un tel propos. Comme fait, nous pouvons penser à une place plus basse, mais Son conseil était de nous donner la place de fils, « afin qu’il montrât dans les siècles à venir les immenses richesses de sa grâce, dans sa bonté envers nous dans le Christ Jésus ». Une partie de Sa gloire — de ce que les anges apprennent — aurait été perdue autrement, une partie du sacrifice glorieux de l’expiation. Cela n’était pas possible. Ainsi, Il les a appelés, Il les a justifiés, Il les a tous amenés à la perfection dans Son conseil — Il les a glorifiés. Ce n’est pas encore accomplissement historique, mais tout n’est qu’une chaîne ininterrompue pour Dieu.

La grande et précieuse vérité qui en découle nous est présentée maintenant : « Dieu est pour nous » ; et « si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ? ». C’est la grande vérité centrale de la grâce : Dieu est pour nous. Il est pour nous en donnant, en justifiant, et en prenant soin que, dans toutes nos difficultés, rien ne nous sépare de Son amour : « Celui même qui n’a pas épargné son propre Fils, mais qui l’a livré pour nous tous …  ». Oui, si Lui a donné Son Fils, nous pouvons compter que nous recevrons toutes choses avec Lui. Il n’y a pas de don comparable à celui-là : — comment ne nous donnerait-Il donc pas tout le reste ? Et puis, c’est Dieu Lui-même qui justifie. Il ne s’agit pas ici de justification devant Lui, mais de ce que Lui nous justifie Lui-même ; — peu importe alors qui nous condamne : Dieu est pour nous, en cela aussi (comparer Zach. 3).

Mais, direz-vous, il y a des difficultés, des épreuves, des dangers sur la route, la mort, le saint lieu si distant, la puissance de l’ennemi. Eh bien, d’abord, pour ce qui est des difficultés et des épreuves, nous sommes plus que vainqueurs ; elles sont le sentier même de la bénédiction et de la gloire : là, Christ a marché ; là Sa puissance et Sa pensée sont avec nous. Embrassez ensuite tout ce qui est en haut ou en bas — les anges et les puissances ne sont que des créatures — puissance de la créature ou faiblesse de la créature, rien de tout cela ne peut nous séparer de l’amour de Dieu : cet amour est plus, il est plus sûr, plus fort qu’aucune créature ; cependant il est en Lui qui, comme homme, a rencontré pour nous, sur Son chemin, tout ce qui nous était contraire, toute la puissance de l’ennemi et la mort — et qui est maintenant dans le ciel pour nous. C’est l’amour de Dieu, la certitude de l’amour divin, et cela dans le Christ Jésus notre Seigneur, qui a tout traversé, et qui est maintenant dans le ciel pour nous. Ceci nous met à l’abri et nous garantit contre tout et à travers tout, pour la gloire.

C’est ici le seul passage, dans toute l’épître, où l’apôtre, pour introduire l’intercession de Christ, parle de l’ascension : « C’est Christ qui est mort, mais plutôt qui est aussi ressuscité, qui est aussi à la droite de Dieu, qui aussi intercède pour nous » (v. 34). Christ est descendu par le chemin de la souffrance dans la mort et la ruine de l’homme, pour nous ; et ressuscité maintenant en puissance et vainqueur de la mort, comme homme glorifié, Il s’intéresse à nous, Il intercède pour nous, nous faisant trouver le secours de la miséricorde dont nous avons besoin : qui est-ce donc qui nous séparera de Son amour ? Ici, l’apôtre parle de l’amour de Christ, afin que nous Le connaissions, Lui, et Son amour, comme homme qui est descendu dans la mort et qui est monté dans le ciel comme homme, s’intéressant toujours à nous et prenant soin de nous. Au verset 39, il s’agit de l’amour de Dieu en Christ, afin que nous sachions que l’amour est divin, souverain, invariable, élevé au‑dessus de tout ce qui, en nous, pourrait nous en séparer, plus fort que tout ce qui, en dehors de nous, pourrait tenter de nous séparer de lui.

L’apôtre termine ainsi la doctrine de l’épître, nous amenant personnellement jusqu’à la gloire, selon les conseils de Dieu, sans aller plus loin cependant que notre place personnelle selon ces conseils ; et cette place est assurément assez haute et bénie ! Autrement l’épître ne dépasse pas le sujet de la responsabilité de l’homme, dont la loi est la parfaite règle, et où, même quand la rédemption et l’Esprit (lorsque nous sommes morts au péché et que nous sommes vivants à Dieu par Jésus Christ) nous ont affranchis, l’Écriture dit encore : La juste exigence de la loi est accomplie en nous qui marchons selon l’Esprit. Le moyen de délivrance, c’est d’être ainsi morts et vivants en Christ. Mais nul ne peut lire le verset 14 du chapitre 6 et le chapitre 7, sans reconnaître que le grand objet de l’apôtre, dans ces passages, est de montrer que c’est d’être entièrement retirés de dessous la loi et placés sous Christ — d’être délivrés de la loi — qui est le vrai moyen de vivre saintement et d’avoir la paix ; que la loi, qui ne donnait point de vie nouvelle, et qui laissait au péché sa puissance — qui nous laissait par conséquent sans puissance — est mise en contraste avec le fait que, pour la foi, nous sommes morts au péché, et que nous sommes vivants par Jésus Christ et par la puissance de l’Esprit : l’obligation, le péché, et point de vie nouvelle, ce qui est notre état sous la loi, sont mis en contraste avec la vie et l’Esprit nous donnant (étant morts au péché) la puissance et la liberté, bien que, quoique l’entendement soit renouvelé, la chair reste exactement la même.

Dans l’un des cas, nous sommes encore, même si nous sommes renouvelés, sous la puissance du péché et esclaves du péché ; dans l’autre, nous sommes affranchis pour vivre à Dieu. La loi est assujettissement au péché ; notre place nouvelle est vie et liberté, le péché dans la chair étant condamné à la croix. Les natures sont les mêmes ; — mais être liés sous le joug de la mauvaise et être incapables de nous délivrer nous-mêmes, est une chose tout à fait différente d’être affranchis par la puissance de Dieu et d’être capables de tenir la chair soumise. Mais cela nous l’avons par le fait même que l’épître aux Romains se limite à la responsabilité de l’homme et au moyen par lequel Dieu y a satisfait en grâce : la justification de l’homme et sa délivrance ; avec une courte mention des conseils divins, à la fin, pour introduire notre sûreté. Ainsi le fondement tout entier de la position personnelle du croyant maintenant justifié — le salut de Dieu — est merveilleusement et complètement sondé, et fondé sur l’œuvre de grâce de Dieu, depuis l’état complet de péché d’un homme éloigné de Lui, jusqu’à la parfaite assurance de celui qui est appelé, de sorte que rien ne peut le séparer de l’amour de Dieu. Cette exposition est d’une indicible valeur. Le péché est pleinement établi, recherché et mis en évidence ; la loi comme condamnant et convainquant de péché, le pardon, la justification, la délivrance de la puissance du péché, sont tous passés en revue ; la question de savoir comment un homme peut être juste auprès de Dieu, est examinée sous toutes ses faces ; le jugement divin et l’expérience de l’homme sont traités à fond, et la justice divine par la grâce est efficacement établie comme le fondement sur lequel le croyant est placé et qu’il ne perdra jamais. Le sujet n’est pas poursuivi jusqu’aux conseils de Dieu et aux privilèges qui se rattachent à l’établissement de la gloire de Christ comme Chef ou Tête, mais notre position est révélée et exposée par le raisonnement du Saint Esprit, par la Parole de Dieu.

Les trois chapitres suivants, chapitres 9, 10 et 11, forment un appendice spécial, qui a pour but de concilier la doctrine selon laquelle il n’y a point de différence entre le Juif et le Gentil, avec la fidélité de Dieu aux promesses qu’Il a faites au Juif, ou à Israël. Le Juif en effet pourrait dire : « Je n’ai rien à répondre au procès que vous me faites par la loi ; j’ai violé la loi ; je suis obligé par conséquent de renoncer à mon droit, sous elle, d’être un peuple privilégié ; mais il y a des promesses même avant la loi qui n’ont été subordonnées à aucune condition légale. Comment se fait-il que vous mettiez de côté ces promesses, de manière à ne faire aucune différence entre Juif et Gentil ? ». Cette objection a une apparence de raison, et l’Esprit de Dieu, jaloux de la fidélité de Dieu et de la sûreté de la promesse qu’Il a faite à Son peuple, éclaircit maintenant complètement ce point, et démontre victorieusement, comment Israël avait perdu tout droit aux promesses, et comment Dieu, fidèle à Lui-même, accomplirait néanmoins ces promesses, avec cette différence toutefois que, selon la sagesse divine, le Juif serait admis comme un simple pécheur n’ayant droit à rien, exactement comme le serait un Gentil.

Les Juifs accusaient l’apôtre de montrer de l’indifférence pour les privilèges juifs ; il s’en défend vivement. Il avait, dit-il (le Saint Esprit lui rendant témoignage dans sa conscience), autant d’amour pour Israël que Moïse quand il avait désiré être effacé du livre de Dieu si Dieu ne pardonnait pas. Lui aussi, Paul, comme hors de lui dans son zèle pour eux, avait souhaité[10] d’être par anathème séparé du Christ, pour l’amour d’eux, et il reconnaît ainsi tous les privilèges qui leur appartiennent, comme le Seigneur dans l’histoire du fils prodigue parle du frère aîné, à qui le père dit : « Tout ce qui est à moi est à toi ». Ainsi tout, même Christ selon la chair, venait des Juifs. La Parole de Dieu non plus n’était pas sans effet, car tous ceux qui étaient issus d’Israël, n’étaient pourtant pas Israël. Et maintenant l’apôtre introduit la souveraineté de Dieu.

