Messager Évangélique:La puissance de la foi au milieu du mal

De mipe
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Les détails que nous donne ce chapitre mettent à nu l’état misérable dans lequel tomba Israël. Ici, hélas ! on ne retrouve, au milieu de ce peuple, aucune trace de la joie et des sentiments élevés qu’il avait manifestés au sortir de la mer Rouge. Là, sous l’impression profonde que la délivrance dont il venait d’être l’objet, produisait dans le fond de son âme, le peuple entonne un cantique de louange à l’Éternel qui le sauvait. Cette circonstance, rapprochée de celle qui nous occupe dans ce chapitre, fait ressortir la déchéance complète de ce pauvre peuple : il méconnaissait le rocher de son salut — il abandonnait l’Éternel son Dieu. Ce triste fait, si grave dans sa nature, n’est pas le seul trait caractéristique que la Parole place ici sous nos yeux ; il y est aussi fait mention de Moïse et d’Aaron si éloignés l’un de l’autre dans leur marche respective, en face de l’apostasie d’Israël.

Remarquons d’abord que Moïse et Aaron, l’un et l’autre instruments actifs dans l’œuvre de la rédemption d’Israël, sont en contraste en face de l’apostasie d’Israël, leur état moral n’est plus au même niveau. Au verset 1 nous lisons la proposition faite à Aaron par le peuple et, au verset 2, nous avons la réponse d’Aaron lui-même ; mais arrivé là tout stupéfait, on se demande avec étonnement : Comment Aaron, lui un homme de Dieu, a-t-il pu souscrire au vœu du peuple, avec une condescendance qui paraît si lâche ? Pas un mot, pas une remarque tendant à réveiller la conscience et le sentiment moral du peuple, ne sort de sa bouche. Aaron, en son cœur, sympathisait-il avec un plan si coupable ? Ou bien doit-on voir en ce silence la crainte d’un homme qui est dans la faiblesse et qui se plie à tout ? À quelle de ces deux propositions que l’on s’arrête, on arrive à la même conclusion, savoir : qu’une absence complète de la puissance et de l’énergie de Dieu se voit en Aaron ; le verset 5 porterait même à croire qu’il y avait chez lui sympathie pour ce culte idolâtre, qu’il prenait la peine de décorer du nom de l’Éternel, comme pour en dissimuler l’odieux. L’apôtre Paul exhortant les Corinthiens à n’être point idolâtres, fait allusion au verset 6 (1 Cor. 10, 7).

Reprenons un peu en arrière. Au chapitre 19, 20, Moïse, étant appelé par l’Éternel, monte au sommet de la montagne, sur laquelle Dieu était descendu. Là, Dieu lui donne l’ordre de sommer de nouveau le peuple, afin qu’il ne dépassât pas les bornes qui avaient été posées selon l’ordonnance de Dieu. Au chapitre 20, 21, Moïse ayant accompli son message, retourne auprès de Dieu, mais le peuple se tenait loin ; l’Éternel continue à parler avec Son serviteur, lui enseignant ce qu’il devait faire, afin qu’il sût se diriger de manière à maintenir, au milieu d’Israël, l’ordre, la justice et la bénédiction (voir chap. 20, 21 à chap. 31 inclusivement). Dieu ayant achevé de parler avec Moïse et pendant que Moïse était encore avec Lui sur la montagne, arrive le fait de l’apostasie du peuple. Moïse en apprend la nouvelle de la bouche de Dieu. Alors dans Son indignation, l’Éternel déclare que ce peuple est celui de Moïse et non le sien : « Ton peuple que tu as fait monter du pays d’Égypte ». Ce fut à ce moment décisif que Moïse se mit à la brèche, luttant avec Dieu pour le salut du peuple coupable ; écartant toute idée de devenir, lui, une grande nation, à la place d’Israël, il supplie l’Éternel que Sa colère ne s’embrase point contre — « ton peuple » ; appuyant sa requête que ce que, le cas échéant, les Égyptiens en prendraient occasion pour diffamer la gloire acquise du nom de Jéhovah jusque-là. Puis, remontant à l’origine des relations de Dieu avec Son peuple (v. 13), Moïse insiste sur le fait que l’Éternel Lui-même s’était engagé, par des promesses inconditionnelles, à bénir Son peuple et à lui donner en héritage le bon pays duquel Il avait parlé.

