Écho du Témoignage:Remarques sur le livre de Daniel/Partie 5

De mipe
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Chapitre 8

Au point où nous sommes arrivés maintenant du livre de Daniel, il se fait dans son style un changement remarquable qui n’est peut-être pas connu de tous ses lecteurs. La langue dans laquelle l’Esprit de Dieu révèle la vision que nous allons étudier, et toutes celles qui suivent, est différente de celle dont Il s’est servi pour nous faire connaître les parties précédentes du livre. Depuis une bonne partie du chapitre 2 jusqu’à la fin du chapitre 7, le langage employé était celui du roi de Babylone — le chaldéen ; tandis qu’à partir du chapitre 8 jusqu’à la fin, c’est l’hébreu — la langue ordinaire de l’Ancien Testament. Or, ce changement n’a pas lieu sans dessein. Voici, je pense, ce que nous devons en conclure. Ce qui concernait particulièrement les monarchies gentiles fut communiqué dans le langage du premier grand empire gentil. Cela les concernait d’une manière immédiate et directe ; et le fait est, comme nous le savons, que la première vision, celle de la statue, fut contemplée par le monarque gentil lui-même — Nebucadnetsar. À partir de là, jusqu’à la fin du chapitre 7, c’est dans sa langue que Daniel est écrit. Mais désormais nous allons aborder des visions qui concernent tout particulièrement les Juifs. Ainsi, par exemple, le chapitre 8 fait allusion au sanctuaire, au peuple des saints, au sacrifice continuel et à beaucoup d’autres points particuliers qu’un Gentil aurait eu de la peine à comprendre, et qui n’auraient eu pour lui aucune espèce d’intérêt. Mais, quoiqu’elles puissent n’en avoir qu’un médiocre à nos yeux maintenant, relatives qu’elles sont au passé, à un peuple pulvérisé pour ainsi dire en atomes, dispersé sur toute la surface de la terre, ces choses pourtant n’en conservent pas moins, dans la pensée de l’Esprit, un intérêt réel et permanent.

Dieu n’en a pas fini avec les Juifs. Bien loin de là. Dans le cours de leur histoire, les Juifs ont appris à connaître la misère qu’il y a à entreprendre de mériter les promesses faites aux pères en pur don ; et il leur a été permis de faire l’expérience terrible de la folie et de la ruine qu’il y a nécessairement pour l’homme, quand il essaie de gagner ce qu’il ne peut obtenir que de la seule grâce de Dieu. Tel a été, et tel est encore, le secret de toute leur histoire, dans le passé comme dans le présent. Ils furent retirés du pays d’Égypte par la puissance de Dieu ; mais, à Sinaï, ils se chargèrent de faire tout ce que leur disait le Seigneur. Ils ne dirent pas un mot des promesses que Dieu avait faites. Le Seigneur y faisait allusion ; mais ils ne Lui rappelèrent, en aucune façon, qu’ils étaient un peuple de cou raide, un peuple rebelle et incrédule. Et lorsque Dieu leur proposa de Lui obéir, au lieu de reconnaître leur profonde incapacité, au lieu de se jeter uniquement dans les bras de Sa miséricorde, ils firent, au contraire, une réponse qui trahissait cette hardiesse présomptueuse qui caractérise toujours l’homme dans son état naturel : « Nous ferons, dirent-ils, tout ce que l’Éternel a dit, et nous obéirons ». Le résultat fut qu’ils ne firent rien de ce que le Seigneur avait dit. Ils furent désobéissants en toute occasion et Dieu dut les traiter de la manière qu’ils méritaient. Sans aucun doute, la bonté de Dieu n’a pas cessé de se montrer dans leur histoire ; et même chaque nouveau pas qu’ils accomplissaient dans leur chute ne faisait qu’amener, par la grâce de Dieu, quelque type, quelque figure des bénédictions que Dieu veut leur accorder un jour, lorsque, guéris par Sa miséricorde de cette triste erreur de la chair, et l’ayant bien vue dans les souffrances et les épreuves, et dans cette terrible tribulation par laquelle ils sont destinés encore à passer, ils tomberont aux pieds de ce Bien-aimé qu’ont méprisé et crucifié leurs pères, et reconnaîtront que la miséricorde seule de Dieu peut leur accorder une bénédiction quelconque, et que c’est uniquement Sa miséricorde qui accomplira tout ce dont Il a parlé à leurs pères.

C’est là ce qui commence à poindre d’une façon particulière dans les prophéties de Daniel. Car, quoiqu’il y en ait eu des types dans les parties précédentes (Daniel lui-même dans la fosse des lions — ou comme interprète du roi — les trois jeunes Hébreux qui refusèrent d’adorer les idoles), toutes ces choses étaient des types de ce que Dieu fera dans les derniers jours pour Israël dans une petite semence qu’Il gardera pour Lui-même. Mais ce ne sont pas des types tellement clairs que beaucoup des chrétiens ne considèrent comme un effet de l’imagination de les prendre pour des types. Maintenant nous en venons à des choses auxquelles il n’est pas possible de contredire un moment. Il se trouve néanmoins bon nombre de véritables chrétiens qui prennent ces prophéties comme s’appliquant seulement à l’Église chrétienne. Ils sont disposés à voir dans la petite corne, la papauté. Et dans ce chapitre-ci, plusieurs trouvent l’islamisme, le fléau du monde en Orient, comme la papauté l’est en Occident. Quelles que soient les analogies qui se présentent tout de suite à tout esprit attentif et réfléchi, et que je n’ai niées en aucune sorte quant à la petite corne du chapitre 7, j’admets qu’il y en a ici de semblables par rapport au mahométisme en Orient. Mais ce que je désirerais faire ressortir clairement, c’est l’intention directe de l’Esprit de Dieu dans ces portions de l’Écriture. C’est parfaitement bien de voir qu’il germe dans le monde des semences de mal, et que les horreurs des derniers jours ont leurs précurseurs — signaux d’avertissement qui surgissent de temps à autre à la surface du monde pour nous signaler ce qui approche. Mais dans l’étude de la Parole de Dieu, il est de toute importance d’être dégagé de tout désir de trouver, dans les événements passés ou contemporains, la réponse à la prophétie. La chose essentielle est d’aller à elle avec un esprit exempt de préjugés, et animé du seul désir de comprendre ce que Dieu nous enseigne. En conséquence, qu’il s’agisse du passé ou de l’avenir, juste comme s’il est question du présent, la principale condition, absolument indispensable, est que nous soyons soumis à Dieu et à la parole de Sa grâce. C’est dans cet esprit-là que je désire m’efforcer, autant que le Seigneur m’en rendra capable, d’expliquer le chapitre ouvert maintenant devant nous. Ici, comme dans le chapitre 7, la vision eut lieu sous le règne de Belshatsar ; tandis que les visions subséquentes se passèrent après que la puissance de Babylone eut été renversée. Mais, jusqu’à ce moment, il n’y avait pas eu de jugement sur Babylone. Nonobstant cela, le lieu même où se passa la vision nous prépare à un certain changement. C’était en Orient — plus loin encore en Orient — à Suse, capitale de la province de Élam. Élam est le nom, en hébreu, ou tout au moins, un des noms de la Perse. « Je vis une vision, et j’étais sur le fleuve d’Ulaï ». Je mentionne cela seulement pour montrer que nous avons certains indices de la portée de la prophétie qui suit. Il lève ses yeux, et il voit un bélier, symbole bien connu, en usage dans la Perse elle-même, et qu’on retrouve fréquemment sur ses monuments et dans ses documents publics. « Et voici, un bélier se tenait près du fleuve, et il avait deux cornes, et les deux cornes étaient hautes ; mais l’une était plus haute que l’autre, et la plus haute s’élevait sur le derrière ». L’allusion au caractère mixte de l’empire perse est manifeste. Deux éléments, distincts l’un de l’autre, se trouvaient dans cet empire : l’élément médique, qui était le plus ancien des deux, et le persan, qui était le plus jeune. Mais, avec le temps, l’élément le plus jeune devint le plus considérable : aussi, lisons-nous que l’une des cornes était plus haute que l’autre, et que la plus haute s’élevait sur le derrière. Quoique Darius, le Mède, prenne le royaume lors de la chute de Babylone, c’est néanmoins Cyrus, le Perse, qui, en temps convenable, obtient la prééminence, et, dans la suite, ce sont toujours les Perses qui sont plus particulièrement mentionnés. En attendant, nous trouvons la distinction des deux éléments de l’empire, constatée même dans le langage des nobles à Darius ; ils disent : « la loi des Mèdes et des Perses ». Le bélier avait deux cornes.

« Je vis ce bélier heurtant des cornes contre l’occident, et contre l’aquilon, et contre le midi » — c’est-à-dire, dans la direction que suivit l’empire des Perses dans la poursuite de ses conquêtes diverses — « et pas une bête ne pouvait subsister devant lui, et il n’y avait personne qui lui pût rien ôter ; mais il agissait selon sa volonté, et devenait grand ». Ici, on est bien obligé de reconnaître que toute l’histoire profane n’a qu’à s’incliner profondément devant la Parole de Dieu. Mais nous n’avons nul besoin, pour nous renseigner, de recourir ailleurs qu’à l’Écriture elle-même. Qu’on lise les livres d’Esdras, Néhémie, etc., et on verra comme, en effet, cette domination s’étendait au loin, et combien elle était incontestée. Même dans les historiens profanes, l’expression solennelle « le grand roi » était celle dont on se servait en parlant de la monarchie persane. Tout cela est d’un accord manifeste avec la description que nous en fait la prophétie. « Il agissait selon sa volonté,et devenait grand ».

« Et comme je regardais cela, voici, un bouc d’entre les chèvres venait de l’Occident ». Nous avons ici la première irruption que l’Occident ait jamais faite sur le monde oriental. Rien ne pouvait sembler moins probable qu’un événement pareil, par la raison que l’Orient avait été le berceau de la race humaine. C’était en Orient que l’homme avait été placé après sa création ; c’était en Orient qu’il avait commencé sa seconde histoire dans le monde, je veux dire dans le monde qui succéda au déluge ; c’est de ce centre que les diverses races d’hommes s’étaient répandues sur la terre après que le Seigneur eut confondu leur langage à Babel ; enfin, c’était aussi en Orient que la civilisation avait pris un essor considérable des siècles avant que l’Occident fût sorti de son état de barbarie. Nonobstant tout cela, la figure prophétique si frappante que nous avons sous les yeux, nous apprend que lorsque le royaume des Perses était encore sans rival, et que, bien loin de décliner, il était dans la plénitude même de sa puissance, il surgit subitement d’un tout autre quartier un pouvoir représenté dans la vision sous l’image d’un bouc — un adversaire occidental. Et ce pouvoir s’avance avec la plus grande rapidité possible, comme il est dit ici : « Il ne touchait point à terre ». Quiconque est tant soit peu capable de se faire une conviction, ne peut avoir un moment d’incertitude sur la signification de ce symbole, à supposer même qu’il n’en eût pas dans le chapitre l’interprétation divine. Parmi les anciens empires, il n’y en a eu qu’un seul auquel on puisse imaginer qu’il s’applique — l’empire grec — dont le premier chef, Alexandre, est évidemment désigné par la grande corne que ce bouc avait à sa tête.

« Et il vint jusqu’au bélier qui avait deux cornes, lequel j’avais vu se tenant près du fleuve, et il courut contre lui dans la fureur de sa force. Et je le vis approcher du bélier, et, s’irritant contre lui, il heurta le bélier et brisa ses deux cornes ». L’Esprit de Dieu nous donne là, en peu de mots, ce que toute l’histoire confirme. Après la chute de l’empire de Babylone il s’en élèverait un nouveau, symbolisé par le bélier et qui aurait ceci de particulier, qu’il se composerait de deux peuples différents qui constitueraient sa force. Cet empire garderait un certain temps toute sa puissance ; mais ensuite, d’un autre point où il n’a point existé jusqu’ici de royaume de quelque renom, il vient une puissance dont les progrès sont d’une rapidité étonnante, et à la tête de laquelle se trouve un roi d’une rare valeur et d’une ambition extraordinaire. Ce personnage frappe l’empire perse d’une façon si complète qu’« il n’y avait aucune force au bélier pour tenir ferme contre lui ; et quand il l’eut jeté par terre, il le foula, et nul ne pouvait délivrer le bélier de sa puissance ». L’expression « s’irritant » est plus particulièrement employée quand il s’agit de l’empire grec et d’Alexandre. Les Grecs, effectivement, avaient contre les Perses un fond de haine qu’on ne retrouve pas dans les autres empires, et la grande place qu’ils firent dans leurs guerres au sentiment personnel est admirablement exprimée par ce terme : s’irritant, mû de colère, que nous trouvons ici.

