Études Scripturaires:La foi des patriarches

De mipe
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Traduit d’un article du « Present Testimony » par Th. Carey Avril 1854

Les patriarches étaient sortis du lieu qui était celui de la nature et de la chair, dans la foi en la promesse d’un héritage au pays de Canaan. Et voici ce qu’il y a à considérer dans la force et la victoire de leur foi : — ils s’attachent à cette promesse, malgré deux épreuves bien sévères de cette foi, c’est-à-dire en face de la pauvreté, de la douleur et du désappointement qu’ils éprouvèrent constamment dans la terre de la promesse, et aussi en dépit des charmes, des attraits et des avantages dont ils jouissaient en dehors de Canaan.

C’est là une chose qu’il faut bien observer, et elle peut nous être un encouragement dans un temps tel que le présent.

Il y eut une famine en Canaan aux jours d’Abraham, et encore aux jours d’Isaac, et encore aux jours de Jacob. Abraham, en outre, y fut témoin des abominations de Sodome, ainsi que des querelles et des débats habituels des pots de terre. Isaac y est forcé de se retirer d’un lieu à un autre par les injurieux traitements des naturels du pays. Jacob en est chassé par les menaces de son frère Ésaü. Et de plus, Canaan fut le lieu où chacun d’eux, en son jour, dut passer par l’humiliation et par la discipline, en raison du mal de leurs propres voies aux yeux de l’Éternel.

Telle fut Canaan pour les patriarches. Dans cette terre de promesse, ils furent, je puis dire, déshonorés et désappointés, et leur cœur fut presque brisé. Mais ce qui s’offrait à eux en dehors de ce pays, était entièrement différent, c’était précisément quelque chose d’aussi attrayant pour eux, que Canaan était pleine d’épreuves et d’humiliations.

L’Égypte, par exemple, enrichit Abraham, tandis que Canaan l’avait laissé aux portes de la mort — et pour Jacob cette même Égypte était devenue la scène et l’occasion de tout ce que le cœur ou la chair auraient pu désirer ; car ce fut en ce pays qu’il arriva au terme d’un pénible pèlerinage. Il avait connu abondance de douleurs en Canaan, soit avant qu’il la quittât pour aller à Paddan-Aram, soit après son retour ; mais l’Égypte à la fin lui donna bien plus qu’une compensation de toutes ses pertes et de toutes ses douleurs. De la main du roi il reçut la plus belle et la plus riche portion du pays. Il y fut honoré et chéri, et vit sa famille prospérer de plus en plus autour de lui. Les désirs de son cœur semblaient tous s’y accomplir. Et pour comble de tout, l’Égypte lui rendit ce que les bêtes sauvages de Canaan lui avaient ravi. Joseph, qu’il regardait comme ayant été mis en pièces par quelque bête en Canaan, était vivant en Égypte, et était devenu le second personnage du royaume.

Il y avait là vraiment les attraits et la fascination de l’Égypte, et cela en plein contraste avec tout ce que Canaan avait été pour lui. Au temps du soir il y avait de la lumière ; mais c’était un soir en Égypte. Son œil aurait bien pu désirer le prolongement indéfini d’un pareil couchant, et son cœur aurait pu être tenté de le mettre en contraste avec les nuages du matin et du midi de sa carrière en Canaan. Mais la foi nous est montrée comme un vainqueur. Elle tranche plus d’une question avec la nature, et chez quelques-uns des saints elle obtient plus d’une belle et brillante victoire. Et tel fut ici le cas de Jacob, quelque humiliant que ce puisse être pour notre propre cœur de le constater. Car nous avons ici devant nous un bien beau témoignage, qu’en dépit de tout cela, l’objet aimé du patriarche était Canaan — non l’Égypte.

Ce fut là la victoire qui surmonta l’Égypte alors, et c’est la même qui, à cette heure, surmonte le monde. Ni le souvenir des douleurs ou des désappointements en Canaan, ni la possession présente d’honneurs et de richesses en Égypte, n’ébranla Jacob. La promesse de Dieu dominait en son cœur. Il parlait de Canaan comme de la terre promise par Dieu ; son espérance s’y rapportait ; dans le lieu de sa prospérité présente, il n’était qu’un étranger, et ne voyait sa demeure que dans la terre méprisée et appauvrie qu’il avait laissée derrière lui. C’est en Canaan qu’il voulut être enterré. C’est là qu’il était en esprit, lorsqu’il bénit ses enfants ; et c’est là qu’il donna la double portion à son premier-né d’adoption, 1 Chroniques 5, 1, 2.

