Messager Évangélique:De la médisance et de la calomnie
Quelques extraits d’un vieux livre intitulé: Du combat chrétienP. Dumoulin
En cela se découvre la perversité de l’homme. Car si un vaisseau a deux anses, dont l’une soit sale, et l’autre soit nette, nous le prenons par celle qui est nette. Pourquoi ne faisons-nous pas de même en la vie de nos prochains ? Pourquoi la prenons-nous par ce qui est le plus sale, et nous attachons-nous à ses imperfections ? Semblables aux sangsues qui ne sucent que le mauvais sang, et aux corbeaux qui passent par-dessus les bons fruits et se jettent sur les charognes ?
Or parce que la médisance est commune entre les hommes, on l’estime être chose légère et on la met entre les moindres péchés. Mais l’apôtre n’en juge pas ainsi. Car il dit que les médisants n’entreront point au royaume de Dieu. De ces médisances, quelques-unes disent choses vraies, en cela condamnables en ce qu’elles découvrent ce qu’il faut taire, selon que dit l’apôtre Pierre, que charité couvre une multitude de péchés (1 Pier. 4).
Quelquefois le médisant dit choses fausses et calomnieuses. Telle était la calomnie de Jézabel contre Naboth ; et de la femme de Potiphar contre Joseph ; et d’Amatsia, sacrificateur de l’idole, contre Amos ; et des Juifs contre Jérémie, l’accusant d’avoir intelligence avec les Chaldéens ; et des scribes et sacrificateurs contre Jésus Christ.
Mais le plus souvent les calomniateurs mêlent quelque chose de vrai parmi le mensonge, et se servent de la vérité pour colorer le mensonge. Ainsi, Matthieu 26, des faux témoins déposent contre Jésus Christ Lui avoir ouï dire qu’Il peut défaire le temple et en trois jours le rebâtir. Car Il n’avait jamais parlé de détruire le temple Lui-même ; mais avait dit : « Détruisez ce temple, et en trois jours je le réédifierai » (Jean 2). Entendant parler, non du temple bâti de pierres, mais du temple de Son corps. Ainsi Doëg, Iduméen, rapporta véritablement à Saül qu’Abimélec avait donné des pains à David et le glaive de Goliath : mais la calomnie était en ce qu’il en faisait un crime et conspiration contre le roi.
De cette médisance viennent les querelles, les rancunes invétérées. Et y en a-t-il qui voudrait avoir donné un bras pour racheter une parole de médisance qui lui est échappée. Le psalmiste, au psaume 52, appelle la langue du médisant un rasoir affilé. Et Agur, au chapitre 30 des Proverbes, dit qu’il y a une manière de gens dont les dents sont épées, et les dents machelières sont couteaux. Sur cela s’étend Jacques, au troisième chapitre. Et ce philosophe ne parlait pas sans raison, lequel enquis laquelle de toutes les bêtes était la plus dangereuse, répondit : entre les privées c’est le flatteur, entre les sauvages c’est le calomniateur.