On peut remarquer que l’élection, dont l’apôtre parle ici, n’est pas l’élection nationale, mais précisément le contraire. Le Juif se réclamait de cette élection nationale, et l’apôtre renverse sa prétention en disant : Vous prétendez être enfants, exclusivement enfants de la promesse, comme semence d’Abraham ; mais il est écrit : « En Isaac te sera appelée une semence ». Les Ismaélites ont les mêmes droits que vous, si vous les possédez comme descendants d’Abraham selon la chair. Oh ! dit le Juif, Ismaël est un esclave, non pas un vrai enfant de la promesse. Sans doute, mais le fait qu’Ismaël descend d’Abraham selon la chair, montre que ce ne sont pas les enfants de la chair qui sont enfants de Dieu, mais les enfants de la promesse ; car cette parole est une parole de promesse (c’est ainsi qu’il faut lire ce passage) : « En cette saison-ci, je viendrai, et Sara aura un fils ». Ce n’est pas tout encore : quand Rebecca conçut d’un, d’Isaac (et ici le titre d’esclave ne pouvait pas servir de subterfuge), avant que les enfants soient nés et qu’ils aient rien fait de bon ou de mauvais, il a été dit : « Le plus grand sera asservi au plus petit ». Si le Juif invoque son droit de descendance selon la chair, il faut qu’il accorde les mêmes droits aux Édomites, descendants d’Ésaü ; s’il ne veut pas y consentir, il faut qu’il accepte la souveraineté dans l’élection.

Dieu use de cette souveraineté en faveur des nations aussi bien que des Juifs (v. 24). Mais avant d’en arriver là, l’apôtre traite quelques autres points et objections que nous ne devons pas passer sous silence.

Au verset 14, nous trouvons l’objection ordinaire que, s’il en est ainsi, il y a de l’injustice en Dieu. Il y répond et affirme cette souveraineté en citant Moïse : « Je ferai miséricorde à celui à qui je fais miséricorde, et j’aurai compassion de qui j’ai compassion ». C’était de la souveraineté, mais celle de la miséricorde. C’est l’iniquité qui a donné occasion à ces paroles ainsi qu’à celles qui sont citées un peu plus bas ; car la souveraineté dans la grâce et dans la compassion suppose le mal, et pardonner ne se rapporte pas au bien. En effet, Israël avait fait le veau d’or, et Dieu les avait tous menacés d’extermination ; mais, sur l’intercession de Moïse, Dieu se retire dans Sa propre souveraineté pour en épargner quelques-uns. Si Dieu n’avait pas été souverain, s’Il avait agi en justice, tous, sauf Moïse et Josué, auraient été retranchés ; mais Dieu était souverain, et Il pouvait user de miséricorde, et Il l’a fait. L’apôtre en tire cette conclusion générale : ce n’est donc pas de l’homme qui veut ou de celui qui court ; mais de Dieu qui fait miséricorde ; l’homme n’arrive à aucune justice par son vouloir ou ses efforts ; mais Dieu fait miséricorde quand l’homme est injuste.

Il en est de même, dans l’autre sens, pour le cas du Pharaon : Dieu montre Sa puissance et fait publier Son nom, et le Pharaon est suscité comme celui en qui la chose doit être accomplie. Il était déjà un méchant homme qui avait défié l’Éternel : Qui est l’Éternel pour que je Lui obéisse ? Je ne connais pas l’Éternel (Ex. 5, 2). Eh bien ! dit l’Éternel, tu connaîtras, et toute la terre connaîtra aussi ; et Il endurcit le Pharaon, pour qu’il soit un monument de Ses jugements pour ceux qui défient Sa puissance.

Israël et le Pharaon étaient méchants : la justice les aurait condamnés tous deux ; Dieu fait miséricorde à l’un, et Il endurcit l’autre. Il fait miséricorde à qui Il fait miséricorde, et Il endurcit qui Il veut, tandis que la simple justice les aurait condamnés tous deux. C’est là la souveraineté : Dieu se montre non seulement juste — le jour du jugement le prouvera — mais Il montre qu’Il est Dieu ; cela est d’une importance infinie pour nous tous, car autrement personne ne serait sauvé.

Mais il reste une objection humaine que l’apôtre présente clairement, en regardant l’homme en face. « Pourquoi se plaint-il encore ? car qui est-ce qui a résisté à sa volonté ? » (9, 19). Ici, il ne s’agit pas simplement de Sa justice, mais de puissance exercée selon Sa volonté : c’est l’objection de l’homme prétextant l’impossibilité de résister. L’exercice souverain de la volonté de Dieu n’est pas, pour l’homme, une réponse à l’exercice de sa propre volonté à lui ; mais l’homme, si Dieu fait ce qu’il Lui plaît, voudrait s’en prévaloir comme d’une excuse. Cela regarde Dieu ! Pourquoi blâmer l’homme ? L’apôtre ne raisonne pas sur ce qu’il y a de déraisonnable dans le prétexte invoqué ; mais il donne à Dieu Sa place, et à l’homme la sienne. La chose formée n’a pas à dire à Celui qui l’a formée : « Pourquoi m’as-tu ainsi faite ? ». Dieu, comme le potier, peut faire de la même masse un vase à honneur, et un autre à déshonneur (v. 21). S’Il le fait, nul ne peut dire : Que fais-tu ? Aucune parole, nulle part, ne nous dit que Dieu ait fait ainsi ; mais la première de toutes les justices, c’est que Dieu ait Sa place ; et cela l’apôtre le proclame. C’est ici le premier point : Dieu jugera l’homme ; il n’appartient pas à l’homme de juger Dieu : Dieu est souverain. Il n’est dit nulle part que Dieu fait un vase à déshonneur ; mais s’Il le faisait, l’homme n’aurait qu’à s’incliner.

Voyez maintenant la sainte sagesse de Dieu. Il a la puissance de faire ce qu’Il trouve bon. Mais quoi, « si Dieu voulant montrer sa colère et faire connaître sa puissance, a supporté avec une grande patience des vases de colère tout préparés pour la destruction ; — et afin de faire connaître les richesses de sa gloire dans des vases de miséricorde qu’Il a préparés d’avance pour la gloire » ? En premier lieu, il n’appartient pas à l’homme de raisonner avec Dieu. Dieu a le pouvoir, s’Il le trouvait bon, de faire de la même masse des vases à honneur et des vases à déshonneur. Ensuite le cas est présenté sans affaiblir cela. Quoi donc ? Si Dieu a supporté des vases tout préparés pour la destruction ? Non pas que Lui les ait préparés, mais comme pour le Pharaon, Il montre Sa colère dans ceux qui sont déjà tels, et fait connaître ensuite les richesses de Sa gloire dans des vases de miséricorde. Mais ici l’œuvre dans ceux qu’Il a préparés d’avance pour la gloire est Son œuvre. Ils étaient des vases de miséricorde, et Il les a préparés pour la gloire même : il en est ainsi pour nous qui avons cru par grâce. Les autres étaient des vases de colère ; en ceux-ci qui étaient préparés pour la destruction, Il a montré Sa colère, et a fait connaître Sa puissance, comme dans le Pharaon. Tous, pour commencer, étaient méchants ; Dieu a manifesté Son droit divin et Ses voies, dans la miséricorde et dans la gloire. Il est souverain en Lui-même, préparant pour la gloire, nous, dit l’apôtre, « lesquels aussi il a appelés… non seulement d’entre les Juifs, mais aussi d’entre les nations » (v. 24). L’apôtre force le Juif d’admettre la souveraineté, ou bien il faut qu’il admette les Ismaélites et les Édomites, et le retranchement de tout le peuple sauf Moïse et Josué ; ensuite il montre que Dieu use de cette souveraineté pour appeler des Gentils, qui n’avaient aucun droit par promesse, et des Juifs qui avaient perdu ce droit. Il cite alors Osée, qui annonce les deux choses, ce qui concerne les Gentils, au chapitre 1, ce qui regarde les Juifs, quand ils sont rejetés au chapitre 2[11] ; puis, il introduit le témoignage d’Ésaïe (v. 27-29), déclarant qu’un résidu seulement d’Israël serait sauvé, et que si le Seigneur n’en avait laissé un très petit nombre, ils auraient été comme Sodome et comme Gomorrhe.

Quel est le résultat ? — C’est que les nations, ne cherchant pas la justice, ont trouvé la justice, la justice qui est sur le principe de la foi ; mais Israël poursuivant une loi de justice, n’est point parvenu à cette loi, parce qu’il l’a cherchée sur le principe des œuvres de loi, et non sur le principe de la foi ; car ils ont heurté contre la pierre d’achoppement qu’Ésaïe avait annoncée comme devant être placée en Sion ; en réalité un sanctuaire, mais en même temps une pierre d’achoppement ; or ce serait par la foi qu’ils obtiendraient la bénédiction ; quiconque croirait en Lui, ne serait point confus ; mais, comme corps, ils avaient heurté contre la pierre d’achoppement.

Ce sujet a besoin d’être développé davantage ; car il ne s’agit pas maintenant de la souveraineté de Dieu admettant le Gentil et épargnant par miséricorde un résidu d’entre les Juifs, mais de la réjection d’Israël, comme peuple, et de la question de savoir si cette réjection était finale. Le désir du cœur de l’apôtre était qu’Israël soit sauvé (chap. 10, 1). Il rend témoignage du zèle qu’ils ont pour Dieu ; seulement ce zèle n’était pas selon la connaissance ; puis, il développe ce dernier point pour expliquer leur réjection. Le chapitre suivant s’occupe de la question de savoir si leur réjection est finale ou non. Ils ignoraient la justice de Dieu, ce grand sujet de l’épître, et cherchant à établir leur propre justice sous la loi, ils ne s’étaient pas soumis à la justice de Dieu. Cette justice, c’était Christ ; et Christ était la fin de la loi : en ce qui concerne la justice, Il mettait absolument fin à la loi, pour quiconque croyait. Le « conducteur » avait poursuivi son office « jusqu’à la foi », envers ceux qui avaient été placés sous ses soins jusqu’au temps déterminé par le Père[12] et, en outre, pratiquement et utilement aussi, envers beaucoup d’âmes, puisque la plupart des chrétiens sont sous la loi. Alors le Fils est venu et toute l’économie et la dispensation de la loi ont pris fin. Il en a été ainsi en dispensation — ils ne pouvaient avoir deux maris à la fois ; — et il en est ainsi dans la conscience, car telle est la pensée et la vérité de Dieu : un autre fondement et un autre moyen de justice ont été introduits. Le premier était par les œuvres ; le second est la justice de Dieu, devenue la nôtre, par la foi en Christ qui a parfaitement glorifié Dieu. Christ met fin aux justes exigences de Dieu envers nous selon la loi, qui est la condamnation et la mort ; Il est Lui-même notre justice, à nous qui croyons par grâce.

