Livre:Études sur la Parole — Néhémie

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destinées à aider le chrétien dans la lecture du Saint LivreJ.N. Darby

Chapitres 1-7. — Le livre de Néhémie n’exige que peu de remarques ; mais il est important d’en établir la portée. C’est un chaînon nécessaire dans l’histoire des voies de Dieu, dans le récit de Sa patience et de Sa bonté envers Jérusalem qu’Il avait élue.

Dans le livre d’Esdras, nous avons vu le temple rebâti et l’autorité de la loi rétablie au milieu du peuple, séparé de nouveau des Gentils et mis à part pour Dieu. Dans celui de Néhémie, nous assistons à la reconstruction des murailles de Jérusalem, et au rétablissement de ce que l’on pouvait appeler l’état civil du peuple, mais dans des circonstances qui constatent définitivement son assujettissement aux Gentils.

Par la grâce, la foi avait rétabli l’autel, et les Gentils n’y avaient aucune part, sinon en service volontaire ; mais, pour la reconstruction de la ville, c’est le gouverneur établi par les Gentils qui a le rôle dominant, Dieu ayant touché le cœur de ces nations et les ayant disposées à favoriser Son peuple. On voit chez Néhémie lui-même un cœur touché de la misère de son peuple, signe précieux de la grâce de Dieu ; et Celui qui avait produit ce sentiment, dispose le roi à accorder à Néhémie tout ce qu’il avait à cœur pour le bien du peuple et de Jérusalem. On voit aussi chez Néhémie un cœur qui se tourne habituellement vers Dieu, qui cherche en Lui sa force, et surmonte ainsi les plus grandes difficultés.

Le temps où Néhémie a travaillé au bien de son peuple n’a pas été une de ces phases brillantes qui réveillent, s’il y a de la foi, l’énergie même de l’homme et lui prêtent leur éclat. C’était un temps qui exigeait la persévérance qui se puise dans un intérêt profond pour le peuple de Dieu, parce qu’il est Son peuple ; persévérance qui, pour cette raison même, poursuit son objet à travers le mépris que subit une œuvre si insignifiante en apparence, mais qui n’en est pas moins l’œuvre de Dieu ; persévérance qui poursuit cet objet à travers la haine et l’opposition des ennemis et le découragement de ceux qui coopèrent à ce travail (4, 8, 10, 11) ; persévérance enfin, qui, se livrant entièrement à l’œuvre, déjoue toutes les intrigues des ennemis et évite tous les pièges, Dieu prenant soin de ceux qui se confient en Lui.

C’est aussi un beau côté du caractère de Néhémie que, tout grand seigneur qu’il fût, tous les détails du service et tout ce qui tenait à la marche intègre du peuple de Dieu, étaient si près de son cœur.

Toutefois, au milieu même de toute cette fidélité, on sent l’influence de la puissance gentile qui contrôle tout l’état de choses. L’arrivée de Néhémie, sa conduite même, sont empreintes de cette influence. Ce n’était pas uniquement la foi qui agissait, mais aussi une puissance protectrice (comp. Esdr. 8, 22 ; Néh. 2, 7-9). Néanmoins, la séparation de tout ce qui n’était pas juif est maintenue avec soin (2, 20 ; 7, 65 ; 9, 2 ; 10, 30 ; 13, 1-3, 29, 30).

Cette histoire nous montre d’abord comment, lorsque Dieu agit, la foi imprime son caractère sur tous ceux qui l’entourent. Les Juifs, qui avaient laissé Jérusalem si longtemps déserte, sont tout disposés à se remettre à l’œuvre. Juda, pourtant, se décourage en présence des difficultés. C’est alors que nous voyons la persévérance de la vraie foi, lorsque l’œuvre est de Dieu, quelque pauvre apparence qu’elle ait. Tout le cœur y est, parce qu’elle est de Lui. Encouragé par l’énergie de Néhémie, le peuple est prêt à travailler et à combattre en même temps.