Pourquoi cela ? Nous ne voyons rien de semblable dans les attaques des Perses contre les Babyloniens, quelques féroces qu’ils fussent, ni dans celles des Romains contre les Grecs ; mais c’est particulièrement vrai de cette irruption que firent les Grecs sur l’empire des Perses. Ces derniers avaient, autrefois, envahi la Grèce, et par là avaient soulevé contre eux les sentiments les plus forts. Ce ressentiment traditionnel se transmettait du père au fils, de sorte que les Grecs se considéraient comme les ennemis mortels des Perses. Telle était la provocation dont les Perses s’étaient rendus coupables envers les Grecs, qui n’étaient à cette époque-là qu’une petite nation, et qui n’avaient nullement cherché à étendre leurs limites au-delà de leur contrée natale. Maintenant le temps était venu pour les Grecs de leur rendre ce coup et de les attaquer dans leur propre pays ; et le bouc, avec cette corne remarquable à sa tête, arrive rempli de fureur, frappe le bélier et brise ses deux cornes, le jette par terre, et le foule sous les pieds. Aucune description ne saurait être plus claire ni plus exacte pour donner une juste idée de la position de ces deux puissances l’une à l’égard de l’autre ; et lors même que vous liriez l’histoire toute votre vie, vous ne sauriez trouver un tableau plus vivant de la chute des Perses que celui que l’Esprit de Dieu a tracé en quelques lignes.

Dans ce cas-ci, il devait s’écouler près de trois cents ans depuis le temps de Daniel jusqu’à celui où ces grands événements s’accomplirent — période assez longue pour montrer la merveille de la parfaite sagesse de Dieu, et de quelle manière Il dévoile l’avenir à Son peuple, mais espace de temps relativement assez court dans l’histoire du monde ; néanmoins ce n’était point là le grand objet que Dieu avait en vue. La pensée de l’Esprit se porte toujours en avant sur la fin. Il peut bien présenter des choses qui s’accompliront dans un temps comparativement assez court, mais Son attention principale est dirigée vers la fin de ce siècle, et non vers ces événements qui se passent aujourd’hui dans les différentes parties du monde. Dieu a un peuple sur lequel Son cœur est arrêté, quoique par sa folie, et faute de s’appuyer sur Dieu, ce peuple ait été très faible,qu’il ait manqué, et qu’il soit à cette heure, conformément à la Parole de Dieu, un sujet de mépris et de raillerie pour les nations. Mais quelque idée que l’on puisse avoir de la puissance de la Perse, sinon de la Grèce, et quelle que soit l’importance de leurs querelles qui remplissent l’histoire du monde, Dieu ne s’en occupe que fort peu. Il fait tenir en quelques mots les annales de plusieurs siècles. Il se peut que le point sur lequel Ses regards sont attachés et vers lequel Il se hâte ne soit alors qu’un tout petit point aux yeux du monde ; mais comme il se rattache aux intérêts du roi qui est selon Son cœur et du peuple qui est à Lui, Dieu marche droit aux grands événements qui les concernent dans les derniers jours. Cela nous donne la clé des actes qui suivent : ils sont importants à cause de leur connexion avec l’histoire des Juifs, et en ce qu’ils nous présentent un reflet de ce qui doit arriver dans un autre temps.

« Alors le bouc d’entre les chèvres devint fort grand ; et sitôt qu’il fut devenu puissant, la grande corne fut rompue ». C’est exactement ce qui arriva à Alexandre : il fut retranché, lorsqu’il était encore un homme tout jeune, au milieu de ses victoires. « Et en sa place, il en crût quatre fort apparentes, vers les quatre vents des cieux ». Après la mort d’Alexandre, il s’écoula un certain temps durant lequel ses généraux se firent la guerre entre eux et essayèrent d’établir un grand nombre de royaumes ; mais, en définitive, il s’en forma quatre des pays qui constituaient proprement l’empire grec. De sorte que je ne doute nullement qu’il est fait allusion ici à la division bien connue de l’empire d’Alexandre en quatre royaumes, qui eut lieu environ trois cents ans avant la venue de Christ.

« Et de l’une d’elles sortit une autre corne petite », nommée autrement dans l’Écriture le roi du Nord. Placé au Nord, il pousse sa domination « vers le Midi, et vers l’Orient, et vers le pays de noblesse ». Mes raisons pour penser ainsi, outre celle qui est tirée de la direction qu’il donne à ses conquêtes (direction qui montre où se trouve sa puissance propre et le point d’où il partait), se verront plus particulièrement lorsque nous arriverons au verset 11 . Ce qui nous est présenté ici, c’est la succession de ces deux empires — la Perse d’abord, et ensuite la Grèce. Car de l’une des parties de l’empire grec il surgit un roi qui devait plus tard jouer un rôle très important en rapport avec le pays et le peuple des Juifs. C’est là le grand sujet de ce chapitre.

Nous voyons ensuite ici que cette petite corne « s’agrandit même jusqu’à l’armée des cieux, et renversa une partie de l’armée, et des étoiles, et les foula ». Ces paroles, je pense, désignent ceux qui occupaient devant le peuple juif une position d’honneur et de gloire. C’est ainsi que, dans le Nouveau Testament, les étoiles sont employées comme le symbole des personnes qui sont établies en autorité dans l’Église ; précisément de la même manière, je pense, que par « l’armée des cieux », il faut entendre les personnes qui, dans le régime politique juif, étaient établies dans une position d’autorité. C’est la clé pour l’intelligence de toute cette portion de la prophétie. C’est l’importance de tout ce qui touche Israël, que l’Esprit fait ressortir maintenant. De là vient l’emploi de cette expression « l’armée des cieux », qui peut paraître forte. Mais nous ne devons pas en être surpris. Dieu porte à Son peuple le plus profond intérêt. Mais souvenez-vous que cela n’implique nullement que Son peuple fût dans un bon état. Au contraire, quand il s’agit de juger un état de chute, il nous faut prendre en considération la position occupée, et pour laquelle sont responsables ceux qui s’y trouvent. S’il s’agit de la chrétienté, il faut vous souvenir que tous ceux qui font profession du nom de Christ, soit véritablement, soit à tort — toute personne baptisée — toute personne qui a pris place là où le nom de Christ est extérieurement reconnu, se trouvent dans la maison de Dieu. On s’imagine qu’il n’y a que ceux qui sont réellement convertis qui soient sous des obligations morales. C’est une erreur complète, bien qu’une nouvelle espèce de responsabilité découle du fait de la conversion et des relations de la grâce. Mais il y a une espèce de responsabilité qui entraîne une grande augmentation de culpabilité, lorsqu’on a été placé dans une position privilégiée. C’est là une vérité bien solennelle, à laquelle Dieu attache de l’importance. Voyez dans la seconde épître à Timothée. La maison de Dieu y est comparée à une grande maison parmi les hommes, et il y est déclaré qu’elle renferme des vaisseaux à déshonneur, aussi bien que des vaisseaux ont honneur. Les premiers ne sont pas du tout convertis ; ce peuvent être de fort méchantes gens, mais il est dit néanmoins que ce sont des vaisseaux dans la maison de Dieu. L’Église, ce qui porte sur la terre le nom de Christ, est toujours sous la responsabilité de marcher comme il convient à l’Épouse de Christ : toutefois, vous ne sauriez penser à un privilège et à une responsabilité semblables sans voir l’état de ruine entière, de décadence et de chute de ce qui porte ce beau nom. Et cela fait voir de quelle importance pratique il est de ne pas perdre de vue la position que Dieu nous a assignée. Jamais nous ne pouvons juger combien nous sommes déchus, jusqu’à ce que nous voyions la position dans laquelle Dieu nous a placés. À supposer que j’aie à examiner mes voies comme chrétien, il faut que j’aie dans l’esprit qu’un chrétien est un homme dont les péchés sont effacés, qu’il est membre du corps de Christ, et qu’il est aimé du même amour dont le Père a aimé le Fils. Il y en a qui sont accoutumés à penser que si un homme n’est ni juif, ni turc, ni païen, il doit être chrétien. Mais lorsqu’un croyant entend dire qu’un chrétien est quelqu’un qui a été fait roi et sacrificateur pour Dieu, que c’est un sacrificateur purifié qui n’a plus conscience de péché, il éprouve de l’anxiété et sent qu’il n’a pas une juste idée, une idée complète, de sa vocation et de sa responsabilité. Il commence alors à avoir une autre règle de jugement pour apprécier la manière dont il doit se comporter dans ses sentiments, son travail et sa marche pour Dieu.

La même chose s’applique aussi à Israël. Notre passage désigne comme armée et étoiles des cieux ceux qui tenaient, au milieu du peuple, cette position d’autorité responsable. Dieu les avait mis dans une place d’autorité. Car il faut se souvenir, en rapport avec Israël, que dans la pensée de Dieu, il est le peuple qui occupe sur la terre la première place. Il est la tête, et les Gentils sont la queue. Cela, je le sais, est une pensée nouvelle pour les personnes accoutumées à regarder les Juifs d’un air de pitié dédaigneuse, parce qu’elles n’en jugent que d’après leur dégradation présente. Mais pour bien juger des choses, il nous faut les envisager avec Dieu, les apprécier avec Dieu, et Dieu emploie ces fortes expressions à l’égard de personnes placées dès jadis dans une position extérieure d’autorité parmi les Juifs. Quelques-uns ont supposé que puisque des termes si relevés s’appliquaient à des hommes, il fallait entendre par eux des chrétiens. Mais dans le gouvernement du monde, la première place dans la pensée de Dieu appartient à Israël, qui est Sa nation. C’est là la vocation de ce peuple, et « les dons et la vocation de Dieu sont sans repentance ». Jamais Dieu n’abandonnera la grande pensée qui a appelé Israël à cette position, et c’est d’après elle qu’Israël est jugé. La puissance de Babylone n’est pas encore jugée au moment où cette vision est accordée à Daniel ; elle nous présente un tableau de ce qui s’accomplira pour Israël dans les derniers jours, avant que la puissance qui commença par Babylone soit mise complètement de côté.

Cette petite corne s’agrandit, et renversa une partie de l’armée, et des étoiles des cieux, et les foula. En d’autres termes, elle renversa certains gouverneurs juifs qui se trouvaient dans cette place de grande autorité, les traita avec la dernière cruauté, et les dégrada ignominieusement. « Même elle s’agrandit jusqu’au chef de l’armée », ce qui, je suppose, veut dire le Seigneur Lui-même. « Et le service continuel lui fut ôté (au chef de l’armée), et le domicile assuré de son sanctuaire fut jeté par terre. Et un certain temps (de détresse) fut donné (décrété) contre le sacrifice continuel, à cause de l’infidélité ». Ensuite nous revenons de nouveau à la petite corne. « Et elle jeta la vérité par terre et fit de grands exploits et prospéra ». En d’autres mots, le verset 11, à partir de : et le sacrifice, et la première moitié du douzième, forment une parenthèse ; et puis, dans la dernière partie du verset 12, nous trouvons de nouveau la petite corne du verset 10, qui devait apparaître, et traiter cruellement les Juifs, et plus cruellement encore leurs gouverneurs.