Il y a là quelque chose de bien beau, et pour nous quelque chose qui est bien à propos et très significatif ; car je puis certainement dire du temps présent, que nous traversons, qu’il y a la pauvre Canaan, et la riche et importante Égypte. Ce qui, comme Canaan pour les patriarches, est lié avec Dieu dans les pensées de la foi, est en pauvre et faible état, tandis que le monde autour de nous fait de continuels progrès en grandeur, en forces et en dignités qui lui sont propres.

Il peut être dur d’apprendre cette leçon, que Jacob mit en pratique. Nous pouvons la voir en cette page de son histoire, sans la trouver en aucune page correspondante de la nôtre.

Joseph encore, après Jacob, fournit un exemple de cette même puissance de la foi. L’Égypte l’avait reçu, lorsque Canaan l’avait chassé. Il avait été vendu et transporté hors de Canaan, comme un esclave ; en Égypte, il avait été élevé à la seconde place du royaume. Mais avec tout cela (car « la foi est la victoire qui surmonte le monde »), l’Égypte ne devint jamais Canaan pour Joseph. La promesse de Dieu était vivante dans le cœur de Joseph, comme elle l’avait été dans celui de Jacob. Les désappointements et les douleurs en Canaan — les flatteries, les succès et les honneurs en Égypte, ne produisirent pas en ce cœur leurs résultats naturels, parce qu’il était la demeure de la promesse de Dieu. C’était là, selon les paroles énergiques de l’apôtre (dans la forme que devait prendre chez les patriarches une pareille énergie) « saisir la vie éternelle » — chose que plusieurs d’entre nous connaissent si peu.

Mais je dois faire encore une observation. — Nous sentons quelquefois que c’est une chose sérieuse et hasardeuse, que de faire connaître au monde que nous avons appris cette leçon — que la pauvre Canaan vaut mieux que la riche Égypte. Nous comprenons parfaitement que les hommes ne peuvent pas avec indifférence voir mépriser ainsi la bonne chose qu’ils chérissent et qu’ils améliorent. C’est jeter un blâme sur eux, que de faire peu de cas du monde.

Je crois qu’il y eut un moment dans l’histoire de Joseph, où il sentit cela — où il fit précisément l’expérience dont je parle.

Jacob, son père, en mourant, l’avait fait jurer qu’il l’enterrerait dans le pays de Canaan. Lorsque Joseph en vint à accomplir son serment, il me paraît avoir senti — qu’il s’agissait pour lui d’une affaire sérieuse et hasardeuse. Elle se présente évidemment à lui comme une entreprise qui avait ses difficultés spéciales. Il était haut placé à la cour, comme on dirait ; car nous voyons (Gen. 50, 2) que les médecins — les médecins de l’état — étaient ses serviteurs. Et nous savons qu’il avait alors sous sa main les ressources du royaume, la force et les richesses de l’Égypte. Mais pourtant il hésite à l’égard de cet acte — l’enterrement de son père en Canaan, et recourt à l’assistance et à l’intercession des proches de Pharaon.

Pourquoi tout cela ? N’était-ce pas une petite chose à faire pour un si grand personnage ? Oui, mais, dans un certain sens, demander à être enterré en Canaan, c’était jeter un blâme sur l’Égypte. Cela semblait dire, après tout, que Canaan, avec sa dégradation et sa pauvreté, valait mieux que l’Égypte, avec ses honneurs et ses richesses ; — que les grappillages d’un tel Éphraïm étaient meilleurs que la vendange d’un tel Abiézer.

C’était là le langage de la demande de Jacob ; et Joseph sentait que c’était une chose sérieuse que de faire parvenir un tel langage aux oreilles de Pharaon. Mais il le fit. La foi triompha de nouveau. Et de cette manière, Joseph nous est encore témoin que nous devrions ouvertement faire connaître au monde, qu’avec toutes ses avances et toutes ses promesses, il n’est rien pour nous, tandis que ce qui est de Christ, quoique faible et méprisé, est notre objet.