Messager Évangélique:Les voies de la grâce
C’est une chose sérieuse — et en même temps pleine d’encouragement et d’avertissement pour nos âmes — qu’il n’y a rien qui condamne autant le péché que la grâce. La loi le condamne sans doute ; mais la loi en elle-même, ne juge jamais la nature humaine. Elle condamne des actes. Lorsqu’elle est appliquée par l’Esprit de Dieu, elle nous conduit à inférer ce que doit être l’arbre, d’après son fruit. Elle nous montre comme conclusion ce qu’est la nature ; mais elle n’agit pas à son égard d’une manière directe, immédiate et complète. La grâce le fait. « Ce qui était impossible à la loi en ce qu’elle était faible par la chair, Dieu ayant envoyé son propre Fils » (c’est là la grâce) « en ressemblance de chair de péché et pour [le] péché » (comme sacrifice pour le péché), « a condamné le péché en la chair ». Dieu a condamné la nature — et la racine et la branche ; Il a exécuté Sa sentence sur tout ce qu’est l’homme, même dans son meilleur état. Point de déguisements, point d’excuses, qui puissent subsister maintenant : tout a été pleinement amené à la lumière de Dieu Lui-même, et tout a été condamné. C’est la même chose, du commencement à la fin. C’est la grâce qui arrache tous les voiles si minces dont la chair voudrait se couvrir, pour nous empêcher d’apprendre ce que nous sommes. Mais la grâce, tandis qu’elle ôte ce que nous sommes, nous donne néanmoins le privilège d’apprendre ce que nous sommes — nous met du côté de Dieu pour exécuter Son jugement sur la chair, nous rend capables d’agir à Son égard, d’une main qui n’épargne rien, précisément parce que nous avons une nouvelle nature qui nous est donnée de Dieu. Nous sommes à même de mortifier la vieille nature, parce que nous avons une vie nouvelle et divine, que ni la mort ni Satan ne peuvent toucher. Et c’est pour cela que vous trouverez, que dans les parties de l’Écriture où la grâce est le plus pleinement présentée, là même nous avons les exhortations les plus pressantes à la sainteté. En conséquence, toutes les fois que les âmes ont peur de la grâce, elles évitent la seule chose qui puisse produire une sainteté réelle ; elles évitent la seule chose qui puisse mettre à nu et détruire le vain étalage dans lequel elles marchent elles-mêmes.
Mais il y a une autre chose, et une chose bien sérieuse, pour ceux qui ont reçu la grâce de Dieu, et qui font profession de s’y tenir. La voici : « On ne se moque pas de Dieu ». Il ne souffrira pas que le nom de Son Fils soit jamais allié au mal. Il ne souffrira jamais que Sa grâce soit alléguée comme une excuse pour le péché. La grâce a étendu la main, et nous a arrachés de l’enfer, pour nous transporter directement des portes de la mort jusque dans le ciel même : rien de moins que cela n’est accompli en principe, quand nous recevons le Seigneur Jésus. Nous sommes tirés hors du filet du destructeur, et placés dans les mains du Père et du Fils, et personne ne nous en ravira. Mais s’il en est ainsi, quel est en cela le dessein de Dieu — pratiquement ? Que veut-Il que nous fassions sous l’abri de cette grâce toute-puissante, qui a opéré pour nous de telles merveilles ? Il veut assurément que nous ne tolérions jamais le mal naturel dans nos cœurs ; que nous veillions pour Dieu, et que nous soyons jaloux pour Lui, contre nous-mêmes. Nous sommes tirés hors de nous-mêmes, transplantés en Christ. Nous devenons par conséquent (si nous avons la foi en Lui, s’il s’agit réellement d’une œuvre du Saint Esprit) identifiés dans nos sentiments avec le Seigneur ; nous sommes associés aux intérêts de Dieu, si je puis le dire, contre notre propre nature corrompue ; contre le mal, partout où il se trouve, mais surtout partout où le nom de Christ est prononcé. Nous n’avons rien à faire directement avec le monde corrompu au-dehors, mais nous avons tout à faire avec notre propre nature corrompue ; beaucoup à faire en veillant contre elle, en la jugeant, en agissant à son égard pour Dieu, partout où elle ose se montrer. Dans l’amour les uns pour les autres, et dans la jalousie pour le Seigneur, nous pouvons avoir à agir à son égard même dans autrui : mais alors ce doit toujours être dans un saint amour. Car même dans le cas où nous avons à veiller les uns sur les autres pour le Seigneur, ce n’est jamais dans un esprit légal — jamais pour condamner simplement le mal, pour laisser ensuite une personne sous les effets de sa folie et de son péché.