Puis nous avons, comme s’exprime le prophète, « un saint qui parlait, et un autre saint qui disait à quelqu’un qui parlait : Jusques à quand durera cette vision touchant le sacrifice continuel, et touchant le crime qui cause la désolation, pour livrer l’armée et le sanctuaire à être foulés ? Et il me dit : Jusqu’à deux mille et trois cents soirs et matins, après quoi le sanctuaire sera purifié ». Je soupçonne fort qu’en général, tout ce que nous lisons là, sauf ce qui est présenté sous forme de parenthèse, a eu, dans le passé, un accomplissement partiel. Dans le chapitre 11, où les traits auxquels il est fait allusion ici comme caractérisant cette petite corne sont décrits plus minutieusement encore, nous trouverons un personnage qui, dans l’histoire profane, porte le nom d’Antiochus Épiphane, et qui fut particulièrement un méchant homme. Si vous avez lu les livres des Macchabées (qui, quoique ne faisant pas partie de l’Écriture, sont, en général, vrais sous le rapport historique, deux d’entre eux, du moins), vous savez qu’ils racontent l’histoire de ce roi syro-macédonien, et montrent quels sentiments terribles il éprouvait contre Israël. Il entreprit d’imposer de force aux Juifs le culte païen, spécialement celui de Jupiter olympien, et il mit à mort tous ceux d’entre eux qui résistaient à ses desseins, jusqu’à ce qu’à la fin, partie par les Romains et partie par la valeur et le courage des Macchabées eux-mêmes, il fut contenu et défait, et que de nouveau le temple fut purifié et le culte juif restauré. Nul doute qu’il était historiquement le personnage que désignait la petite corne ; mais on trouve en lui la même espèce de traits qui réapparaîtront dans un autre grand chef des derniers jours, ainsi que la dernière partie de ce chapitre le montrera clairement selon moi ; car lorsque l’ange Gabriel parle au prophète, il lui dit : « Fils d’homme, entends ; car la vision est pour le temps de la fin » (vers. angl.). Parole qui, à mon avis, indique que ce qu’il va expliquer d’une façon plus particulière, se rapporte à ce temps-là.

Mais ceci me fournit l’occasion de répéter une remarque que j’ai déjà faite, savoir, que nous ne devons jamais supposer que les explications que l’Écriture nous donne d’une vision ne sont qu’une simple répétition de ce qui a précédé. Elles font allusion au passé, mais elles ajoutent des traits nouveaux qui n’avaient pas été présentés avant. Cela est particulièrement manifeste dans le cas actuellement sous nos yeux. La partie de la vision déjà passée, (ce qui a été vu par le prophète) a été, en général, accomplie ; tandis que la portion explicative ajoute des informations nouvelles qui portent en avant sur les derniers jours. Néanmoins il y a, dans une certaine mesure, une explication de ce qui a précédé. Mais considérez comme les derniers jours sont fréquemment amenés devant nous dans les explications de l’ange. Il dit : « Voici, je te ferai savoir ce qui arrivera à la fin de l’indignation ; car il y a une assignation déterminée ». Il ne saurait y avoir d’incertitude, pour peu que les prophètes nous soient familiers, sur ce qu’il faut entendre par là. Prenez le premier d’entre eux, j’y trouve cette même expression : « l’indignation ». À la fin de Ésaïe 5, et ensuite dans les chapitres 9 et 10, ce mot « indignation » est souvent répété. Le prophète fait voir que, en conséquence de l’idolâtrie d’Israël et surtout de ses rois, l’indignation de Dieu s’était soulevée contre Son peuple. Il envoie sur lui un châtiment. Mais, quel que soit d’abord l’effet du châtiment, le mal éclate de nouveau avec une nouvelle furie, comme le mal fait toujours, à moins qu’il ne soit ôté. C’est pourquoi le prophète prononce cette terrible parole : « Malgré tout cela, il ne fera point cesser sa colère ; mais sa main sera encore étendue ». La colère de Dieu ne cessait point. Puis, chapitre 10, 25, nous voyons qu’Il annonce que Son indignation cessera. Mais en quoi prendra-t-elle fin ? Ce passage met en scène un personnage nommé l’Assyrien ; et cet Assyrien était quelqu’un qui avait été établi par Sankhérib, dernièrement roi d’Assyrie. Il fut le premier qui intervint particulièrement dans les affaires d’Israël, ou plutôt de Juda. Et que lisons-nous ici à son sujet ? L’Assyrien doit être employé comme verge de la colère de Dieu ; mais lorsque Dieu aura achevé toute Son œuvre sur la montagne de Sion et de Jérusalem, lorsqu’Il aura, pour ainsi dire, laissé Son indignation se consumer entièrement, elle prendra fin dans la destruction de l’Assyrien lui-même, parce qu’il aura oublié qu’il n’était simplement qu’une verge dans les mains du Seigneur. Il nourrissait la pensée qu’il agissait par sa propre sagesse, par sa propre puissance, et le Seigneur déclare qu’Il s’occupera de la verge elle-même et qu’Il la détruira ; aussi ce même chapitre nous montre-t-il l’indignation du Seigneur cessant dans sa destruction.

Cette indignation du Seigneur se rapporte uniquement à Son peuple, à Israël. De sorte que cela confirme ce que je disais auparavant, que nous sommes sur un terrain juif. Elle n’a point trait à ce que peuvent faire les papes ou les musulmans, ni aux progrès de l’apostasie orientale ou occidentale. Elle concerne Israël, elle est la dernière indignation de Dieu contre Israël. Mais on demandera peut-être pourquoi le quatrième empire n’est pas introduit ici. La raison en est que quoique la domination soit ôtée à ces empires, et que par suite nous en voyions s’élever successivement un nouveau, leur corps néanmoins continue d’exister, parce que c’est du troisième empire, et non pas du quatrième, que devait surgir la puissance qui joue dans les derniers jours un rôle si important. De sorte que nous devons nous souvenir que la petite corne du chapitre 8 est une puissance entièrement distincte de la petite corne du chapitre 7. Celle du chapitre 7 est le dernier chef de l’empire romain. Elle s’élève du quatrième empire pendant qu’il est divisé en dix royaumes, tandis que cette puissance-ci s’élève du troisième empire, et pendant qu’il y existait un état de division en quatre parties — non en dix. Rien ne peut être plus distinct. Quoique la grande domination du monde ait passé du troisième empire au quatrième, et quoique nous ayons en Sankhérib le représentant du troisième empire, néanmoins il y aura aussi dans les derniers jours un héritier du troisième empire qui s’immiscera dans les affaires d’Israël d’une façon particulière. De même qu’il y aura un grand chef en Occident, de même il y en aura un aussi en Orient, qui surgira de l’empire grec. Il ne faut pas oublier, en effet, que tout en étant l’empire grec, il était l’Occident, relativement à Babylone et à la Palestine, et l’Orient, par rapport à Rome. Pus tard, nous en apprendrons davantage sur cette petite corne.

Le verset 20 fait connaître que le bélier à deux cornes représente les rois des Mèdes et des Perses, et le verset 21 que « le bouc velu, c’est le roi de Javan (la Grèce), et la grande corne qui est entre ses yeux, c’est le premier roi ». Puis, au verset 22, l’empire grec est brisé, et le verset 23 ajoute : « Et vers la fin de leur règne, quand le nombre des perfides sera accompli, il s’élèvera un roi fourbe et d’un esprit pénétrant ». Ceci, à mon avis, ne se rapporte pas à Antiochus Épiphane, mais bien à celui dont Antiochus était le type. Remarquez encore les termes : « Et vers la fin de leur règne, quand le nombre des perfides sera accompli ». « Et sa puissance s’accroîtra, mais non point par sa force ». Parole remarquable, qui n’est point dite du tout de la petite corne du chapitre 7. Pour cette dernière, c’était, je pense, par sa propre force. Satan pouvait aussi lui donner le pouvoir, mais elle portait dans sa propre personne la force de l’empire romain. Mais, dans le cas qui nous occupe, quoique la puissance de ce chef soit grande, ce ne sera point par sa force. Il s’appuie sur la force qui lui est donnée par d’autres. Il sera l’instrument d’une politique et d’une puissance étrangères, et non d’une politique et d’une puissance qui soient siennes. « Et il fera des merveilleux dégâts et prospérera, et fera de grands exploits, et il détruira les puissants et le peuple des saints ». C’est-à-dire, qu’il est fait mention de lui principalement, et d’une manière expresse, en connexion avec les Juifs en tant que faisant un peuple. Il ne s’agit pas ici des saints du Souverain. Là où cette dernière expression est employée, ce n’est pas simplement pour designer, d’une manière figurée, les hommes élevés du peuple juif ; mais ici il s’agit d’eux, comme en contraste avec les Gentils. Il n’y a rien là absolument qui ait trait à leur caractère personnel ; ce sujet reste tout à fait en dehors de notre chapitre.

Il entrera en rapport avec eux, et détruira les puissants et le peuple des saints, « et par la subtilité de son esprit, il fera prospérer la fraude en sa main, et il s’élèvera en son cœur, et en perdra plusieurs par la prospérité ». C’est-à-dire qu’il tirera parti, pour la réussite de ses desseins, de leur état de bien-être, et du fait qu’ils ne sont pas préparés à ses empiétements. « Il résistera contre le Seigneur des seigneurs, mais il sera brisé sans main ». Il sera entièrement sans appui dans ce dernier combat. Il est dit dans un autre passage (Dan. 11, 45) : « Il viendra à sa fin et personne ne lui donnera du secours »­.

Mon désir serait maintenant de renvoyer à des passages qui feront ressortir l’importance de ce sujet plus clairement que si nous le considérions simplement comme il se trouve présenté en Daniel 8. Y a-t-il, en effet, dans l’Écriture d’autres passages qui jettent du jour sur la nature de ce personnage et sur ce qu’il fera ? Je réponds : Oui, il y en a. Ce personnage est le même que celui dont il est fait mention en diverses parties de la Parole de Dieu, comme l’Assyrien, ou le roi du Nord : c’est celui qui, dans les derniers jours, sera le grand ennemi des Juifs. En ce temps-là, les Juifs seront exposés à deux sortes de maux : un mal intérieur, dans leur propre pays, un antichrist, s’établissant comme dieu dans le temple de Dieu ; et un mal venant sur eux du dehors, le roi dont nous parlons maintenant. Il s’avance contre eux comme un ennemi, et il est aussi doué d’une grande subtilité d’esprit. Ce n’est pas simplement la puissance guerrière qui le distingue, ou un air martial et farouche, mais il a l’intelligence des sentences obscures. Il se présentera comme un grand et profond docteur, ce qui ne saurait manquer d’avoir beaucoup d’influence sur l’esprit des Juifs, car ils ont toujours été un peuple adonné aux recherches et aux spéculations intellectuelles de toutes sortes. Dans ces derniers temps, la plupart d’entre eux ont été trop occupés à gagner de l’argent pour donner une grande attention à ces choses ; mais il y a toujours eu dans la nation juive des représentants de la classe vouée aux travaux de l’intelligence. Sur des hommes semblables, l’influence de ce roi sera immense, quand ils seront de nouveau rétablis dans leur pays et qu’ils seront redevenus importants et les objets des voies de Dieu par rapport au jugement. L’indignation n’aura pas encore pris fin.

Voici de quelle manière ces deux maux tourmenteront les Juifs. L’antichrist, ou le roi qui fera selon sa volonté, prendra dans le pays d’Israël la place du vrai Messie. Car il est bien évident que s’il se présente comme le Messie, ce doit être au milieu du peuple juif et dans le pays des Juifs ; tandis que le personnage de ce chapitre-ci est quelqu’un qui s’oppose à eux comme un ennemi déclaré. Je le regarde comme étant le roi auquel est fait allusion par les autres prophètes comme roi du Nord.

Je voudrais maintenant citer quelques-uns de ces passages.