Le point particulier que l’apôtre fait ressortir ici, c’est que Christ est « la fin de la loi ». C’en est fait d’elle quant à la justice ; Christ prend sa place. La loi ne s’inquiète que d’une chose : que la personne placée sous son autorité l’accomplisse. Elle dit : « L’homme qui aura pratiqué ces choses vivra par elles » ; et cela est parfaitement juste. La justice qui est sur le principe de la foi parle tout autrement ; elle dit : « Si tu confesses de ta bouche Jésus comme Seigneur et que tu croies dans ton cœur que Dieu l’a ressuscité d’entre les morts, tu seras sauvé » (v. 6-9) ; la vraie question, c’est le salut du pécheur, et non l’observation de la loi pour vivre. Le passage du chapitre 30 du Deutéronome, cité par l’apôtre, se rapporte à un temps où la question de la responsabilité quant à l’observation de la loi était close, et où le peuple, étant captif à cause de ses péchés, et rejeté pour n’avoir pas gardé la loi, il n’était plus question de l’observer pour vivre.

L’apôtre alors introduit Christ comme espérance, ce qu’Il était en effet pour le Juif : par Lui seul, même pour les espérances juives, la loi pouvait être écrite dans le cœur selon la nouvelle alliance ; — puis il démontre que Christ est Celui auquel Israël était enseigné à regarder. Mais, s’il en est ainsi, la porte est ouverte au Gentil qui croit : « Quiconque croit en lui ne sera pas confus ». Partout où la parole était dans le cœur et dans la bouche, c’est-à-dire la parole de la foi, laquelle était prêchée, le salut appartenait à l’âme ; c’en était fait de la loi, et la foi n’était pas la loi — c’était un tout autre principe de justice : la loi parlait d’une manière, la foi d’une autre. Le principe qui ouvrait la porte au Gentil étant ainsi établi, la doctrine de l’égalité entre Juif et Gentil apparaît d’une manière admirable, en contraste avec l’application qui en a été faite au chapitre 3. Là nous avions : « Il n’y a pas de différence, car tous ont péché … » ; ici : « Il n’y a pas de différence de Juif et de Grec, car le même Seigneur de tous est riche envers tous ceux qui l’invoquent » ; car quiconque (remarquez comment l’apôtre insiste sur ce mot), « quiconque invoquera le nom du Seigneur sera sauvé » — par conséquent un Gentil qui croyait.

L’application originaire et immédiate du passage de Joël (chap. 2, 32), c’était la délivrance en Sion, pour un résidu ; mais Dieu avait exprimé la bénédiction en termes qui ouvraient aussi la porte au Gentil, lorsque le temps serait venu ; or, cette voie de Sa grâce était de beaucoup plus importante que le privilège juif. Elle supposait le témoignage qui a fait connaître le Seigneur qu’ils devaient invoquer.

Ce qui précède amène l’exposition de la position relative du Juif et du Gentil, sous ce témoignage. Le témoignage en grâce annoncé à Israël, était une doctrine bien connue dans l’Ancien Testament ; aussi l’apôtre cite-t-il, à son sujet, Ésaïe 52, 7.

Mais (v. 16), tous n’ont pas obéi au témoignage ; c’est ce que déclare Ésaïe 53, 1, disant : « Qui est-ce qui a cru à ce qu’il a entendu de nous ? ». Ainsi la foi vient de ce qu’on entend (v. 17) — du témoignage entendu — et celui-ci est par la Parole de Dieu. Mais les Gentils n’étaient-ils pas les objets du témoignage de Dieu ? Dieu n’avait-Il pas envoyé le témoignage ? Le témoignage de Dieu avait été envoyé pour les Gentils : « Leur voix est allée par toute la terre … » (v. 18). Le principal but de l’apôtre est, je crois, de montrer ici que, dans les pensées de Dieu, Son témoignage devait aller par toute la terre, et non pas d’indiquer comment le fait s’accomplirait. Israël n’avait-il aucune connaissance de cette introduction des Gentils ? L’ancien témoignage du chapitre 32 du Deutéronome démontrait le contraire. Quand, au commencement, Dieu a séparé Israël pour en faire une nation devant Lui, Moïse annonce que ce « peuple insensé et dénué de sagesse » abandonnerait Dieu. Dieu les exciterait à jalousie par ce qui n’était point une nation (v. 19). Mais Ésaïe s’enhardit tout à fait : Dieu, dit-il, a été trouvé de ceux (les Gentils) qui ne Le cherchaient pas ; Il a été manifesté à ceux (encore les Gentils) qui ne s’enquéraient pas de Lui ; mais quant à Israël, « tout le long du jour j’ai étendu mes mains vers un peuple désobéissant et contredisant ». La grâce n’avait pas fait défaut, mais elle n’avait pas trouvé de réponse. Dieu avait crié en vain : le divorce était accompli (voyez És. 50).

Chapitre 11. La réjection d’Israël était-elle finale ? Qu’ainsi n’advienne ! L’apôtre donne maintenant trois preuves que la réjection n’était pas finale : il y avait un résidu reconnu maintenant ; les Gentils étaient reçus, afin d’exciter les Juifs à la jalousie, non par conséquent afin que ceux-ci soient rejetés ; et, en troisième lieu, le Rédempteur viendrait encore à Sion et détournerait de Jacob l’impiété. Ainsi Israël serait sauvé comme peuple, « tout Israël » — non pas seulement comme Juifs, ni, ce qui est plus encore, comme un résidu. En même temps, l’apôtre montre que le Gentil se trouvait placé sous une responsabilité semblable à celle du peuple choisi.

En premier lieu donc (car Paul lui-même, issu d’Israël selon la chair, avait part à la bénédiction), l’apôtre déclare que Dieu n’a pas rejeté Israël ; mais il en était maintenant comme aux jours d’Élie, où Dieu s’était réservé un résidu selon l’élection de la grâce, alors que le prophète faisait requête contre les enfants d’Israël, comme adversaires de Dieu et de Son prophète. Lui Paul était la preuve vivante de cette élection. Mais « si c’est par la grâce, ce n’est plus sur le principe des œuvres, puisque autrement la grâce n’est plus la grâce » (v. 6). Israël n’avait pas obtenu ce qu’il recherchait mal ; mais l’élection l’avait obtenu, et les autres avaient été endurcis. C’est ce qu’annonçaient Moïse (Deut. 29, 4) et David en esprit, prononçant leur jugement à cause de leur réjection de Christ (Ps. 69, 22, 23). Depuis la fin de leur histoire dans le désert, ils avaient été les objets de la patience de Dieu, jusqu’à ce que le Messie ait été rejeté ; maintenant ils heurtaient contre la pierre d’achoppement ; ils étaient endurcis et aveuglés.

Mais avaient-ils bronché afin qu’ils tombent sans ressource et à jamais ? Était-ce là le dessein de Dieu à leur égard ? Qu’ainsi n’advienne ! Mais leur chute était l’occasion de faire parvenir le salut aux nations, pour les exciter eux-mêmes à la jalousie (v. 11). C’est ici la seconde preuve que Dieu n’avait pas un dessein final de les rejeter ; mais Dieu l’avait ainsi ordonné, pour les exciter à la jalousie, c’est-à-dire pour ne pas les rejeter ; l’apôtre travaillait dans cette pensée ; il était si éloigné de faire peu de cas d’Israël, qu’il glorifiait son ministère envers les nations, en ce que ce dernier tendait à ce but. Car si leur chute était la richesse des nations, combien plus le seraient leur restauration et leur plénitude ?

Ceci amène l’apôtre à mettre en lumière la relation du Juif et du Gentil, quant à la position de promesse dans ce monde ; point d’une immense importance et qui fait ressortir la vraie place du corps professant gentil dans ce monde. Examinons ce sujet de plus près.

Quand, après le déluge, les hommes, rejetant Dieu, entreprirent de se faire eux-mêmes un nom, afin qu’ils ne soient pas dispersés, Dieu, en jugement, les dispersa et les forma en nations. Celles-ci s’adonnèrent à l’idolâtrie. Dieu appela Abraham (Jos. 24) lorsqu’elles étaient dans cet état, et fit de lui la racine d’une famille séparée, en qui étaient les promesses selon la chair, ou en Christ, d’une manière spéciale, par grâce. Jusque-là il n’y avait eu, pour la bénédiction, aucun chef de race ou de famille. Adam était le père des pécheurs ; — Abraham celui de la semence de Dieu dans ce monde. En lui, l’élection, la promesse et l’appel étaient établis, non seulement dans sa personne en grâce mais comme racine et arbre de promesse. Abraham était les prémices, la racine ; l’arbre naturel, c’était Israël. Quelques-unes des branches avaient été retranchées, car l’apôtre ne veut pas dire davantage. L’arbre est envisagé comme un arbre continu de promesse, et les Gentils sont entés par grâce, à la place des Juifs, héritiers naturels des promesses, afin de participer avec eux à la racine et à la graisse de l’olivier. Nous ne trouvons pas ici le Juif et le Gentil devenus un seul homme nouveau — un seul corps en Christ ; nous n’avons pas un corps uni à Christ dans le ciel, là où il n’y a ni Juif, ni Gentil ; ni le mystère caché dès les siècles et les générations ; mais nous trouvons Israël, l’olivier de la promesse subsistant depuis Abraham, en possession de la promesse, ayant quelques-unes de ses branches arrachées, pour cause d’incrédulité. La racine demeurait au même arbre qui avait porté les branches, et les Gentils étaient entés sur l’arbre en question ; ils n’étaient pas des branches naturelles, mais ils avaient la même position par la foi.