Ayant obtenu de Dieu que le peuple ne serait pas consumé (v. 14), Moïse descend de la montagne (toujours dans l’énergie de l’Esprit, selon laquelle il avait intercédé pour le peuple auprès de Dieu) et marche droit vers l’objet qui déshonorait le Dieu d’Israël, et qu’il réduisit en poudre. Ayant ainsi vengé Dieu du déshonneur fait à Sa majesté, Moïse prit une position qui mettait tout Israël à l’épreuve. De la porte du camp souillé (v. 26), Moïse fit appel à la conscience et aux sentiments du peuple abusé : « Qui est pour l’Éternel, dit-il, qu’il vienne vers moi ». On le voit, Moïse, tout en reconnaissant encore Israël pour le peuple de Dieu, dut se séparer de l’assemblée et prendre vis-à-vis d’elle une position de témoignage. En ce jour-là, et par un acte public, la tribu de Lévi se consacra solennellement à l’Éternel ; cet acte n’épargnait pas les liens de la chair et du sang (v. 27 et Deut. 33, 9). Dieu ayant béni l’appel adressé par Son serviteur, l’œuvre de restauration avait fait un pas ; c’est alors que Moïse représente au peuple son péché (v. 30), puis remonte vers Dieu, en disant : « Peut-être ferai-je propitiation pour votre péché ».

Ici, pour le présent, l’action de Moïse auprès du peuple s’arrête ; mais de nouveau sous le regard de Dieu, le travail de son âme recommence, mais toujours le peuple en était l’objet ; il confesse le péché du peuple et réclame le pardon de Dieu. La première fois (v. 11-13), le péché du peuple n’avait pas été confessé, il fallait que Moïse entendît de ses oreilles et qu’il vît de ses yeux toute la misère du peuple.

Ici donc, c’est le péché du peuple qui occupe la pensée de Moïse ; ce péché qui, d’une manière si inattendue découvrait et attestait l’ingratitude du peuple envers l’Éternel, fut l’occasion du plaidoyer remarquable de la foi de Moïse : … « Pardonne-leur leur péché, sinon efface-moi de ton livre que tu as écrit ». Qu’il est beau de voir Moïse préférer l’existence du peuple de Dieu à la sienne propre ! S’il était effacé, lui seul, du livre, les Égyptiens n’en feraient pas de cas, et ainsi la gloire de l’Éternel serait sauvegardée. Telle était la vue de Moïse — quelle belle page de son histoire ! Ce fait nous rappelle Jésus, Lui plus excellent que tous les autres, monté vers Dieu au plus haut des cieux, ayant non pas un peut-être sur les lèvres, mais l’assurance qu’avec Son propre sang, propitiation avait été faite auprès de Dieu pour les pécheurs (1 Jean 2, 1, 2).

Remarquons encore que le plaidoyer de Moïse se caractérise par ces quatre choses : — 1° Moïse demande que le peuple soit conservé pour le maintien de la gloire de Dieu ; 2° il demande à Dieu qu’Il pardonne le péché du peuple, condition indispensable pour que le peuple soit à l’aise avec Dieu ; 3° il demande encore que Dieu reprenne Sa place au milieu de Son peuple, afin que la clarté de Sa face l’éclaire et qu’elle lui soit en joie chaque jour ; 4° enfin, Moïse demande à voir la gloire de Dieu, mais impossible de la contempler en dehors de Christ ; « tu ne pourras pas voir ma face » etc. ; mais voici, par devers Dieu, un rocher, retraite sûre ; Moïse y serait placé par la main de Dieu (v. 22), mais Sa face ne se verrait pas. Moïse serait témoin de tout ce qui suffisait aux besoins du moment — « Je ferai passer toute ma bonté devant toi » — jusqu’à ce que vînt Celui qui… « ôterait le péché et ferait propitiation pour l’iniquité… » et en la face de qui la gloire de Dieu serait manifestée pour être contemplée (2 Cor. 3, 18).

Ainsi se termine cet édifiant plaidoyer, dans lequel se voit la puissance et la vertu de la foi, triomphant par la volonté de Dieu, afin de soustraire le peuple au jugement qu’il méritait.

Maintenant, j’aimerais faire part à mes chers frères de quelques réflexions pratiques, suggérées par ce précieux sujet. — Il n’y a certainement pas un enfant de Dieu, en qui il y ait tant soit peu de l’affection de l’Esprit, qui n’éprouve un moment ou un autre, ce besoin du cœur, de se rendre utile au milieu du peuple de Dieu ; car une relation vivante, réelle, subsiste entre lui et ce peuple et il en a, à un certain degré, la conscience, ce qui déjà est une grande grâce ; mais pour agir dans l’Esprit et la puissance de Moïse, il faut, comme lui, être en présence du Seigneur — il faut que le mal, dont nous désirons nous occuper sérieusement, nous trouve dans cette position-là.

Nous avons vu que Moïse et Aaron, l’un et l’autre honorés de Dieu comme serviteurs, agirent dans la même circonstance, d’une manière tout à fait opposée : l’un contribua à la ruine du peuple, l’autre contribua à son relèvement. Nous avons déjà signalé le point important, savoir : que l’un était en la présence de Dieu, l’autre n’y était pas ; de là, toute la différence entre eux, quant au résultat — l’un était surmonté par le mal, l’autre surmontait le mal par le bien. C’est donc ici que doit se fixer notre attention : Aaron ne résiste pas à la tentation, mais il y succombe, et autant que cela est en lui, il développe dans le peuple la malheureuse disposition qui se manifestait déjà en lui. C’est aussi, comme résultat, ce qui a lieu lorsque nous-mêmes nous succombons à la tentation ; notre exemple développe, dans nos frères, des dispositions mauvaises, à peine écloses. Que de fois, hélas ! il arrive que l’un se croit justifié en lâchant la bride à sa volonté propre, parce que l’autre a donné libre cours à la sienne, bien que naturellement le péché s’en soit suivi ? Avant de céder à la tentation, prions Dieu pour qu’Il nous en délivre, et Il le fera.

