Livre:La sympathie chrétienne/Lettre 51

De mipe
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Juin 1832
Ma chère amie,

Jusqu’à maintenant je n’ai pas eu le temps de vous écrire une longue lettre, il me semblait toujours que je négligeais des choses vraiment nécessaires. Nous jugeons, je crois, très mal de ce qui est ou n’est pas pour la gloire de Dieu. Je vois chaque jour davantage que ce qui Le glorifie le plus, c’est la simple obéissance. Lorsque nous formons nos plans, nous nous dirigeons beaucoup trop d’après les opinions reçues, et nous nous privons ainsi de beaucoup de bénédictions, soit sous le rapport de nos expériences, soit sous celui du bien que nous pouvons faire. Ce fut le cas de Pierre, lorsqu’il dit : « Tu ne me laveras jamais les pieds ». Son intention était bonne, il était plein d’amour et de zèle, et assurément la réponse qui lui fut faite nous convient aussi. Nous ne pouvons connaître le but que Jésus se propose, mais notre affaire est d’obéir tout simplement, et ce que nous ne savons pas maintenant, nous le saurons plus tard, lorsque le grand architecte « aura tiré la pierre la plus haute avec des sons éclatants : Grâce, grâce pour elle ». Les soldats ne demandent jamais : Pourquoi ceci, ou pourquoi cela. Le général a les lieux et le but devant lui ; le soldat n’a qu’à s’arrêter quand on le veut, et à aller en avant quand on le lui commande ; si chacun voulait marcher d’après sa propre volonté, il n’y aurait plus que confusion. Nous sommes dans une ignorance grossière de la volonté et des pensées de Dieu, et cela vient de ce que nous connaissons fort mal l’Écriture. Nous travaillons, nous nous agitons dans l’obscurité jusqu’à ce que les ténèbres nous enveloppent, et que nous voyions que nous avons dépensé notre force pour néant. Les temps où nous sommes demandent que nous soyons plus que jamais imprégnés de la vérité. Souvent la lumière est si éclatante, ou bien les ténèbres sont si épaisses, que nous n’avons pas le temps d’examiner les choses, et qu’à raison de notre ignorance et de notre imagination, « nous sommes portés çà et là par tout vent de doctrine ». Seigneur, enseigne-nous, et donne-nous le courage d’agir, non seulement contre les opinions du monde, mais aussi, et cela en toute humilité quand il le faut, contre les opinions des chrétiens !

Vous me demandez ce que j’ai appris dernièrement. J’ai appris que nul autre que Dieu ne pourrait me connaître et me supporter, que les démons eux-mêmes seraient étonnés s’ils savaient ce que je suis. Dieu m’a conduite par un chemin que je ne connaissais pas, quoique j’eusse pu le connaître. Souvent je suis entièrement fatiguée de moi-même, mais Lui ne se lasse pas de moi, Il ne se décourage pas. La plus ardente de toutes les fournaises par lesquelles notre foi puisse être éprouvée, est celle qui est chauffée avec nos propres péchés. Oh ! quelles douces vérités Il fait souvent parvenir aux oreilles de Ses saints de derrière les nues ! Alors ils redoutent presque de retrouver quelque repos. — Cependant, comme l’oreille de la foi est trop étourdie par le roulement du tonnerre, tandis que nous sommes sous le nuage, pour qu’elle puisse entendre, il faut que le son doux et subtil vienne à son tour. Le chemin de chacun de nous est le meilleur de tous ceux que l’amour et la sagesse eussent pu imaginer, quand ils prirent conseil ensemble avant que le monde fût fait. Nos besoins ne sont pour Jésus que des occasions de nous enrichir. Quand Il nous appelle à passer par l’épreuve, nous faisons l’expérience qu’Il a suivi ce chemin avant nous, et qu’Il y a déposé des consolations insondables, afin que nous en ressortions enrichis, fortifiés et purifiés. Dans chacune de Ses dispensations Il nous dit : « Buvez, faites bonne chère, mes bien-aimés ».

Votre tendrement attachée

T.A. Powerscourt