Les Gentils ne devaient pas s’enorgueillir de leur position, mais craindre. Dieu n’avait pas épargné les branches naturelles, que ferait-Il donc aux Gentils, qui étaient seulement entés ? Il n’est pas question ici de l’Église, comme corps de Christ. Lorsqu’il s’agit du corps de Christ, il n’est pas question de couper. Ensuite, le Gentil est sérieusement averti, et le principe des voies de Dieu lui est révélé : — « la bonté et la sévérité de Dieu », « la sévérité envers ceux qui sont tombés », c’est-à-dire envers les branches israélites, qui ont été coupées ; « la bonté de Dieu envers toi, si tu persévères dans cette bonté » (v. 22) ; — autrement les branches gentiles seraient coupées, comme l’avaient été les branches juives.

Les Gentils ont-ils persévéré ? La profession gentile a-t-elle persévéré dans la foi et dans la marche qui ont été une fois données aux saints ? Si elle ne l’a pas fait, elle aussi, elle sera coupée, comme les Juifs l’ont été : — Avertissement solennel pour la chrétienté !

Cependant l’arbre de la promesse demeure ; et les branches juives seront entées de nouveau sur leur propre olivier, base originelle de la promesse abrahamique : « car Dieu est puissant pour les enter de nouveau » (v. 23). Ici encore, il ne s’agit pas d’enter dans l’Église ; car bien loin de s’y trouver, les branches juives étaient déjà coupées lorsque l’Église fut fondée (en ce qui concerne l’évangile, ils sont ennemis afin d’ouvrir la porte aux Gentils) ; néanmoins pour l’amour des pères, ils sont bien-aimés comme peuple choisi de Dieu. Ils sont des élus de Dieu, mais des ennemis quant à l’évangile. Les Juifs, peuple choisi de Dieu comme tel, ont été coupés pour cause d’incrédulité (comme le seront les Gentils dans le même cas), puis ils seront entés de nouveau. Le système juif a pris fin, nous le savons, pour ouvrir la porte aux Gentils : le système gentil prendra fin pour réintroduire les Juifs dans la place de la promesse, promesse qui s’étendra alors sur toute la terre. Ce n’est pas que Dieu ait failli ou puisse faillir à l’accomplissement de Son œuvre de grâce, mais un endurcissement partiel est arrivé à Israël, jusqu’à ce que soit entrée la plénitude des nations ; savoir tous les Gentils qui ont une part à la gloire de Christ — en un mot, la vraie Assemblée — ce qui complétait le nombre introduit par l’évangile.

Alors l’histoire gentile de la grâce et de l’Église cessera ; puis Israël sera sauvé comme nation, ce qui n’est pas possible tant que dure le temps de l’Assemblée, où il n’y a ni Juif ni Grec. Ce sera tout Israël, et non pas seulement les Juifs, quand le Christ, le Libérateur, viendra de Sion, quand Il viendra, non du ciel pour nous prendre dans le ciel, mais pour détourner de Jacob l’impiété dans le lieu de Sa puissance, sur la terre. Le système professant gentil sera coupé, à moins qu’on ne puisse appeler le papisme et l’incrédulité de la persévérance dans la bonté de Dieu. Remarquez-le bien, il ne s’agit pas ici de la persévérance de cette bonté ; car c’est précisément alors que cette dernière sera manifestée de la manière la plus complète, puisque la plénitude des nations sera entrée, et élevée alors dans la gloire céleste. Toutefois, comme système sur la terre, ils n’auront pas persévéré dans la bonté de Dieu, et comme tels ils seront coupés. Il s’agit ici des voies de Dieu sur la terre, non de la sûreté des saints pour le ciel. Il y a une position de promesse et de bénédiction dans laquelle les hommes sont introduits, et où ils possèdent extérieurement ce à quoi on peut participer sur la terre, sans être pour cela nécessairement participants du Christ ; c’est le cas qui nous est présenté au chapitre 6 de l’épître aux Hébreux.

L’alliance de Dieu pour ôter le péché d’Israël est sûre ; elle sera accomplie quand Christ viendra. L’apôtre parle de Christ venant de Sion, en un temps qui est encore à venir ; car les dons et l’appel de Dieu sont sans repentir ; ils ne peuvent être ni changés, ni annulés, et Israël, comme peuple, est à Dieu, par don et par appel. « En ce qui concerne l’évangile, ils sont ennemis », savoir la nation maintenant rejetée ; « mais en ce qui concerne l’élection », ils sont toujours et invariablement bien-aimés comme peuple, et cela, en relation non avec la loi, mais avec Abraham, Isaac et Jacob (v. 28). La loi, c’était la bénédiction conditionnelle : « Si tu obéis à ma voix, tu seras… » ; avec Abraham, Isaac et Jacob, c’était le propos de Dieu, le don inconditionnel, et l’appel. On retrouve cette différence tout au long de l’Écriture : Daniel 9 fait allusion à Moïse ; Lévitique 26, 42 à Jacob et Abraham ; Exode 32, 13, de même ; et un grand nombre d’autres passages. La restauration finale d’Israël sera accomplie sur le fondement des promesses faites aux pères ; « car sa bonté demeure à toujours ».

Il y avait là une manifestation de la sagesse de Dieu, que l’apôtre n’oublie pas. Israël avait des promesses : s’il avait été introduit sur le principe de ces promesses, c’était en quelque mesure un droit, quoique ce soit la grâce qui ait donné les promesses originairement. Toutefois Israël n’a pas voulu ; mais il a rejeté Christ, en qui les promesses doivent toutes être accomplies ; il devient ainsi un simple objet de miséricorde, aussi bien qu’un Gentil, quoique Dieu demeure fidèle pour accomplir Ses promesses. Comme les Gentils avaient été incrédules et que la miséricorde avait été le seul principe de leur admission, de même les Juifs, n’ayant pas cru à la miséricorde manifestée envers les Gentils, avaient rejeté la grâce qui ouvrait la porte à ceux-là, et devenaient eux-mêmes de simples objets de souveraine miséricorde.

On verra que j’ai traduit le verset 31 autrement que ne le font d’autres versions qui lisent : « De même ils ont maintenant désobéi, afin que, par la miséricorde qui vous a été faite, ils obtiennent aussi miséricorde » ; mais qui mettent ainsi ce verset en contradiction directe avec le verset 28. Les Juifs ne sont pas sauvés par la miséricorde faite aux Gentils, s’ils sont ennemis, en ce qui concerne l’évangile, à cause des Gentils.

Dieu avait renfermé tous, Juifs et nations, sous la désobéissance, afin de faire purement miséricorde à tous ; c’est ce fait qui amène les louanges et l’adoration de l’apôtre, lorsqu’il contemple la profondeur des richesses et de la sagesse et de la connaissance de Dieu.

L’apôtre termine ainsi l’exposé qu’il nous fait, par l’Esprit. Il nous a présenté la grâce en rédemption et en justification, qui s’était occupée des pécheurs ; puis la sagesse qui avait su concilier la fidélité de Dieu à Ses promesses, avec l’introduction des héritiers de la promesse, sur le pied de la pure miséricorde, seule ressource pour des pécheurs ; enfin les richesses de la grâce de Dieu. Maintenant, tout en résumant brièvement sa doctrine un peu plus loin, l’apôtre en vient (chap. 12) aux conséquences pratiques qui devaient découler de ces « compassions de Dieu ».

L’exhortation pratique prend pour base et pour principe la doctrine tout entière de l’épître, que clôt d’ailleurs la dernière partie relative aux Juifs (chap. 12, 1) — savoir miséricorde envers tous, Juifs ou Gentils. Il n’y avait pas d’autre fondement d’espérance, et cette miséricorde avait été pleinement développée dans la partie doctrinale de l’épître. Le premier principe général se rapporte directement à la doctrine du chapitre 6. Nous avons vu que la première partie de l’épître, qui finit à la fin du verset 11 du chapitre 5, ne nous parle ni d’expérience, ni de pratique : elle est l’exposé de toutes les richesses de la miséricorde de Dieu dans la rédemption. Ensuite, étant affranchis, et dans la nouvelle puissance de l’Esprit de vie, nous présentons nos corps sans volonté propre, comme un instrument dont nous disposons, en sacrifice vivant, saint, agréable à Dieu, ce qui est notre service intelligent. Je ne suis ni innocent, ni sous la domination du péché ; et j’ai le privilège, dans la libre puissance de la vie, d’offrir entièrement à Dieu mon corps en sacrifice, mais en service vivant. Le corps est consacré à Dieu, mis à part, et agréable. L’âme intelligente sait ce qu’elle fait en agissant ainsi : ce n’est pas une cérémonie aveugle accomplie selon une règle, ni une obligation légale, « un joug que ni nos pères ni nous n’avons pu porter », mais c’est le libre service d’une âme de franche volonté, offrant avec intelligence toutes ses capacités à Dieu, et en particulier ce corps. Si ce dernier nous gouvernait, s’il avait une volonté à lui, il serait le siège et la puissance du péché, qui nous mène en captivité ; mais il est maintenant un sacrifice vivant et agréable à Dieu.