Remarquons que, dans les temps difficiles, la foi se montre non dans la magnificence du résultat, mais dans l’amour pour l’œuvre de Dieu, quelque petite qu’elle soit, et dans la persévérance qu’on y apporte à travers toutes les difficultés attachées à cet état de faiblesse ; parce que, ce dont la foi s’occupe, c’est la cité de Dieu et l’œuvre de Dieu ; et ces choses-là ont toujours le même prix, quelles que soient les circonstances dans lesquelles on les trouve.

Dieu bénit le travail du fidèle Néhémie, et Jérusalem est de nouveau entourée de murs ; état de choses moins touchant que celui où la cité de Dieu était défendue par l’autel de Dieu qui était le témoin de Sa présence et de la foi de ceux qui l’avaient dressé ; mais cet état de choses prouvait aussi la fidélité et la bonté du Dieu qui, lorsqu’il s’agissait même d’un rétablissement extérieur, ne se désistait en rien du jugement prononcé sur Son peuple et sur Sa ville. Celui qui en rétablissait les murs n’était que le lieutenant d’un roi étranger ; or c’était la sûreté du peuple, ce que la droiture de cœur exigeait de lui, que de le reconnaître ; et c’est ce qui a lieu (9, 37). Toutefois, Dieu les bénit. Néhémie prend connaissance du dénombrement du peuple selon ses généalogies, se servant du registre dressé au premier retour de la captivité, à une époque déjà bien éloignée. Ainsi, Israël est rétabli dans ses villes.

Chapitres 8-10. — Par les soins d’Esdras et de Néhémie, la loi reprend son autorité, et cela sur la demande même du peuple ; car Dieu avait disposé leurs cœurs. Aussi Dieu les avait-il rassemblés le premier jour du septième mois. C’était vraiment la trompette de Dieu, dont le peuple ne se rendait pas compte, qui le rassemblait lors de cette nouvelle lune que la grâce faisait luire de nouveau, quels que fussent les nuages qui en dérobaient la faible lumière. Le peuple a le cœur touché par le témoignage de la loi, et pleure. Mais Néhémie et Esdras les engagent à se réjouir, car cette journée était sainte. Sans doute, ces hommes de Dieu avaient raison. Puisque Dieu rétablissait Son peuple, il convenait que son peuple s’en réjouît et rendît grâces.

Le second jour, en continuant à s’enquérir du saint livre, ils trouvent qu’Israël devait se réjouir le quinzième jour de ce même mois. Lorsque l’on sort d’une période de châtiment et que l’Assemblée se retrouve devant Dieu, il arrive souvent que l’on se souvient de commandements, longtemps oubliés et perdus en des jours en apparence meilleurs pour le peuple de Dieu, et que l’on retrouve, avec eux, des bénédictions qui en accompagnent l’observation. Depuis les jours de Josué, les enfants d’Israël n’avaient pas suivi ces préceptes de la loi. Quelle leçon ! Cette fête des tabernacles est célébrée avec une très grande joie[1], touchante expression de l’intérêt que Dieu mettait à signaler le retour de Son peuple ; retour partiel, il est vrai, et bientôt assombri (et même l’espérance à laquelle il donnait lieu a été détruite de fond en comble par le rejet du Messie qui devait en être la couronne), mais retour précieux, comme prémices en grâce de ce rétablissement qui accompagnera le retour du cœur d’Israël à Christ, et se manifestera lorsque le peuple dira : « Béni soit Celui qui vient au nom du Seigneur ! ». La joie était sincère et réelle ; mais tout était imparfait. Le dixième jour n’avait pas son antitype. L’humiliation d’Israël ne se rapportait pas encore à cette mort qui mettait en même temps le comble à leur iniquité et en faisait l’expiation. La joie était bien fondée, mais n’était encore que temporaire.

Au vingt-quatrième jour, le peuple s’assemble pour s’humilier d’une manière qui convenait à sa position, et il se sépare de tous les étrangers. En commençant par la bénédiction promise à Abraham, ils racontent tous les témoignages de la grâce de Dieu dont Israël avait été l’objet, les infidélités dont il s’était par la suite rendu coupable, et, expression vraie de la repentance du cœur, ils reconnaissent leur état sans se le déguiser (9, 36, 37) ; et ils s’engagent à obéir à la loi (chap. 10), à se séparer complètement d’avec les peuples du pays, et à remplir fidèlement ce qu’exige le service de la maison de Dieu.

