Livre:La sympathie chrétienne/Lettre 75
- Mon cher Monsieur,
Je ne puis laisser votre aimable billet sans réponse, et j’ai besoin de vous témoigner ma reconnaissance, lors même que chaque fois que je vous vois ou que j’entends parler de vous, cela répand toujours dans mon cœur une tristesse que je ne puis vaincre de toute la journée. Nous ne sommes pourtant pas séparés pour toujours ; oh ! non ; je serai pour vous un grand sujet de joie, et cette assurance me rend heureuse. Qu’il est doux de penser à l’union intime et inséparable des croyants ! Étant tous en particulier unis à Jésus, ils doivent l’être les uns aux autres, et, quelque effort que Satan fasse, il ne peut les séparer. La vie qui circule en eux tous est la même, et c’est dans le cœur de Jésus que s’en font sentir les pulsations ; ils ne sont tous que comme les miettes d’un même pain. Quand nous disons : « Qui nous séparera de l’amour de Christ ? » nous disons par là même : Qui nous séparera les uns des autres ? Si nous L’attendons, nous attendons aussi Ses saints, car ils viendront avec Lui, et la cène du Seigneur est pour nous, comme le oui et l’amen à Ses grandes promesses. Hélas ! ce n’est pas comme une seule famille à bord d’un même bâtiment, que nous faisons voile vers le port ; nous sommes comme des naufragés unis par le même danger et la même délivrance ; et, quoique nous soyons les uns sur un navire et les autres sur un autre, nous cinglons tous vers le même rivage, et nous y arriverons en sûreté. Ce n’est pas en coulant à fond le vaisseau de notre voisin que nous cherchons notre salut, c’est bien plutôt en nous aidant les uns les autres avec toute l’énergie que donne l’amour.
Croyez-moi, cher Monsieur, l’amie la plus affectionnée et la plus reconnaissante que vous ayez au monde.
T.A. Powerscourt