Mais écoutons quelques-unes des paroles adressées aux saints d’Éphèse, et d’abord ce qui est dit dans un verset ou deux du chapitre 4 : « Que toute amertume, et tout courroux, et toute colère, et toute crierie et toute injure soient ôtés du milieu de vous, de même que toute malice. Mais soyez bons les uns envers les autres, pleins de compassion et vous pardonnant les uns aux autres ». Nous avons évidemment ici ce qui doit guider notre marche avec nos frères et en former l’esprit. Est-ce là tout ? Non. Cela ne concerne que l’esprit dans lequel nous devons agir les uns envers les autres. Mais il nous est rappelé quelle est la manière dont Dieu a agi à notre égard. « Vous pardonnant les uns aux autres, comme Dieu aussi vous a pardonné en Christ ». Puis il est question d’une autre chose. Le Seigneur Jésus n’est pas mort seulement pour ôter mon péché, mais pour me donner l’immense privilège d’être placé devant Dieu — en Lui rendu agréable selon Sa propre excellence. Je ne pourrais être dans le ciel, s’il n’en était pas ainsi — s’il y avait seulement ceci, que le péché est ôté. Dieu ne peut rien avoir dans le ciel qui soit purement négatif. La simple absence du mal n’y suffit pas. Pour que nous puissions être dans le ciel, il faut que Dieu nous y place, rendus agréables dans toute l’excellence de Christ ; et c’est là ce qu’Il nous communique ici-bas, du moins pour ce qui concerne le nouvel homme. D’après cela il nous est dit : « Soyez donc imitateurs de Dieu comme de bien-aimés enfants ; et marchez dans l’amour, comme aussi le Christ nous a aimés », etc. C’est là un pas de plus. Une personne pourrait pardonner à une autre, mais garder encore une certaine réserve — se renfermer dans les étroites limites de son propre cercle. Ici, au contraire, nous trouvons qu’il doit y avoir cette énergie qui s’épanche au-dehors, l’amour qui trouve ses délices dans le bonheur d’autrui. C’est l’activité de l’amour qui se répand envers les saints : « Marchez dans l’amour, comme aussi le Christ nous a aimés », etc.
Mais alors une autre chose est mise au jour. Il y a du danger, même parmi les saints de Dieu. Le diable peut entrer et changer l’affection fraternelle en un piège ; et cela non seulement en ce que l’on peut permettre à un mal positif de se déclarer, mais encore en laissant sans être jugée la tendance à ce mal. « Mais que ni la fornication, ni aucune impureté, ni avarice, ne soient même nommées parmi vous, comme il est convenable à des saints ; ni aucune chose déshonnête, ni parole folle, ni plaisanterie, lesquelles ne sont pas bienséantes, mais plutôt des actions de grâces ». Le Seigneur ne défend en aucune manière l’heureuse gaîté, qu’Il aime dans ses saints. Il ne nous appelle pas à être des moines, ce qui est la manière dont l’homme met un frein à la chair, et n’est qu’une autre forme du moi. Nous pouvons avoir le moi sous une forme légale, et le moi sous une forme relâchée ; mais sous quelque forme que ce soit, ce n’est pas Christ, et la seule chose qui ait maintenant du prix devant Dieu, c’est Christ.