L’Assyrien et l’Antichrist sont des puissances entièrement distinctes et opposées. L’Assyrien sera l’ennemi de l’Antichrist : l’un sera, au-dedans, essentiellement l’homme qui s’élève, et l’autre sera le chef des ennemis au-dehors. C’est en Ésaïe 10 que se trouve la première indication claire que les prophètes nous donnent relativement à cet ennemi : « Mais il arrivera que quand le Seigneur aura achevé toute son œuvre dans la montagne de Sion et à Jérusalem, j’examinerai le fruit de la grandeur du roi d’Assyrie, et la gloire de la fierté de ses yeux ». Si on me dit que les Assyriens ont complètement disparu, et que cette nation a cessé d’exister, je réponds en demandant si le Seigneur a achevé toute Son œuvre dans la montagne de Sion et à Jérusalem. Et il faut bien dire que certainement Il ne l’a pas achevée. Par conséquent, ce n’en est pas complètement fini avec l’Assyrien. Le Seigneur m’apprend ici que lorsqu’Il aura achevé toute Son œuvre, Il examinera le fruit de la grandeur du cœur du roi d’Assyrie. Mais, objecte-t-on encore, les Juifs ne sont pas dans leur pays, et Jérusalem est encore foulée par les Gentils. Je le sais ; mais cela prouve-t-il que les Juifs ne doivent pas se retrouver encore dans leur pays, et que Jérusalem ne doit pas être délivrée de l’esclavage dans lequel les Gentils la tiennent ? Lorsque la puissance de Dieu rassemblera les Juifs dans leur pays, la même puissance suscitera celui qui doit être le représentant de l’Assyrien dans les derniers jours. Et comme l’Assyrien fut le premier grand ennemi d’Israël, il est aussi son principal ennemi à la fin. Il montera pour subir son jugement quand le Seigneur aura achevé toute Son œuvre en Sion et à Jérusalem. Il ne l’a pas achevée toute ; Il en a achevé une partie, mais Son indignation contre Israël continue encore. Voilà pourquoi les Juifs ne sont point dans leur pays. Même lorsqu’ils y seront retournés, l’indignation continuera ardente encore. Leur retour s’effectuera dans leur état d’incrédulité, et c’est alors que viendra cette crise solennelle, que Dieu rassemblera les dispersés qui restent et les placera dans leur pays, et que l’Assyrien sera jugé. Il y a un certain grand personnage dont l’Assyrien était le type dans le passé ; ce personnage reparaîtra aux derniers jours, et l’Écriture en parle comme étant ce roi d’Assyrie. Il gouvernera dans la contrée même où cette petite corne a exercé son pouvoir — la Turquie d’Asie. Je n’ai pas la prétention de dire si le sultan sera alors le possesseur de ce pays ; mais, quel qu’en soit le possesseur, c’est lui que les prophètes désignent comme le roi du Nord. Il descendra vers le pays de noblesse, et attaquera les Juifs ; mais ensuite il sera brisé. Il viendra à sa fin, et personne ne lui donnera du secours.

Voyons encore Ésaïe 14. Ce qui rend ce passage remarquable, c’est que le commencement de ce chapitre parle du roi de Babylone (v. 4) : « Tu te moqueras ainsi du roi de Babylone et tu diras : Comment se repose l’exacteur ? Comment se repose celle qui était si avide de richesses ? ». Le roi de Babylone ne représente point l’Assyrien. Babylone et l’Assyrie étaient deux puissances distinctes. Babylone n’était qu’une petite province lorsque l’Assyrie était un grand empire, et lorsque l’empire assyrien était en ruines, Babylone était une chose entièrement nouvelle, comme puissance impériale.

Le chapitre 14 d’Ésaïe s’ouvre en déclarant que « l’Éternel aura pitié de Jacob, et élira encore Israël, et les rétablira dans leur terre ; et les étrangers se joindront à eux et s’attacheront à la maison de Jacob. Et les peuples les prendront, et les mèneront en leur lieu, etc. » — montrant le vif intérêt que Dieu inspirera en leur faveur aux peuples du monde qui les ramèneront en leur lieu. « Et la maison d’Israël les possédera (ces peuples) en droit d’héritage sur la terre de l’Éternel, comme des serviteurs et des servantes ». Les Gentils, au lieu d’être maîtres, seront heureux en ces jours-là d’être serviteurs. « Et ils tiendront captifs ceux qui les avaient tenus captifs, et ils domineront sur leurs exacteurs. Et il arrivera qu’au jour que l’Éternel aura fait cesser ton travail…, tu te moqueras ainsi du roi de Babylone, et tu diras : Comment se repose l’exacteur ? Comment se repose celle qui était si avide de richesses ? L’Éternel a rompu le bâton des méchants et la verge des dominateurs ». Évidemment, ces choses n’ont jamais encore été accomplies. Personne, ayant quelque connaissance de l’Écriture, ne peut supposer que jamais, depuis l’époque de la suprématie de Babylone, Israël ait été en position de tenir un langage tel que celui-là. « Les temps des Gentils » ont commencé avec l’établissement de la puissance de Babylone sur les Juifs, et jusqu’à ce jour Jérusalem est foulée par les Gentils : puissance après puissance ont pris tour à tour possession de la cité. Or, dans les derniers jours dont il est question, nous voyons les Juifs se soumettre les Gentils, et en faire leurs serviteurs. Et c’est lorsque ce temps sera arrivé, et non pas avant, qu’ils diront : « Comment se repose l’exacteur ? etc. ». Et c’est au roi de Babylone qu’à trait cet élan de la prophétie, à celui dont Nebucadnetsar était le type, au dernier possesseur de cette même puissance qui commença avec Babylone. Ce personnage, qui est-ce ? C’est la bête — le dernier héritier de la puissance qui commença par le roi de Babylone, et dont la destruction provoque les transports de joie et les chants de triomphe d’Israël. Quand le roi de Babylone obtint cette puissance, où était l’Assyrien ? Disparu, brisé. Le roi de Babylone, qui avait été auparavant une petite puissance, s’éleva sur les ruines de l’Assyrien. Mais voyez dans ce chapitre, au verset 24 : « L’Éternel des armées a juré, en disant : S’il n’est fait ainsi que je l’ai pensé, même comme je l’ai arrêté dans mon conseil, il tiendra ; c’est que je froisserai le roi d’Assyrie dans ma terre ; je le foulerai sur mes montagnes, et son joug sera ôté de dessus eux, et son fardeau sera ôté de dessus leurs épaules. C’est là le dessein qui a été arrêté contre toute la terre ». Ce passage n’établit-il pas aussi avec évidence que lorsque viendra le jour de son rétablissement, non seulement Israël triomphera du sort du roi de Babylone, mais aussi que l’Éternel renversera l’Assyrien ? Cela ne saurait se rapporter simplement à l’Assyrien de l’histoire. Il était passé déjà quand Babylone parvint au pouvoir ; de sorte que ce ne peut être qu’un type d’une puissance encore à venir. Le dernier jour verra deux grandes puissances en scène — la bête, représentée par le roi de Babylone, qui, en ce temps-là, sera l’ennemi des Juifs sincères, tout en se donnant comme l’ami de la nation, c’est-à-dire de la masse impie ; et l’Assyrien qui, au contraire, sera le chef de la coalition ouvertement hostile des Gentils contre Israël.

D’autres passages prouvent ce que nous disons. En Ésaïe 30, nous retrouvons ces deux mêmes puissances (v. 27) : « Voici, le nom de l’Éternel vient de loin, sa colère est ardente… Et l’Éternel fera entendre sa voix pleine de majesté, et il fera voir où aura frappé son bras dans l’indignation de sa colère… Car l’Assyrien, qui frappait du bâton (allusion évidente au fait qu’il était, entre les mains de l’Éternel, un instrument pour châtier son peuple, comme en Ésaïe 10, 5), sera effrayé par la voix de l’Éternel. Et partout où passera le bâton enfoncé dont l’Éternel l’aura asséné, et par lequel il aura combattu dans les batailles à bras élevé, on y entendra des tambours et des harpes, car Topheth est déjà préparée, et elle est préparée aussi pour le roi : il l’a faite profonde et large ; son bûcher, c’est du feu et force bois ; le souffle de l’Éternel, l’allumant comme un torrent de souffre », expression destinée à faire voir qu’il ne s’agit pas simplement d’un jugement borné à la terre, mais de quelque chose d’une portée plus profonde. Topheth, ou l’abîme, est préparée dès jadis (vers. angl.). « Aussi pour le roi » est le vrai sens du membre de phrase qui suit : Ce Topheth n’est pas pour l’Assyrien seulement, il est aussi pour le roi. Il est fait allusion ici, de même qu’au chapitre 14, à deux personnages distincts. « Le roi » sera dans le pays d’Israël ; il y sera sous les auspices de l’héritier de la puissance de Babylone en ces jours-là ; il y sera en prétendant être le vrai Messie. Topheth est préparée pour lui — mais elle l’est aussi pour l’Assyrien. Ils seront tous les deux livrés à Topheth. Il serait superflu de citer tous les passages qui les concernent ; mais on trouvera dans Ésaïe et en d’autres prophètes beaucoup de choses extrêmement intéressantes, relativement à celui que l’Écriture signale par cette expression « le roi ».

Mais il est si loin d’être vrai que l’antichrist, ou « le roi », soit le personnage qui occupe le plus la pensée de Dieu, qu’il est bien davantage question de l’Assyrien dans les prophètes. En général, les chrétiens ne se doutent pas de la vaste étendue de la prophétie. Ils s’occupent à peine de l’une des puissances les plus importantes qu’elle nous offre. Lisez les petits prophètes, Michée 5, par exemple ; vous y trouverez une allusion tout à fait manifeste à la même puissance. Le chapitre débute par un appel : « Maintenant assemble-toi par troupes, fille de troupes ; on a mis le siège contre nous ; on frappera le gouverneur d’Israël avec la verge sur la joue ». Là est annoncée la réjection du Messie. Puis, le verset 2 est une parenthèse qui nous fait voir quel était ce gouverneur d’Israël : « Mais toi, Bethléhem Éphrata, petite pour être entre les milliers de Juda, de toi me sortira quelqu’un pour être dominateur en Israël ». On peut le frapper sur la joue ; mais, après tout, non seulement Il doit être dominateur en Israël, mais Il est le Dieu éternel, et « ses issues sont d’ancienneté, dès les jours éternels ». Ensuite le prophète reprend, en connexion avec le verset 1 : « C’est pourquoi il les livrera jusqu’au temps que celle qui est en travail d’enfant aura enfanté », c’est-à-dire jusqu’à ce que le grand dessein de Dieu s’accomplisse au sujet de Son peuple. « Et le reste de ses frères retournera avec les enfants d’Israël. Et il se maintiendra, et gouvernera par la force de l’Éternel… Et c’est lui qui fera la paix, après que l’Assyrien sera entré dans notre pays ». Remarquez cette parole — « après que l’Assyrien sera entré, et qu’il aura mis le pied dans nos palais ». Chose qui n’a jamais eu encore son accomplissement. Lorsque jadis l’Assyrien entra dans le pays, il est évident que le gouverneur d’Israël ne s’y trouvait pas. En ce temps-là, Israël n’avait pas été livré, mais l’Assyrien de cette époque n’était que le type du grand héritier du même nom et de la même puissance des derniers jours. Et alors le gouverneur d’Israël sera là en faveur de Son peuple. Le gouverneur qui, autrefois, a été frappé sur la joue, sera reçu par Son peuple, lorsque les grands desseins de Dieu seront accomplis. « C’est lui qui fera la paix, après que l’Assyrien sera entré dans notre pays ». Ensuite, verset 6, nous lisons : « Et il nous délivrera des Assyriens, quand ils seront entrés dans notre pays, et qu’ils auront mis le pied dans nos quartiers. Et le reste de Jacob sera au milieu de plusieurs peuples comme une rosée qui vient de l’Éternel… Aussi le reste de Jacob sera parmi les Gentils, au milieu de plusieurs peuples comme un lion parmi les bêtes des forêts, et comme un lionceau parmi des troupeaux de brebis, lequel y passant foule et déchire, sans que personne en puisse rien garantir ». De sorte qu’il est de toute clarté que nous avons là l’invasion de l’Assyrien avec sa destruction finale en rapport avec la délivrance finale d’Israël.

J’ai tâché de faire voir que, quoique Antiochus Épiphane fût un type de l’Assyrien que nous avons ici, ce n’était néanmoins après tout que pour une bien petite partie qu’il satisfaisait aux exigences de la prophétie, qui, tout en se servant de lui comme d’un type, porte toujours ses regards en avant sur les derniers jours de l’indignation de Dieu contre Israël, où l’Assyrien montera pour recevoir son jugement de la main même de Dieu. Il importe extrêmement d’avoir des vues justes et claires sur ces grands desseins de Dieu à l’égard d’Israël et de voir que les épisodes de la papauté ou du mahométisme dont l’homme est tant occupé, ne sont touchés dans l’Écriture que d’une façon très légère. Je reconnais que, dans l’une comme dans l’autre, se trouve une certaine mesure d’accomplissement de la prophétie ; mais Dieu ne permet jamais à l’Église d’être un peuple terrestre. C’est quand les Juifs reparaîtront sur la scène, que s’accomplira, dans toute sa portée réelle, ce qui les concerne, que cet Assyrien viendra du dehors, en même temps qu’il y aura « le roi » au-dedans ; et ils seront l’un et l’autre les objets des jugements de Dieu. Dieu les abattra tous les deux, et Son peuple, purifié par ses épreuves et regardant à Jéhovah-Jésus, sera ainsi rendu propre aux desseins de Dieu, en miséricorde, en bonté et en gloire, dans toute la durée du monde à venir.