Ce côté pratique est en parfaite harmonie avec la doctrine de l’épître ; tandis que l’épître aux Éphésiens nous présente le chrétien comme ayant été mort dans les péchés, et étant une nouvelle création qui vient directement de Dieu. Quant à la marche pratique chrétienne, le chapitre 5 de cette même épître nous invite à être imitateurs de Dieu et à marcher dans l’amour, étant lumière dans le Seigneur. L’épître aux Romains n’atteint pas ce terrain-là : elle nous a montré le corps comme le siège pratique du péché, comme tel appelé « la chair », et amené dans la mort. Nous avons à nous tenir pour morts ; puis — étant vivants à Dieu dans le Christ Jésus, libres de la loi du péché et de la mort, par la puissance de la grâce — nous pouvons nous livrer nous-mêmes à Dieu comme d’entre les morts étant faits vivants, et Lui présenter nos corps en sacrifice vivant. C’est le propos et la volonté divinement produits, le service intelligent du chrétien libre, mais qui a à considérer ce qu’il fait du corps comme un sacrifice à Dieu, bien qu’un sacrifice vivant.

L’apôtre nous montre ensuite que le monde qui nous entoure, étant un immense système édifié par l’ennemi, tout entier éloigné de Dieu, nous ne pouvons pas comme chrétiens nous y conformer ; toutefois ce n’est pas un simple manque d’harmonie extérieur, mais une différence qui découle d’un renouvellement intérieur de l’entendement. Elle a par conséquent son côté positif, qui s’étend beaucoup plus loin. Le chrétien recherche au milieu de ce monde le chemin de la volonté de Dieu, de cette volonté bonne, agréable et parfaite, agréable, non pas à nous, comme on l’a dit plus d’une fois, mais agréable en elle-même ; d’abord à Dieu, puis, dans sa nature même, à quiconque juge droitement. C’est un immense privilège d’avoir la volonté de Dieu dans un monde éloigné de Lui. Christ l’a indiquée et l’a révélée en marchant comme homme, avec une perfection divine, dans un chemin dont Sa marche était la perfection et le modèle. Son sentier n’était pas celui d’une justice réciproque, car tous étaient contre Lui et suivaient leur propre chemin ; ce n’était pas, je n’ai pas besoin de le dire, un sentier mauvais ; c’était un sentier céleste sur la terre, une vie d’obéissance parfaite ; une vie de grâce sur la terre — Dieu manifesté en chair. Il n’y avait nul besoin d’un chemin, dans le paradis, car l’homme n’avait qu’à rester là où il était, et ce qu’il était. Lorsque le système tout entier n’était qu’éloignement de Dieu, et que l’homme avait abandonné Dieu, il ne pouvait y avoir là de bon et droit chemin, sinon celui du retour vers Dieu ; mais revenir à l’état originel, cela était impossible, c’en était fait de l’innocence ; elle ne pouvait jamais être recouvrée ; l’arbre de vie était perdu. Mais le Fils de Dieu pouvait apporter sur la terre des motifs célestes ; Il pouvait manifester une vie de grâce et de séparation de tout mal, au milieu du mal qui était dans le monde ; Il était saint et obéissant ; Il déployait ici-bas un caractère nouveau et divin, céleste dans sa nature, et toutefois s’adaptant en grâce à l’homme tel qu’il était sur la terre. C’est ce chemin que nous avons à apprendre, pour éprouver quelle est la volonté de Dieu, bonne, agréable et parfaite. Cette volonté, Christ est venu l’accomplir ; Il y a marché au milieu du mal ; Son sentier n’était pas seulement juste et bon ; c’était un sentier d’obéissance. Dieu était ainsi rétabli à la place qui Lui appartenait, et l’homme à la sienne, dans une place parfaite, place de grâce (c’est-à-dire en bonté), adaptée à ceux qui étaient dans le mal, quoique elle-même soit au-dessus du mal, non seulement pour chercher et sauver, mais dans notre propre stature de manière à représenter Dieu. Ici, toutefois, le chemin nous est présenté dans son caractère de soumission à la volonté de Dieu. C’est l’obéissance de Celui qui s’étant livré Lui-même à Dieu, cherche quelle est Sa volonté, sait qu’elle est parfaite, et trouve son plaisir dans cette volonté même, et en y obéissant.

Cet assujettissement à la volonté de Dieu dans le sacrifice de nous-mêmes, empêche, par sa nature même, que notre moi s’élève ; l’âme prend tranquillement la place que Dieu lui a assignée, et cela avec d’autant plus de fermeté, qu’elle le fait comme servant Dieu. Elle sert tranquillement là où Dieu l’a placée et Lui en fait un devoir : ce qu’elle fait dans la foi, elle le fait avec Dieu, et à Son service. Chacun prend sa place dans le corps, selon la position que Dieu lui a assignée ; chacun se borne à son propre service et s’y applique, tous étant un seul corps en Christ, et chacun individuellement membres l’un de l’autre (v. 3 et suivants). C’est le seul passage où le « corps » soit mentionné dans l’épître aux Romains. La position chrétienne nous est présentée dans la Parole sous différents aspects : nous sommes en Christ ; nous sommes des membres de Son corps ; mais la doctrine de l’épître ne traite ni l’un, ni l’autre de ces sujets. Le sujet de l’exhortation ne va pas plus loin que le don par grâce, mais il traite du service dans le don.

L’apôtre passe maintenant à un service plus général, tel que l’exercice de la miséricorde, un amour sans hypocrisie ; puis il touche plusieurs autres points de la vie chrétienne. Toute cette partie de son exhortation se rattache à des qualités, à un caractère, à un état personnel, c’est-à-dire à l’esprit dans lequel nous devons marcher. Si un homme donne, qu’il le fasse avec liberté de cœur ; son amour doit être sans hypocrisie ; il doit avoir en horreur le mal, tenir ferme au bien, être plein de bienveillance et d’affection fraternelle, et placer les autres plus haut que lui-même. La grâce et la générosité du cœur, la sympathie pour les autres, doivent caractériser le chrétien ; il ne doit pas se conformer au monde, ni rechercher les choses élevées, mais s’associer aux humbles ; il doit marcher de telle manière qu’il soit irréprochable devant les hommes ; autant qu’il dépend de lui, il doit être en paix avec tous, n’étant en rien surmonté par le mal, mais surmontant le mal par le bien. Noble et divin principe ! Je suis moi-même, par grâce, en dépit du mal des autres ; je ne me venge pas moi-même, je suis au-dessus du mal, comme Dieu l’est, en principe, et je fais du bien à ceux qui me haïssent. Tout ceci nous caractérise personnellement ; c’est l’esprit dans lequel nous marchons.

Au chapitre 13, l’apôtre passe aux devoirs de relations, en y ajoutant la prochaine venue du Seigneur. Deux principes nous sont ainsi présentés dans ce chapitre : le devoir, auquel l’apôtre exhorte, comme étant le principe d’amour dont ils étaient pénétrés en Christ ; puis le fait que la nuit était fort avancée et que le jour s’était approché.

L’apôtre exhorte d’abord à l’obéissance envers l’autorité civile. Les autorités qui existent, sont ordonnées de Dieu — précieuse direction, qui nous épargne toute question relativement à leur droit, et toute participation aux agitations politiques. Les puissances établies, voilà tout ce dont j’ai à m’inquiéter ; il n’y a pas de puissance, si ce n’est de par Dieu ; par conséquent, où elle se trouve, elle doit être de Dieu, et j’honore Dieu en la reconnaissant. Partout où la puissance est établie, le chrétien obéit : y résister, c’est résister à l’ordonnance de Dieu. Les magistrats sont serviteurs de Dieu pour maintenir l’ordre. D’après le même principe nous payons le tribut.

L’apôtre passe ensuite à ce qui est par chacun : tribut, péage, honneur. Le chrétien rend à chacun ce qui lui est dû ; il ne doit rien à personne, sinon une dette qui demeure toujours. C’est ici ce qui accomplit la loi, car l’amour pour notre prochain ne lui fait point de mal : le principe de l’amour accomplit les exigences de la loi, ce que la loi elle-même ne pouvait jamais faire. Tel est le premier des deux grands principes dont j’ai parlé.

La pensée de la venue du Seigneur est introduite dans les versets 11 et suivants pour donner plus de force encore aux exhortations que nous venons de passer en revue. « C’est déjà l’heure de nous réveiller du sommeil, car maintenant le salut est plus près de nous que lorsque nous avons cru ». La nuit de ce monde, c’est l’absence du soleil de justice. Saisissons bien cela. Au milieu du train de ce monde, agité et amateur de plaisirs, il fait encore nuit pour celui qui a de l’intelligence et qui connaît Christ. L’obscurité de la nuit couvre le monde ; mais le jour commence à poindre pour la foi du chrétien : l’étoile du matin s’est levée dans son cœur, tandis que le monde est endormi dans les ténèbres de la nuit qui se prolongent encore. En effet, pour nous, la nuit est fort avancée, mais le monde dort dans la nuit ; l’âme qui veille voit à l’horizon l’étoile du matin, l’aube qui va la suivre, et elle attend le jour. Le cœur est dans la lumière du jour, et y marche. Nous en avons fini comme chrétiens avec les œuvres des ténèbres. La lutte continue sans doute, mais notre armure contre le mal, contre les dominateurs des ténèbres de ce siècle, c’est la lumière dans laquelle nous marchons. La puissance de lumière, de vérité, de piété, de jugement du mal, qui appartient à ce jour, est dans notre cœur ; les dards, les pièges des ténèbres sont rendus vains et mis à découvert ; ils ne trouvent ni entrée dans l’âme, ni moyen d’en prendre possession. Nous marchons honnêtement, comme de jour, revêtant dans nos voies et dans notre cœur la marche et le caractère de Celui qui en est la vraie lumière, le Seigneur Jésus Christ. Ayant l’espérance de Lui être semblables, là où Il est dans la lumière, nous nous purifions nous-mêmes, comme Lui est pur ; nous marchons comme Lui a marché ; nous ne prenons pas soin des convoitises de la chair, qui appartient aux ténèbres, pour y satisfaire, mais nous marchons comme Christ a marché.