Quant à Moïse, le rôle qu’il remplit est digne de Dieu, sous le regard duquel il se trouve ; là, il a l’intelligence de ce qui convient à Dieu — à Sa gloire, et à l’état misérable du peuple. À l’ouïe de la triste nouvelle, son cœur n’est point insensible ; il juge de la gravité des choses auxquelles le peuple s’est abandonné, par le caractère des paroles que Dieu lui fait entendre. Or, le peuple, loin de Dieu, n’avait pas l’idée que sa coupable conduite fut cause d’un travail si profond, si sérieux pour le cœur de Moïse ; mais l’Éternel voyait, Lui, tout ce travail et l’appréciait à sa juste valeur. C’est ce qui a lieu aussi pour nous. Dieu en avait assez dit à Moïse, pour qu’aussitôt il se mit à la brèche, luttant avec Dieu, afin que le peuple ne fût pas consumé ; il s’oublie lui-même et est assez près de Dieu pour ne chercher que les intérêts de Son peuple et non les siens propres. Sa pensée est au-dessus de tout ce qui ne se rapporte pas au but pour lequel son âme est en travail ; tout absorbé à la pensée de ce dont le peuple est menacé, il ne vise qu’à une chose, à détourner de dessus le peuple la colère de l’Éternel. Une fois cette grâce obtenue, Moïse s’occupe du péché du peuple (Aaron l’avait mis dans un complet dénuement, v. 25) ; il ouvre une porte afin que quiconque jugerait le mal, pût se retirer vers l’Éternel. C’était là le chemin de la délivrance pour le pauvre Israélite. Il y avait encore sans doute beaucoup à faire pour arriver à un relèvement complet : la convalescence est quelquefois longue ; mais les témoignages que Dieu donne à la foi sont un motif d’espérer toujours davantage.

Aujourd’hui, chers frères, l’état moral du peuple de Dieu n’est pas tel qu’il puisse supporter la comparaison avec son passé (Actes 9, 31) ; l’ennemi a fait d’énormes brèches. Toutefois, quelle que soit la somme du mal auquel il faille faire face, il n’est point au-dessus de l’amour et de la grâce de Dieu. L’état du peuple d’Israël ne pouvait pas être plus bas que ce qu’il était alors, et pourtant, à la requête de Moïse, la colère de l’Éternel fut détournée de Son peuple et il put de nouveau jouir de la faveur de son Dieu. C’est ainsi que nous-mêmes pouvons détourner de nos frères des coups de verges, sans cependant affaiblir dans leur cœur le sentiment de la gravité de leur faute. Si donc la connaissance que nous pouvons avoir de l’état actuel de l’Église, produit en nos cœurs l’effet produit en celui de Moïse — luttons avec confiance, étant fondés sur ce principe : « que rien n’est impossible à Dieu ». Que les misères, les difficultés, etc., ne nous découragent pas ; la foi nous amène à une source de grâce qui triomphe et nous fait triompher.

Quand Moïse remonta vers l’Éternel, il Le retrouva au lieu même où il L’avait quitté pour descendre vers le peuple ; l’Éternel, miséricordieux, pitoyable, ne pouvait pas se retirer ainsi ; Il voulait donner encore à Son pauvre peuple un témoignage éclatant de Sa constante bonté ; c’est pourquoi Il attendait le retour de Son serviteur, lui fournissant ainsi l’occasion de plaider encore la cause du peuple devant Lui. La foi en Dieu — en Ses immuables promesses et une intime communion avec Dieu sont deux choses indispensables pour s’occuper, avec fruit, du peuple actuel de Dieu ; quelle que soit la position dans laquelle il se trouve. En accomplissant un tel service on est peut-être ignoré ou méconnu de ceux mêmes qui en sont les objets, mais le Dieu, sous le regard duquel nous sommes, combattant par la foi et par nos prières, voit tout et Il prend bonne note du travail de nos cœurs. Le service de la foi et de l’amour ne se fait pas sans verser beaucoup de larmes ; l’apôtre Paul en fait mention plusieurs fois (Act. 20, 19 et 31 ; 2 Cor. 2, 4). N’oublions pas cela, mais fortifions-nous dans la grâce qui est en Jésus Christ. Dieu répond toujours aux exigences de la foi. Il est doux de penser que l’intercession sincère du moins avancé des chrétiens, fournit à Dieu l’occasion de déployer Sa grâce au milieu des siens, car nos prières, si imparfaites, si faibles qu’elles soient, Lui sont agréables, par notre Seigneur Jésus Christ, auquel soit gloire éternellement. Amen !