« Cela en effet vous le savez, sachant qu’aucun fornicateur, ou impur, ou avare (qui est un idolâtre) n’a d’héritage dans le royaume du Christ et de Dieu ». Ceci amène une question bien sérieuse pour nous tous. Ce sont là des choses qu’il nous faut mettre à profit. Ce sont des exhortations, non pour être simplement employées pour d’autres, comme une mesure pour les juger ; mais pour nous être appliquées à nous-mêmes. Elles sont pour les saints, et non pour le monde. C’est dans le monde, sans doute, que nous trouvons le mal au sujet duquel nous sommes avertis ; et nos cœurs devraient éprouver de la compassion pour ceux qui n’ont point d’héritage dans le royaume du Christ et de Dieu. Mais souvenez-vous que le principal objet du Saint Esprit, c’était d’avertir les saints eux-mêmes et de les mettre en garde ; eux qui, tandis qu’ils désirent veiller contre le mal d’un éloignement charnel, rencontreront, dès l’instant qu’ils se trouvent ensemble, le danger d’une autre chose, savoir, le mal d’une proximité charnelle. Qui donc peut prendre soin de nous, si tels sont les dangers qui nous entourent ? Dieu seul — mais Dieu agissant toujours sur le pied de la grâce. Il n’y a aucune raison pour qu’une âme n’ait pas une parfaite confiance en Dieu contre elle-même. Mais partout où il existe le désir que notre propre volonté et nos propres pensées mauvaises soient satisfaites — partout où il y a le désir de persister dans nos voies selon la chair, soyez bien assurés que le jugement de Dieu sera là, à moins que la grâce de Dieu n’intervienne pour délivrer l’âme. C’est là une chose solennelle, une chose qu’il nous est nécessaire de prendre à cœur. Car le Seigneur est jaloux pour notre bien, et Il est jaloux pour Sa propre gloire. Puissions-nous donc veiller ! Puissions-nous nous rappeler ce qu’Il a écrit ; que, s’il est dit d’un côté : « Le solide fondement de Dieu demeure, ayant ce sceau : Le Seigneur connaît ceux qui sont siens », il est dit de l’autre : « Que tout homme qui prononce le nom du Seigneur se retire de l’iniquité ». Se retirer de l’iniquité ! Est-il possible que de telles paroles soient adressées aux saints de Dieu ? Oui. C’est la parole du Saint Esprit Lui-même, partout où le nom de Christ est prononcé. Que nos âmes retiennent donc fermement la grâce ; mais souvenons-nous que le but de toute la grâce qui nous a été manifestée, c’est que nous servions Dieu, d’une manière qui lui soit agréable, « avec révérence et avec crainte ». Il en est toujours ainsi. Et il y a en même temps une autre pensée qui me semble avoir du prix — c’est que le péché, quand on l’envisage dans la présence de Dieu, revêt toujours son vrai nom et son vrai caractère. Il ne m’est pas permis de le pallier, ni de l’appeler d’un nom que les hommes peuvent lui donner. Par exemple, il y a mille choses que les hommes appelleraient seulement polies. Comment Dieu les appelle-t-il ? Un mensonge. Et encore, il y a beaucoup de choses dont les hommes parleraient comme pouvant être permises en affaires de commerce. Comment Dieu les appelle-t-il ? Friponnerie et avarice. Telle est la sentence de Dieu. Et pourrions-nous y échapper ? Non. Il nous laisserait manifester ce que nous sommes — manifester que nous avons faussement prononcé le nom de Christ, uniquement dans notre propre force — comme les Égyptiens qui essayèrent de passer la mer Rouge après Israël. Le résultat fut qu’ils furent tous noyés. Puissions-nous être jaloux de ne pas nous permettre la plus petite chose qui soit contraire à Dieu ! Quelle liste de choses à l’égard desquelles l’Esprit de Dieu m’avertit ici ! Je puis regarder au-dedans, et connaître comment le cœur répond à la Parole de Dieu au-dehors, qui m’a déjà mis en garde. Et qu’arrive-t-il, si je méprise l’avertissement ? Je donnerai la preuve de ce que je suis, au déshonneur du nom du Seigneur Jésus, et à ma propre honte comme à ma propre douleur. Quel effet d’un moment de satisfaction donnée au moi ! Si donc une petite parole est comme quand on lâche l’eau, qu’est-ce qu’un petit acte de péché, là où il est toléré ? Que le Seigneur veuille nous garder des petits péchés — nous maintenir vigilants, jaloux, attentifs ; mais en même temps ne cessant jamais de retenir fermement la grâce — nous avertissant et nous fortifiant les uns les autres dans cette parfaite grâce dans laquelle nous sommes !
Rappelons-nous que Celui qui nous a appelés à veiller contre ces choses, nous a aussi appelés à Lui rendre grâces — à Lui le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ — en tout temps, et pour toutes choses. Quand même nous avons à nous humilier devant Dieu à cause de ce que nous sommes, nous ne devons jamais oublier ce que Christ est envers nous et pour nous.
Puissions-nous être gardés fidèles et circonspects dans nos voies à cause du Seigneur Jésus !