Tel est le chrétien devant la perspective d’un Christ qui vient, et qui apportera sur ce monde obscur et ténébreux la lumière et le jour de Dieu, dans Sa puissance efficace ; et tels sont les deux mobiles et caractères de la conduite chrétienne : savoir la reconnaissance et la réalisation pratique dans l’amour de tous les devoirs de relation ; puis ceci : « Connaissant le temps », la prochaine venue du jour auquel nous appartenons (comparer 1 Thess. 5). « La nuit est fort avancée, et le jour s’est approché ».

L’apôtre présente ensuite (chap. 14) des exemples spéciaux de l’esprit qui devrait animer les chrétiens dans leurs rapports l’un avec l’autre. Il y avait des chrétiens « faibles en foi » ; ils ne vivaient pas pleinement dans la lumière et la puissance de la nouvelle création, comme étant morts avec Christ aux éléments du monde. C’était de la faiblesse de foi sans doute ; mais ils aimaient Christ, ils étaient rachetés par Son sang précieux ; Christ était mort pour eux. L’apôtre voulait qu’on marche dans la grâce, qu’on reçoive les faibles, mais non pour la décision de questions douteuses qui pourraient égarer leur foi. D’un autre côté, quand un homme était faible, comme cela arrivait facilement à un Juif, qui regardait aux jours et autres choses semblables, il ne devait pas juger le fort, comme faisant mal, parce que sa conscience à lui ne lui permettait pas de faire de même ; mais il ne fallait pas non plus que le fort méprise le faible, parce que celui-ci avait des scrupules, dont une foi plus complète l’aurait délivré. C’était juger le domestique d’autrui : il était debout ou tombait pour son propre maître, et le Seigneur était puissant pour le tenir debout, quelque faible qu’il soit (v. 4). Chacun devait être pleinement persuadé dans son propre esprit, et ne pas agir d’après la foi d’un autre. Ce n’est pas en ayant égard à lui-même, mais au Seigneur que le chrétien vit ; c’est à Lui qu’il doit regarder, comme au Seigneur envers qui il est responsable, comme à Celui pour lequel il doit vivre.

Ceci amène l’apôtre, comme toujours, à parler de ce qui appartient à Christ dans ce caractère. Christ était Seigneur des vivants et des morts ; c’est pour cela qu’Il est mort et est ressuscité ; finalement, Lui seul était juge. C’était à Dieu que chacun rendrait compte pour lui-même ; tous comparaîtraient devant le tribunal de Dieu ; tout genou se ploierait devant le Seigneur ; « chacun de nous rendra compte pour lui-même à Dieu ». Le chrétien devait donc plutôt juger ceci : de ne pas mettre une pierre d’achoppement ou une occasion de chute devant son frère. Il n’est pas charitable de détruire (il s’agit ici de la portée de notre acte) celui pour qui Christ est mort, en amenant un frère à faire violence à sa conscience ou en l’éloignant de Christ, comme si Christ rendait inique celui pour qui Il est mort. Celui qui sert Christ dans ces choses, est agréable à Dieu et approuvé des hommes qui jugent sainement (v. 18). Nous avons à poursuivre les choses qui tendent à la paix et celles qui édifient les autres. « Toutes choses sont pures pour ceux qui sont purs » ; il n’y a pas d’aliments qui soient souillés, si le cœur est pur ; mais si quelqu’un souille sa conscience, même par un scrupule qui n’est pas fondé, ces choses cessent d’être pures. Bienheureux celui qui en se glorifiant de sa liberté par la foi, ne va pas au-delà de sa foi dans ce qu’il fait, ne scandalise pas dans ce qu’il se permet de faire ; car tout ce qui n’est pas le principe de la foi (c’est-à-dire fait avec Dieu, comme chose approuvée de Lui) est péché. Si un homme pensait qu’il doit honorer tel jour ou s’abstenir de telle ou telle nourriture, et que pour montrer sa liberté il fasse autrement, pour lui c’est péché : il ne le fait pas sur le principe de la foi, quant à Dieu. Si l’on a la foi quant à ces choses, il vaut mieux la garder par devers soi-même devant Dieu, que de devenir une pierre d’achoppement pour son frère, quand, en agissant selon cette foi on produirait cet effet.

Les sept premiers versets du chapitre 15 sont un résumé du même sujet, et, proprement, appartiennent encore au chapitre 14. Les « forts » doivent porter les infirmités des « faibles », et ne pas se plaire à eux-mêmes. Christ a fait ainsi ; Il n’a point cherché à se plaire à Lui-même, supportant avec douceur les outrages qui tombaient sur Lui, et marchant si fidèlement, si parfaitement avec Dieu, que lorsque les hommes se mettaient à outrager Dieu, les outrages tombaient sur Christ : c’est ainsi qu’Il a parfaitement présenté Dieu dans Ses voies — Lui, l’image du Dieu invisible. Christ a servi les autres ; tel devrait être notre sentier ; Il n’a point cherché à plaire à Lui-même : Sa vie au contraire a été une vie d’opprobre, mais c’était l’opprobre de Dieu qu’Il portait : « Les outrages de ceux qui t’outragent sont tombés sur moi ». La citation de ce passage devient, pour l’apôtre, l’occasion de justifier l’emploi qu’il en fait, pour un principe de la plus haute importance ; savoir que les choses qui ont été écrites auparavant, ont été écrites pour notre instruction. Elles l’ont été afin que, marchant dans la patience, dans l’opprobre peut-être ici-bas, nous soyons consolés par la consolation des Écritures ; afin que nous apprenions que la pensée de Dieu s’y trouvait, que notre opprobre était Son opprobre parce qu’en Le servant nous avions part avec Lui ; et qu’ainsi nous ayons espérance et une heureuse confiance dans chacune de nos épreuves, tout le long du chemin de la foi. Toutes ces choses amenaient l’apôtre et le chrétien intègre à la patience de l’évangile. Or, c’est là le chemin de l’amour, savoir de servir les autres, et de les servir pour l’amour de Christ. Mais Dieu est le Dieu de patience — quelle patience n’a-t-Il pas envers nous tous ! — et, béni soit Son nom, le Dieu de consolation aussi (v. 5) ! Quel nom donné à Dieu que celui-là — à Lui qui use continuellement de patience envers nous, qui supporte nos cœurs stupides, ignorants, et souvent inconséquents, et qui s’occupe de toutes nos petites épreuves pour nous consoler ! Il console ceux qui ont l’esprit abattu ; Il ne détourne jamais ses yeux de dessus le juste ; Il est patient là où nous sommes impatients même vis-à-vis de Lui ; Il nous console dans Sa grâce. Nous devons marcher ainsi, ayant un même sentiment l’un envers l’autre, et nous recevant les uns les autres, comme Christ nous a reçus — faibles en foi — afin que nous soyons à la gloire de Dieu. Ici se terminent les exhortations de l’épître.

Dans ce qui suit (v. 8-13), l’apôtre résume brièvement les grands principes de ce qu’il avait enseigné ; il s’occupe spécialement de l’introduction des nations dans la jouissance des privilèges de l’évangile. « Christ a été serviteur de la circoncision, pour la vérité de Dieu, pour la confirmation des promesses faites aux pères ». D’un autre côté, les nations qui n’avaient pas de pareilles promesses, avaient à glorifier Dieu pour Sa pure miséricorde (v. 8 et 9). Nous avons déjà vu comment l’accomplissement des promesses faites aux Juifs était devenu pure miséricorde par la réjection du Christ promis. L’apôtre montre ensuite, par différents passages de l’Ancien Testament, que cette miséricorde envers les nations avait toujours été dans le dessein de Dieu ; qu’il devait y avoir une racine de Jessé et quelqu’un qui s’élèverait pour gouverner les nations ; et que les nations espéreraient en Lui. Ayant ainsi les nations devant ses yeux, l’apôtre s’arrête sur ce mot « espérance », et dit : « Or que le Dieu d’espérance (car les promesses dans toute leur portée ne sont pas accomplies, mais Dieu nous donne espérance, et nous sommes sauvés en espérance pour ce qui est de cette plénitude des promesses) vous remplisse de toute joie et paix en croyant, pour que vous abondiez en espérance par la puissance de l’Esprit Saint » (v. 13). Tel est l’état naturel du chrétien ; il est rempli de toute joie et de toute paix en croyant ; le Saint Esprit demeure en lui et opère en lui, de sorte que son esprit abondant en espérance, il se confie en Dieu, et regarde en avant vers ce temps glorieux, saint et bienheureux, où tout sera accompli dans la lumière — où nous serons avec Jésus.

L’apôtre introduit ensuite le sujet de son ministère. Il était persuadé que ceux auxquels il s’adressait étaient capables de s’exhorter l’un l’autre, mais il leur écrivait en vertu du service envers les Gentils qui lui avait été confié. Il annonçait l’évangile de Dieu, afin de présenter les nations comme une offrande à Dieu, agréable, étant sanctifiée par l’Esprit Saint. Ce ministère divin et public lui avait été confié par Jésus Christ dans les choses qui concernent Dieu. À ce point de vue l’apôtre se présente lui-même, au sens figuré, comme un sacrificateur (car telle est la signification de l’expression « exerçant la sacrificature dans l’évangile » que nous trouvons au verset 16) offrant à Dieu ceux d’entre les nations, car les chrétiens sont une offrande tirée du monde, présentée à Dieu, une sorte de prémices de Ses créatures. C’est ainsi que les Lévites avaient été offerts autrefois au lieu des premiers-nés d’Israël. Nous sommes consacrés, sanctifiés à Dieu par l’Esprit Saint.

