Traité:Courtes remarques sur l’écrit intitulé L’holocauste et le sacrifice pour le péché

De mipe
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J.L. Favez 1894

Dans la préface de son écrit, M. B. fait de l’opposition à ce que j’ai dit qu’à la croix, le Seigneur n’a pas été tout le temps sous le regard du Père. Par ces mots, sous le regard du Père, j’entends sous le regard de Sa bienveillance. Nous lui répondons que le Seigneur, sur la terre, fut toujours sous le regard du Père — qu’il n’y eut que ce moment unique, lorsqu’Il était abandonné de Dieu, qu’il en fut autrement. « Être abandonné de Dieu », ne peut pas signifier « être sous le regard du Père ». M. B. raisonne sur les noms de Dieu et de Père ; mais Dieu et le Père, c’est la même personne. Le Père est le Dieu qui, à ce moment solennel, se tenait loin de Lui.

En second lieu, j’ai dit du Seigneur, à ce moment des trois heures terribles de la croix, que « la mort seconde étendait ses ombres jusque sur Lui ». M. B. se plaint sans trop de raison. Ce que j’ai dit peut subsister. Jésus, sous le jugement, abandonné de Dieu, sur la bouche du puits de la destruction, a connu l’effroyable moment de cette scène de mort. Le prince de la mort et les puissances des ténèbres étaient là ; mais ils ne purent rien contre le Juste (Col. 2, 15). Parce que j’ai nommé « les ombres de la mort », M. B. en prend occasion pour dire que c’est irrévérencieux ; qu’il ne s’agit pas d’ombres de la mort à la croix, mais d’une terrible réalité. J’en appelle au lecteur non prévenu. Il reconnaîtra que dans l’article incriminé, je n’ai pas réduit les souffrances de Christ à des ombres. Qui les dira, ces souffrances ? Dieu seul les a connues, et Celui qui les supporta. Je dirai, à qui de droit, que la malice ne convient pas dans les choses saintes. La manière dont M. B. a traité mon présent article n’est pas de la controverse, mais de la chicane.

M. B. se récrie contre l’expression : « l’homme Jésus uni à la déité ». L’humanité du Fils de l’homme est unie à la déité dans la personne du Fils. En ce point, je ne dis rien de nouveau. On trouve dans les écrits de J.N. Darby, d’heureuse mémoire, le passage suivant, reproduit par notre frère H.H. Mac Carthy : « Si l’écrivain veut dire qu’au fait l’humanité de Christ n’était pas sui generis[2], il est dans l’erreur tout à fait, car elle était unie à la déité, ce que l’humanité d’aucun autre ne fut jamais »[3]. Le Fils de Dieu en venant dans le monde, a revêtu l’humanité sainte ; Il est né de Dieu, comme homme, engendré par l’opération du Saint Esprit. Il a ajouté l’humanité à la personne divine (Phil. 2, 7) ; et ainsi, conformément à Son nom donné par l’ange avant sa naissance, Jésus, qui signifie Éternel Sauveur, Il est personnellement « l’homme Christ Jésus » (1 Tim. 2, 5), « la Parole devenue chair » ; — deux natures, une seule personne.

Page 2. L’auteur demande : Quand est-ce que le Seigneur s’est présenté comme offrande à Dieu ? — Selon lui, j’aurais enseigné que le Seigneur ne se livra comme offrande et sacrifice de bonne odeur qu’à la croix, après les trois heures de ténèbres. S’il avait lu avec plus de soin ce que j’ai écrit dans le traité qu’il attaque, il aurait vu que j’ai dit de Jésus (p. 4) qu’en entrant dans le monde, dès que Dieu Lui eut donné un corps, Il s’est offert comme holocauste et comme sacrifice pour le péché. De plus, il aurait vu que je n’ai point négligé la scène de Gethsémané, quand j’ai dit : « Gethsémané fut aussi une terrible anticipation de la mort ; mais son dévouement fut vainqueur ». Rappelons l’offrande du dernier moment : « Père, entre tes mains je remets mon esprit ». En tout ceci, la plainte de M. B. tombe dans le vide. Il a grand tort de crier si bruyamment dans son écrit (p. 4) que, dans mes citations, tout est propre à fourvoyer nos pensées.

Il était holocauste tout le temps qu’Il fut en croix ; cependant, durant la scène des trois heures de ténèbres, lorsque Jésus, fait péché, abandonné de Dieu, se trouvait sous le poids du jugement de Dieu, la seule chose qui eut son expression à ce moment, c’est l’intensité de l’inflexible jugement de Dieu, et la souffrance du Juste ; mais quand vint le moment auquel Il sut « que toutes choses étaient déjà accomplies », la scène avait certainement éprouvé un changement notable pour Lui. Jésus avait passé sous l’anathème. Il l’avait supporté sous le poids du jugement ; mais Il n’y était plus : « Tout était accompli ». Il était sorti vainqueur, à la gloire de Dieu, de Son épreuve dernière et la plus douloureuse. L’offrande n’avait pour cela que plus de prix. Dans la fraîcheur de Sa relation avec le Père, Il pouvait remettre Son esprit entre Ses mains. Il n’était plus abandonné de Dieu, mais agréé comme offrande de bonne odeur.