Que le Seigneur nous donne de connaître Ses desseins quant à nous ! Nous n’avons rien à faire avec ce monde ; nous y sommes étrangers. Nous avons le droit de lire toutes ces visions, toutes ces prophéties, à la lumière du ciel. Il n’est point dit qu’elles ne furent pas comprises de Daniel ; les autres ne les comprirent point. Mais quel qu’ait été le cas pour eux, nous sommes mis en état par le Saint Esprit de les comprendre maintenant. Que le Seigneur nous donne d’être bien au clair sur ce qu’Il met devant nous quant à notre propre marche !


Chapitre 9

Dans les prophéties d’Ésaïe, aussi bien que dans celles de Jérémie, la chute de Babylone se rattachait pour les Juifs à de plus brillantes espérances. La restauration partielle qui suivit pour eux cette chute est le type de la récolte finale d’Israël. Cela explique la pensée qui a prévalu chez beaucoup de chrétiens, que le rétablissement partiel qui s’accomplit alors constitue tout ce que nous devons attendre en faveur d’Israël comme tel, et que le péché dont il s’est rendu coupable plus tard en rejetant son Messie, et la miséricorde par laquelle l’évangile a été accordé aux Gentils, l’ont entraîné sous le rapport national dans une irréparable ruine.

Quoiqu’il y ait beaucoup de vrai dans une telle pensée, elle est certes bien loin d’être toute la vérité. Dieu n’abandonne point le peuple qu’Il a appelé. Jamais Il n’accorde un don de grâce pour le retirer ensuite entièrement, car la même grâce qui a fait la promesse agit et opère dans la personne et le cœur du croyant, jusqu’à ce qu’elle ait son plein effet moral par l’efficace du Saint Esprit. Ainsi, en même temps que la grâce, par laquelle Il appelle soit un individu, soit un peuple, il y a en Dieu aussi la fidélité, la patience, et la puissance efficace qui, à la fin, triomphent toujours.

L’histoire du passé n’est, sans aucun doute, qu’une chute totale. La raison en est qu’Israël choisit pour base de sa position vis-à-vis de Dieu sa propre force, et non la bonté de Dieu à son égard. Agir de la sorte, c’est pour un temps, toujours et nécessairement, une chose fatale. « Cette génération ne passera pas que toutes ces choses ne soient arrivées ». En d’autres termes, toutes les menaces qui ont été faites et prédites doivent encore arriver à la génération d’Israël qui a présumé de sa propre justice, et qui, en définitive, a montré son vrai caractère en rejetant Christ et l’évangile. Un sentiment réel de ruine morale, ou autrement la repentance envers Dieu, accompagne toujours la foi vivante véritable. Israël a passé par cette phase de la confiance en soi-même, ou plutôt il y est encore. « Cette génération » n’a pas encore passé ; toutes choses ne sont pas encore accomplies ; les Juifs n’ont pas encore subi toutes les conséquences de leur folie et de leur haine pour le Fils de Dieu. Ils ont encore à recevoir le châtiment le plus rigoureux, car bien que le passé ait été passablement amer, l’avenir leur réserve des choses bien plus terribles encore. Mais lorsque tout aura été accompli, ils commenceront la scène nouvelle ; ce ne sera plus la continuation de la génération qui a rejeté Christ, mais ce que l’Écriture appelle « la génération à venir », une nouvelle lignée du même Israël, des gens qui seront les enfants d’Abraham par la foi en Christ Jésus — enfants d’Abraham non pas en paroles seulement, mais par la participation à la même foi, au même esprit. Alors ce sera l’histoire, non pas de la chute, des manquements de l’homme, mais d’un peuple que l’Éternel bénit dans Sa grâce, quand ils reconnaîtront, avec allégresse, ce même Sauveur que leurs pères avaient crucifié et tué de leurs mains criminelles.

Ce chapitre s’occupe spécialement de Jérusalem, et des Juifs. Il forme dans l’histoire générale de Daniel une espèce d’épisode, mais qui n’est nullement sans liens avec le reste ; car, comme nous le verrons, les dernières scènes de l’histoire d’Israël le rattachent particulièrement à ces personnages qui doivent encore figurer contre Dieu et contre Son peuple, ainsi que nous l’avons lu dans les chapitres qui précèdent. Pour quiconque lit ce chapitre-ci avec intelligence, ce doit être évident que le sujet principal en est la destinée de Jérusalem, et la place future du peuple de Dieu. Or, cela intéressait profondément Daniel. Il aimait Israël, non pas seulement parce que c’était son peuple, mais parce que c’était le peuple de Dieu. Il ressemble à Moïse en ceci — que même lorsque l’état moral du peuple empêchait que Dieu parlât de lui comme Son peuple (Il pouvait s’occuper de lui dans les voies secrètes de Sa providence, mais je parle ici du fait de le reconnaître publiquement), Daniel continue toujours de mettre en avant, dans sa requête au Seigneur, qu’Israël est Son peuple. Il n’abandonne jamais cette vérité que Jérusalem était la cité de Dieu, et qu’Israël était Son peuple. L’ange pouvait bien dire : le peuple et la cité de Daniel — c’était parfaitement vrai ; mais Daniel tient toujours à cette vérité précieuse que la foi ne doit lâcher jamais — quels qu’ils soient, ils sont le peuple de Dieu. Mais pour cette raison même, ils peuvent être châtiés de plus en plus rudement, parce que rien n’amène davantage le châtiment sur une âme qui appartient à Dieu et qui est tombée dans le péché que le fait qu’elle appartient à Dieu. Il ne s’agit pas simplement de ce qui est bon pour l’enfant. Dieu agit pour Lui-même, et d’après Lui-même ; et c’est là le vrai pivot de toute notre bénédiction. Que gagnerions-nous à ce que Dieu travaillât simplement pour notre gloire ? Mais ce que nous avons devant nous comme sujet de nous glorifier, c’est l’espérance de la gloire de Dieu. Nous avons quelque chose d’autant meilleur, parce que ce sera Dieu nous bénissant d’une manière digne de Lui-même.

Daniel entrait fortement dans cette pensée. C’est le trait saillant de la foi ; car jamais la foi n’envisage misérablement une chose en rapport avec le monde, mais elle l’envisage en rapport avec Dieu. Il en est toujours ainsi. S’il s’agit de la paix, est-ce simplement que j’ai besoin de paix ? Sans doute que j’en ai besoin, comme un pauvre pécheur qui ai été toute ma vie en guerre avec Dieu. Mais combien c’est infiniment plus béni encore, lorsque nous arrivons à voir que c’est « la paix avec Dieu » ; non pas simplement avec notre cœur ou avec notre conscience, mais la paix avec Dieu ! C’est une paix qui tient en Sa présence. Il manifeste tout Son caractère, tout ce qu’Il est, en me la donnant et en l’établissant sur une base telle que Satan ne pourra jamais y toucher. Il s’agit de me délivrer, de briser la dureté même du péché ; et rien n’est aussi efficace pour cela que le fait que Dieu est venu au-devant de moi lorsque je ne méritais que la mort et le jugement éternel, et qu’Il a sacrifié Son Fils bien-aimé pour me donner une paix digne de Lui-même. Et Il a fait cela ; Il a donné cette paix, et toute la pratique chrétienne découle de l’assurance que j’ai trouvé cette bénédiction en Christ.

Nous trouvons donc ici Daniel prenant un profond intérêt à Israël, parce qu’il était le peuple de Dieu. En conséquence, il recherche dans la Parole de Dieu ce qu’Il a révélé concernant Son peuple. Cela se passait « en la première année de Darius, fils d’Assuérus, de la race des Mèdes ». Ce n’était point une communication nouvelle : « La première année de son règne, moi, Daniel, ayant entendu par les livres que le nombre des années duquel l’Éternel avait parlé au prophète Jérémie pour finir les désolations de Jérusalem était de soixante-dix ans ».

Outre qu’il était prophète, Daniel comprit qu’Israël devait être restauré dans sa terre, avant que la chose eût lieu. Il n’attendit pas qu’elle fût accomplie pour dire alors tout simplement : La prophétie est accomplie ; mais il comprit « par les livres », non point par les circonstances. Sans doute, il y avait les circonstances dans la chute de Babylone ; mais il comprit d’après ce que Dieu avait dit, et non pas simplement d’après ce que l’homme avait fait. C’est là la véritable manière de comprendre la prophétie. Et n’est-il pas remarquable que Dieu nous donne la vraie clé pour son intelligence, au moment où nous allons aborder une prophétie bien distincte, limitée presque exclusivement à l’étroite sphère d’Israël ? Daniel étudiait le prophète Jérémie ; et il y vit clairement que, une fois Babylone détruite, il serait permis à Israël de retourner. Et quel effet cela produisit-il sur son âme ? Il s’approche de Dieu. Il ne va pas vers ceux que la prophétie touchait de si près leur dire les bonnes nouvelles ; mais il s’approche de Dieu. C’est là un autre caractère de la foi ; elle tend toujours à tirer en la présence de Dieu celui qui, par elle, comprend la pensée de Dieu en quoi que ce soit. Il a communion avec Dieu au sujet de ce qu’il reçoit de Dieu, avant même de le faire connaître à ceux qui sont les objets de la bénédiction. Nous avons vu cela auparavant en Daniel, au chapitre 2. Ici, nous pouvons le remarquer, ce n’est point avec des actions de grâces qu’il s’adresse au Seigneur, mais avec des confessions. Nous comprendrions facilement que si le peuple d’Israël allait en captivité juste à ce moment, il dût ressentir cela comme un profond châtiment, et voulût s’approcher de Dieu pour reconnaître son péché et s’humilier sous la verge. Mais maintenant Dieu avait jugé l’oppresseur d’Israël, et Il était sur le point de délivrer Son peuple. Néanmoins Daniel s’approche, et que dit-il ? Ce n’est pas simplement de la délivrance du peuple qu’il parle à Dieu ; c’est une prière pleine de confession. Je désirerais, sur cela, présenter une remarque générale. Si l’étude de la prophétie ne nous donne pas un sentiment plus profond de la chute du peuple de Dieu sur la terre, je suis persuadé que nous perdons l’un des effets pratiques les plus importants que doit avoir son usage. C’est à l’absence de ce sentiment qu’il faut attribuer le peu de fruit que l’on tire en général de cette étude. On en fait une affaire de dates et de pays, de papes et de rois ; tandis que Dieu ne la donne point en vue d’exercer l’esprit et l’imagination de Son peuple, mais pour qu’elle soit l’expression de Sa propre pensée quant à sa condition morale ; de sorte que quels que soient les jugements et les épreuves qu’elle nous retrace, ils devraient être saisis par le cœur et compris comme étant la main de Dieu sur Son peuple à cause de ses péchés.