Tout ceci donne à leur position un caractère très net. Reconnaissant la promesse faite à Abraham, et l’introduction du peuple en Canaan en vertu de cette promesse, ils se replacent sous l’obligation de la loi, tout en confessant que la bonté de Dieu les avait épargnés. Ils ne voient pas plus loin qu’une restauration conditionnelle et mosaïque. Ni le Messie, ni la nouvelle alliance, n’entrent en ligne de compte comme fondement de leur joie ou de leur espérance. Ils sont et demeurent esclaves des nations.

C’est dans cette condition qu’Israël est resté jusqu’à ce que, par la bonté souveraine de Dieu, le Messie lui eût été présenté. Le Messie aurait pu les faire sortir de cette position, et les rassembler sous ses ailes ; mais ils n’ont pas voulu.

Chapitres 11-13. — Cette position est expressément formulée dans le livre de Néhémie. C’est le commandement du roi qui pourvoit à l’entretien des chantres. Un Juif est commissaire du roi pour tout ce qui concernait le peuple (11, 23, 24).

Nous avons déjà vu que la joie était la part du peuple ; une joie qui reconnaissait Dieu, car Dieu avait gardé le peuple et l’avait béni. Mais les chefs du peuple étaient aussitôt retombés dans l’infidélité ; et, pendant l’absence de Néhémie, les chambres du temple, où l’on gardait précédemment les offrandes, avaient été évacuées pour faire place à Tobija, ce subtil et persévérant ennemi du peuple de Dieu. Mais, à la dédicace de la muraille de Jérusalem, la joie du peuple et la fidélité de Néhémie le ramènent à la Parole écrite, et Israël se sépare de nouveau de tout le peuple mélangé (13, 3). Tous les effets de Tobija sont jetés hors de la chambre, et lui-même est chassé du temple. L’observation du sabbat est renforcée. Ceux qui s’étaient mariés avec des femmes étrangères, et dont les enfants parlaient moitié la langue des étrangers et moitié celle des Juifs, sont placés sous la malédiction et repris avec des châtiments sévères. L’ordre et la pureté légale sont rétablis ; et cette pensée principale du livre, quant à l’état du peuple, termine le récit.

Ce que nous avons dit donnera l’idée du grand principe de ce livre.

J’ajouterai encore ici quelques remarques.

Le livre de Néhémie place Israël, ou plutôt les Juifs, dans la position où ils devaient se trouver dans leur pays jusqu’à la venue du Messie ; séparés des nations, fidèles à l’égard de l’observation de la loi, mais privés des privilèges qui leur avaient appartenu comme peuple de Dieu ; placés sous le joug des Gentils, capables de rendre à Dieu les choses qui étaient à Dieu, mais privés de Sa présence au milieu d’eux, telle qu’ils en avaient joui précédemment dans le temple ; tenus finalement de rendre à César les choses qui étaient à César. Quand est venu l’Ange de l’alliance (le Fils de Dieu, qui aurait pu placer la gloire dans le temple en le purifiant), ils ne L’ont pas reçu et ils sont encore sous le poids des conséquences de cette réjection. C’est l’état où ils se trouvent actuellement, jusqu’à la venue de Christ.

C’est là ce qui donne au livre de Néhémie son importance. La foi de Néhémie embrassait les promesses de Dieu qui se rattachaient à Son gouvernement, comme elles se trouvent par exemple exprimées au chapitre 26 du Lévitique. Mais sa foi n’allait pas plus loin (voyez chap. 1). Cette foi était bénie, et elle accomplissait les desseins de Dieu ; mais elle laissait Israël au point où il était. La formule précieuse : « Sa bonté demeure à toujours », ne se trouve pas dans ce livre. La foi de Néhémie ne s’élève pas aussi haut. Il est lui-même serviteur des Gentils, et il les reconnaît. La confiance en Dieu, exprimée dans les paroles que nous venons de citer, se rattachait à l’autel et au temple, où l’Éternel était tout pour la foi, et où les Gentils n’étaient rien, sinon des ennemis (Esdr. 3, 4).