À l’appui de ce que je dis du Seigneur comme offrande, un cher frère me fait remarquer que dans le Nouveau Testament, il y a deux mots pour l’exprimer : l’un répondant à la présentation de la victime devant l’autel (prosphérô), l’autre, à la victime sur l’autel (anaphérô). Le Seigneur s’est offert à ces deux égards.

Enfin (p. 6), quant à l’expression « mourir judiciairement », j’ai toujours reconnu que les souffrances de Christ sur la croix étaient des souffrances judiciaires, bien que durant les premières heures, ainsi qu’il est reconnu, Il souffrait pour la justice. La croix est un instrument de supplice ; elle donne aux souffrances et à la mort de Christ une empreinte judiciaire. Le Christ à la croix, nous l’avons remarqué, a enduré le juste jugement que nos péchés méritaient ; mais veuillez reconnaître qu’au sortir des trois heures douloureuses et uniques, Jésus n’était plus sous l’anathème. Il pouvait donner Son attention à Marie, Sa mère, la recommander au disciple bien-aimé, et bientôt après, dans la paix, et de Son propre mouvement, remettre Son esprit entre les mains de Son Père.

En ce fait que Jésus est mort en croix, on peut dire qu’Il est mort judiciairement ; c’est la signification de la croix ; mais ne faites pas dire à l’événement qu’Il est mort sous le coup judiciaire ; ce n’est pas la nature de l’acte. Sur ce point, M. Darby, cité par M. B., ne parle pas comme ceux qui se prévalent de ses écrits. Il ne prétend pas, comme eux, envelopper dans le supplice d’un condamné la mort de Celui qui, par Sa propre puissance, donna librement Sa vie et la reprit. Il a dit dans ses dernières Études sur l’évangile de Jean : « Dans une paix parfaite, déclarant que tout était accompli, Il rend Son esprit Lui-même. Personne ne le Lui ôte ; c’est Lui-même qui le rend. Acte divin : après avoir tout souffert dans Son âme par l’abandon de Dieu, dans un calme parfait, Il reconnaît que tout est accompli. Il détache Lui-même Son esprit de Son corps et le remet à Dieu Son Père. Acte divin qu’Il avait le pouvoir d’accomplir »[4].

Dans son écrit, M. B. se propose, ainsi qu’il le fait entendre, de nous donner à comprendre de quel côté est la vérité dans cette triste controverse, et de nous ramener. Nous répondons que notre foi rejette des doctrines qui sont une offense au Fils de Dieu. Quand on a épousé les insanités de Greenwich, comme l’a fait M. B., on a autre chose à faire qu’à chercher à ramener au vrai chemin ceux qui ne l’ont pas quitté. Nous ramener « au vrai chemin du témoignage », comme il dit : « Leurs yeux étant ouverts aux injustes accusations » ; c’est tenir le verbe un peu haut. Veut-il nous intimider peut-être, et renouveler envers nous l’injuste reproche d’Achab à Élie : « Toi, celui qui trouble Israël » ?

Ce petit écrit est perfide. L’auteur, en même temps qu’il se donne une apparence d’orthodoxie, dissimule ses fausses doctrines en les gardant dans le secret. Il fait plus : il cite aussi les écrits de J.N. Darby. Sur le sujet de l’offrande de Christ comme holocauste, M. B. produit une citation extraite des Études sur le premier chapitre du Lévitique. Ce n’est pas là qu’il devrait chercher un correctif à ce que j’ai écrit, si besoin est. Il est évident que si J.N.D. a écrit sur un sujet, on peut attendre qu’il l’ait fait richement ; mais peut-on me blâmer de ne pas avoir fourni copie de cet auteur ? C’est mon propre témoignage que je devais donner, quoique je m’estime heureux d’avoir profité de la grâce qui reposait sur lui et sur son ministère. En écrivant sur les souffrances de Christ à la croix, j’ai mentionné le point spécial de l’offrande de Christ à Dieu, d’une manière sommaire, comme tout le sujet, du reste. Ce que j’ai écrit n’a rien de contradictoire avec la citation du Lévitique. Le reproche de M. B. est déplacé, tout à fait. J’en dis autant de sa seconde citation de J.N.D. sur le sacrifice pour le péché.

Le mal est encore ailleurs. Pourquoi ces citations de la plume de M. B. ? La doctrine de J.N.D. qu’il reproduit dans les citations, c’est le chemin dont il veut que nous sortions pour prendre ce qu’il appelle le vrai chemin, qui est celui où il est lui-même — le chemin de la doctrine réprouvée de M. Raven. Pour nos temps, J.N.D. a marché le premier dans la ligne que nous appellerons le vieux chemin. Nous qui venons après et marchons dans le vieux chemin, nous sommes, au dire de M. B., des égarés qu’il faut ramener ! Pour cela, il use à faux des écrits de J.N.D. ; c’est de la contradiction et de la ruse. M. B. se comprend quand même : citer Darby est une manière de se recommander. De quel prix sont-elles, ces citations, pour le zélé copiste, attendu que lui et M. Raven sont en contradiction constante avec J.N.D., comme on le voit dans la lettre circulaire ?



  1. Ces quelques mots ont été écrits au sujet des attaques de M. E. Bevir, relatives à mon traité sur les souffrances du Christ.
  2. D’un genre particulier.
  3. The serpent’s counterfeit, p. 10.
  4. Étude sur l’évangile de Jean, 1882, p. 293. Voir aussi ses deux lettres à la fin du traité : Les souffrances de Christ à la croix.