Tel fut l’effet qu’elle produisit sur Daniel. Il était l’un des prophètes les plus estimés — selon ce que disait le Seigneur Jésus Lui-même : « Daniel le prophète » ; et l’effet sur lui fut qu’il ne perdit jamais la portée morale des circonstances les plus simples de la prophétie. Il discernait le grand but de Dieu ; il entendait Sa voix s’adressant dans toutes ces communications au cœur de Son peuple : et ici il répand tout devant Dieu. Comme il avait appris que la délivrance d’Israël aurait lieu à l’occasion de la chute de Babylone, il tourne sa face vers le Seigneur Dieu, « cherchant à faire requête et supplication avec le jeûne, le sac et la cendre. Et je priai l’Éternel, mon Dieu ; je lui fis ma confession, et je dis : Hélas ! Seigneur, le Dieu fort, le grand, le terrible, qui gardes l’alliance et la miséricorde à ceux qui t’aiment et qui gardent tes commandements ; nous avons péché ; nous avons commis l’iniquité ; nous avons agi méchamment, etc. ». Je voudrais faire ici une autre remarque. S’il se trouvait quelqu’un dans Babylone à l’égard duquel sa conduite et l’état de son âme dussent faire supposer qu’il n’avait pas de confession de péché à faire, certainement c’était Daniel. C’était un homme saint et dévoué. Plus que cela : il avait été transporté de Jérusalem à un âge si tendre que ce n’était évidemment pas pour quelque chose à laquelle il aurait pris part que le coup terrible était tombé. Mais il n’en dit pas moins : « Nous avons péché, nous avons commis l’iniquité ». Bien plus, j’ose dire que plus vous êtes séparés du mal, plus vivement vous le sentez : précisément, comme une personne qui, arrivée à la lumière, s’aperçoit d’autant plus des ténèbres qu’elle vient de quitter. C’est ainsi que Daniel, dont l’âme était avec Dieu, et qui entrait dans les pensées de Dieu à l’égard de Son peuple en connaissant le grand amour de Dieu, et voyant ce que Dieu avait fait à l’égard d’Israël (car dans sa prière il n’oublie point cela), ne considère pas simplement les grandes choses que Dieu avait opérées pour le peuple, mais il arrête aussi son attention sur les jugements qu’Il lui avait infligés. Mais a-t-il pour cela dans sa pensée que Dieu n’aime pas Israël ? Bien au contraire, personne n’avait un sentiment plus profond du lien d’affection qui existait entre Dieu et Son peuple ; et c’est pour cette raison qu’il jugeait si bien et si profondément de l’état de ruine où se trouvait le peuple de Dieu. Il en mesurait le péché par la profondeur de l’amour de Dieu, et par la dégradation terrible dans laquelle il le voyait. Tout cela provenait de Dieu. Daniel n’imputait pas à la méchanceté des Babyloniens, ou au génie guerrier de Nebucadnetsar, les jugements qui avaient frappé les Juifs ; c’est Dieu qu’il voyait dans ces choses. Il reconnaît que la cause en est dans leur péché, dans leur iniquité extrême, et il attribue tout à cela. Dans sa prière, ce ne sont pas les petits imputant aux grands leurs malheurs, ou les grands aux petits, comme il arrive souvent parmi les hommes ; il n’allègue pas simplement l’ignorance et la méchanceté de quelques-uns, mais il les renferme tous dans sa confession — rois, sacrificateurs et peuple. Il n’y en avait pas un qui ne fût coupable. « Nous avons péché, nous avons commis l’iniquité ». Et c’est là un autre effet de l’étude de la prophétie quand elle est faite avec Dieu. Elle introduit toujours l’espérance que Dieu est en faveur de Son peuple, l’espérance relative au jour brillant et béni où le mal disparaîtra et où le bien sera établi par la puissance divine. Daniel se garde de l’oublier ; il met cette précieuse espérance comme une sorte de frontispice à ce chapitre. Les détails des soixante-dix semaines vous font voir la continuation du péché et la souffrance du peuple de Dieu ; mais auparavant, la fin, la bénédiction, est placée devant l’âme. Quelle bonté de la part de Dieu en cela ! Dieu saisit l’occasion de me donner, avant tout, la certitude de la bénédiction définitive, et ensuite Il déroule à mes yeux le pénible sentier qui y conduit.

Il n’est pas nécessaire d’aborder maintenant les pensées que suggère cette belle prière de Daniel. Je ferai pourtant remarquer une chose d’une grande importance pratique, savoir, que la prophétie vint de Dieu, comme une réponse à l’état d’âme dans lequel Daniel se trouvait. Il prit devant Dieu la position de quelqu’un qui confesse humblement ; il se fit l’organe du peuple, le représentant du peuple, en répandant devant Dieu les péchés dont le peuple était coupable. Peut-être n’y avait-il pas une autre âme qui le fît, certainement il n’y en avait pas beaucoup : il est si rare de trouver beaucoup d’âmes prenant réellement devant Dieu la place de la confession. Qu’il y en a peu aujourd’hui qui aient un sentiment juste de la ruine de l’Église de Dieu ! Combien peu qui sentent le déshonneur fait au Seigneur même par les fidèles ! À Babylone, ceux qui étaient les plus coupables le sentaient le moins ; tandis que celui qui était le plus exempt de mal, le répandait le plus sincèrement devant Dieu.

En réponse au sentiment profond et vrai qu’il a de l’état d’Israël, Dieu envoie la prophétie. L’âme qui se refuse à examiner des paroles telles que celles que nous avons ici, ne sait pas ce qu’elle perd en agissant de la sorte. Et partout où l’enfant de Dieu se prive de ce que Dieu communique relativement à l’avenir (je ne parle pas maintenant de la pure spéculation, qui est absolument sans valeur, mais bien des grandes leçons morales contenues dans la prophétie), il y a toujours faiblesse et défaut de capacité pour juger du présent.

Mais il y a une autre chose à signaler avant de passer aux soixante-dix semaines. Quoique Daniel confesse devant Dieu la grande et totale chute du peuple, et qu’il ait recours à Ses grandes compassions, néanmoins il ne s’appuie jamais sur les promesses qui furent données à Abraham. Il ne va point au-delà de ce qui fut dit à Moïse. Cela est intéressant et important à observer. C’est la véritable réponse à quiconque supposerait que le rétablissement d’Israël qui eut lieu à cette époque, était l’accomplissement des promesses abrahamiques. Daniel ne se plaça pas sur ce terrain. Il n’y eut rien alors qui ressemblât à la présence de Christ parmi Son peuple, comme son roi. Or, les promesses faites aux pères supposent la présence de Christ, parce que Christ seul est la semence d’Abraham dans le sens plein et propre du mot. Sans Lui, qu’étaient les promesses ? Aussi, avec une sagesse divine, Daniel fut-il conduit à prendre le véritable terrain. Quelle que fût la restauration qui allait s’effectuer alors, ce n’était pas la restauration complète ; et cette prophétie-ci nous amène à la bénédiction finale d’Israël, quand les soixante-dix semaines sont consommées. Mais le retour qui suivit la chute de Babylone n’était simplement que l’accomplissement de quelque chose de partiel et de conditionnel, et non l’accomplissement des promesses faites aux pères.

Cela est digne d’être remarqué. Les promesses qui furent faites alors étaient absolues, parce qu’elles reposaient sur Christ, qui, dans la pensée de Dieu, est la véritable semence, quoique Israël soit la semence selon la lettre. De sorte que, jusqu’à ce que Christ vînt, et que Son œuvre fût faite, la pleine restauration d’Israël ne pouvait point avoir lieu. Lorsque, aux jours de Moïse, Israël se plaça sur le principe de la loi, il l’enfreignit bientôt, et fut brisé. Avant même que la loi eût été mise entre leurs mains, sur les tables de pierre, les enfants d’Israël adoraient le veau d’or. La conséquence fut qu’à partir de ce temps, Moïse prit une place nouvelle — la place de médiateur. Il monte de nouveau sur la montagne, et plaide auprès de Dieu pour le peuple. Dieu ne voulait plus l’appeler Son peuple. En parlant d’eux à Moïse, il dit « ton peuple », et ne voulait pas les reconnaître comme siens. Moïse ne veut pas cependant lâcher Dieu, mais fait valoir auprès de Lui cette considération que quelque chose qu’ils aient pu commettre, ils sont « ton peuple », dit-il ; que je sois effacé, plutôt que de voir Israël perdre son héritage. C’était là précisément ce à quoi Dieu prenait plaisir — le reflet de Son propre amour pour le peuple. Il est possible que vous trouviez des défauts à quelqu’un que vous aimez ; mais vous n’aimeriez pas d’apprendre qu’une autre personne lui en trouve. Ainsi, Moïse, plaidant en faveur d’Israël, était ce qui allait au cœur de Dieu. Sans aucun doute, ils avaient péché d’un bien grand péché, et Moïse le sentait et le confessait ; mais il fait valoir en même temps qu’ils sont le peuple de Dieu.

Dieu continue, et donne occasion à Moïse de montrer toujours plus son cœur : Il place devant lui de grandes choses, offrant d’exterminer le peuple et de le faire devenir lui, Moïse, une grande nation. Non ! répond Moïse, j’aimerais mieux tout perdre que de les voir eux perdus. C’était la réponse de la grâce à la grâce qui était dans le cœur de Dieu en faveur de Son peuple. En conséquence, lorsque la loi fut donnée une seconde fois, Dieu ne la donna point de la même manière qu’auparavant ; mais l’Éternel proclama Son nom, comme le nom de Celui qui était abondant en gratuité et en vérité, tout en déclarant aussi qu’Il ne tiendrait pas le coupable pour innocent. En d’autres mots, la première fois, c’était purement la loi, purement la justice ; et la chose aboutit au culte du veau d’or, c’est-à-dire à l’injustice pure du côté du peuple ; en conséquence, ils auraient dû être détruits. Mais, sur l’intercession de Moïse, Dieu introduit un système mélangé, en partie la loi, et en partie la grâce.

C’est sur ce terrain que Daniel se place ici. Il fait valoir que, quoiqu’ils eussent violé la loi, Dieu avait fait connaître Son nom comme « abondant en gratuité et en vérité ». Daniel croit cela. Il ne remonte point aux promesses faites à Abraham ; sur ce principe la restauration eût été parfaite et définitive, tandis que celle-ci ne l’était point. De même aujourd’hui, prenez un homme qui rattache sa position devant Dieu en partie sur ce que Christ a fait pour lui et en partie sur ce qu’il fait pour Christ : le trouverez-vous jamais heureux ? Non, il ne l’est jamais, et ne saurait l’être. C’est sur ce principe-là que se trouvaient les Israélites, et en conséquence Daniel ne va point au-delà : Christ n’était pas encore venu. D’un autre côté, après la naissance de Christ, vous trouverez, si vous regardez au cantique de Zacharie (Luc 1) ou à celui des anges (Luc 2), que le terrain pris par les fidèles n’est point ce que Dieu avait déclaré à Moïse, mais les promesses qu’Il avait faites aux pères. Jusqu’au moment assigné de Dieu, Zacharie était resté muet, signe de la condition d’Israël ; mais maintenant que le précurseur est nommé, la veille de la venue de Christ, sa bouche est ouverte.

Avant d’aborder plus pleinement, selon que le Seigneur nous en rendra capables, la prophétie des soixante-dix semaines, je voudrais d’abord appeler votre attention sur ces paroles : « Or, comme je parlais encore, et faisais ma requête, et confessais mon péché, et le péché du peuple d’Israël ». Remarquez-le, toutes ses pensées sont relatives à Israël et à Jérusalem. La prophétie ne concerne point la chrétienté mais bien le peuple d’Israël : il n’y a pas moyen de la comprendre, à moins que nous retenions ferme cela. « Comme je parlais encore… et répandais ma supplication en présence de l’Éternel, mon Dieu, pour la montagne de la sainteté de mon Dieu ; comme donc je parlais encore dans ma prière, ce personnage, Gabriel, que j’avais vu en vision du commencement, volant promptement, me toucha, environ sur le temps de l’oblation du soir ». Ensuite, au verset 24, commence la prophétie. Elle se rapporte au peuple de Daniel — « sur ton peuple ». Elle parle d’une période spéciale qui était limitée en rapport avec l’entière délivrance d’Israël. « Il y a soixante-dix semaines déterminées sur ton peuple et sur ta sainte ville ». Chacun doit voir qu’il s’agit des Juifs et de Jérusalem. « …pour abolir l’infidélité, consumer le péché, faire propitiation pour l’iniquité ; pour amener la justice des siècles, pour mettre le sceau à la vision et à la prophétie, et pour oindre le saint des saints ». Du commencement à la fin, c’était une période qui était arrêtée dans la pensée de Dieu, et révélée à Daniel, touchant la destinée future de la ville et du peuple de Dieu ici-bas. Mais, me dira tout à coup quelqu’un alarmé peut-être, n’avons-nous donc rien à faire avec la « propitiation pour l’iniquité », et « la justice éternelle » ? Je réponds par cette question : De qui le verset parle-t-il ? Vous trouverez ailleurs d’autres passages qui révèlent notre intérêt dans l’œuvre qui efface le péché, et dans la justice laquelle nous devenons en Christ. Mais dans la lecture de la Parole de Dieu, nous devons nous attacher fortement à cette règle d’or — de ne jamais faire violence à l’Écriture pour qu’elle se rapporte à nous ou à d’autres. Quand une personne est convertie, mais n’a pas encore la paix, aussitôt qu’elle voit quelque chose concernant « l’abolition des péchés », elle s’en fait l’application. Sentant son besoin, elle saisit, comme un homme qui se noie, des déclarations qui ne peuvent porter son fardeau, ou du moins qui n’ont pas été faites pour elle. Si elle allait aux paroles qui annoncent la grâce de Dieu envers nous, pauvres pécheurs d’entre les Gentils, au lieu de faire une perte, grand serait son gain ; elle aurait des passages bien plus précis pour satisfaire son besoin de paix et d’assurance ; et si Satan travaillait, elle n’éprouverait ni faiblesse, ni frayeur, ni incertitude. Tandis que si elle s’empare de passages qui s’appliquent aux Juifs, Satan peut l’attaquer sur le fondement de sa confiance, de sorte qu’elle soit obligée de dire : Ceci ne me concerne pas du tout d’une manière littérale et certaine. Les « soixante-dix semaines sont déterminées sur ton peuple et sur ta sainte ville ». Mais moi je n’en fais pas partie. Il est important d’avoir l’intelligence de l’Écriture, et de bien voir de quoi Dieu parle. Si on s’était mis cela dans l’esprit, la plus grande partie de la controverse qu’on a soulevée sur ce passage n’aurait jamais eu lieu. On était désireux et pressé d’introduire là quelque chose qui nous concernât comme Gentils ou chrétiens ; tandis que l’attitude du prophète, les circonstances des personnes, et les termes de la prophétie elle-même, excluent toute autre pensée que celle des Juifs et de leur ville. Il nous faut chercher ailleurs ce qui est relatif aux Gentils. Permettez-moi cependant de faire remarquer que l’abolition des péchés pour cette cité et pour ce peuple repose tout à fait sur le même fondement que l’abolition de nos propres péchés. C’est ainsi que l’apôtre Jean nous déclare que Jésus mourut, « non pas seulement pour cette nation, mais aussi pour rassembler en un les enfants de Dieu dispersés » (Jean 11, 52) Ces paroles nous révèlent deux desseins dans la mort de Christ. La prophétie qui nous occupe ne présente que le premier, savoir : que Jésus est mort pour cette nation — la nation juive ; mais par ce même acte de Sa mort, Il pourvut non pas seulement au salut que Dieu avait en vue en notre faveur, mais aussi au rassemblement ensemble « des enfants de Dieu qui étaient dispersés ».