Quoiqu’il laisse les Juifs dans un état bien meilleur qu’auparavant, par la bonne main de Dieu sur eux pour les bénir présentement, le livre de Néhémie n’a pas d’avenir prophétique, pas d’avenir pour la foi[2]. Les Juifs sont toujours Lo-Ammi (pas mon peuple). La présence de Dieu assis entre les chérubins n’est pas avec eux et ne pouvait y être, vu que Dieu avait transporté le trône au milieu des Gentils. Je parle de Sa présence dans le temple, dans la demeure de Sa gloire. Placés ainsi dans la bénédiction et sous la responsabilité, la venue du Messie devait mettre tout à l’épreuve. Le résultat a fait voir une maison vide, balayée et ornée, d’où l’esprit impur était sorti, mais dans laquelle il n’y avait rien. Cet esprit reviendra, avec d’autres esprits plus méchants que lui-même. Ayant rejeté le Christ, ce malheureux peuple recevra l’Antichrist ; mais ceci n’a été manifesté que par la venue de Christ.

En Néhémie, le peuple est seulement placé, en attendant, dans cette position de bénédiction. Les prophéties de Zacharie et d’Aggée se rattachent à l’œuvre de Zorobabel et non à celle de Néhémie : à la foi simple qui a dressé l’autel comme moyen de bénédiction et de sûreté. Là (Zach. 1, 16), l’Éternel peut dire qu’Il est « revenu à Jérusalem avec miséricorde » ; mais c’est « après la gloire » qu’Il viendra y demeurer (2, 8-13). La prophétie les encourage par la bénédiction, et leur promet la venue du Christ et la gloire de la présence de l’Éternel pour une époque encore à venir. Le chapitre 8 de ce même prophète lie ces deux choses pour encourager le peuple à marcher avec droiture ; mais, en le lisant, on verra que l’accomplissement est indiqué très nettement comme ayant lieu à la fin des temps, le rejet du Christ (chap. 9) devenant l’occasion des jugements qui devaient les atteindre, et donnant lieu, d’une manière plus éclatante encore, à cette grâce souveraine qui emploiera la puissance du Messie rejeté, pour délivrer Son peuple entièrement ruiné par suite de son iniquité.

La prophétie de Malachie, prononcée plus tard, déclare et dénonce la corruption introduite après que, par grâce, la bénédiction avait été retrouvée dans une certaine mesure, puis elle prédit la venue de l’Éternel en jugement.

On peut ajouter aux remarques déjà faites, que ni en Zacharie, ni en Aggée, Dieu n’appelle le peuple : mon peuple. Il est dit, prophétiquement, que cela aurait lieu dans le temps à venir, aux derniers jours, lorsque le Christ viendrait établir Sa gloire. Mais le jugement prononcé en Osée n’a jamais été révoqué, et aucune expression qui le contredise n’est jamais employée.

Le livre de Néhémie nous donne donc le rétablissement partiel et extérieur des Juifs dans le pays, sans le trône de Dieu, sans le trône de David, en attendant la manifestation du Messie, et Sa venue pour chercher le fruit de tant de grâces ; en un mot, leur rétablissement, afin que cette présentation pût avoir lieu. C’est le peuple provisoirement dans le pays, de la part de Dieu, mais sous la puissance des Gentils qui possèdent le trône.



  1. La fête des tabernacles était la célébration de leur repos et de la possession du pays, après avoir passé à travers le désert. Les tabernacles rappelaient qu’ils avaient été comme pèlerins sous des tentes.
  2. Or là où il n’y avait pas de foi, mais où ils s’étaient intérieurement éloignés de Dieu, leur exactitude légale, sans grâce dans leur cœur, devenait de l’étroitesse et de l’hypocrisie. L’esprit scrupuleux n’est pas la droiture.