Il montre ensuite la puissance dans laquelle il avait travaillé, et comment il avait porté l’évangile, non pas là où le christianisme était déjà établi, mais à de pauvres âmes perdues, éloignées de Dieu et de la lumière. Son ministère était terminé dans ces contrées ; il avait accompli son service ; d’autres pouvaient édifier sur le fondement posé par lui, mais son œuvre à lui était accomplie. Il était un sage architecte pour poser le fondement, il résistait énergiquement aux invasions du mal ; mais lui-même n’avait que sa propre place, et pas d’autre. Il était rempli d’une énergie qui se développait là où l’énergie était requise ; en dépit de tous les dangers il avait prêché là où personne n’avait été avant lui ; il avait formé, établi, institué ; il était entré dans tous les détails qu’entraînait un pareil service ; il avait résisté au mal et aux fausses doctrines, en sorte que son édifice ne soit pas renversé. Depuis Jérusalem jusqu’en Illyrie, il avait prêché pleinement, il avait complété, rempli la mesure de l’œuvre de l’évangile. Le christianisme était fondé, et son œuvre à lui était accomplie. Le monde grec était christianisé et établi dans l’évangile, en tant qu’il s’agissait de l’œuvre ecclésiastique selon l’Esprit ; il avait maintenant le monde latin devant lui, en particulier ceux qui étaient à Rome. Son œuvre était accomplie dans ces contrées-là et il n’y avait plus de place pour lui ; il aurait été là hors de sa place. Il peut arriver encore aujourd’hui, qu’un homme achève l’œuvre de formation et d’établissement qui lui a été confiée dans un lieu, et qu’il devienne, s’il y demeure, une entrave pour d’autres, et ressenti comme telle. Son énergie n’est pas adaptée aux soins paisibles d’un service journalier qui s’occupe de tous les détails de l’état des âmes ; elle ne ferait que leur être à charge. Il est sage de savoir le discerner à l’occasion, et d’aller travailler ailleurs quand Dieu appelle. En tout cas le service de l’apôtre, dans la sphère grecque de son travail, était achevé maintenant ; sa place désormais n’était plus dans ces contrées.

Mais Dieu n’a pas permis que le christianisme latin puisse se vanter d’une fondation apostolique directe. Il y avait déjà des chrétiens à Rome, comme nous le montre cette épître même ; et Paul (nous l’apprenons ici) ne s’en va pas, quand son service sur la côte orientale de la mer Adriatique est achevé, les rechercher à Rome dans la libre énergie apostolique, mais il s’en va à Jérusalem avec des aumônes et des offrandes. Il n’est allé à Rome que plus tard comme prisonnier : le christianisme, à part les chrétiens qui séjournaient à Rome comme habitants, a commencé dans cette ville par la captivité. Paul avait longtemps désiré visiter les chrétiens de Rome ; mais même maintenant il ne parle pas de cela, quoique travaillant, comme règle générale, partout où il se trouvait, dans un lieu qui était un objet direct de travaux apostoliques. Il n’a pas fondé l’église à Rome, elle y était déjà ; il ne pouvait pas dire quant à Rome : là où Christ n’avait pas été prêché (v. 20) ; il parle seulement de son désir d’aller vers eux « pour le cas où je me rendrais en Espagne … ; car j’espère que je vous verrai à mon passage, et que vous me ferez la conduite de ce côté-là, quand j’aurai d’abord un peu joui de vous » (v. 23 et 24). Il pensait aller en Espagne et les voir à son passage. Que Pierre ait été ou soit à Rome alors, l’épître en exclut absolument l’idée ; le christianisme s’est établi lui-même à Rome ; il n’y a pas eu là de « sage architecte ». Il n’est pas dans la coutume de Dieu de prendre des capitales mondaines pour en faire le centre de Son œuvre. « Hatsor était auparavant la capitale de tous ces royaumes », dit Josué ; elle, et elle seule de toutes les cités qui étaient encore debout dans leur force, fut détruite. Paul s’était proposé d’aller en Espagne et de voir les Romains à son passage ; mais, pour autant que l’histoire de l’Écriture nous renseigne (c’est-à-dire dans la présentation que Dieu fait dans les scènes finales de l’évangile), Paul n’est jamais allé en Espagne ; il est amené comme prisonnier à Rome, après deux ans de captivité à Césarée, et demeure deux ans captif dans son propre logement qu’il avait loué pour lui ; et là, l’histoire se termine avec le jugement des Juifs de province. Ce passage remarquable, et qui n’est pas sans intention, nous donne le caractère de la visite projetée de Paul à Rome, associé qu’il est à l’histoire de son emprisonnement et de son arrivée dans cette ville comme prisonnier, plus de deux ans après. L’épître aux Galates nous fournit la première partie de l’histoire de l’apôtre dans un but doctrinal, mais ni cette épître, ni aucune autre, ne fait une semblable mention de plans déçus ; c’est Rome qui en fut l’occasion, et elle seule, et le Saint Esprit ne le rapporte certainement pas sans intention.

Mais maintenant Paul allait à Jérusalem avec des aumônes et des offrandes pour les saints. Son ministère apostolique était terminé dans l’est ; il entreprend un service de diacre envers les saints de Jérusalem et n’a jamais repris de nouveau son libre service apostolique, autant du moins que les témoignages historiques directs nous renseignent. Nous savons très positivement que le dessein dont il parle lui-même dans ce chapitre, au verset 23, il ne l’a jamais accompli. Ses craintes mêmes, quant à ce qui pourrait arriver en Judée, sont exposées dans les versets 30 à 32. Je n’entre pas ici dans la question si controversée de savoir si Paul a été délivré de sa première captivité à Rome, pour y retomber de nouveau plus tard. La solution de cette question dépend principalement de conclusions tirées de la seconde épître à Timothée et comparées aux épîtres aux Philippiens et à Philémon, et au chapitre 20 des Actes. Le récit scripturaire direct se termine à la fin du livre des Actes, complété par ce qui est dit dans l’épître aux Romains (les épîtres aux Éphésiens, aux Colossiens, aux Philippiens et à Philémon ont été écrites pendant la captivité de Paul), à laquelle nous devons joindre l’épître aux Hébreux, si nous estimons qu’elle a été écrite ou composée par l’apôtre Paul : les versets 23 et 24 de Hébreux 13 se rapportent directement à la question qui, du reste, ne touche en rien à la portée morale ou ecclésiastique d’aucune des épîtres.

La fin du ministère du grand apôtre, telle que l’Écriture nous la fait connaître, est profondément touchante. Même ici-bas, il était déjà rendu semblable à son Maître, à distance il est vrai, comme il ne pouvait en être autrement ; mais tout fait défaut dans ce monde, et (quelque admirable — même quelque divine — qu’ait été l’énergie en exercice dans l’œuvre) finit en résultat par la ruine ici, à cause des matériaux auxquels le divin ouvrier avait à faire. Toutefois le propos final de Dieu n’est accompli que d’une manière d’autant plus merveilleuse, l’œuvre n’est que plus évidemment divine, quand nous considérons les matériaux employés et la ruine manifestée en eux (comparer Actes 20, 29-33 et encore plus És. 49, 4-6). Mais la comparaison de notre chapitre (v. 23-33) avec les derniers chapitres du livre des Actes nous fera comprendre mieux qu’aucun commentaire le véritable état du cas : seulement je ne doute pas qu’en Actes 19, 21 nous ne devions lire « dans son esprit » (et non « par l’Esprit »), l’article défini en grec ayant pratiquement la force de « son » (comparer 21, 4). — Je ferai remarquer que les Juifs qui, pour complaire à leurs concitoyens, avaient recommandé à Paul d’entrer dans le temple, n’apparaissent pas une seule fois dans les difficultés que lui attira l’acte qu’ils avaient conseillé. Mais le Seigneur se tint près de Son serviteur et le fortifia et la main de Dieu avait tout disposé.

Comme témoin auprès de toutes les autorités, depuis le sanhédrin jusqu’à César, la providence de Dieu avait réglé le chemin de Son serviteur, et la grâce du Seigneur le soutenait là. Si le libre service de la puissance apostolique par l’Esprit, allait prendre fin dans une captivité involontaire, Paul toutefois est livré par les Juifs aux nations, pour souffrir par leurs mains, dans la perfection de la grâce, si ce n’est pas dans la perfection du Seigneur Lui-même. Qui est comme Lui ? Il n’y a eu chez Lui ni hauts, ni bas, comme l’énergie de l’apôtre pouvait en éprouver et en avait fait l’expérience, mais le calme d’une perfection invariable, si ce n’est à la pensée de boire la coupe que nul autre que Lui ne pouvait boire et cela, s’il était possible, était plus parfait que tout le reste.

Si Paul, pour le moment, est encore étranger à Rome, son cœur est lié à plusieurs de ceux qui s’y trouvent. Il n’oublie rien de ce qu’on a fait pour lui, rien de ce qu’on a fait pour le Seigneur. Il a, pour presque tous, une épithète affectueuse ou la reconnaissance d’un service rendu, choses qui vont au cœur, en individualisant le souvenir et en lui donnant de la réalité. Il ne pouvait pas leur écrire comme à une assemblée à laquelle il avait eu à s’adresser, car il y en avait une (16, 5) à Rome, mais il pouvait écrire à presque tous comme à des saints qu’il avait connus. Il se sentait heureux en esprit dans leur compagnie, comme gens dont il connaissait la foi et le service ; et, dans les circonstances existantes, il y a là autant de beauté que d’à-propos. Paul était l’apôtre des nations, et, comme tel, il avait son service à Rome comme ailleurs ; mais l’apôtre des nations les avait attachés l’un après l’autre, par les liens de la foi et d’un cœur large qui savait individualiser, au service qu’il accomplissait pour Christ et par le cœur qui l’accomplissait. Nous servons comme un tout — et ainsi faisait l’apôtre — un tout qui embrassait tous les conseils de Dieu ; mais il le faisait avec un cœur qui pouvait réunir tous les éléments dans les liens d’une charité qui pensait à chacun pour faire d’eux un tout en Christ en amour. Les fruits, on les verra plus tard.