De sorte que si nous prenons la Bible telle qu’elle est, sans nous trop préoccuper s’il est question de nous ici ou là, au lieu de rien perdre, nous gagnerons toujours quant à l’étendue et à la profondeur de la bénédiction, et par-dessus tout, quant à la manière claire et ferme dont nous la retiendrons après l’avoir saisie ; nous aurons le sentiment que nous ne nous sommes pas emparés de la part d’un autre peuple, et que nous ne réclamons pas des biens sur des titres susceptibles d’être contestés ; mais que ce que nous possédons est bien ce que Dieu nous a librement et certainement donné. Tandis que ce ne sera jamais le cas, si je m’empare des prophéties relatives à Israël et que je fonde sur elles mon droit à la bénédiction ; elles ne sont ni l’évangile pour les pécheurs, ni la révélation de la vérité touchant l’Église.

Voilà donc la portée propre des derniers versets de notre chapitre. Les détails sur les semaines viennent après le premier énoncé général. « Il y a, dit Gabriel, soixante-dix semaines déterminées sur ton peuple et sur ta sainte ville, pour abolir l’infidélité, consumer le péché, faire propitiation pour l’iniquité ; pour amener la justice des siècles, pour mettre le sceau à la vision et à la prophétie, et pour oindre le saint des saints ». Puis, au verset 25, nous trouvons le premier détail particulier, après que le point de départ a été soigneusement fixé : « Tu sauras donc et tu entendras que depuis la sortie de la parole, portant qu’on s’en retourne et qu’on rebâtisse Jérusalem, jusqu’au Christ le conducteur, il y aura sept semaines et soixante-deux semaines ». Or, dans le livre d’Esdras, nous avons un ordre émané du roi Artaxerxès, appelé dans les historiens profanes Artaxerxès Longue-main, un des monarques de l’empire des Perses. Les premières patentes furent données à Esdras, le scribe, « la septième année du roi Artaxerxès ». D’autres patentes furent données à Néhémie, la vingtième année du règne du même monarque. Il est important pour nous de décider quel est de ces deux ordres celui auquel Daniel fait allusion. Le premier se trouve rapporté en Esdras 7 ; le second en Néhémie 2. Un examen attentif de l’un et de l’autre nous fera voir quel est celui que la prophétie signale. Quelques-uns, excellents d’ailleurs, l’ont interprété d’une manière qui diffère de ce que je crois être le véritable sens. Mais c’est à l’Écriture seule qu’il appartient de décider les questions qui naissent de l’Écriture ; si on recourt à des éléments étrangers, on ne recueillera que perplexité et incertitude. Remarquez qu’il ne s’agit pas ici simplement d’un décret général concernant les Juifs, comme celui de Cyrus, leur permettant de retourner, mais d’un décret spécial qui rétablit leur état politique. Or, en quoi les deux décrets du règne du roi Artaxerxès diffèrent-ils l’un de l’autre ? Celui qui fut donné à Esdras avait principalement pour objet la reconstruction du temple ; l’autre, que Néhémie obtint, se rapportait à la ville. Et qu’est-ce que nous lisons ici ? « Tu sauras donc et tu entendras que depuis la sortie de la parole, portant qu’on s’en retourne et qu’on rebâtisse Jérusalem ». Évidemment c’est de la ville qu’il est question ; et s’il en est ainsi, nous voyons lequel des deux concerne la ville. Il ne saurait y avoir le plus léger doute, c’était le second, et non le premier ; c’était la commission délivrée à Néhémie, la vingtième année d’Artaxerxès, et non celle qu’avait reçue Esdras, treize années auparavant. Que l’on compare avec Néhémie, et l’on en verra la preuve manifeste.

Ce qui a conduit certaines personnes à prendre le premier de ces deux décrets pour celui dont il s’agit dans notre chapitre, c’est l’idée que les soixante-dix semaines devaient se terminer à la venue du Messie. Mais cela n’est dit en aucune manière. Le verset 24 renferme beaucoup plus que la venue du Messie : « Il y a soixante-dix semaines déterminées… pour consumer le péché, faire propitiation pour l’iniquité ». Dans ces paroles, vous avez au moins l’œuvre de Christ, qui, nous le savons, impliquait Ses souffrances et Sa mort. Mais il y a plus que cela ; voici comme le passage continue : « pour amener la justice éternelle, mettre le sceau à la vision et à la prophétie, et pour oindre le saint des saints », expressions par laquelle tout Israélite entendait le sanctuaire de Dieu. Il est évident que tout cela ne s’est pas accompli à la venue ni même à la mort de Messie. Car quoique le fondement de la bénédiction d’Israël fût posé dans Son sang, cependant Israël n’était pas encore réellement introduit dans la bénédiction ; et ces soixante-dix semaines supposent qu’il sera pleinement béni à leur expiration. Nous apprenons de là de quelle grande importance il est de faire attention à la prophétie elle-même ; de ne pas regarder simplement aux événements qui se passent, mais de les interpréter par la prophétie. « Depuis la sortie de la parole portant qu’on s’en retourne et qu’on rebâtisse Jérusalem, jusqu’au Messie le conducteur (sans préciser quel temps), il y aura » — non pas soixante-dix semaines — mais « sept semaines et soixante-deux semaines » ; c’est-à-dire soixante-neuf semaines. Ces paroles m’apprennent tout d’abord que, pour une raison que le commencement de la prophétie n’explique pas, des soixante-dix semaines, soixante-neuf sont séparées de la dernière. La chaîne est rompue : une semaine est mise à part des autres. Il est déclaré que depuis la sortie de l’ordre portant qu’on s’en retourne et qu’on rebâtisse Jérusalem (fait qui devient ici le point de départ, ou le temps depuis lequel nous commençons à supputer les soixante-dix semaines) il y a sept semaines et soixante-deux semaines : périodes quelque peu distinctes, mais faisant en tout soixante-neuf semaines, jusqu’au Christ le conducteur. Évidemment c’est un fait bien remarquable que nous avons là. Mais, pourquoi, pouvons-nous demander, les sept semaines sont-elles séparées des soixante-deux semaines ? Les paroles suivantes nous le font voir : « Et les places et la brèche seront rebâties, et cela dans un temps d’angoisse ». Les sept semaines devaient, je pense, être employées à la reconstruction de la ville de Jérusalem. Dans l’intervalle de sept semaines, ou quarante-neuf ans (car je suppose que personne ne mettra en doute que ce sont des semaines d’années), depuis le point de départ, la construction commencée serait finie. Les places devaient être rebâties, ainsi que les brèches de la muraille, et cela dans un temps d’angoisse. Or, ces temps de difficulté et de détresse nous sont racontés dans le livre de Néhémie, où nous trouvons la date la plus récente de l’histoire de l’Ancien Testament. Prenant ensuite l’autre période, il nous est dit qu’à l’expiration non pas seulement des sept semaines, mais des soixante-deux semaines : « le Christ sera retranché ».

Avant de poursuivre, je désire relever quelques petites inexactitudes de traduction. « Après les soixante-deux semaines », c’est-à-dire après la seconde période, ajoutée aux sept semaines de la première employées à bâtir la ville de Jérusalem — « le Christ sera retranché, mais non pas pour soi ». La vraie signification du terme original rendu par cette dernière expression est, personne ne peut en douter, « et n’aura rien ». La note marginale de la version anglaise, plus exacte que le texte, le rend de cette manière. L’idée est que le Messie, au lieu d’être reçu par Son peuple et d’introduire la bénédiction promise à la fin des soixante-dix semaines, serait retranché à la fin des soixante-neuf semaines, et n’aurait rien. Ces paroles donnent à entendre l’entière réjection du Messie par Son peuple. Et en voici la conséquence. La clé nous est maintenant donnée, et nous avons l’explication de la difficulté signalée au commencement, quant à savoir pourquoi les soixante-neuf semaines étaient séparées de la soixante-dixième. La mort de Christ rompit la chaîne, et brisa les relations du peuple d’Israël avec Dieu. En conséquence, Israël ayant rejeté son Messie, la dernière semaine est mise de côté pour un temps. Cette semaine-là finit par la pleine bénédiction. Mais Israël se trouve rejeté à cause de son péché contre son Messie. Et voilà pourquoi nous lisons dans ce qui vient après : « Puis le peuple du conducteur qui viendra détruira la ville et le sanctuaire ; et la fin en sera avec débordement, et les désolations sont déterminées jusqu’à la fin de la guerre ». Il avait dit auparavant qu’il y avait soixante-dix semaines déterminées pour consumer le péché et amener la justice éternelle, etc. ; c’est-à-dire qu’à la fin de cette période désignée, la pleine bénédiction serait introduite. Tandis que nous apprenons maintenant que bien loin que les Juifs arrivent à la bénédiction, ils ont rejeté leur Messie. Il n’a rien ; et la conséquence en est que la ville et le sanctuaire ne sont pas bénis, mais qu’au contraire, « le peuple du conducteur qui viendra détruira la ville et le sanctuaire, etc. ». Il n’y aura sur le peuple juif que guerres et désolation. Le cours des soixante-dix semaines est interrompu à la mort de Christ, et les événements qui sont ensuite rapportés n’appartiennent en rien à leur accomplissement. On ne saurait nier qu’il s’est écoulé une longue période entre la mort de Christ et la prise de Jérusalem. Il y a jusqu’à Christ soixante-neuf semaines, et ensuite se présentent des événements que la prophétie révèle d’une façon bien claire, mais elle révèle avec non moins de clarté qu’ils sont postérieurs aux soixante-neuf semaines, et antérieurs à la soixante-dixième. Nous avons là un autre peuple appartenant à un conducteur tout à fait différent du Messie déjà rejeté, et ce peuple vient et détruit la ville et le sanctuaire. Ce furent les Romains qui vinrent, malgré le terrible expédient de Caïphe, ou plutôt à cause même de lui. Ils vinrent, et détruisirent la ville et le sanctuaire. Mais par là cette prophétie reçut son accomplissement. Le Messie était retranché, et les Romains, que les Juifs avaient si ardemment désiré se rendre propices, les balayèrent de la face de la terre, et jusqu’au temps actuel il n’y a eu que misère dans leur pays.

