Messager Évangélique:L’Observatoire
Il est non seulement permis, mais encore il est bon et utile de profiter des enseignements que nous offrent les différents objets qui se présentent tous les jours à nos regards. Notre bien-aimé Seigneur, lorsqu’Il était sur la terre, avait constamment l’habitude d’emprunter de sublimes et célestes leçons, aux scènes de la nature et aux circonstances journalières de la vie humaine.
Ce genre d’enseignement a deux avantages. Non seulement il sert à démontrer la vérité d’une manière claire et puissante, ce qui est d’une grande importance ; mais encore il rattache cette vérité à l’objet, employé pour la faire ressortir, à tel point que nous ne pouvons guère voir cet objet sans penser à la vérité qu’il doit nous rappeler.
Il est à supposer que le lecteur a vu quelque part un observatoire avec son télescope dirigé vers le ciel, ou du moins qu’il en a entendu parler. Quoi qu’il en soit, un observatoire peut nous fournir plus d’une intéressante leçon. En Angleterre, on en voit assez souvent sur le toit d’une maison, et l’on s’en sert pour observer les corps célestes, dans le but de régler, par ce moyen, les montres, les pendules et les chronomètres. Nous savons tous combien les horloges varient, et combien il est difficile de les faire marcher d’accord.
Charles-Quint, empereur d’Allemagne, après avoir vainement essayé de faire que les hommes s’accordassent entre eux quant à leurs opinions religieuses, abdiqua le trône, et se livra ensuite à toute espèce d’efforts pour faire marcher ensemble quelques pendules. Mais, hélas ! il trouva que l’un était aussi difficile que l’autre. Il est impossible de vouloir forcer les hommes à être de la même opinion relativement à l’éternité ; tout comme il n’est pas possible de forcer les pendules à marcher exactement d’accord relativement au temps.
Bien que pendules et montres, laissées à elles-mêmes, ne puissent jamais s’accorder, un horloger intelligent, recueilli dans son observatoire et au moyen de son télescope qui lui donne accès jusqu’aux cieux, parviendra à les régler suffisamment pour leur faire indiquer assez exactement la même heure. Chaque jour il montera à son poste élevé d’observateur, et là, loin du bruit et du tourbillon de ce monde, dans la profonde solitude que lui offre cette retraite, aidé du puissant instrument qui place les corps célestes à la portée des regards mortels, il pourra mesurer la voûte au-dessus de sa tête, s’absorber dans une sublime contemplation, et redescendre de cette position élevée, riche de connaissances, au moyen desquelles il donnera une impulsion sage et régulière à tous les rouages, à tous les appareils qui doivent exercer leur influence sur les choses du temps. Il a été préoccupé d’une scène où tout est ordre, précision, régularité. Là-haut il n’existe ni choc ni confusion. Au moment précis et providentiellement fixé par la sagesse divine, chaque corps céleste arrive à son méridien. Alors vous pourriez voir, muni de sa montre ou de son chronomètre, l’horloger anxieusement attentif à comparer leurs mouvements avec ceux de quelque astre, pour en déterminer ainsi les moindres variations. Là-haut tout est dans un ordre parfait ; ici-bas tout est confusion. Le ciel est la seule vraie pierre de touche par laquelle nous puissions juger de ce qui est sur la terre. Aussi l’horloger, quand il descend de l’observatoire à son atelier, n’est nullement étonné, en promenant ses regards autour de lui, de remarquer que, peut-être, il n’y a pas deux de ses pendules ou de ses montres, qui donnent exactement le même temps. Il a été occupé du ciel, et son intelligence comprend mieux, par conséquent, ce qui concerne les lois de notre pauvre terre. Il sait que le mécanisme lourd et imparfait de l’homme ne pourra jamais avoir une marche aussi régulière que les globes des cieux. Le plus parfait chronomètre de la terre variera plus ou moins ; ce n’est que par une constante attention aux mouvements du guide céleste, par une continuelle comparaison entre eux et la montre, enfin par une régularisation incessante, que l’horloger pourra obtenir un certain degré d’exactitude. Il faudra qu’il remonte sans cesse à son observatoire et à son télescope. Plus il étudiera les choses d’en haut, plus sa connaissance des choses du ciel augmentera et se développera, et plus aussi il obtiendra d’exactitude et de précision dans ses opérations d’en bas. — Il faut qu’il maintienne des rapports non interrompus entre son observatoire et son atelier — entre le lieu de la contemplation et la place du travail.
De tout ceci le chrétien peut évidemment recueillir quelques pensées rafraîchissantes et bénies. Lui aussi, il aura besoin d’un observatoire et d’un télescope dirigé en haut, vers le lieu où tout est paix, ordre et harmonie. Il devra habituellement s’élever, au-dessus du tumulte et de la confusion de ce bas monde, jusqu’aux cieux ; là, seul avec Christ, et à l’aide de la puissante lentille de la foi, il pourra s’imbiber jusqu’au fond de l’âme, de l’immuable vérité, propre à donner de la précision et de la fermeté à tous ses actes, à toutes ses démarches ici-bas.
Le chrétien, qui se tient beaucoup dans son observatoire, ne sera pas affecté par le conflit des opinions qu’il rencontrera ici-bas. Il sera à même de les apprécier toutes à leur propre valeur ; et de les attribuer au fait, que les voies de l’homme ne sont pas en harmonie avec les lois et les voies du ciel. Il comprendra que la prière : « Ta volonté soit faite sur la terre comme aux cieux », n’a pas encore reçu son plein exaucement. C’est pourquoi il s’efforcera de régler ses propres voies et de les mettre en communion avec les choses d’en haut. Tel sera son but constant, sérieux et sincère.
Qu’on s’en souvienne, le chrétien ne doit jamais quitter son observatoire ni poser son télescope. Pour la joie et le rafraîchissement habituel de son âme, pour la paix profonde et assurée de son cœur, pour se maintenir personnellement dans une sainteté permanente et une sanctification pratique, pour la bonne direction de toutes ses pensées, de ses paroles et de ses habitudes, il faut qu’il demeure continuellement en Christ — marchant par la foi. Si nous perdons cela de vue, tout ira mal. Si nous ne vivons pas littéralement dans notre observatoire, nous serons ballottés, poussés çà et là comme un morceau de liège sur des eaux en tourmente. — Non seulement c’est par la foi que nous entrons dans cet observatoire ; mais c’est par la foi que nous y demeurons et que nous y travaillons. — Tout est par la foi, ce principe puissant, qui amène les réalités célestes entièrement et clairement à la portée de la vue de l’âme ; par la foi qui « est la substance des choses qu’on espère, et la démonstration de celles qu’on ne voit pas » (Héb. 11, 1).
Puisse le Saint Esprit éveiller dans nos cœurs un désir plus intense de marcher près de Dieu et de nous élever habituellement au-dessus des choses du temps ! — Si les lignes qui précèdent avaient, en quelque mesure, pour effet de diriger une âme en haut, nous ne regretterions pas notre visite à l’observatoire.
Chrétiens, élevons-nous par-dessus ces bas lieux ;
Nos plus riches trésors sont cachés dans les cieux.
Là, pour nous, à jamais, une gloire infinie,
Un royaume éternel, une place bénie ;
Là nous est réservé ce que l’œil n’a point vu,
Le cœur n’a point compris, ni l’oreille entendu.
Soyons tous enflammés d’une telle espérance
Et témoignons à Dieu notre reconnaissance.
Que nos yeux, nos désirs, imprégnés par la foi,
Dirigent nos pensées, Seigneur, toujours vers toi !