Nous trouvons ici, remarquez-le, plusieurs chrétiens, qui de diverses manières servaient diligemment dans la sphère où Dieu les avait placés, depuis ceux qui étaient estimés parmi les apôtres, jusqu’à Phœbé, la diaconesse ou servante de l’assemblée à Cenchrée, qui avait été en aide à plusieurs. Aucun d’eux n’est oublié devant Dieu, bien que leurs noms ne soient pas tous rappelés même par le vivant souvenir d’amour de l’apôtre.

L’apôtre juge ensuite (v. 17 et suivants) ceux qui causent des divisions en mettant devant les saints des occasions de chute par des choses qui ne sont pas selon la doctrine que les chrétiens de Rome avaient apprise ; ceux qui, par un esprit trop actif, et la recherche de l’importance personnelle, font du mal à eux-mêmes et aux autres. Une telle activité entraîne le cœur loin de Dieu, dont la communion produit toujours la soumission d’esprit, la confiance de l’âme qui apprend dans le secret à tout recevoir comme venant de Dieu. Cet esprit nous est présenté d’une manière pleine de charme dans Jean-Baptiste et partout où l’Esprit de Dieu agit : venant de Dieu, il apporte non seulement de la connaissance, mais l’amour de Dieu en elle. Quant à ceux que l’apôtre signale ici, ce n’est pas de la charité que de sanctionner leur conduite, fruit de leurs propres pensées. Nous devons nous éloigner de telles gens ; la fidélité à cet égard, même chez le plus faible d’entre nous, apporte avec elle un témoignage de la part de Dieu qui a de la puissance — plus de puissance que les prétentions de l’homme — et qui opère par l’Esprit pour garder les saints partout où l’Esprit de Dieu gouverne le cœur, partout où l’âme est soumise à Dieu. Les autres sont rendus manifestes. Les cœurs des simples sont gardés ; ils apprécient à leur valeur les discours malfaisants, en dépit de la beauté du langage.

Ceci nous amène à un principe de toute beauté pour la direction de nos cœurs, et que le christianisme seul peut donner : « Je désire que vous soyez sages quant au bien, et simples quant au mal ». La sagesse du monde a besoin de connaître les artifices du monde, afin de les éviter ; mais Dieu a dans le monde un chemin à Lui, tracé par la sagesse. Par l’enseignement de Dieu, le cœur est bien informé de ce qui est bon — bon quant au chemin qui est dans le monde. Ce chemin est celui de Christ, le chemin de la bonté et de la sagesse divines dans l’homme à l’égard de tout ce qui l’entoure. En l’apprenant, je n’ai pas besoin de connaître tout le mal ou quelque partie que ce soit du mal. Je marcherai dans le chemin sage et saint que je connais, et je n’ai pas besoin de connaître autre chose. J’évite le mal ; il me demeure inconnu, et mon cœur devient plus familier avec ce qui est bon, aimable et de bonne renommée. C’est un préservatif précieux et salutaire, un chemin que Dieu a tracé pour nous dans ce monde ; c’est une grande grâce. Si je connais le seul bon chemin à travers le désert, je n’ai pas besoin de connaître tous les sentiers qui vont s’y perdre. « Par la parole de tes lèvres je me suis gardé des voies de l’homme violent ». Il suffisait à notre bien-aimé Seigneur, lorsqu’Il passa par la tentation pour nous, de dire : « L’homme… vivra… de toute parole qui sort de la bouche de Dieu ».

Après cela, nous trouvons les salutations des saints, ainsi que celles qui leur sont adressées, car la communion dans l’amour caractérise l’esprit de l’évangile.

Nous avons aussi ce qui nous montre de quelle manière Paul écrivait ses épîtres, sauf celle aux Galates : il les dictait pendant qu’un autre écrivait. Ici, un nommé Tertius avait écrit l’épître ; et il joint ses salutations à celles des autres.

La seconde épître aux Thessaloniciens, chapitre 3, 17, nous dit comment les lettres de l’apôtre étaient certifiées véritables, comment leur exactitude était garantie en tant qu’écrits qui avaient le caractère de commandements du Seigneur (1 Cor. 14, 37) : cela était important[13] ; la salutation à la fin de l’épître était de la propre main de Paul, ce qui certifiait tout ce que contenait l’épître comme étant sien, c’est-à-dire comme venant de l’autorité apostolique inspirée. Nous voyons ainsi ce que Paul pensait de ses propres épîtres ; il estimait importante l’exactitude, précisément parce qu’elles n’étaient pas de lui, mais venaient de la part du Seigneur.

À cette occasion nous rappellerons les trois degrés dans la réception de la vérité divine, dont l’Écriture fait mention (1 Cor. 2, 12-14). Les choses librement données de Dieu sont connues, étant révélées par l’Esprit ; elles sont communiquées par des paroles que l’Esprit enseigne ; et ensuite elles sont reçues, par la grâce de l’Esprit (comparer pour les deux premiers points 2 Pierre 1, 19-21) : ainsi en est-il pour la fin de notre épître.

L’apôtre termine en donnant gloire au Dieu seul sage ; mais, en le faisant et en reconnaissant Dieu comme Celui qui est puissant pour affermir les saints selon son évangile, il rappelle le caractère du témoignage renfermé dans cet évangile, l’évangile dont il parle d’une manière si remarquable dans tant de passages. Dans cette épître, il n’a pas développé le mystère : son objet était de montrer comment une âme était placée dans la liberté devant Dieu et cela est individuel, et doit l’être. La conscience et la justification sont toujours nécessairement individuelles. L’apôtre cependant suppose la position chrétienne. Au chapitre 8, 1, par exemple, nous sommes en Christ ; au chapitre 12, nous formons un seul corps en Christ ; dans ce chapitre-ci, il introduit le sujet tout entier des conseils de Dieu dans le mystère caché dès les temps éternels. Aucun de ces sujets n’est développé dans l’épître, mais la prédication que l’apôtre avait faite de Jésus Christ, était selon la révélation du mystère qui plaçait Christ à la tête de toutes choses, et qui, de plus, avait uni Juifs et Gentils comme un seul corps — toute distinction étant effacée — à Christ dans le ciel comme Tête — vérité qui mettait entièrement de côté le système de la loi, tout en confirmant l’autorité de la loi là où elle avait sa place. Ce mystère avait été tenu secret dès les temps éternels, mais existait dans les conseils de Dieu avant que le monde soit (comparer 2 Tim. 1, 9 ; Tite 1, 2 ; Éph. 1 et 3 ; et Col. 1) ; il était révélé maintenant que la base d’une bénédiction éternelle et céleste était posée dans l’œuvre de Christ.

L’apôtre ajoute encore une pensée très importante, car il ne s’agit pas ici (v. 26) « des écrits des prophètes », mais d’« écrits prophétiques ». Telle était l’épître aux Romains, telle était l’épître aux Éphésiens, aux Colossiens — toutes les épîtres inspirées en un mot ; et par elles cette vérité était annoncée à toutes les nations, « selon le commandement du Dieu éternel », de ce Dieu dont les conseils n’étaient pas limités au judaïsme, mais qui avait Son propre dessein dans le Fils, et qui révélait ce dessein maintenant aux nations, commandant qu’il leur soit donné à connaître. Si dans le temps, Il avait été en une manière particulière le Dieu des Juifs, Il avait toutefois Ses conseils et Ses vues dans l’homme et, dans la semence de la femme, Il les accomplirait en puissance. Maintenant ce propos premier de Dieu était manifesté à toutes les nations pour l’obéissance de la foi.

Le caractère inspiré et prophétique des écrits du Nouveau Testament est clairement établi ici. Une seule question reste : Puisqu’il y a eu de pareils « écrits », sont-ce ceux que nous possédons dans le Nouveau Testament ?



  1. Ce n’est pas nécessairement Sa résurrection à Lui seulement. C’est abstrait, mais Sa résurrection en fut la première grande et complète preuve.
  2. En ceci Il participe de la nature de l’évangile éternel.
  3. Quand il s’agit de notre résurrection avec Christ, Christ est envisagé comme étant descendu en grâce là où nous étions morts dans le péché. Dieu, dès lors, L’a ressuscité et nous a ressuscités ensemble avec Lui : ce fait implique l’union avec Lui. Or l’épître aux Romains n’est pas occupée de ce sujet, mais de la justification individuelle.
  4. Le mot « écrite » se rapporte à « œuvre », non pas à « loi » ; le grec ne laisse pas d’incertitude à cet égard.
  5. Comparer Hébreux 8, 10.
  6. Il ne faut pas confondre « mettre en compte », que nous trouvons au chapitre 5, 13 et en Philémon 18, avec « estimer, tenir, compter », que nous avons ici et au chapitre 4.
  7. Ce n’est pas « ce en quoi nous étions tenus étant mort », comme si la loi était morte ; mais il faut lire : « étant morts dans ce en quoi nous étions tenus ». Quelques-uns ont changé une lettre dans le texte grec pour maintenir la comparaison apparente, et ils ont renversé ainsi toute la doctrine du passage.
  8. Comparez ce qui était ordonné pour la purification du lépreux qui était lavé, aspergé de sang et ensuite oint d’huile.
  9. Le grec a ici le génitif non le datif. Au verset 1 nous sommes en Christ ; ici Christ est en nous. Les deux choses sont inséparables. L’une est une position devant Dieu ; l’autre est la puissance de vie devant le monde. C’est le développement pratique de Jean 14, 20.
  10. L’apôtre fait ici allusion à Moïse en ce qui concerne son amour pour le peuple. Relativement au peuple de Dieu, je crois que si nous avons l’Esprit de Christ, il n’est pas possible qu’il en soit autrement. L’apôtre n’exprime pas ici un désir réfléchi, mais le désir de la bénédiction du peuple de Dieu quoi qu’il puisse lui en coûter.
  11. Pierre, parlant des Juifs seulement, ne cite que le chapitre 3.
  12. Voyez Galates 3, 23-29 ; 4, 1-7.
  13. C’est pourquoi tout ce qui provenait de la propre expérience de Paul, quelque élevé que cela soit d’ailleurs, était distingué du reste (1 Cor. 7, 12).