À partir de là, Jérusalem devait être foulée par les Gentils, jusqu’à ce que les temps des Gentils fussent accomplis. C’est une période qui dure encore. Depuis lors, Jérusalem n’a fait que changer de maître. Nous avons été témoins, en nos jours, d’une guerre entreprise au sujet de cette même ville et de ce même sanctuaire, et nul ne saurait dire qu’il n’y en aura pas bientôt une autre, car le but de cette guerre n’a nullement été rempli et la question n’est pas encore vidée. Les mêmes éléments de lutte et de combustion subsistent encore : c’est une affaire toujours pendante. Tel que fut Jonas dans le navire, tel Israël sera bientôt pour les Gentils. Il n’y aura point de repos pour eux — rien que des tempêtes — s’ils se mêlent des affaires de ce peuple avec lequel le Seigneur a un procès. Les Juifs sont dans un état misérable ; ils souffrent les conséquences de leur propre péché. Mais ces Gentils qui se mêleront de cette ville et de ce sanctuaire que Dieu destine encore à être purifiés, y trouveront leur ruine. Si nous ne sommes pas encore arrivés à cette période de bénédiction, il faut reconnaître que la soixante-dixième est encore à venir ; car dès qu’elle est accomplie, c’est la pleine bénédiction pour Israël et Jérusalem. Or, il est bien manifeste qu’une bénédiction semblable n’est pas réalisée ; et en conséquence, nous pouvons être parfaitement certains que la dernière des soixante-dix semaines reste à recevoir son accomplissement. Au reste, la prophétie elle-même doit nous préparer à cela. Une chaîne régulière lie les semaines l’une à l’autre jusqu’à la fin de la soixante-neuvième ; mais alors survient une grande lacune. La mort de Christ rompit le lien de relation entre Dieu et Son peuple, et désormais il n’y eut plus entre eux de lien vivant. Les Juifs rejetèrent leur Messie, et par là perdirent pour un temps leur position nationale. Un déluge de maux éclata sur eux. « Le roi envoya ses troupes, et fit périr ces meurtriers, et brûla leur ville ». La dernière partie du verset qui nous occupe (v. 26) nous fait voir que la désolation qui a fondu sur leur ville et sur leur race continue d’être leur lot, et cela postérieurement à la croix du Messie. Et comme personne ne peut prétendre que rien de semblable soit arrivé durant les sept années qui suivirent la crucifixion, il faut nécessairement admettre, entre la soixante-neuvième et la soixante-dixième semaines, un intervalle plus ou moins considérable.

Remarquez l’exactitude de l’Écriture. Il n’est point dit que le conducteur qui viendra détruira la ville et le sanctuaire, mais que son peuple le ferait. Le Messie, le conducteur, est déjà venu et a été retranché. Maintenant l’Écriture nous parle là d’un autre conducteur à venir, un conducteur romain ; car tout le monde sait que ce sont les Romains qui vinrent et s’emparèrent à la fois du pays et de la nation des Juifs. L’Écriture dit simplement : « Le peuple du conducteur qui viendra », ce qui explique que le peuple viendrait avant un certain conducteur qui était encore dans l’avenir. Je regarde cela comme fort important. Sans doute qu’il y avait un prince qui conduisait les Romains à la conquête de Jérusalem ; mais Titus n’est point le personnage auquel il est fait allusion ici. Tandis que rien n’est plus simple, si le peuple devait venir d’abord et si le conducteur en question devait suivre à quelque époque future. « La fin en sera avec débordement, et les désolations sont déterminées jusqu’à la fin de la guerre ». Il devait y avoir une longue période d’inimitié et de désolation. C’est là précisément que les Juifs en sont aujourd’hui. Ils ont été chassés de cette ville et de ce sanctuaire, et depuis ils ne les ont jamais possédés. Il est vrai qu’ils se sont fait une position remarquable dans la plupart des contrées de la terre ; leur influence croît dans toutes les cours et dans tous les cabinets du monde ; mais ils n’ont jamais obtenu le plus petit pouvoir dans leur propre pays et dans leur propre ville — ils y sont les plus proscrits de tous ; ce sont là les désolations qui continuent.

Au verset 27 arrive la scène finale : « Et il confirmera une alliance à plusieurs pour une semaine ». Les versions ordinaires disent à tort « l’alliance ». L’article la n’est point dans l’original, et ce petit mot en fait égarer plusieurs. C’est une alliance qu’il faut lire, ou plutôt, c’est simplement l’idée générale d’alliance que le texte original suggère. C’est le sens de « traiter alliance, faire alliance ». Si on lit « l’alliance », le lecteur est aussitôt porté à en conclure que par l’expression « le conducteur », il faut entendre le Messie, et qu’Il allait confirmer Son alliance. Mais voici comment le passage est conçu : « Il confirmera alliance (ou une alliance) avec les plusieurs pour une semaine ». Sans doute que le Messie a apporté le sang de la nouvelle alliance ; mais est-ce là ce que le passage signifie ? Il suppose que les désolations continuent durant toute cette période, après quoi vient la fin du siècle qui comprend la soixante-dixième semaine, ou qui arrive pendant son cours. La mort de Christ a eu lieu depuis longtemps déjà ; la destruction de Jérusalem aussi, trente ou quarante ans après. Ensuite a suivi une longue période de désolations et de guerres en rapport avec Jérusalem. Il est fait mention de deux personnes différentes. Au verset 25, il s’agit du Messie le conducteur ; mais Il est venu et a été retranché. Au verset 26, nous lisons : « Le peuple du conducteur qui viendra ». Et c’est à ce futur chef romain que le verset 27 fait allusion. C’est lui qui confirmera alliance avec plusieurs ou plutôt avec « les plusieurs », c’est-à-dire la masse ou la majorité. Le résidu ne participera en rien à cette alliance. Observez que la soixante-dixième semaine paraît ici pour la première fois. « Et il confirmera alliance avec la masse pour une semaine ». Or, en supposant que c’est Christ que ces paroles désignent, je demande quel sens elles ont ici ? Une semaine ne peut signifier qu’une période de sept ans. La nouvelle alliance a-t-elle jamais été faite pour sept ans ? Une telle pensée n’a pas de sens. N’est-il pas évident que l’idée d’entendre par là l’alliance apportée par Christ est empreinte d’absurdité ? Car l’alliance que le sang de Christ a cimentée est une alliance éternelle, tandis que celle dont il est question ici n’est conclue que pour sept ans. À quelle époque et de quelle manière Christ a-t-Il fait une alliance pour sept ans ? « Et il confirmera alliance avec les plusieurs pour une semaine, et à la moitié de la semaine, il fera cesser le sacrifice et l’oblation ». Je sais que plusieurs appliquent cela à la mort de Christ. Mais nous avons eu la mort de Christ depuis longtemps — avant que la soixante-dixième semaine commençât ; ensuite toutes les désolations d’Israël arrivant après cette mort, et enfin, subséquemment à tout, la venue d’un autre chef qui confirme une alliance pour une semaine. C’est lui, et non pas Christ, qui fait alliance avec les Juifs pour sept années. Mais au milieu de cette période, il met fin à leur culte. Ils ont rétabli alors le sacrifice et l’oblation et ce personnage les fait cesser.

Mais ne trouvons-nous pas ailleurs d’autre lumière sur le sujet dont il est question ici ? Ce passage est-il seul à nous parler d’une alliance semblable, et de l’abolition soudaine, par un prince étranger, des rites et des cérémonies juives ? Pour ce qui concerne l’alliance, voici ce que nous lisons en Ésaïe 28, 15 : « Car vous avez dit : Nous avons fait accord avec la mort, et nous avons intelligence avec le sépulcre ; quand le fléau débordé traversera, il ne viendra point sur nous ». Et au verset 18 : « Et votre accord avec la mort sera aboli, et votre intelligence avec le sépulcre ne tiendra point ; quand le fléau débordé traversera, vous en serez foulés ». Je ne doute pas que c’est là l’alliance que signale Daniel. Une autre chose vient confirmer ce sens ; la voici : ce prince romain ayant fait avec le peuple juif une alliance impie, et ensuite ayant interrompu les sacrifices et introduit l’idolâtrie — ou ayant réalisé ce que l’Écriture appelle « l’abomination de la désolation » — il mettra fin aux rites juifs, et établira une idole, et se fera adorer là lui-même. Lorsque l’idolâtrie est ouvertement en rapport avec le sanctuaire, Dieu envoie sur Son peuple un fléau terrible. Les Juifs avaient espéré d’y échapper en faisant une alliance avec ce prince ; ils pensaient follement, comme le dit Ésaïe, être par ce moyen délivrés du fléau débordant. Ce dernier est le personnage qui devient le grand chef des puissances orientales du monde liguées contre les puissances occidentales. La masse des Juifs fera alliance avec le grand prince de l’Occident qui sera, à cette époque, leur ami de nom. Mais à l’expiration de la moitié du terme fixé, ce même personnage introduira l’idolâtrie et la leur imposera de force. C’est alors que viendra la dernière catastrophe d’Israël.

L’interruption des cérémonies juives ne repose pas sur ce passage seulement. En Daniel 7, la petite corne est l’empereur de l’Occident, ou « le conducteur qui viendra ». Il est dit de ce personnage qu’« il proférera des paroles contre le Souverain, et détruira les saints du Souverain, et pensera de pouvoir changer les temps et la loi ; et ils seront livrés en sa main jusqu’à un temps, et des temps, et une moitié de temps ». Remarquez l’analogie entre cette déclaration et celle que nous avons ici. Que faut-il entendre par « un temps, et des temps, et une moitié de temps » ? Trois ans et demi, pour sûr. Et que faut-il entendre par la moitié d’une semaine ? Précisément la même période. Au milieu de la durée pour laquelle l’alliance avait été faite avec Israël, ce prince arrêtera leur culte, et prendra en ses mains toutes les cérémonies juives. Il ne leur permettra pas non plus d’observer leurs fêtes. « Ils seront livrés en sa main », c’est-à-dire, les temps et les lois des Juifs. Dieu ne reconnaîtra pas le culte juif d’alors, et en conséquence Il ne les préservera pas en cette occasion. Il laissera poursuivre son chemin à cet homme qui, après avoir fait, comme ami, une alliance avec Israël, l’enfreindra et substituera l’idolâtrie au culte de ce peuple. Alors viendra le fléau débordant. « Au milieu de la semaine, il fera cesser le sacrifice et l’oblation ».

Mais je dois recourir à une manière plus exacte de rendre les paroles qui suivent. Les traducteurs se sont montrés fort incertains de leur véritable signification ; mais en voici la traduction littérale : « Puis, à cause de (ou en raison de) l’aile des abominations, un désolateur ». C’est-à-dire à cause qu’il aura pris les idoles sous sa protection, il y aura un désolateur, savoir le fléau débordant, ou l’Assyrien. Le conducteur qui viendra ne désole point Jérusalem. En ce temps-là, il a fait alliance avec les Juifs, et quoiqu’il rompe son alliance, cependant, par cela même qu’il est leur chef et leur protecteur, et que son favori, le faux prophète, aura son siège parmi eux comme le grand archiprêtre de ce jour, il établit, avec l’aide de ce faux prophète, le culte de sa statue dans le temple de Dieu. En conséquence de cela, le roi du Nord fondra comme un désolateur.

Les Juifs justes et fidèles auront donc deux ennemis en ce temps-là. Le désolateur, ou l’Assyrien, sera l’ennemi du dehors. L’ennemi du dedans sera l’Antichrist, ou leur roi, qui fera selon sa volonté, qui les corrompra en rapport avec le conducteur romain. De sorte que voici le véritable sens de ce passage : « À cause de la protection des abominations, (il y aura) un désolateur, même jusqu’à ce que la consomption déterminée ait fondu sur le désolé ». — « Le désolé » signifie Jérusalem. Toute la consomption, ou ce que Dieu a décrété contre les Juifs, doit avoir son cours. « Cette génération ne passera point que toutes ces choses ne soient arrivées ». Ce seront les derniers représentants de la portion d’Israël qui a rejeté Christ. Dieu fera venir sur eux tous les jugements. Ils seront emportés, et alors il ne restera que la semence sainte, le résidu fidèle, dont Dieu fera le grand noyau de la bénédiction pour tout le monde sous le règne du Seigneur Jésus.